Février 2014 Newsletter n°1 La newsletter de la santé durable LE DOSSIER A LA UNE Les protéines végétales : un rôle à jouer pour la santé de l’Homme et de sa planète. Dans le cadre des Journées Francophones de Nutrition 2013, l’Institut Olga Triballat a organisé, le 12 décembre dernier, un atelier sur la thématique : Les protéines végétales : un rôle à jouer pour la santé de l’Homme et de sa planète ? Cet article reprend les grandes lignes des présentations de Jean-Michel Lecerf et Pierre Combris, intervenus au cours de cet atelier. Les atouts nutritionnels des aliments sources de protéines végétales Légumineuses, oléagineux, oléo-protéagineux, tubercules, céréales et apparentés, … sont autant de sources de protéines végétales. Outre leur origine variée, ces aliments ont un profil nutritionnel intéressant car associé à des teneurs élevées en glucides complexes et en fibres et à de faibles quantités de lipides. La qualité des protéines est notamment définie par leur profil en acides aminés. La quasi-totalité des protéines végétales présente un déficit en lysine (à l’exception des protéines de soja), alors que les protéines animales contiennent en général tous les acides aminés indispensables : une spécificité qui justifie leur complémentarité au sein d’une alimentation variée et équilibrée. Afin de profiter pleinement des atouts nutritionnels des protéines végétales, il est recommandé d’augmenter leur consommation et de réduire celle des protéines animales, souvent excessive aujourd’hui. Les protéines végétales ont un impact positif sur la santé humaine Ø Bénéfice osseux Les protéines, au global, jouent un rôle positif sur la santé osseuse : des apports élevés augmenteraient l’absorption intestinale du calcium et retarderaient la perte osseuse1. Selon une autre étude, rééquilibrer le ratio entre protéines animales et protéines végétales en augmentant la part de ces dernières permettrait de ralentir la déminéralisation osseuse2. Enfin, des chercheurs se sont penchés sur l’intérêt des protéines de soja pour maintenir le statut osseux à la ménopause : une consommation élevée en protéines de soja (≥ 13,27 g / j) réduit le risque de fractures de 37%3. Ø Santé cardiovasculaire Les résultats de méta-analyses indiquent que la consommation d’aliments à base de soja diminue le taux de cholestérol moyen et améliore la réactivité vasculaire4. Les études menées sur les protéines et les isoflavones de soja montrent que ces deux composés améliorent la fonction endothéliale des vaisseaux5, 6, 7 . Ø Cancer du sein : le cas du soja Initiée dès l’enfance, la consommation d’aliments à base de soja semble avoir un effet protecteur contre le cancer du sein. Ainsi, une consommation importante d’aliments au soja (1,5 à 8,8 fois par semaine) 8 pendant l’enfance diminuerait le risque de cancer du sein (RR = 0,40) . De manière moins marquée, la consommation d’aliments au soja, à l’adolescence et à l’âge adulte, 9 diminuerait également le risque de survenue de cancer du sein . Des études menées sur différents échantillons de femmes chinoises montrent que, chez les patientes atteintes d’un cancer du sein, une consommation élevée de protéines de soja est associée à une diminution significative du risque de 10, 11, 12 décès . Les protéines végétales : une réponse aux enjeux posés par la croissance économique et démographique Les experts estiment que la Terre comptera, d’ici 2050, 9 milliards d’êtres humains. Dans ce contexte de croissance démographique, assurer à tous une alimentation de qualité, en quantité suffisante et dans le respect de l’environnement, représente un enjeu majeur. La croissance économique observée dans de nombreux pays se traduit par une modification structurelle de l’alimentation : alors que la part de lipides, de sucres et de protéines animales augmente, celle des glucides complexes et des protéines végétales diminue. Figure 1. Structure de l'alimentation en fonction du PIB (ajustement semi-log sur 163 pays)13. Si la part de la population concernée par ces changements alimentaires a augmenté au cours des 50 dernières années, la majorité de la population mondiale amorce aujourd’hui seulement ce processus de transition nutritionnelle. Ainsi, la part des calories protéiques, relativement constante au début des années 60, connaît aujourd’hui une augmentation progressive due à une consommation plus importante de protéines animales au niveau mondial. Si cette tendance se généralise à l’ensemble de la population, les ressources disponibles risquent de s’avérer insuffisantes. Les travaux de prospective (cf. par exemple Agrimonde14) montrent que l'agriculture permettra de nourrir 9 milliards d'individus en 2050, sur la base d’une ration calorique