MEMOIRE POUR L`OBTENTION DU DIPLOME D`ETUDES

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INTER-REGION NORD-OUEST
UNIVERSITE DE LILLE 2
Année universitaire 2014 - 2015
MEMOIRE POUR L’OBTENTION DU DIPLOME
D’ETUDES SPECIALISEES (DES) D’ONCOLOGIE,
OPTION ONCOLOGIE MEDICALE
DOUBLET LOUIS
EVALUATION RETROSPECTIVE DU RECOURS A UN TRAITEMENT
ANTI-EGFR CHEZ DES PATIENTS ATTEINTS DE CANCER
COLORECTAL METASTATIQUE SANS MUTATION DE KRAS,
AYANT RECU UNE PREMIERE LIGNE DE CHIMIOTHERAPIE SEULE
OU ASSOCIEE AU BEVACIZUMAB
Soutenu le 5 juin 2015
Faculté de médecine Henri Warembourg, Lille 2
Sous la direction du Pr Mohamed HEBBAR
REMERCIEMENTS
A l’issue de ce travail de mémoire, je tiens tout d’abord à adresser mes remerciements au
Professeur Mohamed Hebbar pour m’avoir proposé ce sujet et l’avoir construit avec moi en
percevant mes centres d’intérêts et mes attentes. Je souhaite le remercier particulièrement
pour son enthousiasme, son écoute et son enseignement, pour la qualité de son jugement et
de ses intuitions.
Je tiens également à remercier le Professeur Antoine Adenis qui m’a autorisé avec
spontanéité l’accès aux données de son service et sans qui ce travail n’aurait pu pleinement
voir le jour.
Je désire aussi remercier le Professeur Jacques Bonneterre pour son écoute, sa patience et
sa compréhension, ainsi que pour avoir veillé à me garantir du temps pour la réalisation de
ce mémoire.
J’adresse mes chaleureux remerciements à tous les médecins qui m’ont appris l’art de la
médecine d’un point de vue humain et scientifique, et qui m’ont épaulé dans le travail
quotidien au cours de mes différents stages. Ils m’ont offert un précieux exemple par leur
combativité, leur rigueur, leur abnégation et leur générosité. Je remercie également tout le
personnel paramédical des différents services qui a été pour moi la joie du quotidien. Merci à
tous mes co-internes successifs pour leur humour qui m’a fait du bien, pour leur sincérité et
leur profondeur, ils sont l’espérance de la médecine de demain. Merci également à tous les
patients et leurs familles qui sont la raison d’être de mon métier et qui m’ont bien souvent
édifié.
Je souhaite remercier Agnès qui aura été mon ange gardien pendant tout cet internat,
particulièrement en cette période de mémoire, ainsi que Raphaëlle, Nathalie et Frédérique
qui m’ont aussi tant de fois témoigné de petites attentions, de leur amitié et de leur soutien.
Je tiens à remercier Diane avec qui j’ai partagé les joies et les peines de ce travail, pour son
aide précieuse et amicale, et sa motivation.
Merci à Sophie Cousin pour son aide dans le travail statistique et pour son attention à mon
équilibre de travail tout au long du précédent semestre. Merci à Anne Ploquin pour son aide
indispensable dans l’élaboration de ma base de données. Merci à elle et à Capucine pour
m’avoir généreusement facilité le travail de recueil. Merci à Thomas pour son aide
informatique.
Merci à tous mes amis, mes frères et sœurs, les proches de ma famille que la Providence a
placé dans ma vie. Merci pour votre présence et pour votre soutien inconditionnel.
Je souhaite remercier du fond du cœur mes parents et grands-parents qui m’ont toujours
témoigné de leur amour, m’ont construit et ont su accompagner mes désirs et potentialiser
mes talents.
Et surtout je veux remercier Anne, qui a porté ce mémoire avec moi et en a accepté les
sacrifices. Tu me permets de donner le meilleur de moi-même et rends la vie plus légère et
plus belle.
1
SOMMAIRE
LISTE DES ABBREVIATIONS……………………………………………………......
RESUME………………………………………………………………………………….
ABSTRACT………………………………………………………………………………
INTRODUCTION………………………………………………………………………...
1. Le cancer colorectal…………………………………………………….…..
1.1 Epidémiologie………………………………………………………..
1.2 Statut tumoral RAS………………………………………………….
1.3 Dépistage…………………………………………………………….
1.4 Diagnostic et bilan initial…………………………………………….
1.5 Prise en charge thérapeutique……………………………………..
2. Les traitements anti-EGFR en première ligne dans le cancer
colorectal métastatique……………………………………………………….
2.1 Etude CRYSTAL…………………………………………………….
2.2 Etude OPUS……………………………………………………..…..
2.3 Etude PRIME………………………………………………………...
2.4 Etude COIN…………………………………………………………..
2.5 Etude NORDIC VII…………………………………………………..
2.6 Méta-analyse de Zhou et al. …………………………………...….
2.7 Etude FIRE-3………………………………………………………...
2.8 Etude PEAK……………………………………………………….....
2.9 Etude CALGB/SWOG 80405………………………………….…...
3. Rationnel et objectifs de l’étude……………………………………….…
3.1 Synthèse et analyse critique des études évaluant l’intérêt des
traitements anti-EGFR en 1ère ligne métastatique……………..………
3.2 Objectifs de notre étude…………………………………………….
PATIENTS ET METHODES……………………………………………………………
1. Formalités administratives, réglementaires et éthiques……………..
2. Mise en œuvre de l’étude…………………………………………………..
3. Inclusion des patients………………………………………………………
4. Recueil de données…………………………………………………………
5. Analyse statistique………………………………………………………….
RESULTATS……………………………………………………………………………..
1. Constitution de la cohorte de patients…………………………………..
2. Caractéristiques générales de la population………………………......
3. Traitements reçus par les patients inclus………………………………
4. Taux de recours aux traitements ciblés…………………………………
5. Survie globale………………………………………………………………..
DISCUSSION…………………………………………………………………………….
1. Validité interne et externe de l’étude………………………………….....
2. Analyse des résultats de survie globale………………………………..
3. Analyse du taux de recours aux traitements anti-EGFR…………..…
4. Quel traitement ciblé privilégier en première ligne de
chimiothérapie métastatique ?.................................................................
5. Perspectives………………………………………………………………….
CONCLUSION…………………………………………………………………………...
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES……………………………………………….
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LISTE DES ABBREVIATIONS
5-FU : 5-Fluorouracile
ACE : Antigène carcinoembryonnaire
ASCO : American Society of Clinical Oncology
BPCO : Broncho-pneumopathie chronique obstructive
CALGB : Cancer And Leukemia Group B
CLCC : Centre de Lutte Contre le Cancer
CCR : Cancer colorectal
CCRM : Cancer colorectal métastatique
CCTIRS : Comité Consultatif sur le Traitement de l’Information en matière de
Recherche dans le domaine de la Santé
CHIP : Chimio-hyperthermie intrapéritonéale
CHRU : Centre Hospitalier Régional Universitaire
CHU : Centre Hospitalier Régional
COL : Centre Oscar Lambret
EGFR : Epidermal Growth Factor Receptor
ESMO : European Society for Medical Oncology
GERCOR : Groupe Coopérateur Multidisciplinaire en Oncologie
HR : Hazard ratio
IC95%, IC95 : Intervalle de confiance à 95%
IRM : Imagerie par Résonance Magnétique
IV : Intraveineux
JCO : Journal of Clinicla Oncology
MAPK : Mitogen-activated protein kinases
MICI : Maladie inflammatoire chronique de l’intestin
MMR : Mismatch repair
NEJM : New England Journal of Medicine
NS : Non significatif
OMS : Organisation Mondiale de la Santé
OR : Odds ratio
p : valeur-p
R0 : Résection complète microscopique
RAF : Rapidly Accelerated Fibrosarcoma (protéine)
RAS : Rat sarcoma (protéine)
RECIST : Response Evaluation Criteria in Solid Tumors
SG : Survie globale
SSP : Survie sans progression
TEP : Tomographie par Emission de Positrons
TNM : Tumor, Node, Metastase (classification)
TRO : Taux de réponse objective
USA : United States of America
VEGF : Vascular Endothelial Growth Factor
VEGFR : Vascular Endothelial Growth Factor Receptor
3
RESUME
Contexte : L’intérêt d’un traitement anti-EGFR à la place du bévacizumab en
association à la bi-chimiothérapie de première ligne métastatique dans le cancer
colorectal métastatique (CCRM) KRAS exon 2 sauvage a été évalué par plusieurs
essais prospectifs dont les résultats sont discordants et souffrent de nombreux biais.
La survie globale dans les bras contrôles ne recevant pas d’anti-EGFR en première
ligne peut en effet être altérée par un taux de recours aux traitements anti-EGFR lors
des lignes ultérieures semblant faible (entre 4,4% et 48% selon les études).
Méthode : Nous avons donc conduit une étude rétrospective incluant les 185
patients du CHRU et du Centre Oscar Lambret de Lille traités par chimiothérapie
entre 2007 et 2013 pour un CCRM KRAS exon 2 sauvage.
Résultats : Dans notre population, représentative d’une population standard de
patients atteints de CCRM et globalement comparable aux populations des essais
prospectifs, outre un taux de résection chirurgicale secondaire R0 des différentes
lésions plus élevé (23,2%), le taux de recours aux traitements anti-EGFR au delà de
la première ligne de chimiothérapie métastatique était de 58,4%. Il était de 65% en
ne tenant compte que des patients décédés. La survie globale médiane globale de
notre cohorte était comparable à celle des différents bras de traitement des essais
prospectifs, soit de 26 mois (IC95% : 22,67 – 29,33).
Conclusion : Le biais suspecté d’un taux de recours insuffisant aux traitements antiEGFR dans les bras contrôles des essais prospectifs est confirmé. La supériorité des
anti-EGFR sur le bévacizumab dans cette situation n’est donc pas démontrée,
d’autant que le bévacizumab présente de nombreux avantages en première ligne :
tolérance, efficacité, lignes de traitements ultérieures par anti-EGFR à proposer au
patient.
4
ABSTRACT
« Retrospective evaluation of the use of anti-EGFR treatment in patients with
wild-type KRAS metastatic colorectal cancer without having received a first
line chemotherapy alone or associated with bevacizumab »
Background: The value of an anti-EGFR therapy instead of bevacizumab in
combination with first line metastatic bi-chemotherapy in wild-type KRAS exon 2
metastatic colorectal cancer (MCRC) was evaluated by several prospective trials
whose results are discordant and suffer from numerous biases. Overall survival in the
control arms receiving no anti-EGFR front line can indeed be affected by a rate of
use of anti-EGFR treatments in subsequent lines seeming low (between 4.4% and
48% depending on the studies).
Methods: We therefore performed a retrospective study including 185 patients of the
Regional University Hospital and the Oscar Lambret Center in Lille having received
chemotherapy between 2007 and 2013 for a wild-type KRAS exon 2 MCRC.
Results: In our population, representative of a standard population of patients with
MCRC and broadly comparable to the populations of the prospective trials, excepting
a higher rate of R0 surgical resections of the different lesions (23.2%), the rate of use
of anti-EGFR treatment beyond the first line metastatic chemotherapy was 58.4%. It
was 65% in only considering patients who died. The overall survival median of 26
months (95%CI: 22.67 - 29.33) in our cohort is comparable to that of the different
treatment arms in the prospective trials.
Conclusion: The bias suspected of insufficient rates of use of anti-EGFR treatment
in the control arms of the prospective trials is confirmed. The superiority of the antiEGFR on bevacizumab in this situation is not demonstrated, especially as
bevacizumab has many advantages in the front line: safety, effectiveness,
subsequent treatment lines by anti-EGFR to propose to the patient.
5
INTRODUCTION
1. Le cancer colorectal
1.1
Epidémiologie
Le cancer colorectal est le troisième cancer en incidence en France après les
cancers de la prostate et du sein avec plus de 42 000 nouveaux cas par an dont 15
000 cancers du rectum (1). Cette incidence double à chaque décennie d’âge rendant
le risque appréciable au delà de 45 ans avec une médiane de survenue à 70 ans et
une légère prédominance masculine.
Il s’agit d’un cancer de bon pronostic lorsqu’il est diagnostiqué à un stade
précoce avec une survie à 5 ans de 91% pour les stades localisés et de 70% en cas
d’envahissement locorégional. Mais cette survie diminue à 11% dans les situations
métastatiques représentant environ 25% des patients au moment du diagnostic.
Ainsi, le cancer colorectal est le deuxième cancer en terme de mortalité après le
cancer du poumon puisqu’il est responsable d’environ 18 000 décès par an (11% des
décès par cancer) (2)(3). La survie relative à 5 ans tous stades confondus est
d’environ 57%.
60 à 80% des cancers colorectaux se développent à partir d’un adénome qui
constitue alors une lésion précancéreuse dont l’évolution sur quelques mois à
plusieurs années dépend de la taille, de l’importance de la composante villeuse et du
degré de dysplasie (4). Les formes histologiques sont à plus de 95% des
adénocarcinomes, et rarement des tumeurs neuroendocrines, des lymphomes
digestifs et des sarcomes.
Environ 80% des cas sont sporadiques, 15% surviennent dans un contexte
familial et 5% se développent à partir d’une prédisposition génétique comme la
polypose adénomateuse familiale et le syndrome de Lynch touchant alors
fréquemment des sujets plus jeunes. C’est aussi le cas des cancers colorectaux se
développant dans un contexte de maladie inflammatoire chronique de l’intestin
(MICI) comme la maladie de Crohn ou la rectocolite hémorragique.
D’autres facteurs de risque sont identifiés comme le surpoids, une
alimentation riche en viande rouge, en boissons alcoolisées et en charcuterie, un
exercice physique insuffisant, le tabagisme, l’âge, un antécédent de cancer (4).
En l’absence de traitement, la maladie cancéreuse évolue naturellement vers
un envahissement locorégional au pourtour de la tumeur primitive par atteinte des
différentes couches de la paroi digestive, des organes de voisinage et des premiers
relais ganglionnaires régionaux. L’évolution peut se faire également de façon
synchrone (découverte au diagnostic initial du cancer) ou métachrone (découverte
plusieurs mois après le diagnostic initial) vers une atteinte métastatique notamment
au niveau hépatique (dans la grande majorité des cas), péritonéal et pulmonaire,
mais parfois également au niveau ganglionnaire à distance de la tumeur primitive,
cérébral, osseux, ovarien, surrénalien, voire au niveau d’autres organes.
1.2
Statut tumoral RAS
Environ 50% des cancers colorectaux présentent une mutation de KRAS ou
de NRAS, gènes codant pour deux isoformes de la protéine RAS (Figure 1A). On
6
constate ainsi principalement des mutations de KRAS au niveau des exons 2, 3 et 4,
et des mutations de NRAS également au niveau des exons 2, 3 et 4 (5)(6). Ces
mutations sont dites activatrices car elles engendrent une activation constitutive de
RAS (Figure 1B). Or RAS est impliquée dans la transduction du signal après
activation de l’EGFR par son ligand. Les mutations activatrices de RAS sont donc
responsables d’une résistance constitutive aux traitements anti-EGFR (anticorps
ciblant le domaine extracellulaire de l’EGFR) par activation constitutive en aval de la
voie RAS-RAF-MAPK, court-circuitant ainsi l’inhibition de l’EGFR par le traitement.
Les traitements anti-EGFR dans le cancer colorectal n’ont donc leur place qu’en
l’absence de mutation de RAS au niveau des cellules tumorales, soit lorsque le
phénotype est dit « RAS non-muté » ou autrement dit « RAS sauvage ». Les
mutations situées au niveau de l’exon 2 de KRAS représentent 80% des mutations
de RAS et ont été les premières dont le rôle ait été démontré dans la résistance aux
traitements anti-EGFR. C’est pourquoi la grande majorité des études réalisées sur
les traitements anti-EGFR dans le cancer colorectal se réfèrent simplement au statut
« KRAS exon 2 sauvage » de la tumeur et non à son statut RAS au sens plus large.
Ainsi, jusqu’en 2013, seuls les patients atteints de cancer colorectal métastatique
(CCRM) sans mutation de KRAS exon 2 pouvaient bénéficier d’un traitement antiEGFR, avant que l’indication ne soit encore restreinte aux tumeurs ne présentant
aucune mutation activatrice de RAS.
Anti-EGFR
A
B
Figure 1 : A : Schéma des voies d’activation de l’EGFR et de l’activation constitutive de
la voie RAS-RAF-MAPK en cas de mutation de RAS. B : Schéma des mutations
activatrices de KRAS et NRAS (Douillard et al., NEJM 2013).
1.3
Dépistage
Afin de faire diminuer la mortalité par cancer colorectal de 15 à 18%, il a été
mis en place en France pour les personnes à risque moyen de développer un cancer
colorectal (hommes et femmes de plus de 50 ans), un dépistage organisé de ce
cancer (7). Il repose sur une recherche de sang occulte dans les selles tous les deux
7
ans entre 50 et 74 ans à l’aide de différents tests dont de nouveaux tests
immunologiques à la sensibilité accrue par rapport aux anciens tests (8). En cas de
positivité, cette recherche est couplée à la réalisation d’une coloscopie totale. Pour
les sujets à risque élevé (antécédent personnel d’adénome ou de cancer colorectal,
antécédent familial au premier degré de cancer colorectal ou d’adénome > 1cm
survenu avant 65 ans, au moins deux antécédents familiaux au premier degré de
cancer colorectal quel que soit l’âge de survenue), le dépistage repose sur la
coloscopie totale à partir de 45 ans ou 5 ans avant l’âge du diagnostic du cas index
chez un apparenté au premier degré de moins de 65 ans. Pour les sujets atteints de
MICI ou à risque très élevé de cancer colorectal (prédisposition génétique), des
prises en charge spécifiques existent.
