Place du curage ganglionnaire lombo

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Place du curage ganglionnaire lombo-aortique
et pelvien dans les cancers épithéliaux
de l’ovaire
J.-Y. Bobin et M. Schneider
Le but du curage lombo-aortique et pelvien dans les curages invasifs épithéliaux de l’ovaire est double : obtenir une évaluation précise du stade et obtenir
une cytoréduction tumorale optimale (1).
Curage lombo-aortique et pelvien et stadification
L’évaluation exacte du status ganglionnaire (N) est particulièrement intéressante dans les stades de début (stades IA et IB). En effet, pour ceux-ci
l’indication de chimiothérapie cytotoxique dépend du status ganglionnaire.
L’envahissement d’une adénopathie pelvienne et/ou lombo-aortique faisant
changer de stade I à stade III (TNM : T3 N1) (1, 2).
De nombreux auteurs ont étudié le risque d’invasion ganglionnaire dès les
stades de début. Ce risque varie de 6,5 % (8/123) pour Negishi et al. (3) à 23 %
(9/40) pour Petru et al. (4). Dans une série personnelle, l’envahissement
ganglionnaire dans les stades IA et B était de 13,3 % (1 ; 5). Pour Morice et al.
(6) cet envahissement est de 20 % (15 % au stade IA et 25 % au stade IB, 40 %
au stade IC) (tableau I). L’envahissement ganglionnaire rétro et/ou sous-péritonéal est donc précoce dans l’évolution des tumeurs épithéliales de l’ovaire (10
à 15 % pour les stades IA et IB) (3, 4, 6-10) (11).
Morice et al. (6) remarquent qu’aucune patiente (0/15) ayant un stade IA
grade I et qu’aucune patiente atteinte d’une tumeur mucineuse de stade I n’a
présenté de métastase ganglionnaire. Cependant, ces informations ne pouvant
être acquises par un examen extemporané (histologie, grade, stade), le curage
doit être réalisé dans tous les stades de début, quelle que soit l’histologie.
L'atteinte ganglionnaire peut être controlatérale à la tumeur de l’ovaire
(11 %) pour Morice et al. (6) et Negishi et al. (3) ou bilatérale (26 %) (3). Les
localisations métastatiques ganglionnaire étant, soit lombo-aortiques, soit
pelviennes, soit les deux.
240 Les cancers ovariens
Tableau I – Envahissement ganglionnaire lombo-aortique et/ou pelvien au stade I.
Nombres
de malades
Petru et al. (5)
Envahissement ganglionnaire au stade I
Total
IA
IB
IC
9/40
23 %
Baiocchi et al. (7)
32/242
13,2 %
Le et al. (11)
16/138
12 %
Morice et al. (6)
17/85
20 %
Negishi et al. (4)
8/123
6,5 %
12,9 %
14,7 %
13,6 %
15 %
25 %
40 %
Meier et al. (8)
7%
7%
14 %
Sakurai et al. (9)
10,6 %
55,6 %
18,1 %
Bobin et al. (2004)
2/15
13,3 %
➥ 13,3 % ➥
En conclusion, un stade I présumé n’est pas un facteur prédictif indépendant de
l’envahissement ganglionnaire sous et/ou rétro-péritonéal. Ne pas réaliser de curage
revient donc à sous-stadifier environ 20 % des stades IA et IB (12, 13).
Réduction tumorale optimale
et curage lombo-aortique et pelvien
Depuis plus de vingt ans, il est démontré que le volume résiduel tumoral après
la chirurgie de cytoréduction a un impact direct sur la survie (1).
Quand une cytoréduction optimale (Ro) est obtenue, la médiane de survie
est supérieure de vingt-deux mois en moyenne par rapport à celle obtenue
après cytoréduction tumorale suboptimale, que ce soit lors de la chirurgie de
première intention ou après chimiothérapie néo-adjuvante (1, 5, 14-17). Les
métastases ganglionnaire sont d’autant plus fréquentes que le stade FIGO est
élevé (15), mais, comme nous l’avons déjà précisé, dès les stades I, le risque
d’envahissement ganglionnaire est important.
Pour les stades II, l’envahissement ganglionnaire varie de 23 % à 40 % (11,
18, 19) et pour les stades III il est supérieur à 50 % (6, 11, 13, 18, 19).
Dans notre série, il est de 69 %. Pour les stades IV, cette atteinte ganglionnaire est de 77,7 % pour Dire et al. (11), de 100 % pour Spirtos et al. (20).
Peut-on prévoir l’envahissement ganglionnaire selon l’histologie et le grade de la tumeur ?
