É C H O D E S C O N G R È S Symposium des JESFC 2008 Antiagrégation plaquettaire orale et syndromes coronariens aigus : où en sommes-nous ? ❒ A. Marquand* D ans le cadre des XVIIIes Journées européennes de la Société française de cardiologie, qui se sont tenues du 16 au 19 janvier 2008 au Palais des congrès de Paris, les laboratoires Sanofi-Aventis et Bristol-MyersSquibb ont organisé, sous la présidence de Nicolas Danchin (Paris) et de Jean-Pierre Bassand (Besançon), un fort intéressant symposium intitulé “Antiagrégation plaquettaire orale et syndromes coronariens aigus : où en sommesnous ?”. COMMENT GÉRER L’ANTIAGRÉGATION PLAQUETTAIRE ORALE À LA PHASE INITIALE DES SYNDROMES CORONARIENS AIGUS ? ➤ (d’après la communication de Yves Cottin, Dijon) * Service de cardiologie, CH Intercommunal de Fréjus-Saint-Raphaël. 30 Le syndrome coronarien aigu (SCA) résulte bien entendu d’une lésion coronaire “coupable” ; celle-ci survient chez un patient vulnérable, athéromateux, chez qui une plaque fragile, devient instable et occlusive/subocclusive sous l’influence d’un élément déclenchant (trigger), ce qui induit une thrombose in situ et provoque ainsi le SCA. Cependant, il s’agit d’une maladie globale du réseau artériel ; et il n’est pas rare de voir des ruptures multiples favorisées par une inflammation locale et/ou diffuse. L’aspirine fait encore l’objet d’études ; la dose initiale de 162 mg semble appropriée (1), suivie d’une dose d’entretien de 75 mg/j, mais des complications digestives interviennent dans 5 à 40 % des cas et le taux d’hémorragies atteint 0,93 % pour l’ensemble des doses (2). Les recommandations de l’ESC relatives aux suites de SCA préconisent la bithérapie (aspirine + clopidogrel) au moins 12 mois après l’implantation d’un stent actif, et au mieux 12 mois également après les autres types d’intervention. La grande étude CURE (3) a montré que, dans les suites d’un angor instable ou d’un IDM non-Q, l’association clopidogrel + aspirine administrée dès les premières 24 heures de traitement est plus efficace que l’aspirine seule (4), ce bénéfice s’amplifiant jusqu’au trentième jour puis se maintenant jusqu’au neuvième mois, avec une réduction du risque d’accidents évolutifs de 20 % (p < 0,001). Il a par la suite été établi qu’une dose de charge de 600 mg de clopidogrel à la phase aiguë du SCA est nettement plus efficace qu’une dose de 300 mg (5). Dans les IDM ST+, l’étude CLARITY (6) a montré l’intérêt d’une dose de charge de 300 mg de clopidogrel suivie d’une dose de 75 mg/j en association avec l’aspirine : – 20 % d’événements à 30 jours. L’étude chinoise COMMIT elle-même, évaluant pourtant une dose de seulement 75 mg/j, a mis en évidence un gain de mortalité de 7 % (p = 0,04) et une réduction de 9 % des événements (p = 0,002) à 28 jours (7). Même dans les pays à bon pronostic, comme l’Europe occidentale, les patients doivent bénéficier d’un double traitement antiplaquettaire (8), qui, à 12 mois, réduit de plus de la moitié le taux de complications (9). Malheureusement, si 78 % des patients en bénéficient au cours des 6 premiers mois, ils ne sont plus que 58 % à 9-12 mois, contre 86 % pour l’aspirine seule (10). Ainsi, bien que l’on dispose d’outils pour améliorer le pronostic des patients ayant présenté un SCA, la marge de progression reste importante, leur utilisation étant encore suboptimale. Correspondances en Risque CardioVasculaire - Vol. VI - n° 1 - janvier-février-mars 2008 DU SYNDROME CORONARIEN AU PATIENT POLYVASCULAIRE : UNE PRISE EN CHARGE À INDIVIDUALISER ➤ (d’après la communication de Philippe-Gabriel Steg, Paris) Le Pr Steg a rappelé que les polyathéromateux stables présentent un taux d’événements cardiovasculaires élevé malgré le traitement généralement appliqué en prévention secondaire, comme l’ont montré les études et les registres (CHARISMA, GRACE, REACH, ALLIANCE, etc.). La maladie polyartérielle est observée chez un quart des coronariens, 40 % des patients ayant eu un AVC et 62 % des patients porteurs d’AOMI. Ces multiples localisations aggravent notablement le pronostic et, bien