Les Antidépresseurs M. Polosan Département de Psychiatrie CHU Grenoble 1 Les antidépresseurs dans la dépression Classification AD Mécanismes d’action des AD Hypothèses physiopathologiques de la dépression Indications des AD Critères de choix des AD Réponse au traitement AD Indications de traitement AD au long cours Résistance au traitement AD Stratégies de potentialisation des AD 2 Classification des AD Chimique ADTC IMAO – hydrazinique (iproniazide), non-hydrazinique IMAO-A (rév.) – toloxatone (Humoryl), moclobémide (Moclamine) Non-IMAO, non-TC (2ème génération) Maprotiline (Ludiomil) –profil tt, E2 ~ ADTC Viloxazine (Vivalan) Miansérine (Athymil) Venlafaxine, milnacipran ISRS 3 Classification des AD Biochimique 1) Na – 5HT => ADTC ([-] recapture) – IMAO ([-] catabolisme) 2) ADTC – puissance inhibition recapture 5HT, Na Amines tertiaires – imipramine, clomi, amitriptyline –5HT / Na Amines secondaires – désipramine, nortriptyline – Na / 5HT 4 Classification des AD Biochimique 3) Briley & Moret, 1991 Classification en fonction de leur activité Na et 5HT (inhibition recapture) 4) Fieve, 1979 f (mécanisme d’action sur les systèmes MA) [-] recapture présyn [-] catabolisme [+] synthèse [+] recapture présyn [+] R/Na pré, post-syn 5 Classification biochimique actuelle des AD AD spécifiques AD non spécifiques Classification ISRS en fonction de leur puissance et sélectivité 6 Classification des AD En fonction de l’affinité pour les récepteurs 7 Classification thérapeutique des AD Kielholz, 1973 – 3 propriétés des AD : AD, anxiolytique, désinhibitirice 8 Classification thérapeutique actuelle des AD 1) AD psychotoniques (désinhibiteurs, stimulants) IMAO, AD dopaminergiques => asthénie, RPM 2) AD sédatifs (anxiolytiques) Amitriptyline, miansérine 3) AD intermédiaires Imipramine, clomi, ISRS, IRSNa 9 Mécanisme d’action des AD Systèmes neurotransmetteurs Dopamine Sérotonine Noradrénaline Acétylcholine Neuroplasticité mais avec des différences entre produits, car un effet sérotoninergique réduit la PLT 10 Transmission synaptique PA / bouton synaptique => canaux voltage-dépendants Ca => influx Ca => fusion des vésicules (NT) avec la membrane présynaptique = exocytose Restauration de nouvelles vésicules de stockage de NT Activation des R / NT postsynaptiques 11 Dépression et monoamines Théorie sérotoninergique - 5HT et perturbations de comportement chez déprimé (sommeil, appétit, anxiété, sexualité, impulsivité) - ↓ 5 HIAA dans LCR - Déplétion TRP - - Anomalies des R 5HT 1A et 2 chez suicidés (cortex F, hippocampe) Action des AD 12 Dépression et monoamines - Théorie noradrénergique Interaction étroite avec système 5HT ; action AD sur apathie, attention ↓ métabolites NA / LCR, urine Réserpine – effet dépressogène ↑ Rβ / cortex F des suicidés 13 État normal - pas de dépression Dépression : déficit en NT Augmentation des NT => retour à l ’état normal Augmentation des NT => retour à l ’état normal 14 Interactions 5HT - NA Action excitatrice et inhibitrice de la NA sur la libération de 5HT 15 Hypothèse des récepteurs monoaminergiques dans la dépression État normal Diminution des NT Hypersensibilisation des R par manque de NT 16 Hypothèse de l ’action des AD via les R des neurotransmetteurs Début tt AD Évolution temporelle des 3 effets des AD 17 Hypothèse de l ’action des AD via les R des neurotransmetteurs Hypersensibilisation des R => dépression Augmentation de NT => désensibilisation des R 18 Hypothèse de l ’action des AD via les R des neurotransmetteurs AD bloque pompe de recapture =>↑ [NT] synapse Augmentation du NT => désensibilisation des R IMAO : pas détruire le NT =>↑ [NT] synapse 19 Hypothèse monoaminergique de l ’action des AD sur l ’expression génique 20 Cinétique de la relation 5HT - récepteurs dans la dépression 21 Dépression: 5HT ↓, R hypersensibilisés, signal neuronal ↓ pour libérer 5HT Augmentation initiale de 5HT qu ’au niveau des régions somatodendritiques 22 23 24 Stress - dépression Dépression fragilisation ? 