Correspondance de D-modules et
transformation de Penrose
Andrea D’Agnolo Pierre Schapira
1 La transformation de Penrose classique
Soit Tun espace vectoriel complexe de dimension 4, F=F12(T) sa vari´et´e
des drapeaux de type (1,2), P=F1(T) l’espace projectif de dimension 3, et
M=F2(T) la grassmannienne des sous-espaces de dimension 2. La vari´et´e
Mest identifi´ee `a une compactification conforme du complexifi´e de l’espace
de Minkowski M4, et on peut interpr´eter la famille des ´equations de champs
de masse z´ero dans M4comme une famille d’op´erateurs diff´erentiels entre
fibr´es holomorphes sur M. Il s’agit d’une famille, que l’on note ici par h,
param´etr´ee par un demi-entier happel´e h´elicit´e, qui comprend l’´equation des
ondes de Maxwell, les ´equations du neutrino de Dirac-Weyl et les ´equations
d’Einstein `a masse nulle lin´eairis´ees.
La transformation de Penrose est une transformation int´egrale associ´ee `a
la double fibration
F
g.&f
P M
(1.1)
(o`u f(L1, L2) = L2et g(L1, L2) = L1pour L1L2Tsous-espaces com-
plexes de dimension 1 et 2) qui permet de trouver les solutions holomorphes
de l’´equation hφ= 0 dans certains ouverts UMen termes de classes de
cohomologie de fibr´es en droites sur b
U=gf1(U)P.
Plus pr´ecis´ement, rappelons que pour kZ, les fibr´es en droites sur
Psont donn´es par les k-i`emes puissances tensorielles OP(k) du fibr´e tau-
tologique (i.e. du fibr´e dont la fibre au dessus de L1Pest la droite L1T).
On a alors le r´esultat suivant de Eastwood, Penrose et Wells [4]
Appeared in: S´eminaire sur les ´
Equations aux D´eriv´ees Partielles, 1992–1993, ´
Ecole
Polytech., Palaiseau, 1993, pp. Exp. No. XXI, 12.
1
Th´eor`eme 1.1. Soit UMun ouvert tel que
Ubzsoit contractile pour tout zb
U, (1.2)
o`u on pose bz=fg1(z). Alors pour kZet h(k) = (1+k/2), le morphisme
naturel associ´e `a (1.1) qui a une 1forme associe l’integrale dans les fibres
de fde son image inverse par g:
P:H1(b
U;OP(k)) ker(U;h(k))
est un isomorphisme.
Nous renvoyons `a [1], [3], [9], [14] pour des expos´es de cette th´eorie et
diverses g´en´eralisations.
Suivant [2] on se propose de d´ecrire ici une nouvelle approche de la trans-
formation de Penrose, dans le langage des faisceaux et des D-modules et
ce, dans un cadre g´eom´etrique plus g´en´eral que celui des vari´et´es de dra-
peaux. Cette approche a, selon nous, plusieurs avantages: elle permet de
distinguer les difficult´es de nature topologique (faisceaux) et celles de nature
analytique (D-modules). De plus l’utilisation des cat´egories d´eriv´ees clarifie
consid´erablement la situation et l’on verra que l’une des principales difficult´es
rencontr´ees par de nombreux auteurs est due `a ce que la transform´ee de Pen-
rose de certains D-modules n’est pas ”concentr´ee” en degr´e 0. Enfin, et
surtout, cette approche va nous permettre de caract´eriser (cf le theoreme 3.3
pour un ´enonc´e pr´ecis) tous les syst`emes d’´equations aux d´eriv´ees partielles
que l’on peut esp´erer obtenir par cette transformation.
2 Correspondance de faisceaux et de D-modules
Consid´erons les morphismes de vari´et´es analytiques complexes:
Y
g.&f
Z X
(2.1)
et supposons:
(H.1) gest lisse,
(H.2) fest propre,
(H.3) (g, f) : Y Z×Xest une immersion ferm´ee.
2
On note dXla dimension complexe d’une vari´et´e X. On note Db(X) la
cat´egorie d´eriv´ee de la cat´egorie des complexes born´es de faisceaux de C-
vectoriels sur Xet Db
Rc(X) la sous-cat´egorie triangul´ee pleine dont les objets
sont R-constructibles. (On fait r´ef´erence `a [8] pour une exposition d´etaill´ee
de la th´eorie des faisceaux dans le cadre des cat´egories d´eriv´ees.)
D´efinition 2.1. Soient FOb(Db(X)) et GOb(Db(Z)). Nous posons
PHdef
=Rfg1(H),(2.2)
e
PFdef
=Rg!(f1(F)[2dY2dZ]).(2.3)
Posons D0
X(·) = RHom(·,CX) et RHom(·,·) = RΓ(X;RHom(·,·)). Par
des formules d’adjonction classiques en th´eorie des faisceaux, telles que la
formule de dualit´e de Poincar´e-Verdier, on obtient ais´ement le r´esultat suiv-
ant:
Proposition 2.2. (i) Soient FOb(Db(X)) et HOb(Db(Z)). Alors
HomDb(Z)(e
PF, H)
HomDb(X)(F, PH).
(ii) Soient KOb(Db
Rc(X)),HOb(Db(Z)), avec K`a support com-
pact. Alors on a le diagramme commutatif suivant dont les lignes sont des
isomorphismes:
RΓ(Z;PKH)
RΓ(X;K⊗ PH)
↓ ↓
RHom(D0
ZPK, H)
RHom(D0
XK, PH)
Notons OXle faisceau des fonctions holomorphes sur X, et DXle faisceau
d’anneaux des op´erateurs diff´erentiels lin´eaires `a coefficients holomorphes.