1.4
Diagnostic et bilan initial
En dehors des cas découverts par le dépistage, le diagnostic de cancer
colorectal doit être évoqué devant divers signes cliniques : rectorragies (même en
cas de pathologie hémorroïdaire), méléna, anémie ferriprive sans autre cause
retrouvée, symptômes digestifs d’apparition récente ou récemment modifiés
(alternance diarrhée / constipation, douleurs abdominales ou hépatiques, syndrome
rectal), masse à la palpation abdominale ou au toucher rectal, ascite sans
hépatopathie sous-jacente, altération de l’état général, syndrome occlusif,
diverticulite sigmoïdienne…
La présence seule de ces signes cliniques ou l’existence d’un test de
dépistage positif, doit conduire à la réalisation d’une coloscopie totale qui confirmera
le diagnostic en visualisant la lésion cancéreuse et en permettant d’en réaliser des
biopsies dont l’analyse histologique établira le diagnostic de certitude. En cas
d’existence de lésions secondaires synchrones, le diagnostic peut-être également
porté par la biopsie de l’une des lésions, notamment hépatique ou pulmonaire.
Le bilan initial doit donc comporter la coloscopie totale, qui, outre le diagnostic
histologique, permet également de rechercher une seconde localisation tumorale
colorectale. Il comprend aussi la réalisation d’un scanner thoraco-abdomino-pelvien
avec injection de produit de contraste afin d’analyser l’éventuel envahissement
locorégional ou la présence de métastases notamment hépatiques, pulmonaires,
ganglionnaires ou péritonéales. Afin de préciser les lésions en cas de doute, il peut
être réalisé une échographie ou une IRM hépatique, un TEP-scanner… En cas de
cancer du bas ou du moyen rectum (jusqu’à 10 cm de la marge anale), il est réalisé
également une écho-endoscopie rectale ou une IRM pelvienne afin de préciser
l’envahissement locorégional. D’autres explorations peuvent être réalisées en
fonction des symptômes : imagerie cérébrale, scintigraphie osseuse, coelioscopie
diagnostique… Le marqueur tumoral biologique ACE peut être dosé à visée
pronostique et non diagnostique.
1.5
Prise en charge thérapeutique
1.5.1 Prise en charge des formes localisées (stades I, II et III)
La prise en charge thérapeutique des formes localisées repose toujours sur la
chirurgie sauf s’il s’agit d’une tumeur in-situ dont la résection a pu être complète en
endoscopie. En cas de non-opérabilité, un traitement palliatif par colostomie ou mise
en place d’une prothèse colique peut être réalisé.
8
1.5.1.1
Cancers du côlon et du 1/3 supérieur du rectum
La résection chirurgicale de la tumeur primitive avec lymphadénectomie
régionale incluant au moins 12 ganglions est indiquée (9). Elle constitue l’unique
traitement des tumeurs de stade I (tumeurs T1-T2, N0, M0, c’est-à-dire envahissant
jusqu’à la musculeuse sans atteinte ganglionnaire ou métastatique).
En cas de tumeur de stade III (T1-T4, N1-N2, M0, c’est-à-dire présentant un
envahissement ganglionnaire sans atteinte métastatique), une chimiothérapie
adjuvante pendant 6 mois est indiquée, soit par 12 cycles de FOLFOX (ou de
LV5FU2 si contre-indication à une bithérapie du fait de l’âge ou de comorbidités), soit
par 8 cycles de XELOX (ou de capécitabine si contre-indication à une bithérapie du
fait de l’âge ou de comorbidités).
Pour les cancers de stade II (T3-T4, N0, M0, c’est-à-dire envahissant la sousséreuse ou les organes de voisinage par contiguïté sans atteinte ganglionnaire ou
métastatique), l’indication d’une chimiothérapie adjuvante est discutée par mono- ou
bithérapie en cas de phénotype MMR ou de facteur de mauvais pronostic associé
(tumeur perforée, occlusion, T4, critères d’agressivité anatomopathologiques,
adénocarcinome peu différencié, emboles vasculaires ou engainements périnerveux,
mois de 12 ganglions analysés, critères cliniques…).
Les traitements anti-EGFR et anti-VEGFR n’ont pas leur place en situation
adjuvante car ils semblent alors avoir un effet délétère.
1.5.1.2
Cancers des 2/3 inférieurs du rectum
La résection chirurgicale par résection antérieure du rectum ou amputation
abdomino-périnéale est indiquée même s’il peut se discuter un simple traitement
endoscopique ou une résection par voie trans-anale en cas de tumeur T1 (10). Pour
les tumeurs de stade I, cela constitue le seul traitement.
En cas de tumeur de stade II ou III, une radio-chimiothérapie concomitante
pré-opératoire à la dose de 50 Gy et à base de capécitabine ou de LV5FU2 est
indiquée. Une radiothérapie seule néoadjuvante peut être discutée en cas de patient
âgé ou de contre-indication à la chimiothérapie. La chimiothérapie adjuvante, selon
les mêmes modalités que pour le cancer du côlon, se discute au cas par cas en
fonction des différents éléments pronostiques bien qu’elle soit généralement retenue.
1.5.2 Prise en charge des formes métastatiques (stades IV)
La prise en charge des formes métastatiques diffère en fonction de la
résécabilité chirurgicale ou non des différentes lésions primitive et secondaires (11).
Si les lésions sont résécables ou potentiellement résécables après réduction sous
chimiothérapie, l’objectif initial du traitement est alors curatif. Si les lésions ne seront
a priori jamais résécabes, l’objectif du traitement est d’emblée palliatif. Les
métastases hépatiques ou pulmonaires sont dites résécables si : le terrain du patient
permet l’anesthésie et la résection, la résection R0 de toutes les lésions semble
possible au vue de l’imagerie, la résection permet de laisser un parenchyme
hépatique résiduel comportant sa propre vascularisation et son propre drainage
biliaire, s’il est possible de laisser en place un volume résiduel > 25-40% de foie sain
selon l’existence ou non d’une hépatopathie sous-jacente, et s’il n’existe pas de
progression sous chimiothérapie (12)(13). Le nombre de métastases n’est pas en soi
un facteur limitant.
9
1.5.2.1
Formes résécables
En cas de métastases hépatiques ou pulmonaires métachrones, le schéma
thérapeutique standard comprend une exérèse chirurgicale des lésions encadrée
d’une chimiothérapie péri-opératoire par FOLFOX avec 6 cures pré-opératoires et 6
cures post-opératoires (14). Une chirurgie première suivie d’une chimiothérapie
adjuvante par 12 cures de FOLFOX (ou 8 cures de XELOX) peut être envisagée si
les lésions sont de petites tailles, faisant craindre une disparition sous
chimiothérapie, ou s’il y a un intérêt diagnostique (11).
En cas de métastases hépatiques ou pulmonaires synchrones, il peut
s’envisager une résection initiale de la tumeur primitive, puis dans un deuxième
temps la résection des lésions métastatiques encadrée d’une chimiothérapie périopératoire par FOLFOX selon les mêmes modalités que pour les métastases
synchrones. Mais cette stratégie peut être inversée, en particulier lorsque la tumeur
primitive n’est pas symptomatique (15). On peut alors réaliser une chirurgie première
des métastases, encadrée ou suivie par 12 cures de chimiothérapie de type
FOLFOX, puis réaliser secondairement la colectomie. Ces schémas thérapeutiques
en deux temps opératoires sont parfois remplacés par des schémas en un seul
temps opératoire (résection combinée des lésions primitive et secondaires), voire en
trois temps espacés de chimiothérapie (exemple : résection des lésions hépatiques,
puis des lésions pulmonaires, puis de la tumeur primitive) (16)(17).
Si les critères de résécabilité ne sont pas totalement remplis, il peut
s’envisager diverses modalités pouvant rendre les lésions résécables :
chimiothérapie intra-artérielle hépatique (18)(19), remplacement de la bithérapie à
base d’oxaliplatine (FOLFOX ou XELOX) par une bithérapie à base d’irinotécan
(FOLFIRI) (18)(20), chimiothérapie intraveineuse intensifiée par FOLFOXIRI ou
FOLFIRINOX (21)(22)(23)(24), embolisation portale droite pré-opératoire afin de faire
augmenter le volume du foie gauche (25)(26)(27), hépatectomie en deux temps
(28)(29)(30), adjonction à la chimiothérapie d’un traitement anti-VEGF par
bévacizumab (31)(32)(33)(34)(35), ou d’un traitement anti-EGFR par cétuximab ou
panitumumab en cas d’absence de mutation de RAS (6)(18)(36)(37)(38)(39)(40)(41)
L’usage des anti-EGFR et anti-VEGFR avant métastasectomie n’a pas été étudié
dans des essais randomisés si les métastases sont considérées comme résécables
d’emblée, mais un bénéfice a été montré dans un essai randomisé de phase II si les
métastases ne sont pas résécables d’emblée (42)(43)(44)(38)(45).
Si la résection est difficile ou impossible, que la maladie est peu évolutive, les
métastases peu nombreuses et peu volumineuses, un traitement focal par
radiofréquence ou radiothérapie stéréotaxique peut être réalisé (46)(47)(48)(49).
En cas de carcinose péritonéale, une résection complète des lésions suivie de
chimiothérapie intrapéritonéale avec hyperthermie (CHIP) dans un centre expert est
indiquée si la carcinose est isolée et d’extension modérée, chez un malade en bon
état général et sans insuffisance viscérale, et si l’ensemble des lésions de plus de
2mm ont pu être retirées (50)(51)(52). Si la carcinose est synchrone à une lésion
primitive non menaçante, cette dernière doit être retirée dans le même temps
opératoire que les lésions de carcinose et après chimiothérapie pré-opératoire.
En cas de métastases ovariennes, une résection chirurgicale peut être
proposée dans tous les cas du fait du risque de complication locale (torsion) et de
10
chimiorésistance dans cette localisation (53). Une résection complète est également
possible au niveau des lésions ganglionnaires, cérébrales et surrénaliennes.
En cas de cancer des 2/3 inférieurs du rectum, la prise en charge de la tumeur
primitive s’effectue selon les même modalités que pour les cancers de stade II et III
c’est-à-dire avec une radio-chimiothérapie concomitante de 50 Gy précédant la
chirurgie rectale (10). Le protocole de chimiothérapie utilisé est alors généralement
une bithérapie de type XELOX ou FOLFOX du fait de la présence des lésions
secondaires, à doses légèrement réduite par rapport au protocole classique du fait
de la surtoxicité induite par la radiothérapie concomitante. La chirurgie rectale,
réalisée à l’issue, peut être accompagnée d’une résection dans le même temps des
lésions métastatiques puis suivie d’une chimiothérapie adjuvante par FOLFOX ou
XELOX pour 6 mois de traitement au total (incluant le temps de la radiochimiothérapie pré-opératoire). Ou bien les lésions secondaires peuvent être
réséquées dans un second temps encadré d’une chimiothérapie péri-opératoire par
FOLFOX.
1.5.2.2
Formes non résécables
La résection chirurgicale de la tumeur primitive n’est pas systématique. Elle
doit être envisagée surtout si cette dernière est symptomatique (rectorragie,
syndrome occlusif…). Une pose d’endoprothèse peut être réalisée à visée palliative
pour éviter une chirurgie. En cas de tumeur des 2/3 inférieurs du rectum, un
traitement par radiothérapie ou radio-chimiothérapie concomitante suivi ou non d’une
résection chirurgicale est envisagé en cas de symptômes invalidants (10). Mais le
traitement des CCRM non résécables repose essentiellement sur la chimiothérapie.
En cas de volume tumoral modéré, de métastases non ou peu
symptomatiques et non menaçantes à court terme, si l’état général n’est pas altéré
par le cancer (OMS 0 ou 1, ou état général altéré du fait de l’âge ou de
comorbidités), il peut être réalisé à la phase initiale de la prise en charge de la
maladie métastatique une stratégie d’escalade thérapeutique consistant à débuter
par une mono-chimiothérapie à base de 5-FU (LV5FU2 intraveineux ou capécitabine
orale) pouvant être associé à un traitement anti-VEGF (bévacizumab) ou anti-EGFR
en l’absence de mutation de RAS (cétuximab ou panitumumab) (54). Une escalade
en bichimiothérapie est alors réalisée en cas de progression par l’adjonction
d’oxaliplatine (FOLFOX) ou irinotécan (FOLFIRI).
En cas de métastases menaçantes, de progression tumorale rapide ou d’un
état général altéré du fait de l’importance du cancer, il peut se discuter un traitement
par tri-chimiothérapie de type FOLFOXIRI ou FOLFIRINOX associant 5-FU,
oxaliplatine et irinotécan (55).
Mais dans la majorité des cas, la prise en charge du CCRM non résécable
repose aujourd’hui classiquement en première ligne de traitement sur l’administration
d’une bi-chimiothérapie à base de 5-fluorouracile (5-FU) intraveineux ou oral
(capécitabine) associé soit à de l’oxaliplatine (protocoles FOLFOX et XELOX), soit à
de l’irinotécan (protocole FOLFIRI) (56). Ces deux types de protocoles sont
généralement intervertis entre eux en deuxième ligne de traitement lorsqu’une
progression tumorale est constatée (57)(58). Ainsi, un patient progressant sous
11
FOLFOX / XELOX en 1ère ligne, se voit généralement administrer du FOLFIRI en
2ème ligne et inversement.
En cas d’intolérance, notamment en cas de spasme coronarien, le 5-FU peut
être remplacé par une autre chimiothérapie anti-métabolite, le raltitrexed. Ce dernier
peut également être associé à l’oxaliplatine ou à l’irinotécan respectivement selon les
protocoles TOMOX et TOMIRI (59)(60).
L’adjonction à la bi-chimiothérapie de 1ère ligne d’un traitement ciblé de type
anti-VEGF (anti-angiogénique) apporte un bénéfice en termes de survie sans
progression et de survie globale dans les études réalisées (31)(34)(35). Ainsi,
l’adjonction du bévacizumab (anticorps monoclonal ciblant la partie externe du
VEGFR) à la bi-chimiothérapie de 1ère ligne, apporte un gain en survie globale de
l’ordre de 5 mois ce qui a motivé sa commercialisation dans cette indication. Dans ce
cas, il peut alors être poursuivi avec la bi-chimiothérapie de 2ème ligne lorsqu’une
progression tumorale est constatée (61). Si la maladie tumorale est bien contrôlée
après un nombre suffisant de cycles de traitement ou si le patient présente des effets
secondaires invalidants, une désescalade thérapeutique en mono-chimiothérapie de
maintenance (LV5FU2 ou capécitabine) peut être réalisée avec poursuite du
bévacizumab associé. En cas de progression tumorale, une simple ré-escalade est
alors effectuée en réintroduisant la molécule stoppée (oxaliplatine ou irinotécan)
sans que l’on ne change formellement de ligne de chimiothérapie. Le bévacizumab
n’est pas recommandé en usage seul. Sa tolérance est généralement bonne,
marquée principalement par une asthénie et des arthralgies modérées, des troubles
de cicatrisation, une hypertension artérielle pouvant être contrôlée par des antihypertenseurs, une protéinurie, quelques cas de complications hémorragiques ou
thrombo-emboliques et de rares perforations digestives.
En cas de chimiothérapie de 1ère ligne par FOLFOX +/- bévacizumab, un autre
anti-EGFR, l’aflibercept, a montré un intérêt en association au FOLFIRI en 2ème ligne
par rapport à un placébo, mais il n’a pas été comparé à la poursuite du bévacizumab
dans cette situation (62).
En l’absence de mutation de RAS au sein de la tumeur, l’usage d’un
traitement ciblé anti-EGFR (anticorps ciblant la partie externe de l’EGFR : cétuximab
ou panitumumab) apporte également un bénéfice en termes de survie globale et de
survie sans progression. Il a été ainsi montré qu’un traitement par cétuximab seul ou
en association avec de l’irinotécan, ou un traitement par panitumumab seul, apporte
un bénéfice en deuxième ou troisième ligne de traitement dans le CCRM RAS
sauvage (5)(63)(64)(65)(66)(67). Ces traitements sont donc recommandés dans
cette indication. Leur tolérance est généralement moins bonne que pour le
bévacizumab car ils sont à l’origine de réactions cutanées (rash acnéiforme, prurit…)
dans 80% des cas, d’hypomagnésémies et de réactions anaphylactiques /
anaphylactoïdes à la perfusion.
En cas de progression après traitement par 5-FU / raltitrexed, oxaliplatine,
irinotécan, cétuximab / panitumumab en cas de statut RAS sauvage, une dernière
ligne de traitement par régorafénib, un inhibiteur multikinase, a montré une efficacité
en survie globale (68). Après échec de ce traitement, les seules options
thérapeutiques sont à l’heure actuelle l’inclusion dans un essai thérapeutique ou les
soins palliatifs stricts.
12
2. Les traitements anti-EGFR en première ligne dans le cancer colorectal
métastatique
L’efficacité des traitements anti-EGFR (cétuximab et panitumumab) ayant été
démontrée en 2ème ou 3ème ligne de chimiothérapie dans le cancer colorectal
métastatique, la question suivante s’est donc posée : à l’instar du bévacizumab, fautil utiliser un traitement anti-EGFR plutôt en première ligne de traitement en
association avec la chimiothérapie ? Plusieurs études randomisées de 1ère ligne de
traitement ont évalué cette question (Tableaux 1A et 1B). Elles ont été réalisées chez
des patients atteints de tumeurs KRAS exon 2 sauvages car la résistance aux
traitement anti-EGFR de l’ensemble des tumeurs RAS mutées est de découverte
récente.