25 Vulnérabilité dépressive « Toxicité » de la dépression 26 Arguments épidémiologiques Prévalence de la dépression: 10 à 15 % vie entière en population générale Épisode dépressif unique est rare 58% de récidives parmi les patients asymptomatiques depuis 5 ans 50 à 75 % de récurrence 20 % de chronicisation 27 Arguments cliniques Trouble de l’humeur - maladie de l’adaptation ? Événements stressants => modifications personnalité ↓ coping ↑ vulnérabilité thymique Stress => modifications physiologiques (hippocampe) => perturbation fonctions cognitives nécessaires à l’adaptation => précipitation de l’épisode thymique Arguments indirects ↓ performances cognitives (mnésiques) chez les patients EDM récurrents versus EDM unique Arguments paracliniques 29 Modifications structurales et fonctionnelles cérébrales dans la dépression Cortex Préfrontal ↓ Volume ↓ taille neurone & densité ↓ densité gliale Changements du flux cerebral sanguin et du metabolisme glucose Hippocampe Amygdale ↓ Volume ↓ ↑ Volume ↓ taille neurone ↓ densité gliale Changements du flux cerebral sanguin et du metabolisme glucose 30 Arguments neuropathologiques niveau intracellulaire ↓ « cascades trophiques » dans la dépression (hippocampe, préfrontal) – études post-mortem niveau cellulaire réduction du neuropile, perte neuronale réduction de la connectivité intra-hippocampique 31 Physiopathologie des troubles de l’humeur Des monoamines….(données connues) Dysrégulation des systèmes NA, DA, 5HT, Ach et axe HPA Déplétion monoaminergique, hypersensibilité des R amines Aux neurotrophines (données récentes) Anomalies des « cascades » intracellulaires (Adenylyl-cyclase et PKC) Réduction du volume de certaines régions cérébrales et atrophie / perte cellulaire 32 Traitement antidépresseur et neuroplasticité 33 AD rétablissent le fonctionnement cérébral Neurocircuits - régulation affective cortex frontal cortex cingulaire antérieur striatum hippocampe 34 Les traitements antidépresseurs ont-ils des effets sur la neurogénèse et la plasticité? 35 Relation entre stress, antidépresseurs et plasticité neuronale Neurogenèse Morphologie/Plasticité Stress Ð Ð Antidépresseurs (IRSs) Ï Ï Stress + IRSs ? ?/ Ð tianeptine ∅ ∅ Stress + tianeptine Ï Ï 36 Neuroplasticité – révolution ? Arguments pour le rôle de la neuroplasticité et la résilience ç dans la pathophysiologie des troubles de l’humeur Anomalies neurochimiques associées à des modifications structurales dans certains neurocircuits critiques /fonctionnement affectif normal Imputabilité de la résistance aux traitements Traitement – objectifs effet trophique (connectivité synaptique) effet neurochimique (optimisation du fonctionnement des neurocircuits via le signal biochimique) stimulation des processus adaptatifs cognitifs (psychothérapie) 37 Critères de choix d’un AD Classification chimique et biochimique Situation clinique Comorbidité somatique Interactions médicamenteuses Risque d’IMV Atcd de réponse / AD Voie d’adm° Opinion du patient 38 Qualité de la réponse aux AD • Critères de guérison – période asymptomatique 2 mois (RDC), 4 mois (Beck), 6 mois (HAMD) • Symptômes résiduels - ! rupture psychosociale •Critères biologiques ? – test à la dexaméthasone Stades de la dépression récidivante et de son traitement Ansseau, 1995 39 Rechute, récidive, récurrence Rechute – réapparition du trouble après une phase de rémission (pendant ou peu après la convalescence) = 2mois > rémission épisode index Récidive – réapparition du trouble après le rétablissement complet de la santé Récurrence (fr++) – retour du processus pathologique du au réveil du pouvoir pathogène / agent - idée d’un processus latent (≠ récidive) 40 AD au long cours Risque de rechute (Geddes, Lancet, 2003) ↓ si maintien AD Risque de récurrence (Geddes, Lancet, 2003) ↓ si maintien AD Guérison – après rémission Pas affirmer lors d’une dépression récurrente 41 AD au long cours Justification AD au long cours Risque récidive ↓ Risque vital / récidive Phases de traitement Tt épisode Tt « consolidation » Tt fragilité émotionnelle et cognitive dans un sens plus adaptatif 42 AD au long cours population – cible ? • Critères de Frank et Kupfer • 3 EDM / 5 ans • 5 EDM / vie entière • 3 EDM /vie entière + s. résiduels, stresseurs, RS, atcd fam tr. humeur • Autres auteurs • 2 EDM / vie entière si EDM > 120 j (mauvaise réponse / tt) • Sévérité EDM actuel – HAMD > 24 • Âge début maladie : précoce • Atcd fam unipolaires récidivants • Récidive / rechute rapidement après l’arrêt du tt AD • Trouble personnalité, faible estime de soi • Âge > 65 ans • Isolement, deuils, faible niveau socio-éducatif • N° épisodes, leur durée, durée intervalles libres, s. résiduels 43 Dépendance et syndrome de sevrage Rares AD psychostimulants (IMAO, amineptine) Sujets à risque – atcd TCA, toxicophilie, alcoolisme Sd sevrage ADTC - 12 – 48 h après arrêt; pdt 2 semaines Troubles somatiques généraux (céphalées, asthénie, vomissements, anorexie, douleurs abdo) Anxiété, agitation Troubles du sommeil Troubles moteurs : akathisie, dyskinésie Fluctuations émotionnelles (allure maniaque, irritabilité) 20-50% des cas d’arrêt brutal 44 Dépendance et syndrome de sevrage Sd sevrage IMAO - 24h après arrêt tt; pdt 1-3 semaines Confusion, agitation, déréalisation Tr attention Malaises, céphalées, nausées, sialorrhée, sueurs Tremblements, myoclonies cauchemars Sd sevrage ISRS – 24 – 72h après arrêt; 2 semaines Vertiges, nausées, céphalées, léthargie Anxiété, paresthésies, tr équilibre, sueurs, insomnie, cauchemars Sd sevrage IRSNa Céphalées, vertiges, nausées, diarrhée, sensation de choc Phénomènes de rebond – réapparition symptômes, intensité >, transitoire Retentissement sur l’observance du tt, information du patient 45 Efficacité générale des antidépresseurs Résultats des meta-analyses taux de réponse à l’imipramine : 65% pas de différence entre les produits Résultats d’ensemble taux de réponse (diminution de 50% du score des échelles) 55 à 70% taux de rémission (disparition complète des symptômes) 10 à 20% de moins que les taux précédents 46 Facteurs de résistance au traitement Comorbidité comorbidité somatique antécédents de dysfonction thyroïdienne comorbidité psychiatrique troubles de l ’axe II abus de toxiques Caractéristiques de la dépression prédominance féminine dépression de type unipolaire charge familiale de dépression événements de vie négatifs Caractéristiques du traitement retard au traitement initial traitement inadéquat traitements associés dépressogènes 47 La résistance peut se définir comme l ’échec à un traitement 50% répondent complètement = guérison 30% répondent incomplètement = rémission partielle (symptômes résiduels) Environ 20% des patients déprimés ne répondent pas au traitement (Nierenberg, 1990 ; Thase, 1998) 48 Stades de résistance (Thase et Rush : 1997) Stade I : échec d ’un ATD majeur Stade II : I + échec d ’un 2ème ATD de classe différente Stade III : II + échec d ’un ATD tricyclique Stade IV : III + échec d ’un IMAO Stade V : IV + échec d ’une ECT bilatérale 49 En pratique : quelle attitude adoptez-vous ? 2 ème ATD d ’une autre classe Maintien de l ’ATD et potentialisation Échec d ’un 1er ATD 2ème ATD de même classe ECT Associations d ’ATD 50 Traitement des dépressions résistantes Stratégies de substitution pas de profil clinique prédisant une bonne réponse efficacité dans 1/3 - 1/2 des cas (même classe) 1/2 - 2/3 des cas (classe différente) Stratégies de potentialisation associations (ADTC + IRS ; ADTC + miansérine ; AD + NLP) stratégies d ’augmentation lithium hormones thyroïdiennes pindolol Autres anticonvulsivants ; neuroleptiques atypiques ; psychostimulants stratégies non médicamenteuses 51