Homologie
Pierre Bernard
2003
Quand on ne pr´
ecise pas, un foncteur est covariant. On d´
esigne par Aune
cat´
egorie ab´
elienne qui admet des sommes directes infinies.
1 Homologie d’un complexe
D´
efinition – Un complexe dans la cat´
egorie ab´
elienne Aest un objet Xgradu´
e de
type Zmuni d’un endomorphisme d, gradu´
e de degr´
e1, et de carr´
e nul. On dit
que dest la diff´
erentielle du complexe.
La donn´
ee d’un complexe ´
equivaut `
a celle d’une suite (Xn)nZd’objets et
d’une suite (dn)nZde morphismes, dn´
etant un morphisme de Xndans Xn1, telle
que dndn+1=0 pour tout nZ. On peut noter un complexe comme suit :
... //X1d1//X0d0//X1//...
Lorsque pour tout entier n<0, on a Xn=0, on dit que le complexe est nul `
a droite.
D´
efinition – Soit (X,d)un complexe. Le noyau de ds’appelle l’objet des cycles
de X, et se note Z(X). L’image de ds’appelle l’objet des bords de Xet se note
B(X).
Les modules Z(X)et B(X)sont des modules gradu´
es de type Z. Et puisque
d2=0, on a B(X)Z(X).
D´
efinition – Soit Xun complexe. L’objet quotient Z(X)/B(X)s’appelle l’objet
d’homologie de Xet se note H(X). On dit que Xest exact si H(X)est nul.
1
2 Foncteurs d´
eriv´
es
D´
efinition – Soit Tun objet de la cat´
egorie ab´
elienne A. On appelle r´
esolution
(gauche) de Ttout complexe Xnul `
a droite, muni d’un morphisme de X0dans T
tel que la suite suivante soit exacte :
... //X1//X0//T//0
La r´
esolution est dite projective si tous les objets Xisont projectifs.
Dans la suite, on suppose que la cat´
egorie ab´
elienne Aest telle que tous ses
objets admettent au moins une r´
esolution projective.
Proposition (et d´
efinition) Soit Fun foncteur additif exact `
a droite de Adans
une seconde cat´
egorie ab´
elienne B. Pour tout objet Tde A, choisissons une
r´
esolution projective X. Pour tout entier n0, on note LnF(T)le n-`
eme objet
d’homologie du complexe F(X). Alors LnFd´
efinit un foncteur de Adans B. On
l’appelle le foncteur d´
eriv´
e gauche n-`
eme de F. De plus L0Fest isomorphe `
aF
et, si Fest exact, LnFest nul pour tout n1.
On d´
efinit dualement les d´
eriv´
es droits RnFd’un foncteur Fexact `
a gauche,
en consid´
erant des r´
esolutions injectives. Pour d´
eriver un foncteur contravariant,
on se ram`
ene de mˆ
eme au cas d’un foncteur covariant.
D´
efinition – Sous les hypoth`
eses de la proposition, un objet Tde Atel que
LnF(T)soit nul pour tout entier n1 est dit F-acyclique.
Proposition – On reprend les hypoth`
eses de la proposition pr´
ec´
edente. Tout objet
projectif de Aest F-acyclique. Pour calculer LnF(T), il n’y a pas besoin d’utiliser
une r´
esolution projective de T, il suffit d’une r´
esolution dont tous les objets sont
F-acycliques.
3 La suite exacte longue
On suppose, comme pr´
ec´
edemment, que tout objet de la cat´
egorie Aadmet
au moins une r´
esolution projective. Et on consid`
ere un foncteur additif et exact `
a
droite F, de Adans une cat´
egorie ab´
elienne B. On a d´
efini, pour tout entier n0,
le foncteur d´
eriv´
e gauche LnFde F.
Consid´
erons dans Aune suite exacte courte :
0//X//Y//Z//0
2
On obtient, en lui appliquant le foncteur F, une suite exacte :
F(X)//F(Y)//F(Z)//0
Bien sˆ
ur, il n’y a plus en g´
en´
eral exatitude `
a gauche. La proposition suivante dit
ce que l’on peut mettre `
a gauche.
Proposition – Toute suite exacte courte dans A:
0//X//Y//Z//0
induit fonctoriellement une suite exacte longue dans B:
...
ssh
h
h
h
h
h
h
h
h
h
h
h
h
h
h
h
h
h
h
h
h
h
L2F(X)//L2F(Y)//L2F(Z)
tti
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
L1F(X)//L1F(Y)//L1F(Z)
tti
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
i
F(X)//F(Y)//F(Z)//0
4 Exemples
4.1 Cohomologie des faisceaux ab´
eliens
Soit Xun espace topologique. Notons AbXla cat´
egorie des faisceaux ab´
eliens
(i.e. faisceaux de groupes ab´
eliens) sur X, et Ab la cat´
egorie des groupes ab´
eliens.
Soit Γle foncteur “section globale” de AbXdans Ab. C’est un foncteur additif
exact `
a gauche. On peut montrer que tout objet de AbXa au moins une r´
esolution
injective, donc on peut consid´
erer les d´
eriv´
es droits RnΓ.
D´
efinition – Soit Xun espace topologique. Le foncteur RnΓde AbXdans Ab
se note Hn(X,). Pour tout faisceau ab´
elien Fsur X, on dit que Hn(X,F)est le
n-`
eme groupe de cohomologie de X `
a valeurs dans F. En particulier Γ(F)est
souvent not´
e H0(X,F).
Soit (X,OX)une vari´
et´
e analytique complexe (non n´
ecessairement connexe).
