EPICURE (-342-270 av. J.-C.)

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EPICURE (-342-270av.J.-C.)
Idée clef : « Celui qui ne sait pas se contenter de peu ne sera jamais content de rien. »
Biographie
Son prénom, en grec Epikouros, signifie « celui qui secourt ». Six ans après la mort de Platon
et dix-neuf ans avant celle d’Aristote, il naît dans un milieu modeste. Il grandit à Samos, île
peuplée de colons athéniens. Son père est instituteur et sa mère récite des prières rituelles,
ayant une fonction magique. Ces séances de purification, auxquelles la tradition veut qu’il ait assisté enfant, sont
peut-être à l’origine de sa méfiance ultérieure envers les superstitions et autres explications divines. Le jeune
Épicure vit donc dans les marges géographique, culturelle et sociale de la Grèce antique, au sein d’une fratrie de
quatre garçons. Ce serait par mépris pour ses professeurs de Lettres, incapables de lui expliquer la signification du
chaos chez le poète Hésiode, qu’il serait venu à la philosophie. Il se vantait d’être autodidacte. Il suit à Téos, les
cours du philosophe Nausiphane, disciple de Démocratie, inventeur de la théorie atomiste. L’influence de
Démocrite lui inspire une vision matérialiste de l’Univers formé d’atomes qui se meuvent et se combinent au
hasard des rencontres, s’opposant ainsi aux philosophies de Platon et d’Aristote. Il vint à Athènes à l’âge de 18
ans pour effectuer son service militaire. Il retourne ensuite vivre près de Samos puis à Mytilène, sur l’île de
Lesbos, où il commence à enseigner sa philosophie, puis à Lampsaque. Mais sa philosophie suscite l’hostilité. Il
décide finalement, en 306 avant J.-C., de s’installer à Athènes, en -306, où il achète un jardin. Là, il installera son
école, où il enseignera le restant de ses jours, c’est pourquoi elle est surnommée « l’école du jardin ». C’est à cette
période qu’il rédigea la plupart de ses œuvres, 300 semble-t-il ; mais très peu d’entre elles ont été conservées :
trois lettres et des fragments…
L’école a la forme d’une communauté amicale, animée discussions, autour du maître. La figure d’Epicure était
prédominante : il aurait lui-même posé comme principe : « Fais tout comme si Epicure te voyait. » Les épicuriens
pratiquaient des exercices spirituels comme méditer les textes du maître sous forme de résumés (cf. le
tetrapharmakon). La philosophie d’Epicure a pu choquer et susciter de violentes attaques. Comme il affirme que
le plaisir est le bien, qu’il n’y a pas à se préoccuper des dieux, ses adversaires ont dépeint Épicure comme un
impie, un débauché, voire « un pourceau », bien qu’il ait en fait prôné la sobriété. Le Jardin est pourtant passé
pour un lieu de débauche, mais de telles accusations semblent calomnieuses. Timocrate, le frère de son ami
Métrodore, prétend qu’il vomit deux fois par jour à force de se goinfrer. Sa paresse est telle, dit-on, qu’il ne se
lève jamais de sa litière. On le présente aussi comme un coureur de jupons libidineux, profitant du fait que
le « jardin » accueille des femmes, etc. Au contraire, d’après ses disciples, la vie qu'il menait dans son jardin
semble simple et frugale : « Mon corps est comblé de plaisir en me nourrissant de pain et d’eau », assure-t-il. Il
était végétarien (il écrivit un jour à un de ses disciples pour lui demander de lui apporter – comble du luxe – un
petit pot de fromage), « un verre de vin lui suffisait, et il buvait de préférence de l'eau. » La maladie empêchait
Épicure de quitter son lit et lui interdisait tout excès.
Il légua son jardin à condition que sa philosophie fût enseignée et qu’on célèbre chaque mois une fête à son
honneur. Sa doctrine a connu un très grand succès dans l’Antiquité, notamment à Rome. Il est mort d’une
rétention d'urine causée par la pierre, après une maladie qui a duré quatorze jours.