moyenne d’environ 3000 kcal / personne / jour, et sous réserve que la part des produits animaux ne dépasse pas 500 kcal / personne / jour. Or ce seuil est déjà atteint voire dépassé dans les pays les plus peuplés, et les pays en transition nutritionnelle tendent aujourd’hui vers une consommation de 1000 kcal animales / personne / jour. Un changement des comportements alimentaires s’avère donc nécessaire. Diminuer la consommation de protéines animales au profit des protéines végétales permettrait de bénéficier d’un environnement nutritionnel positif. En parallèle, privilégier les protéines végétales permettrait d'éviter une tension accrue sur le prix des ressources et l'accroissement des inégalités. L’ACTUALITE Ø Changement climatique : quelle adaptation pour l’Homme et la biosphère ? Alors que les changements environnementaux, à l’échelle de la planète, se multiplient, la question de l’adaptation de l’Homme et de la biosphère devient de plus en plus prégnante. Publié en septembre 2013, « S’adapter au changement climatique. Agriculture, écosystèmes et territoires », ouvrage coordonné par Jean-François Soussana, directeur scientifique Environnement à l’INRA, poursuit la réflexion sur les défis à relever et propose une synthèse des points abordés lors de l’atelier ADAGE (Adaptation de l’agriculture et des écosystèmes anthropisés au changement climatique). Source : Soussana JF. (2013) S’adapter au changement climatique. Agriculture, écosystèmes et territoires. Collection Synthèses. Editions Quaé. Ø Maladie cœliaque et diversification alimentaire. Une étude prospective réalisée par une équipe de chercheurs norvégiens a examiné l’impact de l’âge au moment de l’introduction du gluten sur le risque de maladie cœliaque. Menée sur une cohorte de 107 000 enfants, l’étude a montré qu’une introduction tardive du gluten (après 6 mois) était associée à une augmentation du risque de maladie cœliaque (OR = 1,27). L’allaitement maternel poursuivi au-delà de 12 mois est également lié à une hausse de ce risque (OR = 1,49). Source : Størdal K, White RA, Eggesbø M. (2013) Early feeding and risk of celiac disease in a prospective birth cohort. Pediatrics ;132(5), e1202-9. L’AGENDA 22 février - 02 mars Paris Salon international de l’agriculture www.salon-agriculture.com 03 – 04 avril Dijon 9ème Congrès International Goût Nutrition Santé www.vitagora.com/congres 22 – 23 mai Paris Atelier international – Innovations système vers une agriculture durable www.inra.fr 1 Calvez et al. (2012) Protein intake, calcium balance and health consequences. European Journal of Clinical Nutrition, 66, 281-295. Sellmeyer et al. (2001) A high ratio of dietary animal to vegetable protein increases the rate of bone loss and the risk of fracture in postmenopausal women. The American Journal of Clinical Nutrition, 73(1), 118-122. 3 Zhang et al. (2005) Prospective cohort study of soy food consumption and risk of bone fracture among postmenopausal women. Archives of Internal Medicine, 165, 1890-1895. 4 Messina M & Lane B (2007) Soy protein, soybean isoflavones and coronary heart disease risk: where do we stand? Future Lipidology, 2(1), 55-74. 2 5 Cuevas et al. (2003) Isolated soy protein improves endothelial function in postmenopausal hypercholesterolemic women. European Journal of Clinical Nutrition, 57, 889–894. 6 Steinberg et al. (2003) Soy protein with isoflavones has favorable effects on endothelial function that are independent of lipid and antioxidant effects in healthy postmenopausal women. The American Journal of Clinical Nutrition, 78(1), 123-130. 7 Beavers et al. (2012) Exposure to isoflavone-containing soy products and endothelial function: A Bayesian meta-analysis of randomized controlled trial. Nutrition, Metabolism & Cardiovascular Diseases, 22(3), Pages 182-191. 8 Korde et al. (2009) Childhood Soy Intake and Breast Cancer Risk in Asian American Women. Cancer Epidemiology, Biomarkers & Prevention, 18(4), 1050-1059. 9 Wu et al. (2009) Dietary patterns and breast cancer risk in Asian American women. The American Journal of Clinical Nutrition, 89, 1145-1154. 10 Zhang et al. (2012) Positive Effects of Soy Isoflavone Food on Survival of Breast Cancer Patients in China. Asian Pacific Journal of Cancer Prevention, 13, 479-482. 11 Kang et al. (2012) Study on soy isoflavone consumption and risk of breast cancer and survival. Asian Pacific Journal of Cancer Prevention, 13, 995-998. 12 Shu et al. (2009) Soy Food Intake and Breast Cancer Survival. JAMA, 302(22), 2437-2443. 13 P. Combris, P. Martin d'après FAO Stat 14 Paillard, S.C., Treyer, S.C., Dorin, B.C., 2010, Agrimonde : Scénarios et défis pour nourrir le monde en 2050, Quae, Collection Matière à débattre et décider, Paris.