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Un constructeur non présent sur le chantier est-il un
voisin occasionnel ?
le 25 février 2011
CIVIL | Responsabilité
IMMOBILIER | Construction
Doit être cassé l’arrêt d’appel qui retient la responsabilité d’intervenants au motif qu’ils ont
participé à l’opération de construction à l’origine des troubles subis, sans établir que ces troubles
étaient en relation de cause directe avec la réalisation de leurs missions.
Civ. 3e, 9 févr. 2011, FS-P+B, n° 09-71.570
La notion de voisin occasionnel est-elle réservée aux seuls entrepreneurs réalisant les travaux ou
concerne-t-elle des intervenants peu ou pas présents sur le site ?
La notion de voisin répondant des troubles anormaux du voisinage a connu une importante
extension lorsqu’elle a inclu le constructeur (V. Civ. 3e, 30 juin 1998, Bull. civ. III, n° 144 ; RDI 1998.
647, obs. Malinvaud et B. Boubli ). Le cercle des voisins occasionnels est potentiellement large car
de nombreux intervenants participent à une opération de construction, entrepreneurs principaux,
sous-traitants, architectes, bureaux d’études, contrôleurs techniques, etc. Recherchant l’origine du
trouble dans l’opération de construction, la Cour de cassation n’a pas toujours distingué selon que
le locateur d’ouvrage était l’auteur ou non des travaux source du dommage. Elle a ainsi retenu la
responsabilité d’un gestionnaire de projet (V. Civ. 3e, 22 juin 2005, RDI 2005. 339, obs. P. Malinvaud
) ou d’un architecte (V. Civ. 3e, 20 déc. 2006, D. 2007. Jur. 1472, note J.-P. Karila ; ibid. AJ 148,
obs. I. Gallmeister ; ibid. Pan. 2490, obs. B. Mallet-Bricout et N. Reboul-Maupin ; ibid. Pan. 2897,
obs. P. Brun et P. Jourdain ; RDI 2007. 145, obs. E. Gavin-Milllan-Oosterlynck ; ibid. 170, obs. P.
Malinvaud ; RTD civ. 2007. 360, obs. P. Jourdain ). Cet élargissement se poursuit sur le plan de la
contribution à la dette. Le maître d’ouvrage ou les entrepreneurs ayant indemnisé la victime
disposent d’un recours subrogatoire à l’encontre des autres intervenants, sans avoir à établir une
quelconque faute de leur part (V. Civ. 3e, 20 déc. 2006,préc. ; M. Mignot, Construction, troubles de
voisinage et obligations in solidum, RDI 2008. 408 ).
Peut-être sensible aux critiques répétées de la doctrine (H. Périnet-Marquet, Remarques sur
l’extension du champ d’application de la théorie des troubles du voisinage, RDI 2005. 161
;P.Malinvaud, Vers un nouveau régime prétorien de la responsabilité des constructeurs pour
troubles de voisinage, RDI 2006. 251 ; Reboul-Maupin, Constructeurs et troubles anormaux du
voisinage : regards critiques sur la position jurisprudentielle en droit privé, LPA 25 oct. 2007), la
jurisprudence a semblé marquer un pas, confirmé par le présent arrêt.
En l’espèce, une construction a causé des désordres à un immeuble voisin. Le maître de l’ouvrage
et l’entreprise générale chargée du chantieront été condamnés in solidum à les réparer sur le
fondement des troubles anormaux du voisinage. L’assureur du maître de l’ouvrage a alors exercé
un recours subrogatoire à l’encontre de plusieurs sous-traitants chargés respectivement d’une
mission d’étude des sols, d’un lot « pieux forés » et d’une mission de contrôle technique. La cour
d’appel a retenu une vision très extensive de la notion de voisin occasionnel estimant que doit être
considéré comme tel, tout intervenant ayant participé à l’opération de construction de l’immeuble,
peu important que cette intervention soit simplement intellectuelle ou ponctuelle. C’est l’acte de
construire lui-même, pris dans sa globalité, qui génère le préjudice. Tous les participants sont dès
lors responsables, quelle que soit la nature de leur intervention. La Cour de cassation rejette cette
thèse et censure l’arrêt d’appelpour ne pas avoir établi que les troubles subis étaient en relation de
cause directe avec la réalisation des missions d’études de sol, de maîtrise d’œuvre, de contrôle
technique. Il faut en déduire que si tout constructeur peut être un voisin occasionnel, sa
responsabilité ne pourra être recherchée que s’il est personnellement à l’origine des troubles.
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