La littérature démontre clairement que le type histologique comme le grade
ne permettent pas d’évaluer le risque ganglionnaire avec précision (6, 13).
L’envahissement ganglionnaire semble moins fréquent pour les tumeurs
Place du curage ganglionnaire lombo-aortique et pelvien… 241
mucineuses par rapport aux tumeurs séreuses, indifférenciées ou endométrioïdes (6, 11, 20).
Morice et al. (6) comme Dire et al. (11) trouvent un envahissement
ganglionnaire entre 50 et 60 %, quel que soit le grade de la tumeur. Les grades
I ont un risque d’environ 50 % (6).
En conclusion, quel que soit le stade, le type histologique de la tumeur et son
grade, le risque d’invasion ganglionnaire est important. Le curage ganglionnaire
radical rétro- et sous-péritonéal est donc nécessaire pour obtenir une cytoréduction
tumorale optimale.
Est-ce que le curage lombo-aortique et pelvien doit être radical
sur les deux sites ? Peut-on se contenter de biopsie ganglionnaire sélective ?
À la suite des travaux anatomiques de Rouvière (21) et des travaux de Burke
(22), Onda et al. (19) proposent le prélèvement de deux groupes ganglionnaires principaux, le groupe supra-mésentérique et le groupe obturateur.
Cette technique permet de connaître le statut ganglionnaire avec une sensibilité de 94 % avec une valeur prédictive négative de 95 %. Cette étude, qui ne
se base que sur les 48 curages positifs, ne permet pas de limiter le curage à ces
deux sites dans le but d’une cytoréduction optimale. L’ensemble de ces travaux
de la littérature démontre que les sites d’envahissement ganglionnaire lomboaortiques et/ou pelviens restent imprévisibles quel que soit le stade de la
tumeur. Bien que les sites le plus souvent atteints soient situés sous la veine
rénale gauche et dans la région iliaque externe sous-veineuse (ganglions obturateurs) (6, 11, 13, 19, 23)), le risque d’envahissement ganglionnaire
lombo-aortique isolé ou pelvien isolé se rencontre dans environ 30 % des cas et
l’atteinte lombo-aortique et pelvienne est d’environ 40 %. Il n’est donc pas
logique de se contenter d’un curage lombo-aortique ou pelvien, le curage doit
être radical sur les deux sites rétro- et sous-péritonéal.
Quelle est la valeur de la biopsie ganglionnaire guidée par la
palpation du chirurgien pour connaître le statut ganglionnaire ?
La palpation ganglionnaire des chaînes lombo-aortiques et pelviennes est très
trompeuse même quand elle est réalisée par des chirurgiens entraînés, et ceci
surtout après une chimiothérapie néo-adjuvante.
D'ailleurs, dans l’étude de Tangjitgamol et al. (24) à partir d’un échantillon
de 2 069 ganglions pelviens, les auteurs démontrent que la différence de taille
entre un ganglion normal histologique et un ganglion métastatique n’est que
de 4 mm (10 mm versus 6 mm). Cette différence est évidemment non exploitable par le chirurgien.
242 Les cancers ovariens
En outre, 94,5 % des adénopathies métastatiques mesurent moins de
20 mm et 35,5 % sont des micro-métastases (< 3 mm).
Le risque de micro-métastases isolées dans les ganglions lombo-aortiques et
pelviens, sans aucune adénopathie palpable, est évalué à plus de 30 % dans
toutes les séries de la littérature (6, 20, 24-26).
En conclusion, la biopsie orientée par la palpation est inadaptée à la stadification dans les cancers de l’ovaire.
Existe-t-il une technique non invasive capable de prévoir l’envahissement ganglionnaire ?
La lymphographie est actuellement un examen très rarement pratiqué, bien
que dans les cancers de l’ovaire sa spécificité soit proche de 100 %, mais avec
une sensibilité inférieure à 70 %. La tomodensitométrie comme l’IRM ont des
limites de détection qui ne permettent pas de définir avec précision l’invasion
ganglionnaire. Enfin, le PeT-scan a une valeur peu contributive dans la détection des métastases ganglionnaires rétro-péritonéales et pelviennes dans les
cancers de l’ovaire (27-29).
À quel moment le curage lombo-aortique doit-il être réalisé ?
Chaque fois que la cytoréduction tumorale intra-péritonéale est satisfaisante, le
curage radical doit être réalisé, que ce soit au cours de la chirurgie primaire ou
après chimiothérapie néo-adjuvante. Si le curage n’a pas été réalisé quand l’ensemble du programme de chimiothérapie est terminé, le curage peut être
envisagé à ce moment-là, à condition que l’ensemble des investigations préopératoires élimine une poursuite de l’évolution intra-péritonéale. Avant la
réalisation de la laparotomie, on peut proposer une exploration intra-péritonéale par cœlioscopie. Cette intervention ne peut être réalisée que par des
chirurgiens entraînés car la cytoréduction tumorale entraîne des adhérences
intra-péritonéales le plus souvent serrées (30, 31).