2.1
Etude CRYSTAL
L’étude CRYSTAL de phase III, publiée en avril 2009 par Van Cutsem et al., a
ainsi comparé deux bras de patients atteints de CCRM KRAS exon 2 sauvages non
résécables recevant un traitement par FOLFIRI seul (n = 350) versus FOLFIRI cétuximab (n = 316) (39). Cette étude était positive en survie globale en faveur du
bras comportant le cétuximab (23,5 versus 20 mois ; HR = 0 ,796 ; p =
0,0093)(Figure 2). Mais la validité de ce résultat est faible car le critère de jugement
principal de l’étude n’était pas la survie globale mais la survie sans progression et il
s’agit là d’une analyse de sous-groupe puisque l’étude n’avait pas été conçue
initialement en fonction du statut KRAS des tumeurs et avait donc inclus
indistinctement des CCRM KRAS sauvages et KRAS mutés. Néanmoins, l’analyse
s’est avérée également positive en faveur du bras comportant le cétuximab pour la
survie sans progression et le taux de réponse objective. Par ailleurs, dans le bras
FOLFIRI seul, seulement 30,9% des patients recevaient un traitement anti-EGFR,
conformément aux recommandations, lors des lignes ultérieures, ce qui laisse
penser que la survie globale dans le bras FOLFIRI seul est peut-être sous-évaluée
par rapport à la réalité de ce qu’elle est dans nos pratiques. En outre, le taux de
résection secondaire R0 des métastases hépatiques n’explique pas ce résultat car il
apparaît également très faible (5,1% dans le bras avec cétuximab contre 2% dans
l’autre bras). L’étude a été conduite en majorité dans une population d’Europe de
l’Est (49%) où l’on sait que les traitements anti-EGFR ne sont pas toujours
remboursés ce qui pourrait expliquer ce taux faible de recours aux anti-EGFR lors
des lignes ultérieures.
Figure 2 : Etude CRYSTAL, survie globale (Van Cutsem et al., 2009)
13
2.2
Etude OPUS
L’étude OPUS de phase II, publiée en février 2009 par Bokemeyer et al., a
comparé deux bras de patients atteints de CCRM KRAS exon 2 sauvages non
résécables recevant un traitement par FOLFOX seul (n = 97) versus FOLFOX cétuximab (n = 82) (69)(70). Cette étude était négative en survie globale bien que
positive en taux de réponse objective (critère de jugement principal), et en survie
sans progression (critère de jugement secondaire) (Figure 3). La validité de ce
résultat est également faible car il s’agit aussi là d’une analyse de sous-groupe
puisque l’étude n’avait pas été conçue initialement en fonction du statut KRAS des
tumeurs et avait donc inclus indistinctement des CCRM KRAS sauvages et KRAS
mutés. Par ailleurs, dans le bras FOLFOX seul, seulement 23% des patients
recevaient un traitement anti-EGFR, conformément aux recommandations, lors des
lignes ultérieures. L’étude a été à nouveau conduite en majorité dans une population
d’Europe de l’Est (62%).
Figure 3 : Etude OPUS, survie globale (Bokemeyer et al., 2009)
2.3
Etude PRIME
L’étude PRIME de phase III, publiée en novembre 2010 par Douillard et al., a
comparé deux bras de patients atteints de CCRM KRAS exon 2 sauvages recevant
un traitement par FOLFOX seul (n = 331) versus FOLFOX - panitumumab (n = 325)
(6). Cette étude était négative en survie globale et en taux de réponse objective,
même si elle était positive en survie sans progression qui constituait le critère de
jugement principal (Figure 4). Il ne s’agissait pas d’une analyse de sous-groupe
puisqu’un amendement avait été réalisé en cours d’étude pour n’inclure que les
patients atteints de CCRM KRAS exon 2 sauvages. Dans le bras FOLFOX seul,
seulement 18% des patients recevaient un traitement anti-EGFR en 2ème ligne, ce qui
est faible et tend ainsi à défavoriser le bras sans panitumumab bien que les
traitements administrés à partir de la 3ème ligne ne soient pas précisés par les
auteurs. L’étude a été conduite principalement dans une population d’Europe de
l’Ouest, du Canada et d’Australie (58%).
14
0
2
4
6
8
10
12
14
16
18
20
22
22
16
10
10
1
2
0
1
0
2
4
6
178
197
152
168
118
132
Time (months)
No. of patients at risk
Panit. + FOLFOX4
325
FOLFOX4 alone
331
C
294
296
254
242
204
185
156
127
111
82
73
41
39
28
Events
n (%)
Probability of Overall
Survival
1.0
Panitumumab
+ FOLFOX
FOLFOX
0.8
No. of patients at risk
Panit.+FOLFOX4
221
FOLFOX4 alone
219
Median months
(95% CI)
165 (51)
23.9 (20.3 to 28.3)
190 (57)
19.7 (17.6 to 22.6)
D
HR = 0.83 (95% CI, 0.67 to 1.02)
P = .072
0.6
0.4
0.2
0
4
8
12
16
20
24
28
32
1.0
Probability of Overall
Survival
36
0.8
0.6
0.4
0.2
0
4
8
Time (months)
No. of patients at risk
Panit. + FOLFOX
325 315 310 288 266 242 227 217 207 189 164 135 104 74 55 29
FOLFOX alone
331 320 301 281 265 242 223 207 188 170 145 116 77 56 36 21
9
9
2
3
0
0
No. of patients at risk
Panit. + FOLFOX
221 211 199 183 168 14
FOLFOX alone
219 212 206 199 181 16
Fig 2. Progression-free
in patients
(A) wild-type
(WT) KRAS
mutant (MT) KRAS. Overall survival i
Figure
4 : Etude survival
PRIME,
surviewith
globale
(Douillard
et and
al.,(B)
2010)
FOLFOX4, infusional fluorouracil, leucovorin, and oxaliplatin; Panit., panitumumab; HR, hazard ratio.
2.4
Etude22.4
COIN
months) for patients with MT KRAS status who received
OS. In the WT KRAS
panitumumab-FOLFOX4 and 12 months (range, 0.2 to 23.1 months)
deaths had occurred—165
L’étude
publiée en juin 2011 par Maughanarm
et and
al., 190
a (57%) in the
for COIN
patients de
whophase
receivedIII,
FOLFOX4.
comparé deux bras de patients atteints de CCRM KRAS exon 2 sauvages
non
months (95% CI, 20.3 to 28
Efficacy
résécables recevant un traitement par FOLFOX / XELOX seul (n = 367)
and versus
19.7 months (95% CI, 1
PFS. In the WT KRAS stratum, there were 414 progression or
FOLFOX / XELOX - cétuximab (n = 362) (41). Cette étude était négativeresulting
en survie
in an absolute diff
death events—199 (61%) in the panitumumab-FOLFOX4 arm and
globale qui constituait le critère de jugement principal, ainsi qu’en survie
sans
(95%
CI,
0.67 to 1.02; P
215 (65%) in the FOLFOX4 arm. A statistically significant improveprogression,ment
bien in
que
positive
en
taux
de
réponse
objective
(Figure
5).
La
validité
de
FOLFOX4
arm
(Fig 2C). Fro
PFS was observed with panitumumab-FOLFOX4 compared
ce résultat est
renforcée
l’effectif
detopatients
et par le fait
nesubsets was less
HRqu’il
for all
with
FOLFOX4par
(HR
! 0.80; important
95% CI, 0.66
0.97; P !inclus
.02, stratified
s’agisse cette
fois
pas
d’une
analyse
de
sous-groupe
puisque
seuls
des
patients
subsets
with
no liver metasta
log-rank test; Fig 2A). Median PFS was 9.6 months (95% CI, 9.2 to
atteints de CCRM
KRASfor
exon
2 sauvages avaientand
été
outre,
bras
to study
11.1 months)
panitumumab-FOLFOX4
8.0inclus.
monthsEn
(95%
CI, dans leSubsequent
FOLFOX / XELOX
seul,
seulement
4,4%
des
patients
recevaient
un
traitement
antipanitumumab-FOLFOX4
a
7.5 to 9.3 months) for FOLFOX4. From the planned subgroup analyème
arm
received
anti-EGFR
m
EGFR en 2 ses for
ligne,
quiWT
estKRAS
très stratum,
faible etthetend
ainsi
à défavoriser
PFS ce
in the
HR for
all subsets
was less le bras sans
therapy
from random assignm
cétuximab, bien
que
les
auteurs
ne
précisent
pas
les
traitements
administrés
à partir
than 1 (panitumumab-FOLFOX4 v FOLFOX4), with the exception
of
FOLFOX4
de la 3ème ligne.
L’étude
a
été
conduite
dans
une
population
du
Royaume–Uni
etarm and 11 mo
patients ! 65 years old, women, and patients with ECOG PS of 2
d’Irlande où (Fig
l’on3A).
sait que les traitements anti-EGFR ne sont généralementchemotherapy
pas non (including o
midine)
was received by 62
plus remboursésIncethequi
pourrait
expliquer
ce
taux
faible
de
recours
aux
anti-EGFR
MT KRAS stratum, there were 324 progression or death
53% of patients in the pani
lors des lignes
ultérieures.
events—167
(76%) in the panitumumab-FOLFOX4 arm and 157
bevacizumab in 12% and 15
(72%) in the FOLFOX4 arm. PFS was inferior in patients receiving
In the MT KRAS stratu
panitumumab-FOLFOX4 versus FOLFOX4 (HR ! 1.29; 95% CI,
the panitumumab-FOLFOX
1.04 to 1.62; P ! .02, stratified log-rank test; Fig 2B). Median PFS was
arm. Median OS was 15.5 m
7.3 months (95% CI, 6.3 to 8.0 months) for panitumumab-FOLFOX4
panitumumab-FOLFOX4 a
and 8.8 months (95% CI, 7.7 to 9.4 months) for FOLFOX4.
4700
© 2010 by American Society of Clinical Oncology
Information downloaded from jco.ascopubs.org and provided by at CNRS on April 11, 2
Copyright © 2010 American Society of Clinical Oncology. All rights re
Figure 5 : Etude OPUS, survie globale (Maughan et al., 2011)
15
CRYSTAL
OPUS
PRIME
COIN
Van$Cutsem$et$al.,$NEJM,$avril$
Bokemeyer$et$al.,$JCO,$février$
Douillard$et$al.,$JCO,$novembre$
Maughan$et$al.,$Lancet,$juin$2011
2009
2009
2010
prospective,$ouverte,$
prospective,$ouverte,$
prospective,$ouverte,$
prospective,$ouverte,$
Type;d'étude
multicentrique,$randomisée,$phase$ multicentrique,$randomisée,$phase$ multicentrique,$randomisée,$phase$ multicentrique,$randomisée,$
3
2
3
phase$3
Europe$de$l'Est$(49%),$Europe$de$ Europe$de$l'Est$(62%),$Europe$de$ Europe$de$l'Ouest,$Canada,$
Population
RoyaumeUUni$et$Irlande
l'Ouest$(43%)
l'Ouest$(38%)
Australie…
KRAS$exon$2$sauvage$(analyse$de$ KRAS$exon$2$sauvage$(analyse$de$ KRAS$exon$2$sauvage$
KRAS$exon$2$sauvage$
Population;RAS
sousUgroupe)
sousUgroupe)
(amendement)
(amendement)
Période;d'inclusion Juillet$2004$U$Novembre$2005
Juillet$2005$U$Mars$2006
Août$2006$U$Février$2008
Mars$2005$U$Mai$2008
>$18$ans
>$18$ans
>$18$ans
>$18$ans
CCR$stade$IV$non$résécable
CCR$stade$IV$non$résécable
CCR$stade$IV
CCR$stade$IV$non$résécable
OMS$0U2
OMS$0U2
OMS$0U2
OMS$0U2
Absence$de$dysfonction$
hématologique,$hépatique$et$
Espérance$de$vie$>$3$mois
Espérance$de$vie$>$3$mois
Absence$de$dysfontion$d'organe
rénale
Absence$de$chirurgie$ou$
Absence$de$dysfonction$
Absence$de$dysfonction$
Critères;d'inclusion
Au$moins$1$lésion$mesurable$selon$
radiothérapie$dans$le$mois$
hématologique,$hépatique$et$
hématologique,$hépatique$et$
les$critères$RECIST
précédent
rénale
rénale
Absence$d'antécédent$de$
Au$moins$1$lésion$mesurable$selon$ Absence$de$chirurgie$dans$les$4$
chimiothérapie$en$contexte$
les$critères$OMS
semaines$avant$l'inclusion
métastatique
Au$moins$1$lésion$mesurable$selon$
les$critères$RECIST
Antécédent$de$traitement$par$antiU Antécédent$de$traitement$par$antiU
Métastases$cérébrales
EGFR$ou$irinotécan
EGFR$ou$oxaliplatine
Chimiothérapie$préalable$en$
Chimiothérapie$préalable$en$
dehors$d'une$chimiothérapie$
Antécédent$de$traitement$par$antiU
dehors$d'une$chimiothérapie$
adjuvante$achevée$au$moins$6$
EGFR$ou$oxaliplatine
adjuvante
mois$avant$l'inclusion
Chimiothérapie$préalable$en$
dehors$d'une$chimiothérapie$
Principaux;critères;
adjuvante$sans$oxaliplatine$
d'exclusion
achevée$au$moins$6$mois$avant$
l'inclusion
Comorbidités$:$cardiopathie,$
pneumopathie$interstitielle,$déficit$
en$DPD,$seconde$néoplasie,$
neuropathie$périphérique,$
infection,$allergie$aux$sels$de$
platine…
Bras$A$:$FOLFIRIUCétuximab$
Bras$A$:$FOLFOXUPanitumumab$
Bras$A$:$FOLFOX/XELOXUCétuximab$
Bras$A$:$FOLFOXUCétuximab$(n=82)
(n=316)
(n=325)
(n=362)
Bras;comparés
Bras$B$:$FOLFIRI$(n=350)
Bras$B$:$FOLFOX$(n=97)
Bras$B$:$FOLFOX$(n=331)
Bras$B$:$FOLFOX/XELOX$(n=367)
Publication
Critère;de;jugement;
SSP
principal
Résultats
TRO
SSP
SG
SG$:$Bras$A$>$Bras$B$(23,5$vs$20$
mois$;$HR=0,796$;$p=0,0093)
SG$:$NS$(22,8$vs$18,5$mois$;$
HR=0,855$;$p=0,39)
SG$:$NS$(23,9$vs$19,7$mois$;$HR$
0,83$;$IC95$0,67U1,02$;$p=0,072)
SG$:$NS$(17,9$vs$17$mois$;$HR=1,04$
;$IC95$0,87U1,23$;$p=0,67)
SSP$:$Bras$A$>$Bras$B$(9,9$vs$8,4$
mois$;$HR=0,696$;$p=0,012)
SSP$:$Bras$A$>$Bras$B$(8,3$vs$7,2$
mois$;$HR=0,567$;$p=0,0064)
SSP$:$Bras$A$>$Bras$B$(9,6$vs$8$mois$ SSP$:$NS$(8,6$vs$8,6$mois$;$HR=0,96$
;$HR$0,80$;$IC95$0,66U0,97$;$p=0,02) ;$IC95$0,82U1,12$;$p=0,60)
TRO$:$Bras$A$>$Bras$B$(57,3$vs$
39,7%$;$OR=2,069$;$p<0,001)
Taux$de$résection$secondaire$R0$:$
5,1$vs$2%
TRO$:$Bras$A$>$Bras$B$(57$vs$34%$;$
OR=2,551$;$p=0,0027)
Taux$de$résection$secondaire$R0$:$
12$vs$3%
TRO$:$NS$(55$vs$48%$;$OR=1,35$;$
TRO$:$64$vs$57%$(p=0,049)
p=0,068)
Taux$de$résection$secondaire$R0$:$ Taux$de$résection$secondaire$R0$:$
10,5$vs$9,4%
15$vs$13%
Taux;de;recours;à;
un;antiGEGFR;dans;le;
30,9%$(lors$des$lignes$ultérieures) 23%$(lors$des$lignes$ultérieures)
bras;sans;antiGEGFR;
en;1ère;ligne;
18%$(en$2ème$ligne)
4,4%$(en$2ème$ligne)
Tableau 1A : Comparaison des études évaluant l’intérêt d’un traitement anti-EGFR en 1ère
ligne dans le cancer colorectal de stade IV. Etudes CRYSTAL, OPUS, PRIME et COIN.
16
NORDIC'VII
FIRE+3
PEAK
CALGB/SWOG
Heinemann&et&al.,&Lancet&
Schwartzberg&et&al.,&JCO,&juillet&
Publication
Tveit&et&al.,&JCO,&mai&2012
Lenz&et&al.,&non&publiée
Oncology,&septembre&2014
2014
prospective,&ouverte,&
prospective,&ouverte,&
prospective,&ouverte,&
prospective,&ouverte,&
Type'd'étude
multicentrique,&randomisée,&
multicentrique,&randomisée,&
multicentrique,&randomisée,&
multicentrique,&randomisée,&
phase&3
phase&3
phase&2
phase&3
Population
Europe&du&Nord
Allemagne&et&Autriche
USA,&Europe&de&l'Ouest
USA
KRAS&exon&2&sauvage&(analyse&de& KRAS&exon&2&sauvage&
KRAS&exon&2&sauvage&
Population'RAS
KRAS&exon&2&sauvage
sousOgroupe)
(amendement)
(amendement)
Période'd'inclusion Mai&2005&O&Octobre&2007
Janvier&2007&O&Septembre&2012
Avril&2009&O&Décembre&2011
Novembre&2005&O&Mars&2012
18O75&ans
18O75&ans
>&18&ans
>&18&ans
CCR&stade&IV&non&résécable
CCR&stade&IV
CCR&stade&IV&non&résécable
CCR&stade&IV
OMS&0O2
OMS&0O2
OMS&0O1
Absence&de&dysfonction&
Au&moins&1&lésion&mesurable&
hématologique,&hépatique&et&
Espérance&de&vie&>&3&mois
selon&les&critères&RECIST
rénale
Critères'd'inclusion
Absence&de&dysfonction&
Au&moins&1&lésion&mesurable&selon&
hématologique,&hépatique&et&
les&critères&RECIST
rénale
Absence&de&chirurgie&dans&les&4&
semaines&avant&l'inclusion
Au&moins&1&lésion&mesurable&selon&
les&critères&RECIST
Métastases&cérébrales,&carcinose&
Métastases&cérébrales
péritonéale&symptomatique
Antécédent&de&traitement&par&
Antécédent&de&traitement&par&antiO Antécédent&de&traitement&par&antiO
oxaliplatine
EGFR&ou&bévacizumab
EGFR&ou&bévacizumab
Chimiothérapie&préalable&en&
Chimiothérapie&préalable&en&
dehors&d'une&chimiothérapie&
dehors&d'une&chimiothérapie&
Chimiothérapie&préalable&en&
adjuvante&sans&oxaliplatine&
adjuvante&achevée&au&moins&6&
contexte&métastatique
achevée&au&moins&6&mois&avant&
mois&avant&l'inclusion
l'inclusion
Principaux'critères'
Comorbidités&:&cardiopathie,&MICI,&
d'exclusion
plaie&non&cicatrisée,&ulcère,&
fracture&osseuse,&HTA&non&
contrôlée,&syndrome&néphrotique,&
terrain&à&risque&thrombotique&ou&
hémorragique,&anticoagulation&à&
dose&curative,&déficit&en&DPD,&
maladie&de&Gilbert,&seconde&
néoplasie&dans&les&5&ans&
précédents.
