Mécanismes d`acquisition des infections nosocomiales en pédiatrie

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Dossier
mt pédiatrie 2012 ; 15 (supplément 1) : 12-6
Mécanismes d’acquisition des infections
nosocomiales en pédiatrie
Mechanisms for contracting nosocomial infections in children
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 25/05/2017.
Catherine Doit
Edouard Bingen
Service de Microbiologie,
Hôpital Robert-Debré,
48 bd Sérurier,
75019 Paris
<[email protected]>
Résumé. Si les mécanismes d’acquisition des infections nosocomiales sont identiques à ceux
décrits dans la population adulte, certaines particularités de la population pédiatrique doivent
être connues et prises en compte dans la prévention de l’acquisition de ces infections : les
pathogènes spécifiques, absents ou très minoritaires chez l’adulte ; la dépendance du petit
enfant pour tout ce qui concerne les tâches de la vie quotidienne, l’affect et le développement
intellectuel, source de contact rapproché avec de multiples intervenants, augmentant le risque
de transmission de nombreux micro-organismes ; et les difficultés de maintenir des mesures
d’isolement chez ces petits patients.
Mots clés : infection nosocomiale, pédiatrie
Abstract. Given that the mechanisms for contracting nosocomial infections may be the same
as those described in the adult population, certain features of the paediatric population should
be understood and taken into account in order to prevent these infections : specific pathogens
which are either absent or at very low levels in adults ; the dependency of young children with
regards to all matters relating to everyday tasks, emotional and intellectual development ; close
contact with multiple healthcare workers and visitors which increases the risk of transmission
of many micro-organisms ; and difficulty in maintaining isolation procedures in young patients.
Key words: nosocomial infection, paediatric
U
ne infection est dite nosocomiale, lorsqu’elle est acquise
dans un établissement de santé. Ce
concept a été élargi récemment [1],
de façon à englober tout événement
infectieux en rapport avec un processus, une structure, une démarche
de soins, dans un sens très large et
on parle désormais plutôt d’infection
associée aux soins (IAS).
Définitions
et particularités de
la population pédiatrique
Tirés à part : C. Doit
12
Pour citer cet article : Doit C, Bingen E. Mécanismes d’acquisition des infections nosocomiales en pédiatrie. mt pédiatrie 2012 ; 15(supplément 1) : 12-6
doi:10.1684/mtp.2012.0453
doi:10.1684/mtp.2012.0453
mtp
Ainsi, l’IAS est une infection qui
survient au cours ou au décours
d’une prise en charge (diagnostique,
thérapeutique, palliative, préventive
ou éducative) d’un patient, et qui
n’était ni présente, ni en incubation au début de la prise en charge.
Un délai supérieur à la période
d’incubation ou un délai d’au moins
48 heures entre l’acte de soin et
le début de l’infection permet de
suspecter une IAS. Pour les infections du site opératoire, on considère
habituellement comme associées aux
soins les infections survenant dans
les 30 jours suivant l’intervention ou,
s’il y a mise en place d’un implant,
d’une prothèse, ou d’un matériel
prothétique, dans l’année qui suit
l’intervention. Toutefois, et quel que
soit le délai de survenue, il est recommandé d’apprécier dans chaque cas
la plausibilité de l’association entre le
geste de soin et l’infection [1].