Après chimiothérapie néo-adjuvante ou après que l’ensemble
du programme de chimiothérapie ait été réalisé, est-il logique
de proposer un curage lombo-aortique et pelvien ?
En d’autres termes, est-ce que la chimiothérapie a permis la stérilisation des
ganglions éventuellement envahis ?
La chimiorésistance des métastases ganglionnaires rétro- et sous-péritonéales est un argument avancé par les partisans du curage radical (6, 13) (11).
Place du curage ganglionnaire lombo-aortique et pelvien… 243
L’incidence d’invasion ganglionnaire après chimiothérapie reste élevée.
Celle-ci reste très voisine de l’incidence d’invasion démontrée au cours des
curages de première intention.
Dans notre série personnelle, après quatre cures de chimiothérapie néoadjuvante comprenant un sel de platine et du paclitaxel, il persistait 63,2 %
(12/19) d’invasion ganglionnaire. L’envahissement ganglionnaire avant
chimiothérapie par les curages primaires était de 44,4 % (28-63). Ces résultats
sont confirmés par de nombreux auteurs. Pour Joulie et al. (32), l’envahissement ganglionnaire au cours des curages de première intention est de 35 %
(35/100) contre 54 % (18/28) au cours d’une chirurgie de révision et de 36 %
(28/77) au cours d’une chirurgie de l’intervalle. Pour Wu et al. (26), 64 % des
métastases ganglionnaire sont encore présentes après chimiothérapie et pour
Scarabelli et al. (25) 70 %. Cette chimiorésistance pourrait s’expliquer selon
Kimball et al. (33) par la persistance de lignées cellulaires diploïdes et d’une
faible proportion de cellules en phase S. Toutefois, il faut souligner que ces
études sont rétrospectives et qu’il y a de nombreux biais, en particulier de sélection des patientes.
En conclusion, il est logique de réaliser un curage ganglionnaire radical après
chimiothérapie même si les lésions intra péritonéales sont apparemment stérilisées (34).
Quelle technique chirurgicale doit-on recommander ?
La stadification chirurgicale des cancers de l’ovaire est actuellement parfaitement codifiée (1, 2). La lymphadénectomie lombo-aortique et pelvienne est
réalisée après la cytoréduction tumorale optimale par la même voie d’abord,
c’est-à-dire par une médiane sous-ombilicale dépassant l’ombilic vers le haut
sur 3 cm.
Le curage lombo-aortique est conduit par voie trans-péritonéale ou par voie
sous-péritonéale après avoir décollé le côlon droit (ouverture du fascia de toldt
droit) et, dans des cas difficiles, en décollant aussi le côlon gauche.
L’axe lombo-aortique est totalement exposé jusque sous les veines rénales
droite et gauche et vers le bas en dessous de la bifurcation aortique.
La veine ovarienne gauche est sectionnée sous la veine rénale gauche et la
veine ovarienne droite au ras de la veine cave inférieure. L’artère mésentérique
inférieure est en général préservée. Sa section au ras de l’aorte est toutefois
nécessaire dans les cas difficiles de dissection lombo-aortique.
Le curage lombo-aortique est conduit de bas en haut, en partant de dessous
les veines rénales. Il résèque les ganglions latéro-cave, rétro-cave, pré-cave,
inter-aortico-cave, pré-aortique et latéro-aortique, au-dessus et en dessous de la
mésentérique inférieure, jusqu’à la bifurcation aortique. Les ganglions de la
bifurcation et du promontoire sont aussi réséqués. L’hémostase est assurée par
la pince bipolaire ou par clips. La lymphostase est en règle illusoire. Le curage
pelvien est alors réalisé avec exérèse des ganglions iliaques primitifs et externes
sus-, pré- et sous-veineux ; l’absence de péritonisation prévient les lymphocèles
244 Les cancers ovariens
post-opératoires. Les différents sites ganglionnaires prélevés sont précisés sur
un schéma pour les anatomo-pathologistes.
Le curage lombo-aortique et pelvien par cœlioscopie a été proposé par
quelques équipes dans des cas particuliers (30, 31, 34-36). On pourrait
discuter l’indication de curage par voie cœlioscopique dans les cas où le curage
n’est fait qu’après l’ensemble des traitements médicaux et s’il n’y a pas de geste
de cytoréduction tumorale intra-péritonéale à envisager. Ce sont donc des cas
exceptionnels.
