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pragmatique, l'approche d'origine plus philosophique d'Austin (1955/1970) et Searle
(1969/1972) insiste sur le rôle du langage comme moyen d'agir sur la réalité, en
opposant les fonctions du constatif et du performatif. La distinction entre niveaux
locutoire, illocutoire et perlocutoire de la communication en situation, ainsi que les
différentes catégories d'actes de parole (assertifs, directifs, promissifs, expressifs et
déclaratifs) complètent ces analyses, proche de celles de Goffman, et forment la base
de l'analyse pragmatique classique.
Analyse conversationnelle
L'analyse de conversation apparaît paradoxalement assez tard dans l'histoire de la
linguistique, qui a longtemps pensé exclusivement le langage à partir des formes
écrites de ses manifestations (Ollivier 1980). Dans les travaux de Sacks (1992)
comme ceux de Blanche-Benveniste se voit soulevée la question de l'articulation des
niveaux micro (interaction hic et nunc entre inter-locuteurs) et macro (sociologique
et institutionnel). Mondada (2006) rappelle le lien originel entre l'ethnométhodologie
et l'analyse conversationnelle, qui s'organise autour de la prise en compte de
l'indexicalité et du contexte d'énonciation. Celle-ci questionne finalement la relation
entre la forme linguistique et le pouvoir à partir de l'étude de l'interaction enregistrée.
L'observation de l'oral enregistré montre que des catégories centrales dans l'écrit,
comme la phrase, n'y existent pas, alors que les marqueurs de prise de parole,
l'organisation de la circulation de la parole, les redites, les implicites énonciatifs, la
lutte pour l'énonciation, bref les structures de micro interactions revêtent un rôle
central (Cadiot et al. 1979). L'Analyse de conversation s'appuie sur des
enregistrements et questionne d'un point de vue ethnométhodologique la manière
dont le pouvoir et l'institution se construisent au cours des interactions. Le contexte
de l'énonciation est ici fondamental pour analyser la production langagière. Mondada
(2006) précise que « Toute pratique est irrémédiablement indexicale : l’action
s’ajuste au contexte tout en le configurant par sa manière même de l’interpréter et de
le prendre en considération. Elle est donc à la fois structurée par le contexte (context-
shaped) et structurante pour lui (context-renewing) ».
Finalement, comme le notent Dumoulin et Licoppe (2007), « l’analyse de
conversation (AC) pointe les limites d’une approche analytique centrée sur l’énoncé
isolé davantage que sur la manière dont celui-ci s’inscrit dans un contexte que son
énonciation contribue à renouveler. [Elle] s’intéresse à l’analyse systématique des
méthodes permettant aux acteurs de collaborer à produire en situation un tel acte de
langage de manière reconnaissable et séquentiellement pertinente ». Mais, pas plus
que l'analyse de Bourdieu (1982) pour qui la performativité n'est que la conséquence