Bras&A&:&FOLFIRIOCétuximab&
Bras&A&:&mFOLFOX6OPanitumumab& Bras&A&:&FOLFOX/FOLFIRIO
Bras&A&:&FLOXOCétuximab&(n=66)
(n=297)
(n=142)
Cétuximab&(n=578)
Bras'comparés
Bras&B&:&FLOX&intermittent&O&
Bras&B&:&FOLFIRIOBévacizumab&
Bras&B&:&mFOLFOX6OBévacizumab& Bras&B&:&FOLFOX/FOLFIRIO
Cétuximab&(n=67)
(n=295)
(n=143)
Bévacizumab&(n=559)
Bras&C&:&FLOX&(n=64)
Critère'de'jugement'
SSP
principal
TRO
SSP
SG
SG&:&Bras&A&>&Bras&B&(28,7&vs&25&
SG&:&Bras&A&>&Bras&B&(34,2&vs&24,3&
SG&:NS&entre&les&bras&A&et&C&
SG&:&NS&(29,93&vs&29,04&mois&;&
mois&;&HR=0,77&;&IC95&0,62O0,96&;& mois&;&HR=0,62&;&IC95&0,44O0,89&;&
(HR=1,14&;&IC95&0,80O1,61&;&p=0,48)
HR=0,92&;&IC95&0,78O1,09&;&p=0,34)
p=0,017)
p=0,009)
Résultats
SSP&:&NS&entre&les&bras&A&et&C&
SSP&:&NS&(HR=1,06&;&IC95&0,88O1,26& SSP&:&NS&(10,9&vs&10,1&mois&;&HR=& SSP&:&NS&(10,45&vs&10,84&mois&;&
0,87&;&IC95&0,65O1,17&;&p=0,︎353)
(HR=1,07&;&IC95&0,79O1,45&;&p=0,66) ;&p=0,55)
HR=1,04&;&IC95&0,91O1,17&;&p=0,55)
TRO&:&NS&(OR=1,18&;&IC95&0,85O
TRO&:&57,8&vs&53,5%
&
1,64&;&p=0,18)
Taux&de&résection&secondaire&R0&:& Taux&de&résection&secondaire&R0&:& Taux&de&résection&secondaire&R0&:&
11%&(A)&vs&8%&(B)
12%&vs&14%
10&vs&8%
TRO&:&NS
Taux'de'recours'à'un'
anti+EGFR'dans'le'
48%&(27%&en&2ème&ligne,&21%&en&
27,2%&(lors&des&lignes&ultérieures)
38%&(lors&des&lignes&ultérieures)
3ème&ligne)
bras'sans'anti+EGFR'
en'1ère'ligne'
Tableau 1B : Comparaison des études évaluant l’intérêt d’un traitement anti-EGFR en 1ère
ligne dans le cancer colorectal de stade IV (suite). Etudes NORDIC VII, FIRE-3, PEAK et
CALGB/SWOG
17
2.5
Etude NORDIC VII
L’étude NORDIC VII de phase III, publiée en mai 2012 par Tveit et al., a
comparé trois bras de patients atteints de CCRM KRAS exon 2 sauvages non
résécables recevant un traitement soit par FLOX seul (n = 97), soit par FLOX cétuximab (n = 97), soit par FLOX intermittent – cétuximab (n = 109) (71). Cette
étude était négative en survie globale, en taux de réponse objective et en survie sans
progression, cette dernière constituant le critère de jugement principal (Figure 6). La
validité de ce résultat est faible car il s’agit encore d’une analyse de sous-groupe
puisque l’étude n’avait pas été conçue initialement en fonction du statut KRAS des
tumeurs. En outre, même si les deux molécules de chimiothérapie sont les mêmes
(5-FU et oxaliplatine), le protocole FLOX présente des différences avec le protocole
FOLFOX que nous utilisons en France en termes de posologies et de modalités
d’administration. Par ailleurs, dans le bras FLOX seul, seulement 27,2% des patients
recevaient un traitement anti-EGFR, conformément aux recommandations, lors des
lignes ultérieures. L’étude a été cette fois conduite dans une population d’Europe du
Nord.
Figure 6 : Etude NORDIC VII, survie globale (Tveit et al., 2012)
2.6
Méta-analyse de Zhou et al.
Une méta-analyse, publiée en novembre 2012 par Zhou et al., a été réalisée à
partir des précédentes études comportant une bi-chimiothérapie à base d’oxaliplatine
associée ou non à un anti-EGFR (OPUS, COIN, NORDIC VII, PRIME) (72). L’étude
CRYSTAL n’en fait pas partie car elle comportait une bi-chimiothérapie à base
d’irinotécan. Cette méta-analyse est négative en survie globale (HR = 0,97 ; IC95%
0,87-1,09) ne montrant pas de bénéfice à l’adjonction d’un anti-EGFR en 1ère ligne
(Figure 7).
18
Figure 7 : Méta-analyse des études COIN, NORDIC VII, OPUS et PRIME,
survie globale (Zhou et al., 2012)
2.7
Etude FIRE-3
L’un des manquements importants des études présentées précédemment est
qu’elles comparent un bras chimiothérapie + anti-EGFR à un bras chimiothérapie
seule, alors que le traitement de référence n’est pas chimiothérapie seule mais
chimiothérapie + bévacizumab. L’étude FIRE-3 de phase III, publiée en septembre
2014 par Heinemann et al., a donc comparé deux bras de patients atteints de CCRM
KRAS exon 2 sauvages recevant un traitement par FOLFIRI - bévacizumab (n = 295)
versus FOLFIRI - cétuximab (n = 297) (73). Cette étude était positive en survie
globale en faveur du bras comportant le cétuximab (28,7 versus 25 mois ; HR =
0,77 ; IC95% 0,62-0,96). Mais elle était négative en taux de réponse objective, ce qui
constituait le critère de jugement principal, et en survie sans progression (Figure 8). Il
ne s’agissait pas d’une analyse de sous-groupe puisqu’un amendement en cours
d’étude avait réduit les inclusions aux seuls patients atteints de CCRM KRAS exon 2
sauvages. Les conclusions de cette étude concernant la survie globale sont
antagonistes avec les autres données connues et fiables de la littérature puisque si
l’on se fie à ces résultats, et en regard des précédentes études sus-citées, cela
suggérerait que l’adjonction d’un anti-EGFR est plus convaincante en comparaison à
une chimiothérapie + bévacizumab qu’en comparaison à une chimiothérapie seule.
Or l’on sait que l’adjonction du bévacizumab à la chimiothérapie apporte un bénéfice
en survie globale. On constate par ailleurs une séparation tardive des courbes de
survie globale ce qui suggère un rôle important des lignes de traitement ultérieures.
Or, la survie du bras FOLFIRI seul peut être altérée par le fait que seuls 48% des
patients inclus dans ce bras reçoivent un traitement anti-EGFR lors des lignes
ultérieures (27% en 2ème ligne et 21% en 3ème ligne). L’étude a été conduite
principalement dans une population d’Allemagne et d’Autriche.
19
mFOLFOX6 Plus Panitumumab or Bevacizumab in WT KRAS mCRC
Events
n/N (%)
Panitumumab-mFOLFOX6 90/142 (63)
Bevacizumab-mFOLFOX6 94/143 (66)
Event-Free Survival (%)
100
Median months
(95% CI)
10.9 (9.4 to 13.0)
10.1 (9.0 to 12.6)
B
100
Event-Free Survival (%)
A
Hazard ratio = 0.87 (95% CI, 0.65 to 1.17)
P = .353
80
60
40
20
0
6
12
18
24
Panitumuma
Bevacizuma
Haz
P=
80
60
40
20
30
0
6
12
Figure 8 : Etude FIRE-3, survie
globale (Heinemann et al., 2014)
Time (months)
2.8
No. at risk
PanitumumabmFOLFOX6
BevacizumabmFOLFOX6
Etude PEAK
142
94
40
13
3
2
143
87
38
11
1
0
Time
No. at risk
PanitumumabmFOLFOX6
BevacizumabmFOLFOX6
88
62
30
82
54
24
Fig 2. Progression-free survival in (A) wild-type (WT) KRAS exon 2 intent-to-treat group and (B) extended WT RAS subgroup. Da
fluorouracil,
leucovorin,
and oxaliplatin.
L’étudemodified
PEAK
de phase
II, publiée
en juillet 2014 par Schwartzberg et al., a
comparé quant à elle deux bras de patients atteints de CCRM KRAS exon 2
sauvages non résécables recevant un traitement par FOLFOX – bévacizumab
= Of 221 with WT
Fig A1, online (n
only).
RESULTS
143) versus FOLFOX - panitumumab (n = 142) (74). Cette étude était
positive
enRAS (WT in exon
identified
with WT
andversus
51 (23%)24,3
with WT KRAS exon
survie globale en faveur du bras comportant le panitumumab (34,2
Patient Population
(mutant
in KRAS exon 3 or 4 or N
mois ; HR = 0,62
; IC95%
0,65-1,17
; p =2011,
0,009),
ainsiwith
qu’en
de réponse
Between
April 2009
and December
285 patients
WT taux
treatment arms were generally simila
objective, mais
négative
en survie
sans from
progression,
dernièreand
constituant
le
KRAS
exon 2 mCRC
were enrolled
60 sites, withcette
142 patients
baseline characteristics
in both th
randomlyprincipal
assigned to(Figure
panitumumab
mFOLFOX6pas
and d’une
143 to analyse
critère de jugement
9). Il plus
ne s’agissait
de
sousRAS groups (Table 2).
bevacizumab
plus mFOLFOX6,
primary analysis
groupe puisque
l’analyse
du statutcomprising
tumoralthe KRAS
était ITT
prévue par l’étude.
set (Fig 1); 278 patients received treatment.
Néanmoins, il aurait
été
plus
significatif
que
l’objectif
principal
soit
la Efficacy
survie
globale.
In the primary analysis of the W
Of 285 patients in the WT KRAS exon 2 ITT group, tumor
Dans le brassamples
FOLFOX
seul,
seulement
desRAS
patients
un traitement
cutoff,
May 30, 2012), PFS was similar
from 250
patients
underwent38%
extended
analysis, recevaient
and 233
anti-EGFR, conformément
auxhad
recommandations,
des
lignes ultérieures.
L’étude
bevacizumab
arms (HR, 0.87; 95% CI
tumor samples (82%)
a KRAS or RAS resultlors
(Table
1; Appendix
a été conduite dans une population d’Europe de l’Ouest et des USA.
Events
n/N (%)
Panitumumab-mFOLFOX6 52/142 (37)
Bevacizumab-mFOLFOX6 78/143 (55)
100
Hazard ratio = 0.62 (95% CI, 0.44 to 0.89)
P = .009
80
Overall Survival (%)
Median months
(95% CI)
34.2 (26.6 to NR)
24.3 (21.0 to 29.2)
60
40
20
0
6
12
18
24
30
36
B
100
Overall Survival (%)
A
42
Panitumuma
Bevacizuma
80
60
40
20
0
6
12
Time (months)
No. at risk
PanitumumabmFOLFOX6
BevacizumabmFOLFOX6
18
Time
142
125
107
75
44
24
9
0
143
125
108
74
43
18
7
1
No. at risk
PanitumumabmFOLFOX6
BevacizumabmFOLFOX6
88
78
69
53
82
75
64
47
Fig 3. Overall survival in (A) wild-type (WT) KRAS exon 2 intent-to-treat group and (B) extended WT RAS subgroup. Data cutoff, Ja
fluorouracil, leucovorin, and oxaliplatin; NR, not reached.
Figure 9 : Etude PEAK, survie globale (Schwartzberg et al., 2014)
www.jco.org
© 2014 by Am
Information downloaded from jco.ascopubs.org and provided by at SCD LILLE II20
SECTEUR SANTE o
Copyright © 2014 American Society
of Clinical Oncology. All rights reserved.
193.51.139.123
2.9
Etude CALGB/SWOG 80405
L’étude CALGB/SWOG 80405, conduite par Lenz et al., a comparé deux bras
de patients atteints de CCRM KRAS exon 2 sauvages recevant un traitement par
FOLFOX / FOLFIRI – bévacizumab (n = 559) versus FOLFOX / FOLFIRI - cétuximab
(n = 578) (Lenz et al., ESMO 2014). Cette étude était négative en survie globale qui
constituait le critère de jugement principal, ainsi qu’en survie sans progression
(Figure 10). Il ne s’agissait pas d’une analyse de sous-groupe puisque l’analyse du
statut tumoral KRAS a été prévue par un amendement de l’étude. Il s’agissait d’une
étude de phase III avec des effectifs de patients importants. L’étude n’étant pas
encore publiée, nous ne savons pas encore quel est le taux de recours à un antiEGFR lors des lignes ultérieures en cas de traitement de première ligne comportant
du bévacizumab. Elle a été conduite dans une population des USA.
Figure 10 : Etude CALGB/SWOG 80405, survie globale
(Lenz et al., ASCO 2014)
3. Rationnel et objectifs de l’étude
3.1
Synthèse et analyse critique des études évaluant l’intérêt des
traitements anti-EGFR en 1ère ligne métastatique dans le CCRM
Certaines études s’avèrent positives au regard de leur critère de jugement
principal, montrant un bénéfice à l’adjonction d’un traitement anti-EGFR (cétuximab
ou panitumumab) à la chimiothérapie de 1ère ligne métastatique : CRYSTAL, OPUS
et PRIME. Mais la plupart sont négatives au regard de ce critère : COIN, NORDIC
VII, FIRE-3, PEAK et CALGB/SWOG 80405. En outre, la méta-analyse de Zhou et
al. est également négative. Concernant la survie globale, seules sont positives en
faveur du bras comportant le traitement anti-EGFR les études CRYSTAL, FIRE-3 et
21
PEAK. Les autres études ne montrent pas de différence significative entre les
différents bras. Les résultats de ces différentes études sont donc très discordants.
Par ailleurs leurs méthodologies sont peu superposables : objectifs principaux
différents, effectifs de patients très variables (de 64 à 578 patients dans un bras),
essais de phase II et de phase III, analyse principale ou de sous-groupe, populations
plus ou moins sélectionnées en fonction des différents critères d’inclusion et
d’exclusion (Tableaux 1A et 1B). Ainsi l’étude FIRE-3 présente des critères
d’inclusion et d’exclusion très stricts et détaillés ce qui rend la population de cette
étude de fait très sélectionnée et moins superposable à la population réelle que nous
rencontrons dans la pratique quotidienne. A l’opposé, la population de l’étude
CALGB/SWOG 80405 n’est pas du tout sélectionnée ce qui tend à la rapprocher de
la population habituelle.
De plus, les populations des différentes études sont hétérogènes de par leur
origine et leur lieu de prise en charge. Il existe donc très certainement des
différences dans les modalités de prises en charge oncologique de ces diverses
populations ainsi qu’un niveau d’accès variable aux traitements anti-EGFR lors des
lignes ultérieures du fait de contraintes économiques ou de remboursement des
médicaments (Europe de l’Est, Royaume-Uni…). Par ailleurs, certaines études
précisent qu’elles n’incluent que des patients atteints de CCRM non résécables
(CRYSTAL, OPUS, COIN, NORDIC VII, PEAK) sans opérer de distinction entre
CCRM « non résécables d’emblée » ou « probablement jamais résécables ».
D’autres ne précisent pas le caractère résécable ou non (PRIME, FIRE-3,
CALGB/SWOG). Cela peut induire des différences non négligeables dans le
pronostic de ces différents groupes de patients.
Une autre source d’hétérogénéité entre les études est liée au protocole de bichimiothérapie employé : tantôt FOLFOX ou FLOX (OPUS, PRIME, COIN, NORDIC
VII, PEAK), tantôt FOLFIRI (CRYSTAL, FIRE-3), tantôt les deux (CALGB/SWOG).
L’anticorps anti-EGFR diffère également : tantôt cétuximab (CRYSTAL, OPUS,
COIN, NORDIC VII, FIRE-3, CALGB/SWOG), tantôt panitumumab (PRIME, PEAK).
Mais surtout, si les études les plus récentes (FIRE-3, PEAK, CALGB/SWOG) utilisent
bien un bras contrôle traité par bi-chimiothérapie + bévacizumab, ce qui constitue le
traitement recommandé dans cette indication, ce n’est pas le cas des premières
études réalisées qui ne comparent l’adjonction d’un anti-EGFR qu’à un bras contrôle
traité par bi-chimiothérapie seule (CRYSTAL, OPUS, PRIME, COIN, NORDIC VII)
dont on sait que cela est délétère par rapport à l’adjonction de bévacizumab.
Le taux de résection secondaire R0 des lésions métastatiques est
globalement similaires dans la plupart des études, autour de 10-15% quel que soit le
bras de traitement. Néanmoins ce taux chute à 2 et 3% dans les bras sans traitement
anti-EGFR des études CRYSTAL et OPUS. Cela apparaît très faible au regard des
habitudes et des chiffres retrouvés dans les autres études et pourrait altérer
significativement la survie des patients inclus dans ces bras de traitement et majorer
artificiellement la survie relative des patients traités par anti-EGFR.