La morbidité des curages lombo-aortiques et pelviens dans les
cancers épithéliaux de l’ovaire est-elle acceptable ?
En règle générale, pour les cancers de pronostic sévère, comme pour les
tumeurs épithéliales de l’ovaire, toute chirurgie risquant d’entraîner une
morbidité sévère immédiate ou à long terme est inacceptable.
La mortalité post-opératoire des curages est voisine de zéro (6, 13, 20) (11).
La morbidité est plus en rapport avec la chirurgie de cytoréduction intra-péritonéale qu’avec le curage.
Les plaies de gros vaisseaux rétro- et sous-péritonéaux (en règle les veines)
sont rares. Elles sont dues à la difficile dissection d’adénopathies envahies. Elles
sont réparées sans difficulté (6, 13) (2,4 % dans notre série).
Quant aux plaies urétérales ou digestives elles sont exceptionnelles (13).
La principale morbidité post-opératoire est le retard à la reprise franche du
transit après quatre à cinq jours (environ 15 % des patientes). Les hématomes
rétro-péritonéaux imposant une reprise chirurgicale pour drainage sont rares si
l’hémostase a été minutieuse. Les complications médicales (phlébites, accidents
cardio-vasculaires, complications emboliques pulmonaires) doivent être prévenues par un lever précoce, la physiothérapie des membres inférieurs, la
prophylaxie systématique par l’héparinothérapie (2 % de phlébite dans notre
série).
Les lymphocèles rétro- et sous-péritonéales symptomatiques imposant un
drainage sont devenues exceptionnelles (1 cas/82 dans notre série) (10, 13, 18).
Dans la littérature, 5 à 10 % de celles-ci se compliquent de fièvre, de
douleurs, d’iléus paralytique ou de thrombophlébites des membres inférieurs
(37, 38).
La découverte de petites lymphocèles suspendues asymptomatiques (12 %
dans notre série, 10 à 25 % dans la littérature) (6, 13, 37, 38) ne doit pas être
considérée comme une complication.
Les cruralgies transitoires post-opératoires sont dues aux dissections difficiles pour des adénopathies envahies et adhérentes (< 1 %) (37).
Quant aux rares ascites chileuses post-opératoires (2,7 % à 8 %), elles
guérissent grâce à l’alimentation parentérale totale sans lipide pendant une
dizaine de jours. 4,5 % (37) sont symptomatiques.
Place du curage ganglionnaire lombo-aortique et pelvien… 245
La morbidité à court terme et à long terme, uniquement due à la lymphadénectomie est difficile à étudier car, dans la majorité des cas, elle est associée
à un geste intra-péritonéal majeur, mais elle est certainement mineure. Les
études faites par Giannici et al. (39) et Gol et al. (40) montrent que la morbidité de ces lymphadénectomies n’est pas plus grande chez les femmes âgées que
chez les femmes de moins de 65 ans, malgré des co-morbidités supérieures.
La lymphadénectomie lombo-aortique et pelvienne radicale n’est pas
contre-indiquée après 65 ans, sauf s'il existe des morbidités sévères non
contrôlées.
Chez les femmes jeunes désirant des grossesses, la chirurgie conservatrice
peut être proposée pour les stades IA et IB de grades 1 et 2 non à cellules claires
(41-43). Le curage lombo-aortique et pelvien peut être réalisé par voie sous- et
rétro-péritonéale sans entraîner de stérilité, à condition que le pédicule lomboovarien du côté où l’ovaire est conservé soit préservé. Quatre patientes de notre
série désirant une grossesse (4/15 stade I) atteintes de stade IAB ont eu une
conservation utérine et d’un ovaire et un curage lombo-aortique et pelvien. Ces
quatre patientes ont eu des grossesses normales, aucune n’a rechuté à cinq ans.
Une seule a demandé qu’une hystérectomie ovariectomie soit réalisée après le
deuxième enfant.
Valeur thérapeutique des lymphadénectomies dans les tumeurs
épithéliales malignes de l’ovaire
Comme dans la majorité des tumeurs malignes lymphophiles, le rôle curateur
des évidements ganglionnaires est difficile à mettre en évidence. Toutefois, la
lymphadénectomie radicale participant à la cytoréduction optimale, il est
logique de penser qu’elle a un impact bénéfique sur la survie globale et sans
rechute (34, 42). Ceci est d’autant plus logique que certains auteurs considérent que l’envahissement ganglionnaire rétro- et sous-péritonéal est un site
chimiorésistant (6, 11, 13, 20, 25, 32, 33).