que les lésions soient assez facilement identifiables, ces patients sont plutôt moins activement traités que les autres malgré le bénéfice considérable qu’un traitement optimisé leur offrirait. Un gros effort de recherche exhaustive des atteintes artérielles est nécessaire, tout comme l’optimisation du traitement médical, en particulier du traitement antithrombotique. UTILISATION DES ANTIAGRÉGANTS PLAQUETTAIRES AU LONG COURS : Dans ce but, les recommandations des sociétés savantes ont été écrites de manière détaillée et sont facilement disponibles. ■ RÉFÉRENCES 1. Berger JS, Stebbins A, Granger CB et al. Initial aspirin dose and outcome among ST-elevation myocardial infarction patients treated with fibrinolytic therapy. Circulation 2008;117(2):192-9. 2. Bassand JP, Hamm CW, Ardissino D et al. Task force for diagnosis and treatment of non-ST-segment elevation acute coronary syndromes of European Society of Cardiology. Guidelines for the diagnosis and treatment of non-STsegment elevation acute coronary syndromes. Eur Heart J 2007;28(13):1598-660. 3. Yusuf S, Zhao F, Mehta SR et al.; Clopidogrel in Unstable Angina to Prevent Recurrent Events Trial investigators. Early and late effects of clopidogrel in patients with acute coronary syndroms. N Engl J Med 2001;345(7):494-502. 4. Yusuf S, Mehta SR, Zhao F et al.; Clopidogrel in Unstable Angina to Prevent Recurrent Events Trial investigators. Early and late effects of clopidogrel in patients with acute coronary syndromes. Circulation 2003;107(7):966-72. 5. Cuisset T, Frere C, Quilici J et al. Benefit of a 600mg loading dose of clopidogrel on platelet reactivity and clinical outcomes in patients with non-ST-segment elevation acute coronary syndrome undergoing coronary stenting. J Am Coll Cardiol 2006;48:1339-45. DES ÉTUDES À LA PRATIQUE ➤ (d’après une communication de Jean-Pierre Bassand, Besançon) 6. Sabatine MS, Cannon CP, Gilbson CM et al.; CLARITY- Le Pr Bassand a repris les grandes études relatives aux agents antiplaquettaires et ayant abouti aux recommandations de l’ESC sur l’utilisation large de l’association aspirine + clopidogrel à la phase aiguë et au décours des SCA, chez les patients ayant bénéficié d’une revascularisation coronaire percutanée, chez les coronariens et les polyartériels à risque élevé en particulier… Le bon pronostic des patients à court et moyen terme dépend de ces antiplaquettaires, qui présentent par ailleurs un bon rapport bénéfice/risque. Leur arrêt peut être lourd de conséquences. Ainsi, en 2008, les prescripteurs disposent de thérapeutiques efficaces, les antiplaquettaires, en particulier le clopidogrel, en association fréquente avec l’aspirine, pour réduire les risques évolutifs des patients polyartériels, et il leur revient de les utiliser au mieux de l’intérêt des patients. 7. Chen ZM, Jiang LX, Chen YP et al.; COMMIT (Clopidogrel Correspondances en Risque CardioVasculaire - Vol. VI - n° 1 - janvier-février-mars 2008 TIMI 28 investigators. Addition of clopidogrel to aspirin and fibrinolytic therapy for myocardial infarction with ST-segment elevation. N Engl J Med 2005;352:1179-89. and Metoprolol in Myocardial Infarction Trial) collaborative group. Addition of clopidogrel to aspirin in 45,852 patients with acute myocardial infarction: randomized placebocontrolled trial. Lancet 2005;366:1607-21. 8. Danchin N, Cambou JP, Hanania G et al.; USIC 2000 investigators. Impact of combined secondary prevention therapy after myocardial infarction: data from a nationwide French registry. Am Heart J 2005;150(6):1147-53. 9. Zeymer U, Gitt AK, Jünger C et al.; Acute Coronary Syndromes (ACOS) registry investigators. Effect of clopidogrel on 1-year mortality in hospital survivors of acute ST-segment elevation myocardial infarction in clinical practice. Eur Heart J 2006;27(22):2661-6. 10. Danchin N, Thébaut JF, Diévart F et al. Influence of percutaneous coronary intervention in non ST-elevation acute coronary syndromes on prescription of secondary prevention medications. Data from the S-Témoin Registry. Ann Cardiol Angeiol 2007;56:30-5. 31