Le Courrier de la Transplantation - Vol. X - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2010
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Dossier thématique
Prise en charge
du transplanté hépatique en 2010
Règles hygiéno-diététiques et prévention
des facteurs de risque cardio-vasculaire
Sur le plan nutritionnel, les apports énergétiques
doivent être adaptés aux besoins individuels du trans-
planté ; la ration journalière doit être répartie sur 3 repas
principaux à horaires fixes (plus éventuellement 1 à
2 collations). L’alimentation doit être diversifiée, et une
bonne hydratation doit être assurée. Sans être restric-
tifs, les apports alimentaires doivent éviter les excès
de sucres, de graisses et de sel. Une perte minérale
osseuse est très souvent constatée avant et après greffe
hépatique. Un apport quotidien en calcium doit donc
être assuré, et une supplémentation vitaminique est
recommandée. La consommation de boissons alcooli-
sées doit être évitée ; elle est même proscrite si la greffe
a pour cause une maladie alcoolique du foie.
La plupart des transplantés améliorent leurs capacités
physiques après la greffe ; ils peuvent donc reprendre
leurs activités sportives. Cependant, quelques règles
sont à respecter : être à distance de la greffe, pratiquer
un échauffement avec étirements musculaires, s’hy-
drater suffisamment avant, pendant et après le sport,
éviter la pratique sportive en solitaire, arrêter les acti-
vités en cas de rejet ou d’infection, pratiquer plutôt
un sport d’endurance tels la course à pied, le cyclisme
ou la natation.
Le patient transplanté hépatique est exposé à un haut
risque cardio-vasculaire du fait de ses antécédents per-
sonnels et familiaux mais aussi de par son traitement
immunosuppresseur au long cours.
L’hypertension artérielle de novo est une complication
très fréquente qui concerne 45 % à 75 % des patients
transplantés hépatiques (2). Le contrôle tensionnel,
parfois difficile à obtenir, peut nécessiter rapidement
une bithérapie antihypertensive, voire une trithérapie.
Sur le plan médicamenteux, les inhibiteurs de l’enzyme
de conversion sont utiles pour lutter contre l’hyperfil-
tration glomérulaire mais imposent une surveillance
rigoureuse de la fonction rénale.
Le tabagisme actif est fréquent chez les candidats à la
transplantation. Plus de 50 % des patients transplantés
ont fumé au cours de leur vie, dont 27 % dans les 2 ans
avant la transplantation (3, 4). Après la greffe, il existe
un bénéfice évident à accompagner le transplanté vers
l’arrêt du tabac, facteur de risque cardio-vasculaire et
carcinologique majeur.
Après la transplantation hépatique, une prise de poids
est constatée. En moyenne de 5 kg à 1 an et de 9 kg à
3 ans, elle est responsable d’un taux d’obésité (indice
de masse corporelle [IMC] > 30 kg/m
2
) de 24 % et de
31 % à 1 et 3 ans, respectivement, après greffe (5). Il est
donc important de surveiller la cinétique de la courbe
de poids des patients afin de tenter de stabiliser celui-ci
précocement et d’éviter une évolution vers une obésité
associée à une morbidité, notamment cardio-vasculaire,
à long terme. La chirurgie bariatrique après transplan-
tation hépatique est envisageable, mais l’expérience
reste limitée à quelques patients (6).
Chez la plupart des patients, l’intolérance au glucose
disparaît après l’arrêt des corticostéroïdes. En revanche,
chez 20 à 30 % d’entre eux, les effets diabétogènes des
immunosuppresseurs peuvent nécessiter un traitement
spécifique (2). Le traitement du diabète après trans-
plantation ne diffère pas de celui des autres patients.
L’insuline, souvent nécessaire pendant les premiers
mois, n’est maintenue que chez une minime proportion
de patients. En effet, avec la diminution des doses d’im-
munosuppresseurs, les antidiabétiques oraux permet-
tent souvent un contrôle des glycémies. Des contrôles
réguliers des complications à long terme (rétinopathie,
néphropathie, neuropathie) sont nécessaires.
Concernant la dyslipidémie, les statines constituent
la classe de médicaments de premier recours : la pra-
vastatine devrait être préférée aux autres statines
en raison de son risque faible d’interaction avec la
ciclosporine et le tacrolimus. Comme la ciclosporine
peut augmenter le taux de cholestérol par inhibition
de la synthèse d’acides biliaires, une conversion de la
ciclosporine au tacrolimus, en association avec l’arrêt
ou la diminution des corticostéroïdes, peut avoir des
effets bénéfiques.
Médecine préventive et cancer
L’incidence globale des cancers chez le patient trans-
planté est augmentée d’un facteur 2,5 par rapport à la
population générale, justifiant une surveillance clinique
et paraclinique spécifique et régulière (7, 8). Les cancers
de la peau et les lymphomes malins, hodgkiniens et non
hodgkiniens, sont les tumeurs les plus fréquentes. Les
patients transplantés pour maladie alcoolique du foie
avec consommation tabagique sont particulièrement
exposés, après la greffe, au risque carcinologique des
voies aéro-digestives supérieures (VADS). L’incidence
des principaux cancers responsables d’une mortalité
importante dans la population générale, qu’il s’agisse
des cancers du poumon, du côlon-rectum, des VADS,
du rein, du pancréas ou de l’estomac, est significative-
ment augmentée. Le cancer le plus souvent rencontré
après greffe est le cancer cutané. Sa prévention passe
par la limitation de l’exposition solaire, le traitement
des kératoses préépithéliomateuses et par un suivi