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Forum Med Suisse 2010;10(4):71 71
Statines – bonnes pour le cœur,problématiques
pour les muscles1
Annette Draegera,Verónica Sanchez-Freirea,Eduard B. Babiychuka,Katia Monastyrskayaa,Hans Hoppelera,
Fabio Breila,Markus G. Mohauptb
aInstitut für Anatomie, Universität Bern
bAbteilung für Nephrologie/Hypertonie, Inselspital, Universität Bern
Introduction
Les maladies cardiovasculaires sont l’une des plus im
portantes causes de décès dans le monde occidental.
Un taux élevé de cholestérol favorise notablement leur
manifestation. Les statines, qui inhibent la production
endogène de cholestérol, en sont le traitement reconnu.
Mais 5à10% des patients ressentiront des douleurs
musculaires comme effet indésirable [1]. La situation
s’améliore en général après diminution de la dose ou
un changement de médicament. Mais parce que la ma
ladie de base persiste, une diminution de la dose, voire
une interruption complète du traitement, n’est la plu
part du temps pas indiquée.
La forme la plus grave de myopathie chez les patients
traités par statines, la rhabdomyolyse, est très rare.
Elle ne touche statistiquement que moins d’un patient
sur 100000. Mais si rare qu’elle soit, la rhabdomyolyse
est une complication potentiellement très dangereuse
[1]. Des douleurs moindres sont plus fréquentes, sur
tout à l’effort physique, de même qu’une myasthénie.
De tels effets indésirables discrets ne sont malheureu
sement pas pris au sérieux, pas plus par les patients
que par leurs médecins traitants.
But
Si le traitement par statines inhibe la synthèse de cho
lestérol par l’organisme, il est concevable que les mem
branes cellulaires en souffrent. Elles se composent en
effet en majeure partie de cholestérol. C’est la raison
pour laquelle notre projet a d’abord cherché à savoir si
un sevrage en cholestérol avait un effet sur les mem
branes des myocytes surtout. Notre question suivante
fut pourquoi la musculature squelettique est particu
lièrement sujette aux dégâts provoqués par les statines.
Dans un second temps, nous avons examiné dans
quelle mesure les problèmes musculaires diagnostiqués
cliniquement étaient en corrélation avec les lésions vi
sibles sur les biopsies. Nous avons en outre cherché à
savoir si la créatinekinase pouvait être un indicateur
d’une myopathie provoquée par les statines. Cet en
zyme est effectivement augmenté dans le sérum en cas
de pathologies musculaires.
Les hypocholestérolémiants ne provoquent des pro
blèmes quechez quelque 10% des patients traités. Dans
une troisième partie de l’étude, nous nous sommes
posé la question du pourquoi. Si nous pouvons savoir
rapidement quels patients sous statines risquent de dé
velopper une myopathie, il devrait être possible de sim
plifier le choix du médicament et d’optimiser le traite
ment et la surveillance des patients. Finalement nous
avons tenté d’améliorer les tests cliniques dans le but
de favoriser le développement de nouveaux hypolipé
miants.
Méthode
Depuis de nombreuses années, notre groupe de travail
àl’Institut d’Anatomie de l’Université de Berne
s’intéresse àl’équilibre lipides–protéines dans les mem
branes des cellules contractiles [2]. Nous étions donc à
même d’étudier la structure des cellules de la muscula
ture squelettique au microscope optique, électronique
et à fluorescence. Nous avons ainsi voulu d’abord exa
miner l’effet du sevrage de cholestérol sur les différents
systèmes membranaires de ces cellules [3].
Pour la partie clinique de notre étude, nous avons pré
levé des biopsies musculaires de la cuisse de quelques
patients pour en examiner les défauts structurels
(n = 83). 44 échantillons provenaient de patients sous
statines avec problèmes musculaires et 19 de patients
traités mais sans de tels problèmes. 20 biopsies pro
venaient de personnes non traitées par statines qui ont
servi de témoins. Nous avons dosé la créatinekinase
dans le sérum de tous ces sujets. Une analyse biolo
gique moléculaire de la musculature squelettique était
censée nous montrer si certains patients avaient une
prédisposition génétique à une myopathie due aux sta
tines.
Résultats
Les cellules de la musculature squelettique ont un
système membranaire complexe, les tubules T, avec
une structure lipidesprotéines particulière. Ce système
est conçu pour que les excitations nerveuses soient
transmises efficacementàl’intérieur de la cellule [2]. La
structure des membranes est si compliquée qu’un
stress mécanique intense du muscle squelettique peut
provoquer des lésions structurelles à ce niveau.
Ce risque est accru chez les patients sous traitement
par statines car elles inhibent un enzyme (l’HMGCoA
réductase) responsable de la production de cholestérol.
Les fibres musculaires squelettiques desquelles du cho
lestérol a été extrait in vitro montrent déjà que de très
1 Myopathie induite par les statines. Projet numéro:
405340-104679.
Programme national
de recherche PNR 53
«Santé musculosque-
lettique – douleurs
chroniques»