l’émergence des S. aureus communautaires méticilline-R
(souvent sensibles aux macrolides, clindamycines, ami-
nosides, cotrimoxazole, quinolones) qui circulent en ville
mais qui peuvent aussi diffuser à l’hôpital si les conditions
d’hygiène sont déficientes [8].
–Les entérocoques, en particulier E. faecium,
peuvent être résistants à la fois à l’ampicilline, à
l’ensemble des glycopeptides, au cotrimoxazole et plus
rarement au linézolide ou à la daptomycine. De plus,
les entérocoques colonisent le tube digestif de nombreux
mammifères, et peuvent survivre de longues périodes dans
l’environnement, rendant le contrôle hospitalier de ce
germe particulièrement difficile [1]. Si l’entérocoque fait
partie des bactéries responsables d’IAS (environ5à10%
des cas), contrairement aux États-Unis, les infections dues
à des souches résistantes sont exceptionnelles en pédia-
trie. En France, elles surviennent plus fréquemment dans
les services d’Oncologie [9].
Depuis de nombreuses années, des BGN multi-
résistants (BGN-MR) appartenaient essentiellement aux
espèces P. aeruginosa, Acinetobacter sp, Burkholderia
cepacia, Xanthomonas maltophilia. Ils étaient retrou-
vés occasionnellement chez des patients présentant des
pathologies sous-jacentes sévères [1]. Ces pathogènes
opportunistes dont l’une des caractéristiques est de per-
sister dans l’environnement ont été responsables de
nombreuses épidémies nosocomiales. Acinetobacter sp.
est devenu résistant à l’ensemble ou presque des anti-
biotiques (ou totorésistant) et les épidémies ont conduit
à la fermeture temporaire des services. Les infections bac-
tériémiques à P. aeruginosa sont grevées d’une très lourde
mortalité [10].
Émergence
des entérobactéries multirésistantes
Avec l’émergence des entérobactéries multirésistantes,
une nouvelle étape inquiétante a été franchie et on
peut parler de pandémie. Les entérobactéries (dont prin-
cipalement E. coli) sont des commensaux du tractus
gastro-intestinal, responsables d’infections variées, même
chez des sujets sans pathologie sous-jacente : infections
urinaires, infections digestives, infections néo-natales,
septicémies par translocation [11, 12]. Ces bactéries ne
présentaient auparavant pas de problèmes de traitement
antibiotique, mais au cours des dernières années, leur
taux de résistance a augmenté de fac¸on importante. Deux
mécanismes de résistance prédominent : production de
bêtalactamases à spectre étendu (BLSE [principalement de
type CTX-M]) et et de carbapénémases (dont NDM-1).
Les BLSE sont des enzymes qui hydrolysent l’ensemble
des pénicillines et des céphalosporines à l’exception des
céphamycines (céfotixine, céfotétan), du moxalactam et
des carbapénèmes. Elles sont portées par des plasmides et
partiellement par les inhibiteurs de bêta-lactamases. Les
premières BLSE ont été mises en évidence dans les années
1980-1990 [13]. Elles dérivaient des bêta-lactamases plas-
midiques classiques par mutation ponctuelle et ont été
décrites initialement chez Klebsiella pneumoniae. Elles
ont été responsables d’épidémies nosocomiales mais elles
ont eu une diffusion limitée dans la communauté. Plus
récemment, de nouvelles BLSE provenant de bactéries
de l’environnement de type CTX-M ont émergé et ont
diffusé dans le monde entier, non seulement à l’hôpital
mais surtout dans la communauté [14]. À ce jour, plus
de 80 variants ont été décrits appartenantà5grands
groupes : M1, M2, M8, M25, M9. Ces souches possèdent
des mécanismes de résistance multiples associés (aux ami-
nosides, cotrimoxazole, tétracyclines et quinolones). Les
souches productrices de BLSE sont de plus en plus fré-
quemment isolées en France chez des enfants consultant
dans les services d’urgences, de pédiatrie, mais aussi dans
les cabinets pédiatriques de ville, reflétant leur acquisi-
tion communautaire. On les retrouve en portage vaginal
faisant le lit des infections materno-fœtales à E. coli BLSE.
Il devient donc très difficile de cibler des patients à risque
de portage de ces souches et de cibler les dépistages
à l’admission des patients. Un renforcement global des
mesures d’hygiène de base est donc nécessaire. Parmi les
facteurs de risque favorisant le portage des E-BLSE, les trois
les plus importants sont : la prise d’antibiotiques au cours
des trois derniers mois, en particulier les céphalospo-
rines et les quinolones, le séjour dans un pays d’endémie
(pourtour méditerranéen, Asie du Sud-Est (OR = 18),
Inde (OR : 145), Afrique (OR = 7,7 et une hospitalisa-
tion récente [15]. Le traitement de ces infections sévères
repose sur l’utilisation des carbapénèmes [16]. La fré-
quente utilisation de cette famille d’antibiotiques favorise
l’émergence de souches résistantes par production de car-
bapénémases. Ces souches résistantes aux pénèmes sont
généralement résistantes aux mêmes antibiotiques que les
E-BLSE. Certes, ces souches apparaissent encore sensibles
«in vitro »à la colimycine ou à la tigécycline ou à la fosfo-
mycine, mais l’activité clinique réelle de ces molécules est
relativement modeste et une perte de chance existe pour
les malades infectés par ce type de bactérie. Un retour
à l’ère pré-antibiotique pour ces patients est un scénario
probable et ce, depuis des années [4]. C’est pour ces rai-
sons qu’il a été proposé, pour les infections non sévères,
de prescrire d’autres molécules éventuellement actives sur
les souches productrices de BLSE : aminosides, association
pipéracilline-tazobactam, céfoxitine, temocilline, ceftazi-
dime, cefepime, association non orthodoxe d’inibiteurs de
-lactamines avec une céphaloporine ayant des CMI plus
basses que le céfotaxime ou la ceftriaxone [17, 18].
mt pédiatrie, vol. 15, suppl´
ement 1, novembre 2012 39
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