En outre, en l’absence d’usage d’un traitement anti-EGFR en première ligne
de traitement, on constate un taux de cross-over vers un anti-EGFR lors des lignes
ultérieures semblant faible et très variable : de 4,4 à 48% selon les études sus-
22
citées, alors que le bénéfice attendu de ce type de traitement est significatif (Tableau
2). Cela peut donc constituer un facteur altérant la survie globale des patients des
bras contrôles de ces études, et majorer ainsi artificiellement en regard la survie
globale relative des patients traités avec un anti-EGFR. Il peut paraître étonnant que
dans d’autres études de première ligne n’étudiant pas l’intérêt des traitements antiEGFR, le taux de recours à un anti-EGFR lors des lignes ultérieures soit plus
important. Ainsi, dans l’étude MACRO évaluant l’intérêt d’une maintenance ou non
par bévacizumab après première ligne de chimiothérapie associée au bévacizumab,
le taux de recours à un anti-EGFR lors des lignes ultérieures pour les patients
atteints de CCRM KRAS exon 2 sauvages est de 50%.
Etudes
Taux de recours aux anti-EGFR dans le bras contrôle
CRYSTAL
30,9 %
OPUS
23 %
PRIME
18 %
COIN
4,4 %
NORDIC VII
27,2 %
FIRE-3
48 %
PEAK
38 %
CALGB/SWOG 80405
?
Tableau 2 : Taux de recours aux traitements anti-EGFR lors des lignes ultérieures
dans les bras contrôles (sans anti-EGFR en 1ère ligne) des différentes études.
Par ailleurs, utiliser un traitement anti-EGFR en première ligne au lieu du
bévacizumab, conduit à se passer des avantages du bévacizumab. Comme nous
l’avons déjà dit, il présente une bonne efficacité en première ligne de traitement et il
peut être poursuivi en deuxième ligne lors du changement de bi-chimiothérapie. Cela
permet donc de conserver en recours, à progression de la maladie, un traitement de
deuxième ou troisième ligne par anti-EGFR +/- irinotécan. De plus, la tolérance du
bévacizumab est globalement meilleure que celle des traitements anti-EGFR. Il peut
sembler donc licite de le préférer en association avec la bi-chimiothérapie qui
présente elle-même des effets secondaires parfois conséquents. Enfin, des données
précliniques semblent suggérer que le bévacizumab pourrait être plus efficace en
cas de tumeur KRAS sauvage qu’en cas de tumeur KRAS mutée (75). Si cela était
confirmé in vivo, il pourrait donc être dommageable de priver les patients de ce
traitement en le remplaçant par un traitement anti-EGFR en première ligne.
A l’heure actuelle, il n’y a donc pas de donnée solide dans la littérature pour
associer préférentiellement à la bi-chimiothérapie de première ligne du CCRM un
traitement anti-EGFR ou du bévacizumab.
3.2
Objectifs de notre étude
Comme nous l’avons vu, des réserves peuvent être émises quant à la validité
des études évaluant l’intérêt d’un traitement anti-EGFR en première ligne de
23
traitement du CCRM, notamment du fait d’un taux de cross-over vers un anti-EGFR
lors des lignes ultérieures semblant faible dans les bras de traitement ne comportant
pas de traitement anti-EGFR en première ligne. Notre objectif principal est donc de
vérifier par une analyse rétrospective, le taux de recours à un traitement anti-EGFR
au-delà de la première ligne dans des centres français, où le recours à ces
molécules n’est pas limité, chez des patients recevant une première ligne de
chimiothérapie associée ou non au bévacizumab.
Afin d’assurer la validité des résultats de notre étude, nous vérifierons la
comparabilité de notre cohorte de patients avec celles des patients inclus dans les
étude précédemment décrites. Nous analyserons également les habitudes de prise
en charge du CCRM dans les centres où a été conduite notre étude.
Nous réaliserons enfin une analyse de survie globale des patients de
l’ensemble de notre cohorte afin de vérifier qu’elle est superposable à la survie
globale des patients des bras contrôles dans les études sus-citées.
24
PATIENTS ET METHODES
Notre étude est une étude non interventionnelle, rétrospective, bicentrique,
portant sur des patients atteints de cancer colorectal métastatique traités par une
première ligne de chimiothérapie seule ou associée au bévacizumab.
1.
1.1
Formalités administratives, réglementaires et éthiques
Déclaration de l’étude
L’étude a fait l’objet d’une demande d’avis auprès du CCTIRS après rédaction
d’un protocole d’étude par mes soins, en collaboration et avec relecture par le Pr M.
Hebbar. L’avis favorable définitif a été rendu le 18 mai 2015.
Le promoteur déclaré de l’étude est le Centre Hospitalier Régional et
Universitaire de Lille (CHRU de Lille) et le coordonnateur de l’étude le Pr M. Hebbar.
1.2
Information des patients et confidentialité
L’étude a été conduite conformément à la loi n° 2004-801 du 6 août 2004
relative à la protection des personnes physiques à l’égard des traitements de
données à caractère personnel et modifiant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative
à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, et conformément à la loi de Santé
Publique (Lois n° 2004-806 du 9 août 2004 et 2006-450 du 18 avril 2006). S’agissant
d’une étude rétrospective portant sur une pathologie de mauvais pronostic, avec une
majorité de patients décédés au moment de leur inclusion, une demande de
dérogation à l’obligation d’information des malades en vertu de l’article 57 du code
de la loi informatique et liberté a été formulée. Concernant les patients vivants, une
notice d’information individuelle a été rédigée, incluse dans le protocole de l’étude
que nous avons adressé au Comité Consultatif sur le Traitement de l’Information en
matière de Recherche dans le domaine de la Santé (CCTIRS). Aucune information
n’a donc été réalisée pour les patients décédés. Conformément au Code de la Santé
Publique, les intervenants qui ont été appelés à collaborer à l’étude ont été tenus au
secret professionnel en ce qui concerne l’étude, les personnes s’y prêtant et les
résultats obtenus. L’anonymat des patients a été respecté. Les données
indirectement nominatives concernant les patients et les médecins ont été recueillies
en accord avec la Loi Informatique et Libertés du 6 janvier 1978, modifiée par la Loi
n° 2004-801 du 6 août 2004 relative à la protection des personnes physiques à
l’égard des traitements de données à caractère personnel. Seuls le numéro
d’identifiant du centre et les initiales du patient apparaissent dans le fichier de recueil
de données.
2.
Mise en œuvre de l’étude
L’étude a été promue par le CHRU de Lille et coordonnée par le Pr M. Hebbar.
Deux centres y ont participé : le service d’Oncologie Médicale du CHRU de Lille
dirigé par le Pr M. Hebbar et le service d’Oncologie Digestive du Centre Oscar
Lambret (COL) de Lille dirigé par le Pr A. Adenis.
25
Les données ont été recueillies entièrement par mes soins à partir des
dossiers informatisés des patients dans les deux centres et intégrées au sein d’un
tableur Excel® validé par le CCTIRS et sécurisé par un mot de passe. Il s’agissait de
données indirectement nominatives afin de pouvoir en contrôler la qualité
directement dans les dossiers sources en cas d’incohérences ou de données
manquantes.
3.
3.1
Inclusion des patients
Critères d’inclusion
Les critères d’inclusion des patients de notre étude étaient :
- patients de plus de 18 ans
- atteints de cancer colorectal métastatique
- sans mutation de l’exon 2 de KRAS (donc éligible à un traitement anti-EGFR)
- ayant reçu une 1ère ligne de chimiothérapie seule ou associée au bévacizumab
- traités entre 2007 (date à laquelle la recherche du statut KRAS pour les CCRM a
commencé à être réalisée en routine) et 2013.
3.2
Etablissement de la cohorte
L’étude ne portant que chez les patients atteints de cancer colorectal KRAS
exon 2 sauvages, la connaissance de ce statut tumoral était indispensable à leur
inclusion. Notre cohorte de patients a donc été établie à partir de la liste des patients
atteints de tumeur digestive ayant eu une recherche de statut tumoral pour l’exon 2
de KRAS entre 2007 et 2013 inclus, fournie par la plateforme de biologie
moléculaire du CHRU de Lille. Cette dernière effectue les recherches de statut KRAS
de toutes les tumeurs analysées histologiquement (opérées ou biopsiées) au CHRU
de Lille et au COL, ainsi que de la plupart des autres structures hospitalières de la
région Nord – Pas de Calais. La liste obtenue contient donc la grande majorité des
patients atteints de CCRM KRAS exon 2 sauvage suivis au CHRU de Lille et au
COL, quand bien même ils auraient été opérés ou biopsiés initialement dans une
autre structure hospitalière de la région. Seul un nombre négligeable de patients
suivis dans ces deux centres (pris en charge initialement dans d’autres régions…)
est ainsi susceptible de ne pas avoir été intégré dans cette liste.
Les patients de cette liste ne répondant pas aux critères d’inclusion ou n’étant
pas suivis au CHRU de Lille ou au COL sur le plan oncologique ont été exclus de
notre cohorte. L’effectif visé était de 120 patients inclus au minimum afin d’assurer
une comparabilité aux effectifs de patients des autres études publiées sur le sujet.
Cet effectif étant largement atteint par les seuls patients du CHRU de Lille et du COL
présents sur la liste de la plateforme de biologie moléculaire, c’est la raison pour
laquelle nous nous sommes limités à ces deux centres pour réaliser notre analyse.
4.
Recueil de données
Différentes données ont été recueillies pour chaque patient inclus afin de
pouvoir répondre aux objectifs de notre étude et de s’assurer de la comparabilité de
notre cohorte avec celles des études publiées dans la littérature. Il s’agissait :
26
-
De caractéristiques générales des patients : date de naissance (au format
MM/AA), sexe, lieu de prise en charge (CHRU de Lille ou COL).
-
De données concernant la maladie carcinologique : localisation de la tumeur
primitive (côlon ou rectum), date du diagnostic initial de CCR, date de la mise
en route de la chimiothérapie de 1ère ligne métastatique (correspondant
approximativement à la date de diagnostic de CCRM non réséqué d’emblée),
existence d’une prise en charge curative antérieure avec type de prise en
charge, réalisation ou non d’une résection secondaire R0 des localisations
tumorales.
-
De données concernant les diverses lignes de chimiothérapie administrées en
situation métastatique : protocoles de traitement et numéros de ligne,
administration ou non d’un traitement anti-VEGF, administration ou non d’un
traitement anti-EGFR. Il a été considéré comme une ligne de chimiothérapie
un protocole administré au patient selon au minimum deux cycles successifs.
Il été considéré comme une seule et même ligne de chimiothérapie une
incrémentation du traitement de la mono-chimiothérapie par 5-FU/raltitrexed à
la bi-chimiothérapie à base de 5-FU/raltitrexed, de même qu’une
décrémentation de la bi-chimiothérapie à base de 5-FU/raltitrexed à la monochimiothérapie par 5-FU/raltitrexed, une reprise du traitement antérieur après
une pause thérapeutique, ainsi que l’ajout ou le retrait du bévacizumab en
cours de ligne. Le protocole retenu alors dans l’analyse est le protocole
maximal, c’est-à-dire celui de bi-chimiothérapie +/- bévacizumab. Un switch de
la capécitabine au 5-FU intraveineux ou inversement, y compris lorsqu’ils sont
utilisés dans une bi-chimiothérapie, n’a pas non plus été retenu comme un
changement de ligne. Un changement de ligne a en revanche été acté dans
les cas suivants : en cas de changement complet des molécules administrées,
de changement de la chimiothérapie associée au 5-FU/raltitrexed (oxaliplatine
ou irinotécan), de mise en route ou de changement d’un traitement antiEGFR, de l’adjonction d’une chimiothérapie à un traitement anti-EGFR,
d’inclusion dans un essai thérapeutique.
-
De données de suivi : date de décès ou de dernières nouvelles, cause de
décès (les patients perdus de vue alors qu’ils étaient en situation palliative
stricte ont été considérés comme probablement décédés d’une évolutivité
tumorale), date de fin de recueil (01/04/2015) pour les patients encore en vie.
5.
Analyse statistique
Les statistiques descriptives ont été établies à partir des données de notre
cohorte de patients selon des méthodes statistiques classiques : calcul de nombre
de cas, pourcentage, médiane. Le taux de recours aux traitements anti-EGFR au
delà de la première ligne de traitement correspond au pourcentage de patients ayant
reçu un traitement anti-EGFR sur le nombre total de patients inclus.
Plusieurs calculs de survie globale ont été réalisés sous la responsabilité du
Pr M. Hebbar, en considérant pour date de décès soit la date effective de décès pour
les patients dont le décès est confirmé, soit la date des dernières nouvelles pour les
patients perdus de vue, soit la date de fin de recueil des données (01/04/2015) pour
les patients encore en vie à cette date. Il a ainsi été étudié la survie globale des
27
patients à partir du diagnostic de cancer (temps écoulé entre la date de découverte
du cancer et la date du décès), et la survie globale des patients à partir de la mise en
route d’une première ligne de chimiothérapie à visée métastatique (temps écoulé
entre la mise en route de cette chimiothérapie et la date du décès). Ces calculs ont
été effectués selon la méthode non paramétrique de Kaplan-Meier. Pour la
comparaison des survies globales de différents sous-groupes de patients, il a été
utilisé le test du Log-Rank (Mantel-Cox). Les résultats sont exprimés sous forme de
médiane en mois, assortie d’un intervalle de confiance à 95%.
28
RESULTATS
1.
Constitution de la cohorte de patients
Plateforme de biologie moléculaire du CHRU de Lille
Tumeurs digestives de patients du CHRU de Lille ou
du COL ayant fait l’objet d’une analyse du statut
KRAS entre 2007 et 2013
Tumeurs KRAS mutées
Tumeurs KRAS exon 2 sauvages : 329 patients
- CHRU Lille : 229
- COL : 100
Patients inclus : 185
- CHRU Lille : 102
- COL : 83
Patients exclus :
-  Opérés au CHRU de Lille ou au COL mais suivis ailleurs sur le
plan oncologique : 111
-  Non éligibles à une chimiothérapie en contexte métastatique : 5
-  Non évolutifs après séquence initiale à visée curative
comprenant une résection première des lésions : 15
-  Traités par anti-EGFR en 1ère ligne : 8
-  Tumeur NRAS mutée : 1
-  Primitif inconnu ou autre primitif que colorectal : 4
Figure 11 : Schéma de la constitution de la cohorte de patients
Nous avons obtenu auprès de la plateforme de biologie moléculaire du CHRU
de Lille la liste des patients ayant bénéficié sur cette plateforme d’une analyse du
statut tumoral de KRAS exon 2 entre 2007 et 2013. Les patients atteints de tumeurs
KRAS mutées, représentant environ la moitié des cas, ont été d’emblée exclus.
Parmi les 1177 patients restant, présentant une tumeur digestive KRAS exon 2
sauvage, la demande de recherche de statut KRAS tumoral provenait pour 229
d’entre eux du CHRU de Lille et pour 100 d’entre eux du COL, soit 329 patients au
total (Figure 11).
Parmi ces 329 patients, 144 ont été exclus car ne répondant pas aux critères
d’inclusion. 111 d’entre eux avaient été opérés initialement au CHRU de Lille ou au
COL mais avais été suivis dans une autre structure hospitalière sur le plan
oncologique par la suite. 5 patients atteints de cancer métastatique n’avaient pas été
éligibles à une chimiothérapie en raison de leur âge, de comorbidités ou d’un état
général trop altéré. 15 patients n’étaient pas évolutifs après réalisation d’une
séquence de traitements à visée curative, et n’avaient donc jamais reçu de
chimiothérapie en situation métastatique proprement dite (seulement en situation
adjuvante après chirurgie première et complète de la tumeur primitive ou des
29
métastases). 8 patients avaient été traités par anti-EGFR dès la première ligne. 1
patient, dont la recherche de statut KRAS avait été réalisée en 2013, présentait
également une mutation de NRAS le récusant pour tout traitement anti-EGFR
ultérieur étant donné l’évolution des connaissances en 2013. 4 patients étaient
atteints de tumeurs digestives KRAS sauvages autres qu’un adénocarcinome
colorectal (lésions carcinomateuses hépatiques de primitif inconnu, adénocarcinome
gastrique, adénocarcinome de l’ouraque).
Au total, 185 patients ont finalement été inclus dans notre étude, 102
provenant du CHRU de Lille et 83 provenant du COL.
2.
Caractéristiques générales de la population
!!
!!
Age"au"diagnos-c"de"cancer"
!!
18$75!ans!
!!
≥!75!ans!
!!
Age!médian!:!60!ans!
Age"lors"de"la"mise"en"route"de"la"chimiothérapie"en"situa-on"métasta-que"
!!
18$75!ans!
!!
≥!75!ans!
!!
Age!médian!:!60,8!ans!
Sexe"
!!
!!
Hommes!
!!
Femmes!
Localisa-on"du"primi-f"
!!
Côlon!
!!
Rectum!
Traitement"préalable"à"visée"cura-ve"avec"résec-on"première"des"lésions"
!!
Oui!
!!
Non!
Hôpital"de"prise"en"charge"
!!
CHRU!de!Lille!
!!
Centre!Oscar!Lambret!
Evolu-on"
!!
!!
Décès!liés!à!l'évoluOvité!du!cancer!
!!
Décès!probables!sur!évoluOvité!tumorale!mais!paOents!perdus!de!vue!en!fin!de!vie!
!!
Décès!non!liés!directement!au!cancer!
!!
PaOents!en!vie!
n"
!
165!
20!
!
!
160!
25!
!
!
111!
74!
!
122!
63!
!
84!
101!
!
102!
83!
!
91!
44!
8!
42!
%"
!
89,2!
10,8!
!
!
86,5!
13,5!
!
!
60!
40!
!
65,9!
34,1!
!
45,4!
54,6!
!
55,1!
44,9!
!
49,2!
23,8!
4,3!
22,7!
Tableau 3 : Caractéristiques générales de la population étudiée
L’âge médian de notre cohorte de patients au diagnostic initial de cancer
colorectal était de 60 ans (Tableau 3). Il était de 60,8 ans lors de la mise en route de
la 1ère ligne de chimiothérapie en situation métastatique, la légère différence entre les
deux nombres étant due aux patients ayant pu bénéficier initialement d’une prise en
charge chirurgicale curative suivie ou non d’une chimiothérapie adjuvante (et
précédée généralement d’une radio-chimiothérapie concomitante en ce qui concerne
les cancers des 2/3 inférieurs du rectum). En effet, 45,4% des patients de la cohorte
avaient bénéficié initialement de ce type de séquence de traitement à visée curative
sans administration de chimiothérapie de 1ère ligne métastatique. Lors de la mise en
30
route de la chimiothérapie de 1ère ligne métastatique, 86,5% des patients étaient
âgés de 18 à 75 ans, et 13,5% avaient 75 ans ou plus.
