Applications linéaires I Définitions et exemples I.A Définition d’une application linéaire . . . I.B Composée de deux applications linéaires . I.C Noyau et image d’une application linéaire I.D Projecteurs et symétries . . . . . . . . . . I.D.1 Projecteurs . . . . . . . . . . . . . I.D.2 Symétries . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 1 3 4 5 5 6 II Applications linéaires en dimension finie II.A Le théoréme fondamental . . . . . . . . . . . . . . . . . . II.B Isomorphismes entre espaces vectoriels de dimension finie II.C Théorème du rang et conséquences . . . . . . . . . . . . . II.D Rang d’une application linéaire . . . . . . . . . . . . . . . II.E Noyau d’une forme linéaire, hyperplans . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 7 10 11 12 13 I . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Définitions et exemples I.A Définition d’une application linéaire Définition 1. Soient E et F deux K-espaces vectoriels et f : E → F une application. On dit que f est une application linéaire de E dans F si : ∀~u, ~v ∈ E, ∀λ, µ ∈ K on a f (λ~u + µ~v ) = λf (~u) + µf (~v ) On note LK (E, F ) l’ensemble des applications linéaires de E dans F . (noté aussi L(E, F )) Remarque 1. Si f est une application linéaire, on déduit assez facilement de la définition ci-dessus les propriétés suivantes : 1. f est linéaire si et seulement si ∀λ ∈ R, ∀~u, ~v ∈ E : f (λ~u) = λf (~u) f (~u + ~v ) = f (~u) + f (~v ) 2. f (~0E ) = ~0F . 3. ∀λ1 , λ2 , . . . , λn ∈ K, ∀~u1 , ~u2 , . . . , ~un ∈ E : f( n X λi ~ui ) = i=1 n X λi f (~ui ) k=1 Définition 2. Une application linéaire de E dans E est appelée endomorphisme de E. L’ensemble des endomorphismes de E se note : LK (E, E) = LK (E) = L(E) 1 Définition 3. – Une application linéaire bijective de E dans F est appelée isomorphisme de E sur F . E et F sont dits isomorphes s’il existe un isomorphisme de E sur F . On note alors E ∼ F . – Un endomorphisme bijectif de E est appelé automorphisme de E. Exemples 1. Voici quelques exemples usuels d’applications linéaires dans un K-ev E quelconque : E → F 1. f : est une application linéaire. ~u 7→ ~0F E → E 2. Si α ∈ K, alors f : est un endomorphisme de E appelé ~u 7→ α~u homothétie vectorielle de rapport α. E → E En particulier, IdE : est une application linéaire. ~u 7→ ~u Exemples 2 (Autres exemples). 1. Dans le R-espace vectoriel R : R → R R f: est linéaire alors que g : x 7→ 2x x → R ne l’est pas. 7 → sin x 2. Dans le K-espace vectoriel K[X] : K[X] → K[X] Φ: est linéaire. P 7→ P0 3. Toute isométrie vectorielle du plan, comme par exemple une rotation vectorielle (voir chapitre géométrie du plan), est une application linéaire. Démonstration. 1. ∀x, y ∈ R, ∀λ, µ ∈ R, on a : f (λx + µy) = 2(λx + µy) = λ(2x) + µ(2y) = λf (x) + µf (y) En revanche, g( π2 + g( π2 ) π ) 2 + g( π2 ) = sin( π2 + = π 2 sin π ) 2 + sin = sin π = 0 π 2 = 2 6= g( π2 + π ) 2 Exercice 1. Les applications suivantes sont-elles linéaires ? Justifier. R → R R → R a) f : b) g : x 7→ 2x2 x 7→ 4x − 3 R → R R2 → R2 c) h : d) i : x 7→ |x| (x, y) 7→ (y, x) 2 R → R R2 → R3 f) j : e) k : (x, y) 7→ xy (x, y) 7→ (2x, x + y, 2y) 2 Proposition 1. LK (E, F ) est un K-espace vectoriel, d’élément neutre l’application nulle de E dans F (~u 7→ ~0F ), pour les lois usuelles + et . définies pour les applications. Définition 4. Si F = K, f ∈ L(E, K) est appelée forme linéaire de E (sur K). Exemples 3. R2 → R 1. Φ : est une forme linéaire de R2 (x, y) 7→ x K[X] → K 2. Ψ : est une forme linéaire de K[X]. P 7→ P (1) I.B Composée de deux applications linéaires Proposition 2. La composée de deux applications