Il nous reste, de toutes les nombreuses œuvres d’Epicure, seulement trois lettres et des fragments. La Lettre à
Hérodote traite de la physique, la Lettre à Pythoclès traite des phénomènes célestes et la Lettre à Ménécée traite
de la morale et du bonheur. Les fragments sont regroupés dans deux recueil : les Sentences vaticanes et les
Maximes capitales. De nombreux renseignements sur Epicure proviennent du dixième chapitre de Vies et
doctrines des philosophes illustres de Diogène Laërce datant du début du IIIe siècle.
La morale
Qu’est-ce que les quatre remèdes ? C’est un résumé de la philosophie morale d’Epicure facile à mémoriser.
(Le terme grec est tetrapharmakon.) 1) Il ne faut pas craindre les dieux, 2) il ne faut pas craindre la mort, 3) le
bonheur est le bien suprême et il est facile d’accès, 4) la souffrance est toujours supportable.
En quoi Epicure peut-être qualifié d’hédoniste ascétique ? Dire ce qu’est le bien est facile, pourvu qu’on
s’en remette à notre expérience immédiate. Nous le savons sitôt nés : le bien, c’est le plaisir ; le mal, c’est la
souffrance. « Pour ce qui me concerne, je ne suis plus en mesure de concevoir le bien, si je supprime le plaisir que
procure la nourriture, le plaisir que procurent les relations sexuelles. » L’idée de bien ne prend sens qu’à partir de
nos expériences de plaisir, et il y trouve son contenu – le plus grand bien sera un plaisir continu, stable, sans
souffrance. C’est pourquoi, selon la formule de la Lettre à Ménécée, « le plaisir est le principe et la fin de la vie
bienheureuse ». C’est donc le plaisir qui est au principe de toutes nos actions. Cependant il se distingue
radicalement des hédonistes, car il affirme en même temps qu’il ne faut pas chercher le plaisir, que ceux qui
cherchent le plaisir sont malheureux. (C’est pourquoi certains préfèrent le classer parmi les eudémonistes plutôt
que les hédonistes, même si le plaisir est le bien pour Epicure. Disons au moins que c’est un hédoniste différent de
ce qu’on attend habituellement par ce terme, c’est un hédonisme ascétique, prônant la modération, la frugalité.)
En effet, le véritable plaisir est celui qui survient quand on est serein, débarrassé des angoisses liées aux désirs
vains et les plaisirs qui y sont associés. L’excès est banni car il apporte une souffrance. C’est au nom du plaisir
lui-même qu’il faut limiter le plaisir : « La suppression de tout ce qui est souffrant est la limite de la grandeur des
plaisirs. » (Maximes capitales, III.)
Qu’est-ce que le bonheur ? Le bonheur est défini comme l’absence de souffrances. Ce qui signifie bien qu’il
n’y a rien à chercher pour être heureux, plutôt à retirer : retirer les sources d’angoisses que sont la peur de la mort,
des dieux et les désirs vains. Le bonheur réside dans l’ataraxie (l’absence de troubles, c’est-à-dire la tranquillité
de l’âme) et l’aponie (l’absence de douleur). La philosophie est nécessaire au bonheur, car c’est elle qui nous
guérit de ces angoisses : elle est thérapeutique.
Quels sont les plaisirs à chercher ? Les plaisirs ne sont pas seulement du corps (manger, boire), les biens de
l’âme (qui est aussi corporelle, cf. ci-dessous) sont même considérés comme supérieurs aux plaisirs du corps,
parce qu’ils contribuent à assurer la continuité de l’état de plaisir qui caractérise la vie bienheureuse. Ceux qui
cherchent une plus grande intensité de plaisir transforment celui-ci en douleur. Il faut apprendre à régler ses désirs
sur cette limite négative : ne pas souffrir. Celui qui atteint cette limite trouve aisément à se satisfaire. Il connaît le
plaisir stable et se met sur la voie de l’autosuffisance (Lettre à Ménécée, 130-131) : « Le pain d’orge et l’eau
procurent le plus vif plaisir à celui qui les porte à sa bouche après en avoir senti la privation. »
Comment classifier les désirs ? Épicure distingue trois types de désirs : 1) les désirs artificiels, ou « vains »
selon les traductions, le terme grec les qualifiant signifie « vide », dans le sens de vide de tout fondement naturel ;
2) les désirs naturels non nécessaires ; 3) les naturels nécessaires. Les premiers, les désirs vains, sont à exclure : ce
ne sont pas des besoins naturels et ils sont source de souffrances. Ce sont les désirs de gloire et le désir
(impossible) d’immortalité. La première clé du bonheur est donc de s’en débarrasser. La deuxième catégorie, les
désirs naturels non nécessaires, dont les désirs sexuels font partie, ne sont pas à proscrire, mais à contrôler. Seuls
les désirs naturels nécessaires doivent impérativement être satisfaits et ils sont de trois sortes : les désirs
nécessaires au bonheur (la philosophie), à l’absence de perturbation du corps (se vêtir, s’abriter, etc.), à la vie
(manger, boire, etc.). En se délestant des désirs creux, en satisfaisant de façon contrôlée les désirs naturels et se
concentrant sur ceux nécessaires, on atteint le bonheur.