Notre population comportait 60% d’hommes et 40% de femmes, soit un léger
sex-ratio masculin. 65,9% des patients souffraient d’un cancer du côlon (caecum,
côlons droit, transverse, gauche et sigmoïde, charnière recto-sigmoïdienne) et 34,1%
d’un cancer du rectum. La prise en charge était réalisée dans 55,1% des cas au
CHRU de Lille et dans 44,9% des cas au COL.
Le 01/04/2015, date de la clôture du recueil de données, 49,2% des patients
étaient décédés de l’évolutivité de leur CCRM, 23,8% étaient probablement décédés
également d’une évolutivité de leur cancer mais avaient été perdus de vue alors que
leur prise en charge était devenue exclusivement palliative, 4,3% étaient décédés
d’une pathologie non directement induite par le cancer colorectal (carcinome
hépatocellulaire, ischémie aiguë de membres, décompensation de BPCO…), et
22,7% des patients (soit 42 patients) étaient encore en vie. Au total, 77,3% des
patients étaient donc décédés : 4,3% de cause non directement liée au cancer
d’intérêt et 73% de cause a priori liée au cancer.
3.
Traitements reçus par les patients inclus
100#
90#
100#
82,7#
80#
%"pa%ents"
70#
60#
48,6#
50#
40#
27,6#
30#
20#
8,6#
10#
0#
1#ligne#
2,2#
1,1#
0,5#
2#lignes# 3#lignes# 4#lignes#
5#lignes# 6#lignes# 7#lignes# 8#lignes#
Figure 12 : Pourcentage de patients inclus recevant les différentes lignes
successives de chimiothérapie métastatique
Si les patients inclus dans notre étude étaient logiquement 100% à recevoir
une chimiothérapie de 1ère ligne métastatique puisqu’il s’agissait d’un critère
d’inclusion, ils étaient 82,7% à bénéficier d’une 2ème ligne et seulement moins de
50% (48,6%) à recevoir une 3ème ligne (Figure 12). 27,6% recevaient encore une
4ème ligne et 8,6% une 5ème. Les rares cas de patients ayant reçu une 6ème, une 7ème,
voire une 8ème ligne de traitement sont anecdotiques et correspondent à des patients
longs survivants ayant été traités à nouveau par des protocoles qui leur avaient déjà
31
été administrés antérieurement ou ayant été inclus dans des essais thérapeutiques
de phase précoce.
1ère%ligne%
2ème%ligne%
2,1"%" 2"%"
1"%"
7"%"
LV5FU2/Capécitabine"+/;"
Bévacizumab"
LV5FU2/Capécitabine"+/="
Bévacizumab"
FOLFOX/XELOX/TOMOX"
+/="Bévacizumab/AxiJnib"
FOLFIRI/XELIRI/TOMIRI"+/="
Bévacizumab/Aflibercept"
Capécitabine"="Cétuximab"
6,5"%"
0,7"%"
31,5"%"
FOLFOX/XELOX/TOMOX"+/;"
Bévacizumab"
20,3"%"
9,8"%"
XELOX"="Cétuximab"
6,5"%"
1,3"%"
FOLFIRI/XELIRI"+/;"
Bévacizumab"
Irinotécan"="Cétuximab"
0,7"%"
Irinotécan"="Panitumumab"
Autres"
60,5"%"
FOLFIRI"="Cétuximab"
50,3"%"
Panitumumab"
Autres"
3ème%ligne%
2,2#%#
4ème%ligne%
1,1#%#
2$%$
Capécitabine#
FOLFOX#+/;#Bévacizumab#
11,1#%#
FOLFIRI#+/;#Bévacizumab#
LV5FU2#;#Cétuximab#
FOLFOX#;#Panitumumab#
Irinotécan#;#Cétuximab#
5,9$%$ 7,8$%$
16,7#%#
5,9$%$
FOLFOX$>$Cétuximab$
3,9$%$
2$%$
5,6#%#
21,6$%$
4,4#%#
3,3#%#
1,1#%#
FOLFIRI#;#Cétuximab#
17,6$%$
2,2#%#
Cétuximab#+/;#AfaKnib#
41,1#%#
FOLFIRI$>$Cétuximab$
Irinotécan$>$Cétuximab$
5,9$%$
11,1#%#
Irinotécan#;#Panitumumab#
Panitumumab#
Capécitabine/Ral9trexed$+/>$
Bévacizumab$
FOLFOX/TOMOX$+/>$
Bévacizumab$
FOLFIRI$+/>$Bévacizumab$
Irinotécan$>$Panitumumab$
Cétuximab$
Panitumumab$
21,6$%$
Régorafénib$
Régorafénib#
2$%$ 3,9$%$
5FU$>$Mitomycine$
Autres$(essais)$
Figure 13 : Protocoles de traitements reçus lors des 1ère, 2ème, 3ème et 4ème lignes
de chimiothérapie métastatiques
En 1ère ligne de traitement, 60,5% des patients, soit une large majorité, avaient
reçu une bi-chimiothérapie à base d’oxaliplatine (FOLFOX, XELOX ou TOMOX)
associée ou non au bévacizumab (Figure 13). 31,5% des patients avaient reçu quant
à eux une bi-chimiothérapie à base d’irinotécan (FOLFIRI, XELIRI ou TOMIRI)
32
associée ou non au bévacizumab. Enfin, quelques patients âgés ou trop altérés par
leurs comorbidités s’étaient vus administrer simplement une monothérapie à base de
5-FU (LV5FU2 ou capécitabine) associée ou non au bévacizumab.
En 2ème ligne de traitement, on constatait logiquement une répartition
globalement inversée entre les deux types principaux de bi-chimiothérapie, liée au
switch de l’oxaliplatine vers l’irinotécan et inversement. Ainsi, une majorité de
patients (50,3%) avaient reçu une bi-chimiothérapie à base d’irinotécan associée ou
non au bévacizumab (qui était en général poursuivi lorsqu’il avait déjà été introduit en
1ère ligne). 20,3% des patients avaient reçu une bi-chimiothérapie à base
d’oxaliplatine associée ou non au bévacizumab. Enfin, une part non négligeable des
patients (25,5%) s’étaient vus administrer dès cette 2ème ligne un traitement antiEGFR (cétuximab ou panitumumab), principalement selon les protocoles FOLFIRI –
cétuximab (9,8%), irinotécan – cétuximab (6,5%) ou panitumumab en monothérapie
(6,5%).
En 3ème ligne, 27,8% des patients avaient reçu encore une bi-chimiothérapie à
base d’oxaliplatine ou d’irinotécan (respectivement 16,7% et 11,1%) associée ou non
au bévacizumab. Mais la majeure partie des patients (68,8%) avaient été traités par
un anti-EGFR, principalement selon le protocole irinotécan – cétuximab (41,1%), ou
bien par panitumumab en monothérapie (11,1%) ou cétuximab en monothérapie
(5,6%) parfois associé à l’afatinib dans le cadre d’un essai thérapeutique.
En 4ème ligne, 3 protocoles de traitement principaux se détachaient : irinotécan
– cétuximab (17,6%), panitumumab en monothérapie (21,6%) et régorafénib
(21,6%). Au total 53% des patients y avaient reçu un traitement anti-EGFR associé
ou non à de la chimiothérapie. 7,8% des patients avaient reçu une monochimiothérapie de type capécitabine ou raltitrexed associé ou non au bévacizumab.
9,8% des patients s’était vus prescrire à nouveau une bi-chimiothérapie à base
d’oxaliplatine ou d’irinotécan (5,9% et 3,9% respectivement) associé ou non au
bévacizumab. Enfin, 5,9% des patients étaient inclus dans des essais cliniques.
En 5ème ligne, les patients étaient traités principalement par régorafénib ou
bien inclus dans des essais thérapeutiques.
LV5FU2/Capécitabine$:$
Cétuximab$
1,9$%$ 1,9$%$
2,8$%$
XELOX$:$Cétuximab$
0,9$%$
FOLFOX$:$Panitumumab$
19,4$%$
Irinotécan$:$Cétuximab$
Irinotécan$:$Panitumumab$
2,8$%$
48,1$%$
19,4$%$
FOLFIRI$:$Cétuximab$
Cétuximab$
Panitumumab$
2,8$%$
Cétuximab$:$AfaHnib$(essai)$
Figure 14 : Protocoles de traitement lors de l’introduction du traitement anti-EGFR
33
Lors de l’introduction de la thérapie ciblée anti-EGFR au cours de la prise en
charge des patients de notre étude, le principal protocole de traitement utilisé a
été « irinotécan – cétuximab » dans presque la moitié des cas (48,1%) (Figure 13).
Un nombre significatif de patients a néanmoins été traité par FOLFIRI – cétuximab
(19,4%) ou panitumumab en monothérapie (19,4%).
23,2$%$
Oui$
Non$
76,8$%$
Figure 15 : Taux de résections chirurgicales secondaires R0
Parmi les patients de notre cohorte, un nombre non négligeable représentant
23,2% du total, a bénéficié après la mise en route de la chimiothérapie de première
ligne métastatique d’une prise en charge à visée curative par résection chirurgicale
secondaire R0 (avec marges saines macroscopiquement et microscopiquement) de
l’ensemble des lésions tumorales individualisées, qu’il s’agisse de la tumeur
digestive primitive, ou bien de métastases hépatiques ou pulmonaires (Figure 15).
4.
Taux de recours aux traitements ciblés
an#$EGFR)
an#$VEGF)
20#%#
Oui%
Non%
Oui#
41,6%%%
Non#
58,4%%%
80#%#
Figure 16 : Taux de recours aux traitements anti-EGFR et anti-VEGF
chez les patients de la cohorte
34
Le taux de recours aux traitements anti-EGFR après la première ligne de
chimiothérapie métastatique dans notre cohorte de patients, objectif principal de
notre étude, était de 58,4% (Figure 16). A l’opposé, 41,6% des patients n’avaient
jamais reçu de traitement anti-EGFR au cours de la prise en charge de leur CCRM
KRAS exon 2 sauvage.
Le taux de recours aux traitements anti-VEGF dans notre cohorte était
logiquement plus élevé, à 80% des patients, puisque, conformément aux
recommandations, le bévacizumab était généralement administré dès la première
ligne de chimiothérapie. Les 20% restant représentaient essentiellement des patients
présentant un état général très altéré ou une contre-indication au bévacizumab :
tumeur primitive en place avec rectorragies, hypertension artérielle sévère, terrain
athéromateux sévère avec accidents ischémiques, pathologie thrombo-embolique
sévère…
9,7%%%
Traitements%an45VEGF%+%
an45EGFR%
10,3%%%
48,1%%%
Traitement%an45VEGF%
sans%an45EGFR%
Traitement%an45EGFR%
sans%an45VEGF%
31,9%%%
Pas%de%traitement%an45
VEGF%ou%an45EGFR%
Figure 17 : Taux de recours aux différents traitements ciblés anti-VEGF
et anti-EGFR chez les patients de la cohorte
Au sein de notre population de patients, une majorité relative d’entre eux
(48,1%) avait reçu à la fois un traitement anti-VEGF et un traitement anti-EGFR
(Figure 17). 31,9% avaient bénéficié d’un traitement anti-VEGF mais n’avaient pas
pu recevoir de traitement anti-EGFR, généralement en raison d’une progression trop
rapide de la maladie carcinologique s’accompagnant d’une dégradation de l’état
général ne permettant pas l’administration d’un traitement anti-EGFR. Une proportion
faible de patients (10,3%) s’était vue administrer un traitement anti-EGFR sans avoir
reçu de traitement anti-VEGF. Il s’agissait essentiellement de patients présentant
une contre-indication au bévacizumab. Enfin, 9,7% des patients n’avaient reçu ni
traitement anti-VEGF, ni traitement anti-EGFR. Il s’agissait de patients présentant un
état général trop altéré pour recevoir une thérapie ciblée en plus de la chimiothérapie
et décédés précocement.
5.
Survie globale
L’analyse de la survie globale de notre population à partir de la mise en route
de la première ligne de chimiothérapie en contexte métastatique met en évidence
une survie globale médiane de 26 mois (IC95% : 22,67 – 29,33) (Figure 18). Si l’on
35
considère la survie globale de notre population à partir du diagnostic initial de cancer
colorectal, la valeur médiane retrouvée était de 36 mois (IC95% : 29,01 – 42,98).
Figure 18 : Courbe de survie globale de la population de l’étude à la date de
mise en route de la première ligne de chimiothérapie métastatique
Nous avons également analysé la survie globale de quatre sous-groupes de
patients séparés en fonction des thérapeutiques ciblées anti-EGFR et anti-VEGF
dont ils avaient bénéficié ou non (Figure 19).
A
B
Figure 19 : Courbes de survie globale de différents sous-groupes de patients ; courbe 1 :
traitement par anti-VEGF et anti-EGFR ; courbe 2 : traitement par anti-VEGF sans antiEGFR ; courbe 3 : traitement par anti-EGFR sans anti-VEGF ; courbe 4 : absence de
traitement anti-VEGF ou anti-EGFR. A : Survie globale au diagnostic initial de cancer
colorectal. B : Survie globale à la date de mise en route de la première ligne de
chimiothérapie métastatique.
36
Ainsi, la survie globale médiane au diagnostic initial de cancer colorectal des
patients ayant été traités à la fois par anti-VEGFR et anti-EGFR était de 42 mois
(IC95% : 33,68 – 50,32) contre 32 mois pour les patients ayant reçu simplement un
anti-VEGF (IC95% : 21,26 – 42,74), 24 mois pour ceux ayant reçu simplement un
anti-EGFR (IC95% : 16,89 – 31,11) et 18 mois pour ceux n’ayant reçu ni anti-VEGF
ni anti-EGFR (IC95% : 14,88 – 21,11) (Figure 19A). La différence de survie globale
entre ces 4 sous-groupes est statistiquement significative (p = 0,004).
L’analyse de la survie globale à la date de mise en route de la première ligne
de chimiothérapie en situation métastatique montre les mêmes tendances (Figure
19B). La survie globale médiane était alors de 34 mois pour les patients ayant été
traités à la fois par anti-VEGF et anti-EGFR (IC95% : 27,07 – 40,93), contre 23 mois
pour ceux ayant reçu simplement un anti-VEGF (IC95% : 16,56 – 29,44), 18 mois
pour ceux ayant reçu simplement un anti-EGFR (IC95% : 9,47 – 26,53) et 13 mois
pour ceux n’ayant reçu ni anti-VEGF ni anti-EGFR (6,07 – 19,93). La différence de
survie globale entre ces 4 sous-groupes est statistiquement très significative (p <
0,001).
37
DISCUSSION
1. Validité interne et externe générale de l’étude
1.1
Validité interne
Le caractère rétrospectif de notre étude est à l’évidence une limite à
considérer car cela peu engendrer différents biais, en particulier un biais de
sélection. Néanmoins, pour limiter ce biais, nous avons établi des critères d’inclusion
précis et globalement superposables aux critères d’inclusion des essais prospectifs
auxquels notre étude est comparée. Bien que le recueil de données ait été effectué
avec rigueur, il peut exister aussi des biais d’évaluation liés notamment à
d’éventuelles données manquantes dans les dossiers médicaux analysés a
posteriori.
1.2
Validité externe
Le caractère simplement bicentrique de l’étude, et non plus largement
multicentrique, peut constituer un frein pour l’extrapolation des résultats à la
population générale de patients atteints de CCRM car cette population n’est pas
exclusivement prise en charge en CHU ou en Centre de Lutte Contre le Cancer
(CLCC). Toutefois, cela peut aussi constituer un avantage pour notre étude. En effet,
les centres où elle a été conduite sont des centres de référence dans la prise en
charge des CCRM. Aussi, nos résultats peuvent-ils être le reflet des conséquences
d’une bonne prise en charge des patients atteints de CCRM, selon les bonnes
pratiques médicales. En outre, les essais thérapeutiques évaluant l’intérêt des
traitements anti-EGFR en première ligne de chimiothérapie dans le CCRM, ont été
conduits très majoritairement dans ce type de structure hospitalière, ce qui est gage
de comparabilité entre les résultats de ces études et les nôtres.
La période d’inclusion de notre étude, sur 7 ans (de 2007 à 2013 inclus), peut
sembler longue par rapport à la période d’inclusion des principaux essais auxquels
elle est comparée qui est généralement de 2 à 3 ans. Néanmoins, on note pour
l’étude FIRE-3 une période d’inclusion de quasiment 6 ans et pour l’étude
CALGB/SWOG 80405 un période d’inclusion de 7,5 ans ce qui est dans l’ordre de
grandeur de notre étude. Toutefois, à la différence des essais prospectifs, la
recherche du statut KRAS tumoral n’a pas été toujours réalisée dès la mise en route
de la chimiothérapie de première ligne métastatique mais parfois plus tard dans la
prise en charge. Aussi, l’inclusion de nos patients reposant sur la date de recherche
du statut KRAS tumoral et non sur la date de mise en route de la chimiothérapie de
première ligne métastatique, certains patients ont en réalité débuté la chimiothérapie
métastatique avant 2007, ce qui tend à allonger notre période réelle d’inclusion. Mais
cela ne concerne que 16 patients, soit 8,6% de la cohorte, une proportion
relativement négligeable.
L’effectif de notre cohorte (185 patients) est certes plus mince que celui de
l’étude CALGB/SWOG 80405 qui a inclus le plus de patients (559 patients dans le
bras de patients ne recevant pas de traitement anti-EGFR en première ligne), mais il
se situe dans la fourchette des différentes études. Ainsi, l’étude NORDIC VII n’avait
inclus que 64 patients dans le bras sans traitement anti-EGFR.