On a la suite exacte de faisceaux ab´
eliens sur Xsuivante :
0ZOXO
X0
3
o`
u la troisi`
eme fl`
eche est la composition par l’exponentielle complexe. D’apr`
es ce
qui pr´
ec`
ede, on a donc une suite exacte longue de groupes ab´
eliens de la forme
suivante :
0//Γ(Z)//Γ(OX)//Γ(O
X)//H1(X,Z)//...
Soit (X,OX)une vari´
et´
e diff´
erentielle r´
eelle C. Son faisceau tangent se note
TX. C’est un OX-module. Le faisceau dual (TX)s’appelle le faisceau cotangent.
Il est not´
e1
X. L’alg`
ebre ext´
erieure V1
Xse note X. C’est une OX-alg`
ebre al-
tern´
ee. De plus, elle est munie d’une R-d´
erivation dqui prolonge la d´
erivation
naturelle de OXdans 1
X. Le complexe (n
X)de faisceaux de R-espaces vectoriels
ainsi obtenu s’appelle le complexe de De Rham. On montre que le complexe de
De Rham est une r´
esolution acyclique du faisceau constant R. Par cons´
equent,
les objets d’homologie du complexe de De Rham sont isomorphes aux Hn(X,R)
d´
efinis pr´
ec´
edemment.
4.2 Les foncteurs Extnet Torn
Dans cette partie, Ad´
esigne un anneau et Ala cat´
egorie (ab´
elienne) des A-
modules `
a gauche. On peut montrer que dans cette cat´
egorie, tout objet a au moins
une r´
esolution projective et une r´
esolution injective.
Le foncteur Hom de Aop ×Adans Ab est exact `
a gauche. Puisque tout objet
de Aop ×Aa au moins une r´
esolution injective et on peut consid´
erer les d´
eriv´
es
droits de Hom.
D´
efinition – Le n-`
eme foncteur d´
eriv´
e droit du foncteur Hom de Aop ×Adans
Ab est not´
e Extn. Pour deux objets M,Nde A, on dit que Extn(M,N)est le n-`
eme
groupe d’extension de N par M.
Le foncteur Ade A×Adans Ab est exact `
a droite. Donc on peut consid´
erer
les d´
eriv´
es gauches de A.
D´
efinition – Le n-`
eme foncteur d´
eriv´
e droit du foncteur Ade A×Adans Ab
est not´
e Torn. Pour deux objets M,Nde A, on dit que Torn(M,N)est le n-`
eme
produit de torsion de M et N.
A priori, pour calculer Extn(M,N), on utilise une r´
esolution projective de M,
et une r´
esolution injective de N, pour obtenir par produit une r´
esolution injective
de M×Ndans Aop×A. En fait, il suffit d’utiliser ou bien une r´
esolution projective
de M, ou bien une r´
esolution injective de N. En effet, on obtient alors par produit
une r´
esolution Hom-acyclique de M×N, et on sait que cela suffit.
4
Si Mest un objet fix´
e de A, alors le foncteur Hom(M,)de Adans Ab est
exact `
a gauche et on peut consid´
erer ses d´
eriv´
es droits. En fait son n-`
eme d´
eriv´
e
droit, appliqu´
e`
a un objet Nde A, n’est autre que Extn(M,N). On peut ´
enoncer un
r´
esultat analogue en fixant la seconde variable N.
Les mˆ
emes remarques valent pour les foncteurs Torn(M,N).
4.3 Cohomologie des groupes
Soit Gun groupe. Notons Z[G]l’anneau du groupe G. Si Met Nsont deux
Z[G]-modules `
a gauche, on a d´
efini plus haut les groupes ab´
eliens Extn(M,N),
et en particulier Extn(Z,M)(puisque Zest de fac¸on ´
evidente un Z[G]-module `
a
gauche).
D´
efinition – Soit Gun groupe. Soit Mun Z[G]-module `
a gauche. Le groupe
ab´
elien Extn(Z,M)est not´
e Hn(G,M)et s’appelle le n-`
eme groupe de cohomo-
logie de G `
a valeur dans M.
Ainsi, Hn(G,)est le n-`
eme d´
eriv´
e droit du foncteur additif exact `
a gauche
Hom(Z,)de la cat´
egorie des Z[G]-modules `
a gauche dans celle des groupes
ab´
eliens. Ce dernier foncteur s’identifie `
a celui qui associe `
a tout Z[G]-module `
a
gauche Mle sous-groupe MGdes invariants.
On sait que pour calculer Extn(Z,M), on peut choisir une r´
esolution projective
de Z(en tant que Z[G]-module).
Soient L/Kune extension galoisienne finie. Notons Gson groupe de Galois.
Alors Gop`
ere de fac¸on naturelle sur le groupe additif Let sur le groupe multipli-
catif L. Autrement dit, Let Lsont des Z[G]-modules. On peut donc consid´
erer
les groupes ab´
eliens Hn(G,L)et Hn(G,L). On peut montrer que les Hn(G,L)sont
nuls pour n1 (corollaire du “th´
eor`
eme de la base normale”) et que H1(G,L)
est nul (“th´
eor`
eme 90 de Hilbert”).
Remarque – Si l’extension galoisienne L/Kn’est pas n´
ecessairement finie, alors
Gest un groupe profini qui op`
ere continuement sur Let L. Si Mest un G-module
topologique, alors on peut d´
efinir des groupes ab´
eliens Hn
top(G,M). Et on a encore
H1
top(G,L) = 0, par exemple.
Soient L/Kune extension galoisienne finie et Gson groupe de Galois. La suite
exacte de groupes :
1//µn(L)i//Lp//Ln//1
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