Faut-il suivre la morale ? La morale pour Épicure n’est pas un sacrifice de soi, mais une sagesse, une manière
de se réaliser. Elle est essentiellement un calcul des plaisirs : il s’agit d’apprendre à acquérir un plaisir stable et
serein. Épicure propose cette règle : « À tous les désirs il faut appliquer la question suivante : que m’arrivera-t-il
si s’accomplit ce que cherche à obtenir mon désir et que m’arrivera-t-il si cela ne s’accomplit pas ? » (Sentences
vaticanes, 71.) La recherche d’un plaisir stable, continu, au contraire de la recherche insensée de plaisirs intenses,
n’amène pas à l’égoïsme, mais au contraire à la recherche de l’amitié. L’amitié est en effet un plaisir stable et
procure un sentiment de sécurité.
Faut-il vivre au présent ? Carpe diem est une locution latine extraite d'un poème de Horace, poète latin et
épicurien du Ier siècle av. J.-C. On traduit cette phrase par : « Cueille le jour présent » (« … sans te soucier du
lendemain » continue le poème). La phrase résume le poème qui le précède et dans lequel Horace cherche à
persuader une femme, Leuconoé, de profiter du moment présent et d'en tirer toutes les joies, sans s'inquiéter ni du
jour ni de l'heure de sa mort. Il ne s’agit pas d’une exhortation à un hédonisme effréné, à une vie de plaisirs
intenses, mais au contraire à une vie de contentement dans le présent, à bien savourer le présent et ce que l’on a
déjà, dans l'idée que le futur est incertain et que tout est appelé à disparaître.
Le sage épicurien se mêle-t-il de politique ? Le sage épicurien fuit la politique. Pour vivre heureux, il vit
caché en son « jardin », sa communauté, entouré d’amis, poursuivant un bonheur stable dans un ici et maintenant,
préservé de la crainte et de la souffrance. Épicure conçoit la philosophie moins comme une discipline de l’esprit
tournée vers les affaires de la cité que comme une médecine, une thérapie, qui se pratique à huis clos. (Alors que
les Stoïciens estimaient qu’accomplir les tâches de citoyen est un devoir.)
Quelle place faut-il donner à l’amitié et à l’amour pour l’épicurien ? . Si la vie du sage est une « vie
cachée » qui ne se mêle pas de politique, c’est tout de même une vie communautaire, où l’amitié a une place
centrale. L’école du Jardin a la forme d’une communauté amicale, animée discussions, autour du maître. La
recherche du plaisir stable conduit au développement des sentiments d’amitié, parce que rien n’est plus plaisant
que cette relation amicale réciproque, où l’on donne sans compter, sûr de recevoir l’équivalent en retour : « Parmi
les choses dont la sagesse se munit pour la félicité de la vie tout entière, de beaucoup la plus importante est la
possession de l’amitié. » (Sentences vaticanes, 13.) Par contre, Epicure met en garde contre l’amour, qui est d’une
autre nature et peut fait perdre à l’amant la maîtrise de lui-même, le blesser, l’éloigner du bonheur. « Les choses de
l’amour ne sont jamais profitables, et il faut se réjouir qu’elles ne nous nuisent pas. » (Sentences vaticanes, 51.)
Pourquoi ne faut-il pas craindre les dieux ? Un dieu est « un vivant incorruptible et bienheureux » (Lettre à
Ménécée, 123). D’où le savons-nous ? Nous en avons une « conception commune », une connaissance évidente.