38
Notre population de patients comporte des caractéristiques générales
conformes aux données d’épidémiologie connues sur le CCRM et comparables à
celles des patients inclus dans les essais prospectifs : un âge médian lors de la mise
en route de la chimiothérapie de première ligne de l’ordre de 60 ans, une légère
prédominance d’hommes (de l’ordre de 60%), un taux de cancers du rectum de
l’ordre de 35%.
Nous avons fait le choix de ne pas retenir la résécabilité initiale ou non des
lésions comme critère d’inclusion ou d’exclusion. En effet, les études PRIME, FIRE-3
et CALGB/SWOG 80405 ne retiennent pas non plus ce critère (alors que les autres
études n’avaient inclus que des patients atteints de CCRM non résécables). En
outre, ce critère nous est apparu trop subjectif et présentant trop de variabilité
potentielle entre les différents centres en fonction des habitudes locales, en
particulier celles des chirurgiens digestifs.
Sur le plan des chimiothérapies administrées lors des lignes successives, les
données récoltées montrent qu’elles étaient dans l’ensemble conformes aux
recommandations et aux données de la littérature publiées au sujet de la prise en
charge du CCRM (Figure 13) : majorité de bi-chimiothérapies associées au
bévacizumab en 1ère ligne, poursuite en bi-chimiothérapie (en switchant l’oxaliplatine
par l’irinotécan ou inversement) en deuxième ligne avec poursuite ou non du
bévacizumab, introduction d’un traitement anti-EGFR en 2ème ou 3ème ligne
essentiellement selon les protocoles irinotécan – cétuximab ou panitumumab en
monothérapie, régorafénib après échec de ces différents traitements… La seule
exception notable à cela peut être le recours à des bi-chimiothérapies
(FOLFOX/XELOX ou FOLFIRI) associées à un anti-EGFR (cétuximab ou
panitumumab) en 2ème ligne et au delà car ce type de traitement n’est pas validé
même s’il existe des arguments pour le justifier au cas par cas. Cela représente
11,1% des traitements de 2ème ligne, 6,6% des traitement de 3ème ligne et 7,9% de
ceux de 4ème ligne, ce qui est tout de même à considérer.
2. Analyse des résultats de survie globale
2.1
Comparaison aux données de la littérature
Nous avons mis en évidence une survie globale médiane pour notre
population de 26 mois (IC95% : 22,67 – 29,33) à partir de la mise en route de la
première ligne de chimiothérapie en contexte métastatique. Ce résultat est conforme
aux données de la littérature puisque dans les 3 études prospectives publiées
comportant un bras de traitement par bi-chimiothérapie + bévacizumab en première
ligne métastatique, la survie globale médiane dans ce bras est de 25 mois dans
l’étude FIRE-3, 24,3 mois dans l’étude PEAK et 29,04 mois dans l’étude
CALGB/SWOG 80405. Cette survie globale médiane est moindre dans les autres
études dont le bras contrôle ne comporte pas de bévacizumab en association à la bichimiothérapie de première ligne : de 17 mois dans l’étude COIN à 20 mois dans
l’étude CRYSTAL.
Cela est conforté par l’analyse de sous-groupes puisque si l’on exclue les
patients qui n’ont pas reçu de bévacizumab, on retrouve une survie globale médiane
de 34 mois (IC95% : 27,07 – 40,93) en cas d’administration d’un traitement antiEGFR lors des lignes ultérieures, et de 23 mois (IC95% : 16,56 – 29,44) pour les
patients qui n’ont jamais reçu de traitement anti-EGFR.
39
2.2
Surestimation potentielle de la survie globale
Le mode de recrutement des patients de notre étude peut potentiellement
nous conduire à une surestimation de la survie globale médiane de notre cohorte. En
effet, notre recrutement s’est effectué uniquement à partir des résultats de statuts
KRAS tumoraux analysés au niveau de la plateforme de biologie moléculaire du
CHRU de Lille à partir des pièces histologiques initiales. La recherche du statut
KRAS tumoral n’étant pas réalisée de façon systématique lors du diagnostic
anatomopathologique initial, il est possible que certains patients présentant une
tumeur KRAS exon 2 sauvage soient décédés avant qu’il ait été demandé l’analyse
complémentaire du statut KRAS de leur tumeur. Si ces éventuels patients avaient été
inclus dans notre cohorte, ils auraient probablement altéré nos résultats de survie
globale médiane. C’est l’une des limites de l’analyse rétrospective. Néanmoins, il
était logique d’inclure les patients de cette manière, la connaissance du statut KRAS
tumoral étant indispensable à la réalisation de notre étude. En outre il est
vraisemblable que ce phénomène soit négligeable car les recherches du statut
KRAS tumoral sont habituellement demandées précocement lors de la prise en
charge métastatique des patients du CHRU de Lille et du COL.
2.3
Sous-estimation potentielle de la survie globale
S’il est possible que nos résultats de survie globale médiane soient surestimés
comme nous venons de l’expliquer, pour plusieurs autres raisons il paraît plus
probable qu’ils soient plutôt sous-estimés.
De même que dans l’étude CALGB/SWOG 80405 (dont nous rappelons
qu’elle est négative en survie globale, survie sans progression et taux de réponse
objective), notre population de patients atteints de CCRM n’était pas sélectionnée. Or
ce n’était pas le cas des autres études prospectives, en particulier FIRE-3, dont
certains critères stricts d’inclusion peuvent être responsables d’une survie globale
augmentée par rapport à la population réelle des patients atteints de CCRM
(exclusion des patients atteints de certaines comorbidités, espérance de vie à
l’inclusion supérieure à 3 mois, absence de dysfonction rénale, hépatique ou
hématologique, métastases cérébrales ou péritonéales…; cf. Tableaux 1A et 1B). En
outre, les études NORDIC VII et FIRE-3 excluaient également les patients de plus de
75 ans qui représentent une proportion significative des patients de notre cohorte
(13,5%).
Le taux de recours aux traitements anti-VEGF n’était que de 80% chez les
patients de notre cohorte alors que la totalité des patients présentait une indication
théorique au bévacizumab en 1ère ligne de traitement associé à la chimiothérapie. Il a
en effet été montré par plusieurs études le bénéfice de l’adjonction du bévacizumab
à la bi-chimiothérapie de première ligne métastatique. Cela est d’ailleurs confirmé
par nos résultats d’analyse de sous-groupes où les patients ayant été traités par antiVEGF (qu’ils aient reçu ou non également un anti-EGFR) avaient une survie globale
médiane supérieure aux autres (Figure 19). Notre taux de 80% s’explique par des
contre-indications individuelles aux anti-VEGF ou un état général trop altéré chez les
20% des patients restant. Ce taux est même réduit à 53,9% si l’on ne considère que
la 1ère ligne de traitement. Ces patients récusés pour le traitement par bévacizumab
en première ligne, dont le pronostic est à l’évidence plus péjoratif que celui des
autres, n’était pas inclus dans les 3 études prospectives comprenant un bras contrôle
40
de patients traités par bévacizumab (FIRE-3, PEAK et CALGB/SWOG 80405) ce qui
tend en comparaison à altérer la survie globale observée dans notre analyse.
De même, nous avons inclus dans notre étude les patients traités en première
ligne avec une mono-chimiothérapie par 5-FU associée ou non au bévacizumab (7%
des patients de 1ère ligne). Il s’agissait là encore de patients âgés ou à l’état général
trop altéré par diverses comorbidités. Or toutes les études prospectives étudiant les
anti-EGFR en première ligne métastatique associent ce traitement ciblé à une bichimiothérapie dont on sait qu’elle est bénéfique par rapport à la monochimiothérapie. Ces différents éléments tendent donc à sous-estimer la survie
globale de notre cohorte par rapport aux résultats des autres études publiées.
Un autre élément peut également altérer artificiellement la survie globale de
notre cohorte, il s’agit de la proportion importante (22,7%) de patients encore en vie
à la clôture de notre recueil de donnée. Pour l’analyse statistique, la date de fin du
recueil de données (01/04/2015) a en effet dû être considérée comme leur date de
décès. Cette proportion importante de patients encore en vie lors de l’analyse
statistique s’explique en partie par le fait que la clôture de notre recueil de données
n’a été réalisée qu’un an et trois mois après la fin des inclusion de nos patients (fin
2013). Or, dans les études prospectives sur le sujet, la publication a eu lieu en
moyenne 3 ans après la fin des inclusions (de 2 ans pour FIRE-3 à 4 ans et demi
pour NORDIC VII) ce qui laisse imaginer une période d’observation plus longue des
patients.
Enfin, grâce aux avancées récentes dans la connaissance des mécanismes
de résistances aux traitements anti-EGFR, nous savons désormais que d’autres
mutations de RAS (KRAS exons 3 et 4, et NRAS exons 2, 3 et 4) sont également
responsables d’une résistance constitutive à ces traitements. Or, ces autres
mutations n’ont pas été prises en compte dans notre analyse et il est donc probable
qu’une partie des patients de notre étude présentaient en réalité des tumeurs
résistantes aux traitements anti-EGFR ce qui grève partiellement la survie globale.
Toutefois, c’était aussi le cas dans les études prospectives publiées.
3. Analyse du taux de recours aux traitements anti-EGFR
3.1
Comparaison aux données de la littérature
Dans notre étude, le taux de recours à un traitement anti-EGFR au delà de la
première ligne de chimiothérapie métastatique était de 58,4%, soit une valeur
nettement supérieure à celle retrouvée dans les bras contrôles des différents essais
prospectifs (de 4,4% pour l’étude COIN à 48% pour l’étude FIRE-3).
3.2
Surestimation potentielle du taux de recours aux traitements anti-EGFR
Comme pour l’analyse de la survie globale, le taux de recours aux traitements
anti-EGFR chez les patients de notre cohorte peut être surestimé par le fait que, du
fait du caractère rétrospectif de notre étude, nous n’avons pu inclure que des
patients pour lesquels le statut KRAS tumoral avait été établi sur la plateforme de
biologie moléculaire du CHRU de Lille. En effet, il est possible que certains patients
présentant une tumeur KRAS sauvage soient décédés avant que ce statut ne soit
connu car sa détermination sur la pièce histologique initiale n’avait pas encore été
demandée. Même si l’on avait connu le statut KRAS tumoral dès la mise en route de
41
la chimiothérapie de première ligne (comme c’est le cas dans les essais prospectifs),
le taux de recours aux anti-EGFR chez ces patients auraient sans doute été moindre
que chez les autres du fait d’une dégradation de l’état général trop rapide et trop
franche pour tolérer un traitement anti-EGFR. Cela aurait pu alors diminuer le taux
de recours global aux anti-EGFR dans la cohorte totale. Néanmoins, comme nous
l’avons vu, il est vraisemblable que ces cas potentiels soient négligeables.
1,8%%%
10,2%%%
36,1%%%
2ème%ligne%
3ème%ligne%
4ème%ligne%
5ème%ligne%
51,9%%%
Figure 20 : Ligne à laquelle est introduit le traitement anti-EGFR dans notre cohorte
Par ailleurs, on constate dans notre étude que lorsqu’un traitement anti-EGFR
est introduit au cours de la prise en charge métastatique des patients, il l’est
principalement au cours de la 3ème ligne de traitement (51,9%), mais également
fréquemment dès la deuxième ligne (36,1%) (Figure 20). Néanmoins, dans 12% des
cas, il est introduit en 4ème voire en 5ème ligne. Or, dans les études PRIME et COIN,
nous ne connaissons le taux de recours aux anti-EGFR qu’en 2ème ligne
(respectivement de 18% et 4,4% pour les bras contrôles) et pour l’étude FIRE-3 nous
ne le connaissons qu’en 2ème et 3ème ligne (27% et 21% ce qui fait 48% au total).
Comme notre étude prend en compte toutes les lignes de traitement au delà de la
2ème et la 3ème ligne, elle peut majorer le taux de recours aux anti-EGFR par rapport à
ces 3 études. Néanmoins, les 5 autres études prospectives tiennent quant à elles
compte de l’ensemble des lignes ultérieures à la première pour exprimer leur taux de
recours aux traitements anti-EGFR. Les habitudes locales peuvent varier de façon
importantes quant à la ligne privilégiée pour l’introduction du traitement anti-EGFR
entre les différents pays et même les différentes structures hospitalières ce qui rend
la comparaison des différentes études difficiles à ce sujet.
3.3
Sous-estimation potentielle du taux de recours aux traitements anti-EGFR
Comme nous l’avons déjà vu, les patients de notre étude sont moins
sélectionnés que ceux des essais prospectifs et sont plus âgés en moyenne que
dans certains de ces essais. Ainsi, des patients de notre cohorte ont été récusés
pour l’administration d’un traitement anti-EGFR du fait de la toxicité potentielle induite
par ces traitements, toxicité non tolérable pour certains patients âgés ou trop altérés.
Cela tend naturellement à abaisser le taux de recours aux anti-EGFR dans notre
étude par rapport aux autres études. En outre, ce type de patients présente à la base
un pronostic plus péjoratif et certains sont donc décédés avant d’avoir pu bénéficier
d’un traitement anti-EGFR.
42
4,8#%# 2,4#%#
9,5#%#
1ère#ligne#
33,3#%#
2ème#ligne#
3ème#ligne#
4ème#ligne#
21,4#%#
5ème#ligne#
6ème#ligne#
28,6#%#
Figure 21 : Stade de traitement des patients encore en vie à la fin de l’analyse
Par ailleurs, le taux de recours aux anti-EGFR dans notre cohorte est abaissé
par rapport à la réalité car bon nombre des patients encore en vie à la fin de
l’analyse n’a pas encore pu bénéficier d’un traitement anti-EGFR. En effet, 33,3% de
ces patients suivent encore une 1ère ligne de chimiothérapie métastatique et 28,6%
une 2ème ligne. Seuls 38,1% de ces patients suivent une 3ème ligne de traitement ou
au delà (Figure 21). Or l’on sait que dans les habitudes des centres où a été conduite
notre étude, la majorité des traitements anti-EGFR sont administrés à partir de la
3ème ligne (63,9% dans notre analyse, Figure 20). C’est ainsi que le taux de recours
aux anti-EGFR chez les patients encore en vie n’est que de 35,7% dans notre étude.
Si l’on se limite donc pour notre analyse aux seuls patients déjà décédés, le taux de
recours aux traitements anti-EGFR au delà de la première ligne métastatique passe
de 58,4% à 65% (Figure 22). La réalité est probablement intermédiaire.
Pa#ents(en(vie(
35,7%%%
Oui%
Pa#ents(décédés(
35#%#
Oui#
Non#
Non%
64,3%%%
65#%#
Figure 22 : Taux de recours aux traitements anti-EGFR chez les patients en vie ou
chez les patients décédés à la clôture de l’analyse
On remarque également que le taux de résections chirurgicales secondaires
R0 de l’ensemble des lésions tumorales est très important dans notre étude (23,2%)
par rapport aux études prospectives publiées pour lesquelles les taux varient de 2%
43
(CRYSTAL) à 14% (FIRE-3) dans les bras contrôles sans anti-EGFR en première
ligne. Cela est probablement dû à une attitude plus interventionniste des chirurgiens
digestifs dans les centres où a été conduite notre analyse. Nous nous sommes donc
demandé si cela pouvait influencer le taux de recours aux anti-EGFR au delà du
traitement de première ligne métastatique. En effet, le taux de recours aux antiEGFR dans cette population de patients ayant bénéficié d’une résection chirurgicale
secondaire R0 n’était que de 41,9% (Figure 23). Mais si l’on effectue l’analyse chez
les seuls patients décédés ayant bénéficiés par le passé d’une résection chirurgicale
secondaire R0, ce taux de recours passe à 63,6% ce qui est superposable au taux
observé chez l’ensemble des patients décédés (65%). Ainsi, la diminution du taux de
recours aux anti-EGFR chez les patients ayant bénéficié d’une résection chirurgicale
secondaire R0 est liée à l’amélioration de la survie chez ces patients et non
directement à la résection. Par ailleurs, ces données peuvent expliquer les bons
chiffres de survie globale observés dans notre cohorte, pourtant non sélectionnée et
analysée rétrospectivement, en comparaison aux études prospectives publiées. Cela
soulève en outre l’intérêt d’une stratégie chirurgicale interventionniste pour améliorer
les perspectives de survie.
Pa#ents(ayant(bénéficié(d'une(résec#on(R0(
Oui%
41,9%%%
Non%
58,1%%%
Pa#ents(décédés(ayant(bénéficié(d'une(résec#on(R0(
Oui$
36,4$%$
Non$
63,6$%$
Figure 23 : Taux de recours aux traitements anti-EGFR chez les patients ayant bénéficié
d’une résection chirurgicale secondaire R0 de l’ensemble des lésions tumorales
Nous nous sommes également demandé si le fait que les métastases soient
synchrones ou métachrones à l’origine de la prise en charge métastatique influençait
le taux de recours ultérieur aux traitements anti-EGFR. Dans la population globale de
l’étude, on retrouvait une légère prédominance de métastases synchrones à l’origine
(54,6%) par rapport aux métastases métachrones (45,4%). Mais cette prédominance
ne se retrouvait pas chez les patients encore en vie lors de l’analyse, la proportion de
chaque type de métastases à l’origine étant alors de 50%, ce qui confirme de façon
attendue le meilleur pronostic des métastases métachrones par rapport aux
métastases synchrones (Figure 24). Dans la population globale, le taux de recours
aux anti-EGFR chez les patients atteints initialement de métastases synchrones était
de 56,4% contre 60,7% chez ceux atteints de métastases métachrones. Cette
différence peu significative aurait pu être atténuée par le meilleur pronostic des
métastases métachrones, les patients concernés encore en vie n’ayant pas encore
eu le temps de bénéficier des traitements anti-EGFR. Or, cela n’est pas le cas car la
44
différence n’est pas plus significative si l’on se focalise sur les seuls patients
décédés : taux de recours de 63,8% pour les métastases synchrones et de 66,7%
pour les métastases métachrones. Nous ne dégageons donc pas d’impact franc du
caractère synchrone ou métachrone des métastases initiales sur le taux de recours
ultérieur aux traitements anti-EGFR.
Popula'on)globale)
Pa#ents(en(vie(
A
Métastases%synchrones%
Métastases%métachrones%
Métastases#synchrones#
45,4%%%
54,6%%%
Métastases'synchrones'
50#%#
50#%#
Métastases#métachrones#
Métastases'métachrones'
B
Traitement%an01EGFR%
Pas%de%traitement%an01EGFR%
Traitement%an12EGFR%
39,3%%%
43,6%%%
Pas%de%traitement%an12EGFR%
56,4%%%
Métastases'synchrones'
60,7%%%
Métastases'métachrones'
C
Traitement%an01EGFR%
33,30%&
36,2%%%
Traitement&an01EGFR&
Pas&de&traitement&an01EGFR&
Pas%de%traitement%an01EGFR%
63,8%%%
66,70%&
Figure 24 : A : Taux de patients atteints initialement de métastases synchrones et
métachrones dans l’ensemble de la cohorte (gauche) et chez les patients en vie (droite). B :
Taux de recours aux traitements anti-EGFR dans la cohorte globale en fonction du type de
métastases à l’origine. C : Taux de recours aux traitements anti-EGFR chez les patients
décédés en fonction du type de métastases à l’origine.
45
4. Quel traitement ciblé privilégier en première ligne de chimiothérapie
métastatique ?
4.1
Analyse des survies en fonction des thérapeutiques ciblées utilisées
Si l’on regarde les résultats de l’analyse de survie globale en sous-groupes
réalisée en fonction des thérapies ciblées administrées ou non (Figure 19), cela
semble montrer que l’administration de deux thérapies ciblées au cours de la prise
en charge métastatique est la prise en charge optimale (survie globale médiane de
34 mois à partir de la mise en route de la chimiothérapie de 1ère ligne ; IC95% 27,07
– 40,93), puis que l’administration d’un anti-VEGF seul est supérieure à celle d’un
anti-EGFR seul (23 mois, IC95% 16,56 – 29,44, versus 18 mois, IC95% 9,47 –
26,53), cette dernière modalité étant elle-même supérieure à l’absence de traitement
par anti-VEGF et anti-EGFR (13 mois, IC95% 6,07 – 19,93).
Mais cette conclusion est erronée du fait du caractère rétrospectif de notre
analyse. En effet, il est évident que les patients n’ayant reçu aucune thérapie ciblée
avaient à l’origine un pronostic globalement plus péjoratif du fait de comorbidités ou
d’un état général trop altéré pour se voir administrer ce type de traitement. Leur
mauvaise survie globale s’explique donc surtout pas cela. A l’inverse, les patients
ayant reçu les deux types de traitements ciblés étaient globalement des patients de
pronostic meilleur car s’ils avaient pu recevoir les deux traitements, c’est
probablement en raison de leur comorbidités moins importantes, de leur état général
meilleur et de tumeurs plus lentement évolutives.
La comparaison entre le sous-groupe de patients n’ayant reçu qu’un
traitement anti-VEGF et celui n’ayant reçu qu’un traitement anti-EGFR est peu
informative également. En effet, d’une part les intervalles de confiance de leurs
survies globales ne s’excluent pas mutuellement. D’autre part, les anti-VEGF étant
généralement administrés dans les premières lignes de traitement et les anti-EGFR
dans les dernières lignes, la comparabilité entre les courbes de survie globale de ces
deux sous-groupes est médiocre.
Le résultat intéressant apporté par cette analyse de sous-groupe est la
comparaison que l’ont peut raisonnablement faire entre le sous-groupe de patients
traités par les deux types des thérapies ciblées et le sous-groupe de patients traités
simplement avec les anti-EGFR (courbes 1 et 3 sur la Figure 19). Il est probable que
le pronostic à l’origine des patients de ces deux sous-groupes était assez
comparable car si les patients des deux sous-groupes ont pu recevoir un traitement
anti-EGFR, administré généralement dans les dernières lignes de traitement, c’est
que leur état général et la vitesse d’évolution de leur cancer le permettaient. La
différence entre ces deux sous-groupes réside certainement plus dans le fait que les
patients du groupe traité simplement par anti-EGFR présentaient essentiellement
une contre-indication aux anti-VEGF, ce qui n’altère pas intrinsèquement le pronostic
de leur maladie, contrairement à une altération de l’état général qui est généralement
en lien avec une maladie plus agressive. En outre, les intervalles de confiance pour
la survie globale médiane de ces deux sous-groupes s’excluent, ce qui rend leur
différence de survie clairement significative. Ainsi, si la survie globale des deux sousgroupes diffère, c’est principalement lié à l’administration ou non du bévacizumab.
Cela confirme donc l’intérêt de faire bénéficier aux patients d’un traitement antiVEGF, même si ces derniers reçoivent également dans l’histoire de leur prise en
charge un traitement anti-EGFR.
46
4.2
Eléments en faveur d’un traitement anti-EGFR
Outre les résultats positifs de certaines études prospectives que nous avons
exposés (et dont nous avons aussi montré les limites), plusieurs éléments peuvent
inciter à utiliser un traitement anti-EGFR dès la première ligne de chimiothérapie
métastatique. D’une part, nous voyons dans notre étude que moins de 50%
seulement des patients reçoivent une 3ème ligne de chimiothérapie métastatique
(Figure 12), les autres décédant avant d’avoir pu la recevoir. Or, la majorité des
patients traités par anti-EGFR, bénéficient de ce traitement en 3ème ligne et au delà.
Ainsi, un grand nombre de patients, dont l’évolution de la maladie est plus rapide,
risquent de ne pas se voir administrer de traitement anti-EGFR du fait de son
introduction trop tardive dans la stratégie de prise en charge (Figure 20).
Ce problème se pose par exemple pour les patients atteints de métastases
synchrones dont le pronostic est plus sévère qu’en cas de métastases métachrones.
La survie des patients atteints de métastases synchrones étant diminuée, introduire
un traitement anti-EGFR en première ligne pourrait permettre d’éviter que les
patients concernés n’en bénéficient pas ultérieurement du fait d’un décès prématuré.
Toutefois, nous avons vu précédemment que ce postulat n’était probablement pas
juste puisque le taux de recours aux anti-EGFR au delà de la 1ère ligne de traitement
n’est pas significativement différents entre les patients atteints de métastases
synchrones et ceux de métastases métachrones dans notre étude.
Dans la littérature, certains auteurs pensent que le taux de réponse objective
au traitement de 1ère ligne serait supérieur en cas d’usage d’un anti-EGFR par
rapport au bévacizumab. Cela pourrait ainsi permettre la réalisation de plus de
résections chirurgicales secondaires R0 des différentes lésions et donc de guérir
plus de patients. Or, les données de la littérature sont peu robustes et contradictoires
à ce sujet (Tableau 1A et 1B). Dans l’étude FIRE-3 par exemple, on constate un taux
de résections secondaires plus important chez les patients traités par bévacizumab
(14%) que chez ceux traités par cétuximab (12%). Et dans notre étude ce taux de
résection est encore plus important (23,2%).
4.3
Eléments en faveur d’un traitement anti-VEGF
Comme nous l’avons vu, les données de la littérature mettant en évidence
l’intérêt du bévacizumab en 1ère ligne de chimiothérapie métastatique sont solides.
Ces résultats sont corroborés par le fait que la survie globale de notre cohorte est
conforme aux données de la littérature alors même que notre population n’est pas
sélectionnée, que tous les patients de notre cohorte n’ont pas reçu de traitement
anti-VEGF, ou bien ne l’ont pas reçu dès la première ligne, que certains n’ont été
traités en 1ère ligne que par mono-chimiothérapie et non bi-chimiothérapie… Ils sont
appuyés aussi par notre analyse de sous-groupes qui montre un bénéfice de l’usage
du bévacizumab chez les patients ayant aussi reçu un traitement anti-EGFR. Or, les
études évaluant l’intérêt du bévacizumab ayant été réalisées ainsi, l’indication
théorique aujourd’hui du bévacizumab dans le CCRM est en 1ère ligne de traitement,
voire en poursuite en 2ème ligne en cas d’introduction préalable lors de la 1ère ligne.
Traiter les patients par anti-EGFR en première ligne à la place du bévacizumab
risque donc de priver ces patients d’un traitement dont ils tireraient probablement
bénéfice. En effet, le bévacizumab ne serait alors plus indiqué, ou du moins son
intérêt n’a pas été démontré s’il est introduit lors des lignes ultérieures.
47
De plus, contrairement aux traitements anti-EGFR, il y a un intérêt à
poursuivre le bévacizumab au delà de la 1ère ligne s’il est introduit au préalable, en
continuant de l’associer à la bi-chimiothérapie de 2ème ligne. Cela permet
d’augmenter le nombre de lignes potentielles de traitements auxquelles les patients
atteints de CCRM RAS sauvages sont éligibles. Les traitements anti-EGFR, qui ont
montré leur intérêt pour améliorer la survie des patients en monothérapie ou en
association avec une chimiothérapie comme l’irinotécan, peuvent alors servir de
recours en 3ème ou 4ème ligne de traitement en cas de progression. Leur tolérance en
monothérapie ou en association avec l’irinotécan étant généralement correcte, cela
permet aux patients dont la maladie est déjà avancée de bénéficier d’un traitement
encore acceptable. En outre, si les anti-EGFR sont généralement correctement
tolérés dans cette situation, ça n’est pas le cas lorsqu’ils sont associés à une bichimiothérapie comme en 1ère ligne. Leurs effets indésirables (rashs cutanés,
diarrhées, asthénie…) sont alors généralement plus invalidants que ceux induits par
le bévacizumab.
Enfin, il existe des données précliniques qui tendent à montrer que le
bévacizumab serait plus intéressant sur les tumeurs KRAS sauvages que sur les
tumeurs KRAS mutées (75). Aussi, il serait dommage de priver de ce traitement les
patients atteints de tumeurs KRAS sauvages du fait de l’usage en 1ère ligne d’un
traitement anti-EGFR à la place.
5. Perspectives
En pointant les limites des essais prospectifs étudiant l’intérêt d’un traitement
anti-EGFR en première ligne de chimiothérapie métastatique dans le CCRM,
notamment en montrant que le taux de recours aux traitements anti-EGFR lors des
lignes ultérieures dans les bras contrôles de ces études est probablement insuffisant,
notre étude tend à renforcer l’intérêt d’utiliser un traitement anti-VEGF par rapport à
un traitement anti-EGFR en 1ère ligne de chimiothérapie métastatique dans le CCRM.
Toutefois, sa nature rétrospective ne permet pas de trancher formellement entre les
deux attitudes possibles. Afin d’obtenir une réponse robuste à cette question, il est
nécessaire de conduire des essais prospectifs de stratégie thérapeutique, comparant
le plus objectivement possible les deux attitudes potentielles. C’est l’objectif par
exemple de l’essai de phase III appelé STRATEGIC-1 et conduit par le GERCOR et
le Dr Benoist Chibaudel qui apportera peut-être la réponse (Figure 25).
Figure 25 : Design de l’essai GERCOR STRATEGIC-1
48
CONCLUSION
Plusieurs études prospectives visant à évaluer l’intérêt d’un traitement antiEGFR en association à la bi-chimiothérapie de première ligne métastatique dans le
CCRM KRAS exon 2 sauvage ont été publiées. Leurs résultats sont discordants,
certaines études étant négatives, d’autres positives. Dans tous les cas, leur validité
est atteinte par de nombreuses limites et biais potentiels, en particulier un taux faible
de recours aux traitements anti-EGFR lors des lignes ultérieures chez les patients
des bras contrôles ne recevant pas d’anti-EGFR en première ligne (entre 4,4% et
48%). Or, si l’usage d’un traitement anti-EGFR dès la première ligne de
chimiothérapie peu présenter quelques avantages, il présente aussi des
inconvénients non négligeables : tolérance médiocre, risque de ne pas traiter les
patients ultérieurement par bévacizumab, diminution du nombre de lignes
potentielles de traitements à proposer. A l’inverse, l’usage du bévacizumab en
première ligne de chimiothérapie métastatique présente de nombreux avantages en
termes d’efficacité et de tolérance, mais permet surtout, en cas de progression
tumorale, de proposer aux patients de nouvelles lignes de traitement par anti-EGFR
dont on sait que l’efficacité a été démontrée dans cette situation. La question de
l’efficacité réelle des traitements anti-EGFR en première ligne est donc cruciale pour
pouvoir déterminer quelle est la biothérapie, entre anti-EGFR et anti-VEGF, à utiliser
en association à la chimiothérapie de première ligne.
Dans notre étude rétrospective portant sur les 185 patients atteints de CCRM
KRAS exon 2 sauvages pris en charge au CHRU de Lille et au Centre Oscar
Lambret entre 2007 et 2013, nous avons pu constater un taux de recours aux
traitements anti-EGFR au delà de la première ligne de chimiothérapie de 58,4%, soit
un taux nettement supérieur à ceux des bras contrôles des essais prospectifs. Ce
taux s’élève à 65% si l’on ne tient compte que des patients décédés, et la réalité est
donc probablement intermédiaire entre ces deux valeurs. La validité de ce résultat
est appuyée par les données statistiques de notre population, montrant que celle-ci
est représentative d’une population standard de patients atteints de CCRM, et qu’elle
est globalement comparable aux populations des essais prospectifs, à la différence
près que le taux de résection chirurgicale secondaire R0 est nettement plus
important dans notre population (23,2%). En outre, la survie globale médiane de
notre cohorte de patients (26 mois, IC95% : 22,67 – 29,33) est proche des valeurs
observées dans les bras contrôles des essais prospectifs, ainsi que dans les bras
comportant un traitement anti-EGFR.
Ce biais suspecté d’un taux de recours insuffisant aux traitements anti-EGFR
dans les bras contrôles des essais prospectifs, pouvant altérer la survie globale de
ces bras, est donc confirmé, du moins au regard de nos habitudes de prise en
charge. Cela souligne d’autant plus les limites de ces essais et de leurs conclusions
et leur applicabilité à nos populations de patients. Il n’y a donc pas aujourd’hui
d’argument solide pour proposer un traitement anti-EGFR en association à la bichimiothérapie de première ligne métastatique dans le CCRM KRAS sauvage. Cette
question de la meilleure biothérapie de première ligne étant très complexe, des
essais de stratégie thérapeutique doivent être conduits pour y répondre, comparant
la survie globale des patients après plusieurs combinaisons différentes de lignes de
traitements successives, dont au moins une comporterait un traitement anti-EGFR en
première ligne et une autre un traitement anti-VEGF par bévacizumab.
49
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ANNEXE : CURRICULUM VITAE
Louis DOUBLET
39, rue Nicolas Leblanc, 59000 Lille
06/10/1985 (29 ans)
Nationalité : français
+33 6 10 80 60 08
[email protected]
Situation actuelle :
- Interne des hôpitaux de Lille, DES Oncologie médicale, promotion 2009, 10ème semestre en
cours en inter-CHU au Département d’Innovations Thérapeutiques et d’Essais Précoces
(DITEP), Institut Gustave Roussy (IGR), Villejuif, Pr Soria.
Cursus universitaire :
- 2009-2015
9 semestres d’internat d’oncologie médicale à l’université Lille 2
- 2013-2014
Master 2 Recherche, Université Lille 2, Parcours Biologie cellulaire. Stage
chez le Pr de Launoit et le Dr Tulasne, Institut de Biologie de Lille / Institut
Pasteur de Lille. Mémoire sur les clivages protéolytiques du récepteur Met
dans les CBNPC. Mention assez-bien.
- 2009
Interne des hôpitaux de Lille (Examen Classant National : rang : 1136ème sur
6323)
- 2004-2009
Deux premiers cycles des études de Médecine, Faculté René Descartes,
Paris V
- 2003-2004
PCEM1 à la faculté de médecine Necker - Enfants Malades, primant, rang :
57ème sur 750.
Internat de médecine :
- 2014-2015
Semestre 9 :
- 2013
- 2012-2013
- 2012
- 2011-2012
- 2011
Semestre 8 :
Semestre 7 :
Semestre 6 :
Semestre 5 :
Semestre 4 :
- 2010-2011
- 2010
Semestre 3 :
Semestre 2 :
- 2009-2010
Semestre 1 :
Oncologie sénologique et gynécologique, Centre Oscar
Lambret, Lille, Pr Bonneterre
Oncologie médicale, CHRU de Lille, Pr Hebbar
Radiothérapie, Centre Oscar Lambret, Lille, Pr Lartigau
Oncologie générale, Centre Oscar Lambret, Lille, Dr Penel
Médecine interne, CH de Roubaix, Dr Auxenfants
Onco-hématogie, hôpital Saint-Vincent de Paul, Lille, Pr
Rose
Pneumologie, CHRU de Lille, Pr Lafitte
Oncologie sénologique, Centre Oscar Lambret, Lille, Pr
Bonneterre
Oncologie médicale, CH de Valenciennes, Dr Block
Diplômes, formations :
- 2010-2012
Master 1 Recherche, Université Lille 2, Parcours biologie cellulaire
(méthodologie en biologie cellulaire, différenciation et oncogénèse), Stage
chez le Pr Marchetti (Faculté de médecine Lille 2 – Pôle Recherche)
- 2011-2012
DU de Carcinologie clinique à l’IGR, Université Paris-Sud 11
- 2013
XXVIIIèmes cours de chimiothérapie antitumorale et traitement médical du
cancer, IGR, Ecole des Sciences du Cancer
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Publications :
- R. Montagne, M. Berbon, L. Doublet, N. Debreuck, A. Baranzelli, H. Drobecq, C. Leroy, N.
Delhem, H. Porte, MC. Copin, E. Dansin, A. Furlan, D. Tulasne : Necrosis- and apoptosisrelated Met cleavages have divergent functional consequences.
Accepté dans Cell Death and Differenciation, 2015.
- L. Doublet, A. Renaud, H. Gauthier, L. Ceugnart, J. Bonneterre, MH. Vieillard : Assessment
of bone metastases response to systemic treatment.
En cours de révision dans Critical Reviews of Oncology/Hematology.
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