La Lettre du Pneumologue • Vol. XI - n° 5 - septembre-octobre 2008 | 195
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l’analogie, ou analogia, dans les maladies nouvelles,
➤
repose sur la recherche d’un élément semblable par
rapport à des maladies déjà connues.
Les deux apports de l’école empirique sont la qualité
de la séméiologie et la qualité des prescriptions.
La séméiologie, ou science médicale des signes, va
aboutir à une description cohérente des symptômes,
des syndromes et des maladies. Les prescriptions et
la surveillance des effets des traitements vont être
adaptées à l’expérience pratique, autant qu’il était
possible à cette époque. Mais l’école empirique se
heurte à de nombreux problèmes : comment gérer
la masse de données accumulées ? Quand passer
de la description aux conseils pratiques ? Comment
accepter l’imprécision et l’incertitude associées aux
analogies ? Au fil des siècles, cette école de pensée
va être progressivement méprisée et exclue de la
médecine académique.
École dogmatique
(école d’Alexandrie)
C’est l’école de la raison, ou école rationaliste. Elle
s’est développée à Alexandrie grâce à la bienveillance
des pharaons d’origine grecque, les Ptolémées. Pour
les médecins de cette école, les maladies ont le plus
souvent des causes naturelles qui ne sont pas acces-
sibles par l’obser-vation ni par les sens : en dehors
des causes évidentes (froid, chaud, faim), les causes
sont cachées. Le diagnostic et le traitement doivent
se fonder sur des théories tentant d’expliquer les
chaînes causales.
La médecine dogmatique est fondée sur différents
principes. La connaissance du fonctionnement interne
du corps est capitale : les travaux en anatomie et en
physiologie se développent, les vivisections sont
favorisées, sur des animaux et parfois même sur des
humains. Le raisonnement est capital, la logique est
un élément essentiel de la démarche. Il faut enfin
bâtir des théories en faisant certaines hypothèses
et en développant des “modèles”.
L’école dogmatique regroupe une grande variété
de disciples selon la réponse à trois problèmes
majeurs.
De quoi est fait le corps ? Cette question aboutit à
l’école des pneumatistes : ceux-ci font jouer un rôle
central à l’air, qui, par la trachée, puis le cœur et les
artères, gagnerait tout le corps.
Quelle est la part de finalité dans le fonctionnement
du corps ? C’est l’école des finalistes.
Quelle est la puissance réelle de la raison ? Certains
médecins soutiennent qu’il faut admettre une part
d’empirisme, d’autres refusent de choisir entre empi-
risme et dogmatisme. Ils se réservent le droit de choisir
pour chaque malade et selon les situations l’attitude
la mieux adaptée : ce sont les éclectiques.
Les apports de l’école dogmatique se situent dans
les domaines de l’anatomie et de la physiologie. Au
fil des siècles, cette école de pensée sera progres-
sivement valorisée et représentera la médecine
académique.
L’opposition entre Galien
et l’école méthodique
L’Antiquité romaine est dominée par Claude Galien
(131-201), l’héritier d’Hippocrate, d’Aristote et des
stoïciens. Avec Claude Galien, qui développe la
théorie des quatre humeurs d’Hippocrate, l’“humo-
risme” médical va devenir très doctrinal et le restera
pour les quinze siècles à venir. Les autres sectes
médicales continuent de se développer, comme
les pneumatistes stoïciens, pour qui l’air extérieur
devient le souffle intérieur, et les éclectistes.
Les idées de Galien s’opposent à celles des disciples
d’Épicure, ou épicuriens, regroupés dans les écoles
des atomistes, et les adeptes de l’école méthodique.
Ces courants de pensée regroupent des médecins
opposés à la théorie des quatre humeurs et qui
pensent qu’il existe une fragmentation de la subs-
tance, en atomes par exemple.
Dans les conflits qui font rage au sein des écoles
médicales gréco-romaines entre empiriques et
dogmatiques, une troisième voie est aussi proposée
par les méthodiques. Ils sont vus comme des provo-
cateurs qui renient l’enseignement hippocratique.
Pour eux, aucune cause n’est importante à connaître,
et la médecine pourrait s’apprendre en dix mois. Par
ses différents sens, le médecin perçoit des signes qui
donnent des indications d’ordre thérapeutique. Entre
l’observation et le traitement, il faut regrouper les
signes en “communauté”. Les maladies sont divisées
en deux groupes : maladies aiguës et maladies chroni-
ques. Le nom de la maladie et les signes associés sont
bien décrits, mais on renonce à connaître la cause
de la maladie. C’est une médecine antihumorale,
antiphysiologique. Seule l’approche thérapeutique
intéresse les méthodiques, et certains conseils dans
le domaine psychiatrique (traitements en douceur et
refus des traitements de choc) seront redécouverts
par les aliénistes du XVIIIe siècle.