REVUE MÉDICALE SUISSE
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25 mai 2016
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(17 000 patients), une antiagrégation plaquettaire par aspirine
à faible dose (75-150 mg / jour) réduit l’incidence des MACE de
33 % pour les patients avec une MCS et de 53 % après une PCI.2
Pour les patients avec un antécédent d’IM, l’aspirine réduit
l’incidence de la mortalité CV, de l’IM et de l’AVC, au détri-
ment d’une augmentation du risque de saignement majeur.2
En prévention secondaire, l’aspirine est associée à une réduc-
tion du risque absolu annuel de mortalité de 34 % et d’IM de
66 %.2 Sur la base des données disponibles, la dose optimale
d’aspirine con fé rant une protection maximale contre les évé-
nements ischémiques et minimisant le risque hémorragique
(en particulier gastro-intestinal) se situe entre 75 et 150 mg /
jour.3,6
Traitement médical conservateur
L’étude CAPRIE a évalué le bénéfice d’une monothérapie
par clopidogrel (75 mg / jour) par rapport à l’aspirine (325 mg /
jour) dans une population de 19 185 patients avec une maladie
CV (AVC ou IM récents, maladie vasculaire périphérique).7
L’étude montre que la monothérapie par clopidogrel au long
cours (suivi médian : deux ans) est associée à une réduction
significative du risque annuel de MACE par rapport à l’aspi-
rine, sans augmentation du risque d’hémorragie intracrânienne
ou gastro-intestinale. Au contraire de leur supériorité démon-
trée pour les patients avec un SCA, le bénéfice clinique des
nouveaux inhibiteurs du récepteur P2Y12 (prasugrel, ticagre-
lor) n’a pas été évalué dans le cadre d’études randomisées
incluant des patients avec une MCS et sans antécédent récent
d’IM. Aucune évidence ne permet donc de soutenir actuelle-
ment le bénéfice d’une inhibition plaquettaire avec le prasu-
grel ou le ticagrelor pour les patients avec une MCS, traités de
manière conservative. En l’absence de contre-indications,
les recommandations pré conisent une monothérapie par
aspirine à faible dose au long cours pour tous les patients avec
une MCS (classe de recommandation I),3,6 le clopidogrel (75
mg / jour) pouvant être considéré comme une alternative en cas
d’intolérance à l’aspirine (classe I).3 En cas d’hypersensibilité /
allergie à l’aspirine, l’alternative d’un traitement de désensibi-
lisation rapide à l’aspirine peut également être envisagée.
L’étude CHARISMA a évalué le bénéfice d’une DAPT par aspi-
rine et clopidogrel par rapport à une monothérapie par aspi-
rine (75-162 mg / jour) pour la prévention secondaire chez
15 603 patients avec une maladie CV ou de multiples facteurs
de risque CV.8 L’étude ne montre pas de différence significa-
tive entre les deux thérapies sur l’incidence des MACE dans la
population totale après un suivi médian de 28 mois. Cepen-
dant, une analyse secondaire du sous-groupe de 9478 patients
avec un antécédent d’IM, d’AVC ischémique ou de maladie
vasculaire périphérique suggère un bénéfice de la DAPT au
long cours, avec une réduction significative de 17 % des MACE
et de 14 % des hospitalisations pour une ischémie myocardique,
sans augmentation de l’incidence des saignements sévères
par rapport à la monothérapie par aspirine, mais au détriment
d’une augmentation significative de 60 % du risque de saigne-
ments modérés.9
Le bénéfice d’une combinaison entre l’aspirine et le vorapaxar,
un antagoniste du récepteur plaquettaire PAR-1 à la throm-
bine, a été évalué dans l’étude TRA 2P-TIMI 50, qui a rando-
misé 26 449 patients avec un antécédent d’IM, d’AVC ou de
maladie vasculaire périphérique (94 % des patients sous aspi-
rine) entre le vorapaxar (2,5 mg / jour) et un placebo. Si TRA
2P-TIMI 50 montre une réduction significative de 13 % des
MACE à trois ans en faveur des patients traités par le vora-
paxar, l’étude a dû être interrompue prématurément en rai-
son d’une augmentation significative du risque d’hémorragies
modérées / sévères et intracrâniennes par rapport au place-
bo.10 De manière similaire, l’analyse du sous-groupe de 17 779
patients avec un antécédent d’IM montre que le vorapaxar en
prévention secondaire est associé à une réduction significative
de 20 % des événements ischémiques au prix d’une augmenta-
tion des hémorragies modérées / sévères et intracrâniennes par
rapport au placebo.11
Une combinaison d’AAP ne peut actuellement pas être re-
commandée de routine pour les patients avec une MCS et sans
antécédent de SCA, de PCI ou de CABG dans les douze mois
précédents (classe III).6 Les données de l’étude CHARISMA
suggèrent toutefois le bénéfice potentiel d’une DAPT combi-
nant aspirine et clopidogrel par rapport à une monothérapie
par aspirine, dans un sous-groupe de patients avec une MCS
stable et à haut risque d’événements CV 9 (figure 1).
Revascularisation coronarienne percutanée
L’intensification de l’inhibition plaquettaire après la mise en
place d’un stent endocoronaire permet de réduire le risque
d’événements ischémiques et de la thrombose de stent (TS).
La durée de la DAPT est déterminée par le type de stent et le
risque hémorragique individuel du patient.3,4,6 Si une durée
minimale d’un mois de DAPT est actuellement recommandée
après la mise en place d’un stent non actif (BMS),3,4,6 la durée
optimale de la DAPT après un stent actif (DES) demeure
controversée. La nouvelle génération de DES, caractérisée
par une épaisseur des mailles plus fine, un composant poly-
mérique biocompatible ou biodégradable et une concentra-
tion réduite en agent antiprolifératif favorisant une endothé-
lialisation précoce, permet actuellement de réduire le risque
de TS et de limiter l’importance d’une inhibition plaquettaire
prolongée après une PCI. Plusieurs études randomisées et
méta-analyses, parues au cours des dernières années, ont remis
en question le dogme de la DAPT minimale de douze mois
après un DES.12-27 De manière générale, la tendance actuelle
s’oriente vers un raccourcissement de la durée de DAPT, mais
plusieurs études ont également suggéré le bénéfice potentiel
d’une prolongation de la durée de DAPT au-delà de douze
mois dans un sous-groupe de patients à haut risque CV.3-6
Cinq études randomisées, évaluant le bénéfice clinique d’une
courte durée (3-6 mois) de DAPT après un DES par rapport à
une durée standard de douze mois dans une population à
faible risque d’événements CV,12-16 ont montré la non-infério-
rité d’un raccourcissement de la DAPT sur l’incidence des
événements ischémiques incluant la TS, et une diminution
significative de l’incidence des complications hémorragiques
majeures.12-16 Au contraire, six autres études randomisées ont
comparé une durée prolongée (18-48 mois) de DAPT après
un DES par rapport à une durée standard (6-12 mois) afin
d’évaluer le bénéfice potentiel d’une prolongation de la DAPT
pour la prévention des événements CV associés à la progres-
sion de la maladie athérosclérotique et l’incidence de la TS
(très) tardive.17-23 Ces études montrent que la prolongation de
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