Concernant les infections associées aux soins, l’enfant n’est pas
un petit adulte. En effet, selon le
type de population (prématurés, nouveaux nés, autres), les risques et les
agents pathogènes responsables de
ces infections sont différents. De plus,
si cette population partage les mêmes
facteurs de risque d’infections nosocomiales que la population adulte
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(hospitalisation en réanimation, procédures invasives,
etc.), elle se distingue par :
– l’immaturité du système immunitaire chez certains d’entre-eux (nouveau-nés, prématurés), et l’absence
d’immunité vis-à-vis d’un certain nombre d’agents pathogènes ;
– l’incidence de ces infections qui est inversement
corrélée à l’âge et au poids de naissance pour les prématurés ;
– l’absence de facteurs de co-morbidité excepté pour
quelques patients atteints de pathologies chroniques (cardiopathie, dysplasie broncho-pulmonaire, hémopathie,
mucoviscidose, drépanocytose, etc.) ;
– la prévalence de certains types d’infection ne touchant quasiment pas la population adulte, essentiellement
des infections virales respiratoires et digestives, sévissant
par bouffées épidémiques et reflets de l’activité virale
communautaire (épidémie hivernale de bronchiolite et de
gastro-entérite) ;
– la dépendance de l’enfant pour toutes les tâches
quotidiennes de la vie (toilettes, alimentation, gestion des
excreta) à la source de contacts fréquents, rapprochés et
intimes qui sont partiellement, voire totalement absents du
monde hospitalier « adulte » ;
– la multiplicité des intervenants allant des soignants aux parents en passant par les éducateurs et les
accompagnateurs (visiteurs de tout genre) nécessaires au
développement intellectuel et socio-affectif de l’enfant
qui augmente le risque de transmission croisée. Les services de pédiatrie ont privilégié depuis quelques années
l’aspect relationnel et convivial (visite libre à toute heure,
salle de jeux commune, accueil de nombreux intervenants
extérieurs (clowns, bénévoles, école à l’hôpital, etc.) compliquant l’organisation et le respect des règles d’hygiène ;
– la fréquence importante des hospitalisations pour
des pathologies infectieuses et de ce fait, une utilisation
importante d’antibiotiques ;
– un risque plus important de localisations secondaires en cas de septicémie (méningite, ostéo-arthrite) ;
– la tendance à porter fréquemment à la bouche les
mains et les objets (jouets) chez les nourrissons ;
– une absence de compréhension de l’enfant des
mesures d’isolement qui peuvent lui être imposées, donc
des difficultés à les faire respecter et à les maintenir.
Infections endogènes et exogènes
Le traitement et la maîtrise des infections nosocomiales
nécessitent la connaissance des processus physiopathologiques conduisant à l’infection et à l’analyse des voies
de transmission des micro-organismes. Schématiquement,
on peut distinguer les infections d’origine endogène se
développant à partir des flores oro-pharyngée, digestive, urogénitale ou cutanée du patient et les infections
d’origine exogène dont les micro-organismes proviennent
de l’environnement hospitalier (environnement au sens
strict (surfaces, air, eau) et environnement humain (autres
patients, soignants, visiteurs).
Toutefois, il existe au cours de l’hospitalisation de
rapides modifications de la flore endogène du patient
(alimentation modifiée, antibiothérapie, etc.), voire des
échanges avec la flore « environnementale ». Ainsi, des
bactéries multirésistantes peuvent coloniser la peau et les
muqueuses (Staphylococcus aureus résistant à la méticilline, Acinetobacter multirésistant) ou le tube digestif
(entérobactéries productrices de ß-lactamases à spectre
étendu) et être secondairement à l’origine d’infections. On
peut donc séparer les infections nosocomiales « primitivement » endogènes dues à des germes appartenant à la
flore habituelle du patient et les infections « secondairement » endogènes liées à des bactéries ayant colonisé le
patient après son admission.
Évolution de la flore digestive
et septicémie d’origine endogène
La flore fécale de l’enfant évolue rapidement après
sa naissance pour atteindre une composition très stable,
responsable d’un effet dit de « barrière » s’opposant à
l’implantation d’autres bactéries éventuellement ingérées.
Cette flore est essentiellement composée de bactéries de
type anaérobie strict (Bacteroides, Bifidobacterium, etc.) à
des taux s’élevant jusqu’à 1011 bactéries/g, d’Escherichia
coli et d’entérocoques à des taux de 106 à 109 bactéries/g
de selles, et de bactéries sous-dominantes (staphylocoques, autres entérobactéries), n’excédant pas des taux
de 107 bactéries/g de selles. Cet équilibre écologique
peut être affecté par de nombreux facteurs au cours de
l’hospitalisation, en particulier lors d’une anomalie du
péristaltisme ou à l’occasion d’une intervention chirurgicale. Mais, la cause majeure des modifications de la
flore digestive est l’administration d’antibiotiques, que ce
soient des antibiotiques administrés per os, incomplètement absorbés et atteignant le côlon sous forme active, ou
des antibiotiques administrés par voie parentérale et éliminés sous forme active par voie biliaire. Ces antibiotiques
peuvent entraîner une destruction de la flore de barrière
qui est, le plus souvent sensible et :
– provoquer la sélection et la pullulation de bactéries
endogènes résistantes ou de levures ;
– et/ou faciliter l’implantation et la pullulation de
bactéries multirésistantes d’origine exogène ;
– et/ou favoriser la colonisation d’autres sites de
l’organisme à partir du tube digestif (urines, etc.).