Notons Db(DX) la cat´egorie d´eriv´ee de la cat´egorie des complexes born´es de
DX-modules `a gauche. On dit qu’un DX-module coh´erent Mest “good”
si pour tout compact KX, il existe un OX-module coherent d´efini au
voisinage de K, inclus dans M, et qui engendre M(cf [10]). Notons par
Db
good(DX) la sous cat´egorie triangul´ee de Db(DX) dont les objets Msont `a
cohomologie coh´erente et “good”. Notons par fet f1les foncteurs d’image
directe et inverse pour les D-modules. (On fait r´ef´erence `a [6], [11] et [12]
pour une exposition d´etaill´ee de la th´eorie des D-modules.)
D´efinition 2.3. On d´efinit le foncteur Pde Db
good(DZ)dans Db
good(DX)par:
PN def
=fg1N.
Nous appellerons parfois P(N)la transform´ee de Penrose de N.
3
En utilisant le th´eor`eme de Cauchy-Kowalevski-Kashiwara relativement
`a l’application g, et le th´eor`eme d’image directe relativement `a f[6, 13], on
obtient:
Proposition 2.4. Soit N Ob(Db
good(DZ)). Alors le morphisme naturel
PRHomDZ(N,OZ)RHomDX(PN ,OX)[dXdY]
est un isomorphisme.
Posons RHomDZ(·,·) = RΓ(Z;RHomDZ(·,·)). Comme corollaire des
Propositions 2.2 et 2.4, on obtient
Th´eor`eme 2.5. (i) Soit N Ob(Db
good(DZ)), et soit FOb(Db(X)). Alors
on a un isomorphisme canonique
RHomDZ(N ⊗ e
PF, OZ)
RHomDX(PN F, OX)[dXdY].
(ii) Soit N Ob(Db
good(DZ)), et soit KOb(Db
Rc(X)) `a support com-
pact. Alors on a le diagramme commutatif suivant dont les lignes sont des
isomorphismes:
RHomDZ(N,PK⊗ OZ)
RHomDX(PN , K ⊗ OX)[dXdY]
↓ ↓
RHomDZ(N D0
ZPK, OZ)
RHomDX(PN D0
XK, OX)[dXdY].
Ce r´esultat permet de distinguer deux types de probl`emes apparaissant
dans ces questions:
calculer la transform´ee de Penrose faisceautique de F,
calculer la transform´ee de Penrose au sens des D-modules de N.
Le premier probl`eme est de nature topologique et n’offre pas de difficult´e
sous des hypoth`eses raisonnables (cf le paragraphe 4 ci-dessous). Le calcul
de PN est nettement plus difficile. Par exemple PN est un complexe de
D-modules qui n’est pas n´ecessairement concentr´e en degr´e z´ero, et si cela
ne change rien tant que l’on travaille dans le langage des cat´egories d´eriv´ees,
il en est autrement d`es que l’on veut calculer explicitement la cohomologie.
Dans la prochaine section on ´etudiera la transformation PN . On com-
mence ici par donner un corollaire facile du th´eor`eme 2.5.
Pour xX,zZet UX, notons bx=gf1(x), bz=f g1(z),
b
U=gf1(U).
4
Corollaire 2.6. Soit N Ob(Db
good(DZ)). Alors
(i) [Formule du germe] Pour xXon a
RΓ(bx;RHomDZ(N,OZ)) 'RHomDX(PN ,OX)x[dXdY];
(ii) [Solutions holomorphes] Soit UXun ouvert tel que
Ubzsoit contractile pour tout zb
U. (2.4)
Alors
RΓ( b
U;RHomDZ(N,OZ)) 'RΓ(U;RHomDX(PN ,OX))[dXdY].
Preuve: On prouve facilement que PCx'Cbxpour xX. D’autre part,
l’hypoth`ese (H.3) donne une identification Ubz'f1(U)g1(z), et donc
(2.4) entraˆıne que les fibres de gsont topologiquement triviales sur f1(U).
Il est alors facile de v´erifier que e
PCU'Cb
U. C.Q.F.D.
Soit Lun fibr´e vectoriel holomorphe sur Z,L=HomOZ(L,OZ) son
dual, et consid´erons le DZ-module localement libre
DL=DZOZL.
On peut retrouver Len tant que faisceau des solutions holomorphes de DL
puisque:
L ' RHomDZ(DL,OZ).
Dans le cadre de la correspondance (1.1), en appliquant le corollaire 2.6 avec
L=OP(k), on obtient ainsi les isomorphismes
RΓ(bx;OP(k)) 'RHomDX(PDP(k),OX)x[1],
RΓ( b
U;OP(k)) 'RΓ(U;RHomDX(PDP(k),OX))[1],
o`u l’on pose DP(k) = DOP(k). On peut alors interpreter le Th´eor`eme 1.1
ainsi: la transform´ee de Penrose du D-module DP(k) est le D-module as-
socie `a l’op´erateur h.
3 L’equivalence de D-modules
On notera ˙
TZle fibr´e cotangent `a Zpriv´e de la section nulle. Considerons
le diagramme: ˙
T
Y(Z×X)
pa
1.&p2
˙
TZ˙
TX
(3.1)
5
1 / 10 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !