Chirurgie Thoracique et Cardio-Vasculaire 2015 ; 19(1) : 9-14 13
chirurgie thoracique
diérentes séries de la littérature n’est donc pas très concluante
quant au risque de la PT pour PB. Si l’on considère maintenant les
pneumonectomies dans leur ensemble, l’étude de Rivera et al.,
recensant 5975 pneumonectomies extraites de la base de don-
nées nationale Epithor®, montre que la pneumonectomie pour
PB a une morbidité et une mortalité significativement plus éle-
vées que pour PM (respectivement 53% vs 39% pour la morbidi-
té et 22% vs 6,4% pour la mortalité). Le facteur retrouvé comme
influençant le plus la mortalité postopératoire était la chirurgie
réalisée en urgence [14].
Dans notre étude, nous avons constaté que la mortalité à 90jours
augmente lorsque le VEMS diminue, mais également lorsque la
scintigraphie de perfusion du côté opéré diminue, ce qui est
plus surprenant. Cependant, nous avons aussi mis en évidence
une corrélation entre ces deux mesures. En eet, nous sommes
dans le cas particulier de patients ayant déjà été opérés et pour
certains la perfusion du côté opéré était déjà très faible, nous
pouvons donc penser que dans ce cas le VEMS est également
globalement altéré. Nous pensons que dans ce cas particulier,
c’est en eet le VEMS qui influence les suites opératoires, mais
qu’il va être altéré lorsque la perfusion du côté opéré est faible.
D’ailleurs, l’altération du VEMS, ainsi que du VEMSppo sont éga-
lement retrouvées comme des facteurs de risque de pneumo-
pathie postopératoire. Dans la série de Daniel et al. la baisse du
transfert du monoxyde de carbone (DLCO) lors des évaluations
préopératoires est aussi un facteur aectant la morbidité et la
mortalité postopératoire [5], mais nous n’avons pas pu étudier
ce facteur du fait d’un manque d’information dans notre série.
De même que pour les pneumonectomies, les interventions du
côté droit ne sont pas sans conséquences. Dans notre série, mais
aussi dans celle de Chataigner et al. nous retrouvons plus de fis-
tules postopératoires de ce côté [9]. Nous avons aussi retrouvé
qu’il y avait plus de réinterventions de ce côté, mais à la dié-
rence de Chataigner et Jungraithmyr, nous n’avons pas montré
d’augmentation significative de la mortalité postopératoire lors
des PT du côté droit [7,9].
Dans notre étude, la mortalité postopératoire est de 11,8% dans
le groupe PM, augmentant à 13,2% à 90 jours. Si nous considé-
rons maintenant 14 séries importantes, la mortalité postopéra-
toire après PT pour PM est comprise entre 2,04 et 15,5% [4-11,
15-19]. On peut donc considérer que nos chires sont accep-
tables en comparaison avec la littérature.
Dans notre série, nous remarquons que, malgré une mortalité
postopératoire plus élevée, la survie à long terme est légèrement
meilleure pour les PB : 35,3% vs 30,3% à 5 ans, mais cette dif-
férence n’est pas significative. Dans plusieurs séries de la littéra-
ture, on retrouve cette tendance, avec une survie à 5 ans entre
50 et 70% pour les PB, versus 26 à 54% pour le PM. Cependant
cette diérence n’est pas significative [7-10, 16].
Peu de séries ont étudié les facteurs influençant la survie à long
terme. Pour Tabutin et al. [19] un âge supérieur à 65 ans, un taba-
gisme actif au moment de la PT, les complications cardiorespi-
ratoires postopératoires et les infections du site opératoire, in-
fluencent péjorativement la survie à long terme. Dans notre série,
nous avons remarqué que, pour les CBNPC, la survie à long terme
augmente avec l’intervalle entre la première intervention et la PT.
Ce phénomène est probablement en rapport avec la proportion
plus importante de deuxième cancer primitif par rapport aux ré-
cidives de cancer lorsque cet intervalle augmente. Cependant,
les critères de Martini [3] ne semblent pas s’adapter à notre série,
où on retrouve moins de 6% de récidive, ce qui semble très peu.
En eet, dans le cas particulier des PT pour CBNPC, une grande
majorité des patients (93% dans notre série) ont déjà eu une ré-
section anatomique (lobectomie ou bilobectomie), donc la ré-
cidive dans le même site anatomique (lobe) n’est pas possible.
Dans notre série de PT pour CBNPC, seulement un patient a eu
une résection infralobaire et 5 une lobectomie associée à une ré-
section infralobaire. Parmi ces 6 patients, seulement 2 ont eu une
nouvelle lésion dans les 2 ans et sont donc considérés comme
ayant eu une récidive selon les critères de Martini. De plus, il est
très rare de pratiquer une PT pour un patient présentant une mé-
tastase controlatérale ou extrapulmonaire. Donc, selon Martini,
la dernière façon de considérer le cancer pulmonaire réséqué
lors d’une PT comme une récidive est la présence de métastase
dans les relais lymphatiques communs dans les deux ans après
la première chirurgie. Cela n’était le cas que pour deux patients
dans notre série (récidive ganglionnaire unique). On note cepen-
dant que dans certaines séries de PT, il y a à peu près le même
nombre de récidive que de deuxième cancer primitif [10,17], mais
dans ces séries, les critères de Martini ont été légèrement modi-
fiés. Par exemple Terzi et al. considèrent comme une récidive les
lésions de même histologie localisées au niveau des limites de ré-
section parenchymateuses ou au niveau de la suture bronchique,
cependant ils n’ont pas mis en évidence de diérence en terme
de survie à long terme entre ces deux groupes [17]. Pour d’autres
auteurs, les critères sont plus vagues et ils retrouvent une ma-
jorité de récidive locale [7,16], mais finalement les auteurs qui
suivent strictement les critères de Martini ont trouvé une majorité
de deuxième cancer primitif, comme nous [6]. Plus récemment
Antakli et al. dans leur étude sur les deuxièmes cancers primitifs
du poumon ajoutent deux conditions en faveur d’un deuxième
primitif qui sont la variation de l’ADN et l’association à des lésions
précancéreuses [20]. Au total, il est dicile de comparer les dif-
férentes études sur le nombre de récidive et de 2e primitif et les
conséquences sur la survie à long terme. Cependant le fait que
l’intervalle entre les deux interventions ait un impact sur la survie
à long terme a probablement un lien avec l’augmentation de la
proportion de deuxième premier cancer avec le temps.
L’autre facteur semblant influencer la survie à long terme dans
notre série est le stade. Ce facteur est retrouvé de manière si-
gnificative par plusieurs auteurs [9,10,17], avec des chires plus
élevés que les nôtres ; la survie à 5 ans allant de 51 à 71,5% pour
les stades I, de 20 à 36% pour les stades II et de 15 à 18% pour
les stades III.
5. CONCLUSION
La PT pour PB est une intervention risquée, surtout lorsqu’elle
est pratiquée en urgence. La PT pour cancer reste une inter-
vention dont la morbimortalité est acceptable. Dans le cas des
CBNPC, les résultats à long terme sont meilleurs lorsqu’il s’agit
d’un stade précoce et lorsque l’intervalle avec l’intervention ini-
tiale est élevé.
RÉFÉRENCES
1. Groome PA, Bolejack V, Crowley JJ et al. IASLC International Staging
Committee; Cancer Research and Biostatistics; Observers to the
Committee; Participating Institutions. The IASLC Lung Cancer Staging
Project: validation of the proposals for revision of the T, N, and M des-
criptors and consequent stage groupings in the forthcoming (seven-
th) edition of the TNM classification of malignant tumours. JThorac
Oncol 2007;2:694-705.
2. British Thoracic Society Society of Cardiothoracic Surgeons of Great
Britain Ireland Working Party. Guidelines on the selection of patients
with lung cancer for surgery. Thorax 2001;56:89-108.