«Le fait qu'on ait une loi est déjà un élément majeur, explique Martine Painchaud, de la boîte Octane, Stratégie en
communication. Maintenant, le public veut qu'elle soit
appliquée.»
Surtout après des cas médiatisés comme celui de Saputo et
de son gorille Igor. Ou comme l'infraction de Pogo, note aussi
Martine Painchaud, qui dirigeait la Coalition à l'époque.
Rappelons cette offensive publicitaire: au printemps dernier,
le fabricant de saucisses enrobées de pâte avait affiché des
jeux de mots pas très élégants autour d'écoles québécoises.
La campagne publicitaire avait avorté dare-dare.
Les responsables de la Coalition sont les premières à
l'admettre, des cas aussi flagrants que ceux-là ont joué en
leur faveur en choquant l'opinion publique.
L'obésité en toile de fond
À l'origine, explique Christian Désilet, la loi québécoise avait été créée pour répondre à l'exaspération des parents
devant des enfants qui voulaient toujours avoir la boîte de céréales contenant le petit jouet... et qui ne mangeaient
jamais les céréales.
La loi a été créée, et la diffusion de publicités destinées aux enfants durant leurs émissions de télé a cessé. Avec les
années 2000, la loi prend une nouvelle couleur, une couleur de santé publique. «La loi revient avec le débat sur
l'obésité», dit Christian Désilet.
Lorsque Saputo, par l'entremise de sa filiale des gâteaux Vachon, a mis les pieds dans les garderies, l'entreprise a été
dénoncée sur la place publique. «Je pense que si ça avait été des yogourts, il n'y aurait pas eu de problème», indique
Pierre Parent, fondateur de P2P Proximité marketing, qui se spécialise dans le marketing alimentaire et qui avait conçu
cette campagne. «On est conscients qu'il y a eu des erreurs dans l'exécution de cette campagne, dit-il. Le produit ne
devait pas être remis aux enfants directement.» Mais il l'a été et Saputo a fini par plaider coupable d'avoir fait de la
publicité directement aux enfants, le mois dernier. L'agence P2P, aussi poursuivie pour cette campagne, est en
pourparlers avec les représentants de l'Office de la protection du consommateur pour convenir d'un règlement.
Car Pierre Parent insiste, il n'était absolument pas question de contourner la loi. «On ne peut pas essayer de tricher, en
publicité, dit-il, parce qu'on se ferait rattraper.» Igor en est la preuve.
Alors il reste deux options pour vendre un produit destiné aux enfants sans se mettre à dos l'opinion publique:
s'adresser aux parents directement, clairement et sans ambiguïté, ou s'appuyer sur le produit pour promouvoir, par
exemple, de saines habitudes de vie. «On dépense des milliards en publicité, dit Pierre Parent. Si on en dépensait 5%
pour faire passer des messages positifs, ça serait déjà bien.»
Pensez à Dove, dit-il, qui a fait une campagne contre l'anorexie, mis sur pied le Fonds d'estime de soi pour les femmes
et créé une campagne qui montre la beauté de femmes de toutes les tailles, de toutes les couleurs et de tous les âges.
Difficile de résister à un pain de savon après ça. Et de se rappeler que Unilever, propriétaire de Dove, est aussi
propriétaire de la marque Slim Fast, qui se spécialise en substituts de repas pour les femmes qui veulent maigrir.
Un jeu facile pour les publicitaires
La loi québécoise interdit la pub destinée aux enfants de moins de 13 ans parce qu'on considère que, avant
l'adolescence, ils ne peuvent faire la distinction entre l'information et la promotion.
Mais il y a un hic: les enfants ne se limitent pas aux dessins animés diffusés avant 17h. Ils regardent Star Académie. Ils
regardent Occupation Double. Les préados vont au cinéma voir À vos marques... Party! dans lequel McDonald's fait du
placement de produit.