La complication la plus redoutable d’un déséquilibre
de la flore digestive est la survenue d’une septicémie
d’origine digestive par translocation. La translocation bactérienne intestinale est le passage de bactéries viables
mt pédiatrie, vol. 15, supplément 1, novembre 2012
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Mécanismes d’acquisition des infections nosocomiales en pédiatrie
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de la lumière du tube digestif via la lamina propria
vers les ganglions mésentériques. Ce phénomène se produit physiologiquement à un faible niveau au cours de
la période post-prandiale. Lors de pullulations microbiennes, les bactéries peuvent transloquer à une fréquence
élevée et être retrouvées en permanence au sein des ganglions mésentériques. L’aptitude à transloquer est variable
selon le type bactérien ; les bactéries les plus aptes sont
les entérobactéries et à un moindre degré Pseudomonas
aeruginosa, les cocci à Gram positif ont une aptitude intermédiaire, et les bactéries de type anaérobie strict ne sont
qu’exceptionnellement incriminées dans ce processus [2].
Chez le patient aux défenses immunitaires affaiblies soit
physiologiquement (prématurés, nouveau-nés), soit du fait
de leur pathologie (neutropénie, aplasie, etc.) ou de leur
traitement (chimiothérapie, corticothérapie, etc.), la translocation peut être à l’origine d’une septicémie [2, 3]. La
surveillance régulière chez ces patients, de la flore digestive, d’autant plus qu’ils sont soumis à une antibiothérapie,
permet d’adapter précocement l’antibiothérapie en cas de
syndrome septique.
Infection nosocomiale
d’origine exogène
Le plus souvent, l’origine de la contamination du
patient est exogène. Elle peut se faire selon trois modalités :
– par contact direct avec un sujet contaminé ou
contagieux (patient ou personnel/visiteur) ;
– par contact indirect soit avec un objet, un dispositif médical contaminé par un patient contagieux, soit par
l’intermédiaire des mains contaminées du personnel ;
– plus rarement, directement par une source environnementale (air, eau).
Transmission par contact direct
La transmission directe de micro-organismes d’une
personne à une autre peut se faire par trois voies selon
le type du micro-organisme et son réservoir :
– par contact direct avec la peau ou les liquides biologiques (selles, urines, sécrétions respiratoires, pus) d’un
patient, contaminés ou infectés. C’est le mode de transmission des germes cutanés, des agents de gastro-entérite,
des bactéries multirésistantes. Il participe également à la
transmission des virus respiratoires ;
– par les gouttelettes de sécrétions respiratoires :
les micro-organismes se retrouvent dans des particules
de gros diamètre (> 5 ␮m) émises lors de la toux, la
parole, l’éternuement. Elles sont projetées sur une courte
distance (environ 1 mètre), puis sédimentent rapidement.
Elles peuvent ainsi, contaminer une personne en se déposant sur ses conjonctives ou ses muqueuses nasales, lors
des contacts rapprochés. C’est le mode de transmission des
infections virales ORL et respiratoires (grippe, bronchiolite, rhinite. . .), de la coqueluche et du méningocoque ;
– par transmission aéroportée : les micro-organismes
sont émis par la toux et portés par des particules de
faible diamètre (noyaux de condensation ou « droplet
nuclei », d’un diamètre < 5 ␮m) qui ont la capacité
d’être véhiculées dans les flux d’air. La contamination peut
donc se faire à distance du sujet contagieux par inhalation. C’est le mode de transmission de la tuberculose
pulmonaire, de la rougeole, de la varicelle. Ces deux dernières infections se transmettent également par le mode
gouttelettes.
Le respect des précautions standard et des précautions
complémentaires d’isolement permet d’éviter la transmission de ces micro-organismes aux autres patients et
aux personnels et visiteurs : chambre individuelle ou
cohorting, précautions complémentaires de type contact,
gouttelettes et air.