De nombreux travaux ont cherché à démontrer un rôle curateur des
curages.
Burghardt et al. (24) montrent que la survie est améliorée dans les stade III
où un curage radical a été réalisé (53 % de survie cinq ans pour les cas avec
curage et 13 % pour les cas sans curage).
Pour Di Re et al. (11), les patientes qui ont bénéficié d’un curage au cours
d’une chirurgie optimale pour des stades II, III, IV ont un taux de survie à cinq
ans de 46 % (médiane 56 mois) contre 30 % (médiane 41 mois) pour celles
n’ayant pas eu de lymphadénectomie. Cette différence est à la limite de la significativité (p = 0,05). Il y a une différence significative (p < 0,005) pour la survie
(24 versus 14 mois) pour les patientes ayant eu une lymphadénectomie malgré
une cytoréduction suboptimale. Dans cette étude rétrospective, les critères de
sélection pour les patientes devant avoir un curage ne sont pas précisés et, à
246 Les cancers ovariens
côté des curages radicaux, il y a des biopsies ganglionnaires « sélectives » guidées
par la palpation.
Spirtos et al. (20) comme Onda et al. (19) remarquent que la survie des
patientes ayant eu un curage avec ganglions envahis est équivalente à la survie
de celles sans envahissement ganglionnaire.
L’étude de Onda et al. (19) est certainement la plus informative. Le taux de
survie des patientes stade III du fait de l’envahissement ganglionnaire (groupe
A) a été comparé à celui des patientes de stade III indépendamment du status
ganglionnaire (groupe C). 103 curages radicaux ont été associés à une cytoréduction intra-péritonéale optimale. La survie à cinq ans est de 84 % dans le
groupe A versus 26 % dans le groupe C. Le groupe A a par ailleurs une survie
équivalente à un groupe B (stade I et II) (84 % versus 96 % - p = 0,042).
La valeur thérapeutique des curages radicaux est aussi évoquée par
Scarabelli et al. (25) et par Saygili et al. (44) après chirurgie de cytoréduction
suboptimale dans les stades III.
Dans notre série de 82 cas ayant tous eu une chirurgie péritonéale optimale
et un curage radical, le taux de survie à cinq ans tous stades confondus est de
84 %. La survie actuarielle à cinq ans des stades III est de 78 % (IC : 0,63-0,94)
avec un recul moyen de 47 mois. Ces chiffres sont intéressants bien que le
nombre de patientes soit réduit.
En conclusion, toutes les études qui essayent de démontrer le rôle thérapeutique
des lympha-dénectomies radicales dans les tumeurs épithéliales malignes de l’ovaire
sont des études rétrospectives, non randomisées.
Deux biais importants sont à souligner, tous les deux dépendent du potentiel évolutif variable des tumeurs :
– les possibilités de réaliser un curage radical et une cytoréduction intra-péritonéale optimale sont certainement dues à une moindre agressivité de la
tumeur et donc correspondent à des tumeurs au pronostic plus favorable ;
– l’amélioration de la survie par stade est due à une stadification plus précise
grâce au curage radical. La survie des stades I est améliorée car les « faux
stades I » qui correspondent aux stades I intra-péritonéaux mais avec invasion ganglionnaire sont classés dans les stades III. De même, les stades III
sont améliorés dans leur survie puisqu’ils comprennent des stades III uniquement par invasion ganglionnaire, parfois microscopique dans un ganglion
sans envahissement intra-péritonéal.
Seules des études randomisées pourraient clarifier la valeur thérapeutique
réelle des curages radicaux pour les stades III et IV. Celles-ci sont de réalisation
difficile car elles demandent à être réalisées dans des centres où les chirurgiens
ont des compétences particulières dans le traitement chirurgical des tumeurs
ovariennes (2, 41, 43).
En conclusion, jusqu’à preuve du contraire, le curage lombo-aortique et
pelvien fait partie du traitement chirurgical optimal des cancers épithéliaux
malins de l’ovaire dès que la cytoréduction tumorale intra-péritonéale est satisfaisante (optimale ou suboptimale avec des résidus tumoraux < 1 an et en
nombre réduit).
Place du curage ganglionnaire lombo-aortique et pelvien… 247
Ce curage permet une stadification précise de la maladie particulièrement
intéressante dans les stades IAB.
En effet, dans les stades de début, la chimiothérapie cytotoxique n’est pas
proposée par la majorité des oncologues.
Il permet une cytoréduction tumorale optimale des stades III et IV qui a
probablement un impact sur la survie des patientes.
Cette chirurgie précise impose des équipes chirurgicales particulièrement
entraînées dans le traitement des cancers ovariens.
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