Les dieux étant, par définition, bienheureux, ils sont autosuffisants comme le sage. Ils n’ont donc pas besoin de
nos prières et de nos sacrifices et ils ne peuvent pas se mettre en colère contre les hommes quand ceux-ci ne leur
offrent pas de sacrifices. Les dieux ne sont d’ailleurs en rien responsables du monde et de l’existence des hommes,
comme l’étude de la physique le montre. Aussi la foule et la religion se trompent-ils, lorsqu’ils s’imaginent que
ces êtres parfaits sont tout-puissants, nous surveillent, voire nous châtient. C’est une fausse conception des dieux.
Si la foule se trompe sur les dieux, c’est précisément parce qu’elle se trompe sur l’idéal que l’on doit suivre. Ce
faisant, ils projettent leurs craintes et leurs faiblesses sur les représentations mentales des dieux. La vision du dieu
est celle d’un idéal : le sage vise à vivre comme les dieux dans le bonheur tout en s’acceptant mortel. Celui qui
applique les enseignements de la philosophie épicurienne vivra « comme un dieu parmi les hommes » dit la fin de
la Lettre à Ménécée, alors qu’il se sait mortel et parce qu’il se sait mortel.
Pourquoi ne faut-il pas craindre la mort ? D’abord parce que nous ne faisons pas l’expérience de notre
mort. Quand la mort est là, nous ne sommes plus là, dit Epicure. On ne peut pas vivre sa propre mort, ce serait
contradictoire. De plus, le bien, c’est le plaisir ; le mal, c’est souffrance ; or une fois mort, il n’y a plus de
sensations, donc il n’y a dans la mort ni bien à désirer, ni mal à fuir. Angoisser à propos de la mort, c’est souffrir
pour un état qui n’apporte aucune souffrance, donc aucun mal : « La mort, avec nous, n’a aucun rapport ; car tout
bien et tout mal résident dans la sensation ; or, la mort est privation de sensation »(Lettre à Ménécée, 124). La
mort ne nous concernerait donc pas ? Il ne faut pas fuir la pensée de la mort, mais au contraire s’accoutumer à
cette pensée que la mort n’a pas de rapport avec nous, pour rejoindre la sérénité du sage. On peut ainsi apprendre
à « jouir du caractère mortel de la vie », tandis qu’on s’affranchit du « désir de l’immortalité ».
La physique
De quoi est constituée la réalité ? D’atomes et de vide. Epicure a été influencé par la philosophie atomiste
de Démocrite. L’Univers est formé d’atomes qui se meuvent dans le vide et se combinent au hasard des
rencontres. La sensation nous apprend avec évidence l’existence des corps. Ceux-ci sont composés, donc
nécessairement constitués de corps plus élémentaires qui, par contre, sont insécables (ce qui est le sens du mot
grec atomes). L’existence du vide se déduit du mouvement des corps, s’il n’y avait pas de vide, aucun mouvement
ne serait possible. Les atomes se meuvent en raison de leur poids et se rencontrent par hasard pour former, par leur
entrechoc, les mondes. Les organismes et les mondes sont des agrégats d’atomes.
Quelle est la nature de l’âme ? Un corps constitué d’atomes, disséminées dans l’organisme, qui n’est
qu’un agrégat d’atomes. L’univers est formé d’atomes rencontrés au hasard, il n’y a pas de réalité incorporelle
en dehors du vide. L’âme elle-même, à l’instar de tout ce qui constitue le cosmos, n’est qu’un « corps composé de
particules subtiles, disséminé dans tout l’agrégat » formé par l’organisme. « Ceux qui disent que l’âme est un être
incorporel parlent pour ne rien dire », écrit-il dans la Lettre à Hérodote. Cette pensée s’oppose avec les doctrines
enseignées à Athènes des platoniciens et des aristotéliciens.
En quoi le clinamen permet de penser la liberté et le hasard ? Le clinamen, c’est la déviation
(littéralement une déclinaison) spontanée de la chute des atomes dans le vide, qui les amène à s'entrechoquer.