Rôle de l’environnement
dans la transmission
des infections nosocomiales
L’environnement hospitalier est largement contaminé
par des micro-organismes d’origine humaine ou spécifiquement environnementale [4]. Cette contamination varie
qualitativement et quantitativement dans le temps, d’un
établissement à un autre et, au sein d’un même établissement, en fonction des services, des patients, des soins
et des techniques pratiquées. Les micro-organismes présents dans l’environnement hospitalier sont extrêmement
variés (bactéries, levures, champignons filamenteux, virus)
et peuvent appartenir aussi bien aux espèces opportunistes
qui ne manifestent leur virulence que sur un organisme
dont les défenses immunitaires sont affaiblies, qu’aux
espèces habituellement pathogènes pour l’homme. La
capacité de survie des micro-organismes sur des surfaces
inertes est extrêmement variable. Ainsi, le rotavirus est
capable de rester viable une dizaine de jours sur des
surfaces sèches inertes, alors que le virus respiratoire syncytial (VRS) ne survit que quelques heures [5, 6]. La
survie et éventuellement la multiplication des bactéries
dans l’environnement sont favorisées par la formation de
biofilms au niveau des surfaces. Staphylococcus aureus
et Acinetobacter baumannii sont les espèces parmi les
plus résistantes à la dessiccation et peuvent survivre plusieurs semaines à plusieurs mois sur des surfaces sèches,
devant Pseudomonas aeruginosa, certaines entérobactéries comme Serratia marcescens et les entérocoques qui
peuvent survivre plus d’une semaine [7, 8]. Escherichia
coli, est beaucoup moins résistant à la dessiccation [8].
Des survies particulièrement longues, atteignant plus de 6
mois sont décrites, en particulier avec certaines souches
mt pédiatrie, vol. 15, supplément 1, novembre 2012
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épidémiques de S. aureus résistant à la méticilline [9]. La
capacité de sporuler, propre à certaines bactéries comme
Clostridium difficile leur assure une persistance de plusieurs mois dans l’environnement [10].
La capacité d’induire, ensuite, une infection chez un
patient découle d’une combinaison de facteurs associant
le niveau d’expression des facteurs de virulence du microorganisme, sa quantité ou sa concentration, le mode de
contamination (aéroportée, hydrique. . .) et la réceptivité
de l’hôte.
La part des infections nosocomiales liée à la contamination de l’environnement hospitalier est encore mal
documentée, à l’exception de celles liées à quelques
micro-organismes comme Legionella spp., Aspergillus
spp. ou les mycobactéries atypiques [4,11-13]. La place
de la transmission directe interhumaine est reconnue
comme prépondérante par rapport à la transmission liée
à l’environnement. Toutefois, certaines études ont permis
d‘incriminer des sources environnementales à l’origine
d’infections nosocomiales [4, 14] :
risque de transmission aérienne (Aspergillus ou autres
champignons filamenteux) et d’infection chez des malades
immunodéprimés à l’occasion de travaux [11] ;
– risque de transmission aérienne à partir d’un
réservoir aqueux par les humidificateurs, les nébuliseurs
(Acinetobacter spp., Pseudomonas aeruginosa, Legionella
pneumophila) [4, 15], les réseaux d’eau chaude ou les
systèmes de traitement d’air pour Legionella pneumophila
[16, 17] ;
– transmission de Mycobacterium xenopi [12], Mycobacterium chelonae [13], Pseudomonas aeruginosa [4] ou
du virus de l’hépatite C à partir de dispositifs médicaux
[18] ;
– transmission de Pseudomonas aeruginosa ou
d’autres bactéries résistantes (Serratia marcescens, Burkholderia cepacia, Stenotrophomonas maltophilia, etc.)
à partir d’antiseptiques ou de perfusats contaminés
[4, 14, 19].
En dehors des cas impliquant des micro-organismes
d’origine strictement environnementale comme Legionella
spp. ou Aspergillus spp., la présence d’un microorganisme dans l’environnement du patient n’est pas,
à elle seule, une condition suffisante pour l’impliquer
comme source responsable de la survenue d’une infection.
Il est en effet difficile de démontrer si cette contamination environnementale est la cause ou la conséquence
de l’infection. Malgré ces incertitudes, la maîtrise de
l’environnement apparaît indispensable dans les établissements de santé, afin de protéger les patients, en particulier
les plus fragiles : mesures d’isolement protecteur pour
les patients en aplasie dans des locaux à environnement maîtrisé (air, eau), procédures de bionettoyage de
l’environnement (utilisation d’un détergent désinfectant),
de désinfection ou stérilisation du matériel et des dispositifs médicaux partagés.
