Vaisseaux, Coeur, Poumons n Numéro Spécial n 2009
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Les résultats de l’étude HF-ACTION multi-
centrique randomisée contrôlée étudiant l’effet
de l’entraînement sur la survie dans l’insuffisance
cardiaque viennent d’être publiés très récemment
(34). Cette étude inclut 2.331 patients souffrant
d’insuffisance cardiaque stable avec une frac-
tion d’éjection ventriculaire gauche < 35% en
classe 2 à 4 de la NYHA. Les patients étaient
randomisés dans un groupe entraîné versus con-
trôle. Les détails du programme d’entraînement
sont repris dans le tableau 2. Il comprenait une
phase supervisée de 36 séances/3 mois suivie
d’une phase d’entraînement à domicile. Les
patients randomisés dans le groupe non entraînés
recevaient une information recommandant
une activité physique journalière modérée à
intense de 30 minutes par jour. L’ergospirométrie
était contrôlée à 3, 12 et 24 mois, la distance
de marche en 6 minutes également à 3 ans et
4 ans de suivi.
Un total de 736 patients a réalisé 36 séances
supervisées sur 3,9 mois. 92 à 95% des patients
étaient sous β bloquants et sous inhibiteurs de
l’enzyme de conversion de l’angiotensine dans
les 2 groupes. Les groupes étaient comparables
en termes de gravité de l’insuffisance cardiaque,
de comorbidités, de traitement et d’aptitude
aérobie.
A 3 mois, la distance marchée en 6 minutes
(20 vs 5 m, p < 0,01), la durée du test d’effort
(1,5 vs 0,3min, p < 0,001) et la V02 pic (0,6 vs
0,2ml/kg/min, p < 0,001) étaient significative-
ment améliorées par l’entraînement. A 12 mois,
l’amélioration de l’ergospirométrie était main-
tenue, mais pas celle de la distance de marche.
Une analyse post hoc de la classe NYHA montrait
également une amélioration de 1 classe pour
30% du groupe entraîné, versus 25% dans le
groupe non entraîné (p = 0,03).
L’entraînement ne provoquait pas d’augmentation
d’événements indésirables comparés au groupe
contrôle. Les raisons principales d’arrêt de
l’entraînement au cours d’une séance étaient
la survenue d’angine de poitrine (10%) et
d’arythmies (7%).
Cette étude n’a pas montré de différence significa-
tive en termes de mortalité ou d’hospitalisations
globales. Néanmoins, après ajustement pour les
variables confondantes (durée du test d’effort,
fraction d’éjection ventriculaire gauche, score
de dépression de Beck, histoire de fibrillation ou
flutter auriculaire) ainsi que pour l’étiologie de
l’insuffisance cardiaque, l’entraînement physique
réduisait la mortalité ou le taux d’hospitalisations
toutes causes de l’ordre de 11% (OR: 0,89; IC:
0,81-0,99; p = 0,03) ainsi que la mortalité car-
diovasculaire ou les hospitalisations pour insuf-
fisance cardiaque de l’ordre de 15% (OR: 0,85;
IC: 0,74-0,99; p = 0,03). L’âge, la race, le sexe, la
fraction d’éjection ventriculaire gauche, la classe
fonctionnelle NYHA, l’étiologie de l’insuffisance
cardiaque et les traitements n’influençaient pas
les effets de l’entraînement.
Les résultats de cette étude peuvent apparaître
décevants pour les défenseurs de l’entraînement
physique. Il existe néanmoins une série d’éléments
ayant probablement réduit la différence entre
les groupes: tout d’abord, l’étude était basée sur
l’intention de traiter, incorporant les patients
même si les prescriptions de traitement n’ont pas
été suivies. Par ailleurs, le manque d’adhérence
à l’entraînement à domicile ainsi qu’un ‘cross-
over’ naturel entre les groupes, puisque 55% des
patients dans le groupe non entraîné étaient
insatisfaits de leur attribution et effectuaient
probablement une activité physique plus impor-
tante que celle recommandée. Il est important
de noter que la diminution de l’ordre de 15% de
la mortalité cardiovasculaire et des hospitalisa-
tions pour insuffisance cardiaque induite par
l’entraînement est équivalente à celle obtenue
dans l’étude CHARM (35). Néanmoins, dans
l’étude CHARM, seulement 55% des patients
recevaient des doses adéquates de β bloquants
contre plus de 90% dans cette étude.
Cette étude montre donc que l’entraînement
physique dans l’insuffisance cardiaque peut être
réalisé de manière sûre et qu’il améliore le de-
venir des patients à terme en réduisant à la fois
le taux d’hospitalisations et la mortalité après
ajustement pour les facteurs confondants.
A la lumière de ces résultats, les nouvelles
recommandations de l’ESC (4) reconnaissent
les programmes de réentraînement physique
comme partie intégrante du traitement pour
tout patient souffrant d’insuffisance cardiaque
stable sans limitation à un sous-groupe particu-
lier (classe 1A). Bien que les patients souffrant
d’insuffisance cardiaque sont souvent considérés
à haut risque de réentraînement, une revue at-
tentive des études précitées ne met en évidence
qu’un taux faible d’événements indésirables. Ce
taux est également faible dans les programmes
d’entraînement à domicile; néanmoins, il est ha-
bituellement recommandé que les patients par-
ticipent d’abord à un programme d’entraînement
supervisé, permettant à la fois la surveillance,
l’administration des conseils d’entraînement, de
sécurité et d’autogestion et favorisant également
la restauration de la confiance du patient dans
ses propres capacités à réaliser des efforts sans
risques majeurs (36).
Modalités d’entraînement
Dans la vaste majorité des études sur
l’entraînement physique chez les patients insuf-
fisants cardiaques, l’entraînement en endurance
a été utilisé. Une revue des 9 études qui furent
incluses dans la méta-analyse ExtraMATCH nous
apprend que ces patients ont été entraînés à
une intensité d’exercices entre 60 et 80% de la
VO2 pic ou de la fréquence cardiaque pic (2). Il
existe par contre une importante variation quant
au type d’exercice, à la durée et à la fréquence
d’entraînement (Tableau 2). Cependant, il est
bien connu que dans la plupart des études rela-
tives à l’exercice, un plateau est atteint en 16-26
semaines d’entraînement. Selon l’état clinique
des patients, certains centres préfèrent débu-
ter par de courtes périodes d’entraînement, de
l’ordre de 10 minutes avec une augmentation
progressive à 30-60 minutes, le plus souvent
à raison de 3 fois par semaine. Il est néces-
saire d’inclure des phases d’échauffement et
de ‘refroidissement’ d’au minimum 5 minutes
durant les séances d’entraînement. Comme
démontré dans une publication de revue par
Smart et al. (37), on peut s’attendre grâce à
l’entraînement à une augmentation de la VO2
pic de l’ordre de 10-30%. A partir d’une revue
‘Cochrane collaboration’, les auteurs concluent
que le bénéfice de l’entraînement en termes
d’aptitude aérobie dépend de la dose d’exercices
réalisée, de la durée des périodes d’exercice, de
la durée et de la fréquence de l’entraînement.
A nouveau, le bénéfice du réentraînement ne
peut être exclusivement attribué à la modeste
amélioration du remodelage ventriculaire, de
la fraction d’éjection ventriculaire gauche (24)
et du volume d’éjection systolique (11). La par-
ticipation de modifications périphériques a été