Cette déviation est spatialement et temporellement indéterminée et aléatoire. Elle permet d'expliquer l'existence
des corps (due au hasard et non à la providence des dieux) et la liberté humaine (le monde n’est pas régi par le
destin ou le déterminisme, mais par le hasard et l’indétermination). Epicure est opposé à la doctrine du destin des
Stoïciens, qu’il juge pire que la croyance populaire dans l’intervention des dieux. Les deux sont fausses d’après
Epicure : il n’y a pas de destin, les dieux n’interviennent pas dans notre existence. Le sage doit savoir que sa
situation dépend en partie de la nécessité, en partie du hasard et en partie de sa propre liberté. S’il n’y avait pas de
liberté, dit Epicure, il n’y aurait de responsabilité, de louanges et de blâmes.
La connaissance
Quels sont les critères de la vérité ? Il existe deux critères de la vérité : la sensation est le critère d’un point
de vue théorique, le plaisir est le critère d’une point de vue pratique. Les sensations sont toujours vraies et
constituent le premier critère de vérité. Avec elles, nous commençons à connaître et, pour ne pas raisonner à vide,
nous devons constamment nous régler sur elles. Rien n’est vrai qui ne soit issu des sens ou qui ne soit en accord
avec eux. Les sensations consistent d’ailleurs en un processus physique qui met en contact des particules émises
par des corps et un organe récepteur. Dans le cas de la vision, ce sont des « simulacres », très fines pellicules
détachées de la surface des corps et reproduisant leurs contours, qui se répandent sans cesse en tous sens et sont
appréhendés par nos yeux. L’erreur existe mais dans le jugement que je porte sur la sensation et non dans la
sensation elle-même. Par exemple, je me trompe en identifiant mal une forme dans la nuit, ce n’est pas le
sensation qui me trompe, mais mon jugement. La vérité est ainsi établie directement par confirmation (des
données des sens) ou indirectement par non-infirmation (pas de désaccord avec les données des sens).
La pluralité des mondes : les mondes sont constitués d’atomes s'assemblant par hasard. Or comme cet
assemblage se fait « depuis un temps infini », les atomes « s'assemblent de mille manières différentes et essayent
toutes les combinaisons qu'ils peuvent former entre eux ». C’est ainsi que se forment les mondes. Il y a donc une
infinité de mondes existants, correspondant à l'infinité des combinaisons atomistiques. « Ce n’est pas seulement le
nombre des atomes, c’est celui des mondes qui est infini dans l’univers. Il y a un nombre infini de mondes
semblables au nôtre et un nombre infini de mondes différents. » (Epicure, Lettre à Hérodote, 45.)
Bibliographie
Lettres et Maximes, traduit et commenté par Marcel Conche (« Épiméthée », PUF, 1987) : l’édition de
référence, avec une lumineuse introduction à la doctrine du philosophe grec.
Lettres, Maximes, Sentences, traduit et présenté par Jean-François Balaudé (« classiques de poche », Le
Livre de Poche, 1994) : une traduction accessible, introduite par une savante explication des théories
épicuriennes.
De la nature, de Lucrèce (« Poésie bilingue », Flammarion, 1999) : le plus célèbre des disciples du sage
expose, dans un poème en vers, la philosophie matérialiste d’Épicure et de l’atomiste Démocrite.
LUCRECE
« En 96 ou 94 avant J.-C. naît le poète Titus Lucretius. Rendu fou par un philtre d’amour,
il rédigea dans les intervalles de sa maladie quelques livres qu’ensuite Cicéron corrigea,
et se donna la mort dans sa quarante-quatrième année. » Voici tout ce que l’on sait de la
vie de Lucrèce, d’après une notice de saint Jérôme, qui était opposé à sa philosophie.
Lucrèce a livré à l’histoire de la philosophie un texte unique, à la fois livre de poésie et de philosophie :
le De rerum natura (De la nature des choses). Ce poème prône la philosophie d’Epicure, philosophie
matérialiste du plaisir et méditation de la fugacité des choses, qu’il l’accompagne du « miel » de la
poésie mais auquel il mêle aussi des accents pessimistes, tourmentés, propres à Lucrèce.
En soutenant que les dieux n’existent pas ou nous sont indifférents, que le bonheur, pour le sage, se
confond avec la volupté, il est à contre-courant de la mentalité romaine, de ses valeurs morales et
religieuses, plus proches du stoïcisme, la grande école philosophique rivale qui s’implante
simultanément. Lucrèce aurait pu sombrer dans l’oubli, et son œuvre disparaître avec lui, si Cicéron
n’était pas intervenu en le publiant en – 43, sans souscrire à sa philosophie.
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