Rôle du personnel soignant,
des visiteurs et intervenants variés
dans la transmission des infections
nosocomiales
L’ensemble des personnes en contact avec les patients
dans les établissements de santé peuvent intervenir à deux
niveaux dans la transmission des infections nosocomiales.
D’une part, parce qu’ils peuvent être eux-mêmes
contagieux et transmettre des micro-organismes aux
patients et aux autres personnels : coqueluche, tuberculose, infections virales (grippe, varicelle, rougeole,
gastro-entérite). La contagiosité de ces infections précède
le début des signes cliniques, et certaines de ces infections
peuvent être peu ou asymptomatiques. Si l’établissement
peut avoir une certaine lisibilité sur le statut immunitaire de son personnel vis-à-vis des pathologies pour
lesquelles il existe une vaccination (coqueluche, rougeole,
varicelle, grippe) et inciter le personnel non immunisé
à se faire vacciner, ces vaccinations ne sont pas obligatoires et la couverture vaccinale du personnel est loin
d’être optimale. De plus, sont exclus de cette politique,
tous les intervenants extérieurs (éducateurs, bénévoles,
stagiaires, étudiants, etc.) qui ne dépendent pas de la
médecine du travail de l’établissement. Ainsi, les établissements de santé sont régulièrement confrontés à des
situations de découverte de pathologie infectieuse contagieuse chez un membre du personnel ayant pu exposer
une cohorte de patients et de personnel [20]. Les parents
peuvent être eux-mêmes une source de contamination
de leur enfant hospitalisé et de ses voisins. Ainsi la responsabilité des parents a pu être mise en cause dans
des cas de coqueluche acquise dans les services de
néonatologie [21].
D’autre part, tous ces intervenants (et c’est surtout
le cas du personnel soignant) peuvent véhiculer certains
micro-organismes, sans être eux-mêmes contaminés, dans
la flore transitoire présente sur leurs mains (transmission
par manuportage). La survie des micro-organismes sur
les mains peut être prolongée : plusieurs heures pour le
rotavirus [22], environ 30 minutes pour le VRS [6]. Le
respect des précautions standard et surtout de l’hygiène
des mains avant tout contact avec le patient permet de
réduire cette transmission. Le port de gants pour tout
contact avec les liquides biologiques, et notamment lors
du change des couches et de la manipulation des excreta
qui peuvent contenir des quantités très importantes de
micro-organismes. Ainsi des taux de 1011 rotavirus/g de
selles peuvent être retrouvés à la phase aiguë de la maladie [23], alors que la dose infectante est elle-même très
faible. Ainsi, des études réalisées chez des volontaires
sains adultes ont montré que l’ingestion d’environ 10 particules virales suffit à déclencher l’infection [24]. De même,
les entérobactéries produisant des ß-lactamases à spectre
mt pédiatrie, vol. 15, supplément 1, novembre 2012
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Mécanismes d’acquisition des infections nosocomiales en pédiatrie
étendu peuvent atteindre des taux de 106 à 109 /g de
selles et ce d’autant plus que le patient est traité par des
antibiotiques.
10. Gerding DN, Muto CA, Owens RC Jr. Measures to control and
prevent Clostridium difficile infection. Clin Infect Dis 2008 ; 46 (suppl
1) : S43-9.
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Conclusion
La prévention des infections dans les services de pédiatrie impose :
– un respect scrupuleux des précautions standard par
le personnel soignant ;
– une information spécifique de l’ensemble des intervenants sur les risques spécifiques de cette population y
compris des parents (vaccinations recommandées, respect
des mesures complémentaires, mise à disposition de produits hydro-alcooliques, de masques, etc.) ;
– une organisation permettant de détecter rapidement et d’isoler dès le service d’urgence les patients
potentiellement contagieux ;
– un usage raisonné des antibiotiques (réévaluation
rapide de l’antibiothérapie initiale, désescalade thérapeutique, durée adéquate, etc.) de façon à réduire la pression
de sélection antibiotique.
Conflits d’intérêts : aucun
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