linéaires est une application linéaire. Démonstration. Soient f : E → F et g : F → G deux applications linéaires. Si λ, µ ∈ K et ~ u, ~v ∈ E, on a : (g ◦ f )(λ~ u + µ~v ) (g ◦ f )(λ~ u + µ~v ) = = = g[f (λ~ u + µ~v )] = g[λf (~ u) + µf (~v )] λg[f (~ u)] + µg[f (~v )] λ(g ◦ f )(~ u) + µ(g ◦ f )(~v ) (car f est linéaire) (car g est linéaire) Conséquence : La composée de deux endomorphismes de E est un endomorphisme de E. Proposition 3. Si f : E → F est un isomorphisme, alors f −1 : F → E est aussi une application linéaire (donc un isomorphisme). Démonstration. Soit f : E → F un isomorphisme. Si λ, µ ∈ K et ~ u0 , ~v 0 ∈ F, a-t-on : f −1 (λ~ u0 + µ~v 0 ) = λf −1 (~ u0 ) + µf −1 (~v 0 ) ? On sait qu’il existe ~ u, ~v ∈ E tels que ~ u0 = f (~ u) et ~v 0 = f (~v ) (car f est surjective). Donc : f −1 (λ~ u0 + µ~v 0 ) = f −1 (λf (~ u) + µf (~v )) = f −1 [f (λ~ u + µ~v )] car f est linéaire. D’où, avec la relation f −1 ◦ f = IdE : f −1 (λ~ u0 + µ~v 0 ) = λ~ u + µ~v = λf −1 (~ u0 ) + µf −1 (~v 0 ) Définition 5. On note GL(E) l’ensemble des automorphismes de E. (GL(E), ◦) est un groupe (non commutatif) appelé groupe linéaire de E (d’élément neutre IdE ). Remarque 2. L’ensemble des homothéties de rapport non nul (applications ~u 7→ α~u avec α 6= 0) forme un sous-groupe de GL(E). 3 I.C Noyau et image d’une application linéaire Définition 6. Soit f ∈ L(E, F ). 1. On appelle noyau de f , l’ensemble noté : Ker f = f −1 ({~0F }) = {~u ∈ E/ f (~u) = ~0F } 2. On appelle image de f, l’ensemble noté : Im f = f (E) = {~v ∈ F/ ∃~u ∈ E, ~v = f (~u)} Exemples 4 (Exemples généraux). 1. Soit f ∈ L(E, F ). Si f est l’application nulle, alors Ker f = E et Im f = {~0F }. 2. Soit f ∈ L(E). Si f = IdE , alors Ker f = {~0E } et Im f = E. Proposition 4. Si f ∈ L(E, F ), alors Ker f (resp Im f ) est un sous-espace vectoriel de E (resp. de F ). Démonstration. Exercice Exemple 5. {(x, y, z) ∈ R3 / x + 2y + z = 0} est un s.e.v. de R3 car il s’agit du noyau de la forme linéaire Φ : (x, y, z) 7→ x + 2y + z. Proposition 5. Soient E, F deux K-e.v. et f ∈ L(E, F ), alors : (i) f est injective si et seulement si Ker f = {~0E }. (ii) f est surjective si et seulement si Im f = F . Démonstration. (i) (⇒) Supposons f injective. Cherchons Ker f . Si ~ u ∈ Ker f alors f (~ u) = f (~0), donc ~ u = ~0 (car f est injective). En conclusion, on a Ker f = {~0}. (⇐) Supposons Ker f = {~0}. Montrons que f est injective. Soient ~ u et ~v ∈ E tels que f (~ u) = f (~v ), alors f (~ u) − f (~v ) = 0 = f (~ u − ~v ). D’où ~ u − ~v ∈ Ker f , ce qui montre ~ u − ~v = 0 et ~ u = ~v . Donc f est injective. (ii) Évident. Exemple 6. Φ : R3 → R (x, y, z) 7→ x + 2y + z est surjective car ∀α ∈ R, on a α = Φ((α, 0, 0)), et non injective car Φ((1, 0, −1)) = (0, 0, 0) par exemple. Exercice 2. 1. Montrer que l’application linéaire Φ : et non injective. 4 K[X] → K[X] est surjective P 7→ P0 2. Montrer que l’application Ψ : K[X] → K[X] est linéaire, injective P 7→ XP et non surjective. Solution. n X 1. Si P = ak X k alors P = Φ n X k=0 k=0 ak X k+1 k+1 ! donc Φ est surjective. De plus, Φ(1) = 0 donc Φ n’est pas injective. 2. ∀P, Q ∈ K[X], ∀λ, µ ∈ K, on a : Ψ(λP + µQ) = X(λP + µQ) = λXP + µXQ = λΨ(P ) + µΨ(Q) donc Ψ est linéaire. De plus : Ψ(P ) = 0 ⇒ XP = 0 ⇒ P = 0 Donc Ψ est injective, mais Ψ n’est pas surjective car le polynôme Q = 1, par exemple, n’a pas d’antécédent par Ψ (∀P ∈ K[X], on a XP = 1 ⇒ X | 1 ce qui est absurde, donc Q ne peut être image de P par Ψ). Exercice 3. Montrer que les applications suivantes sont des automorphismes : R2 → R2 R[X] → R[X] a) f : b) g : (x, y) 7→ (x + y, x − y) P 7 → P + P0 I.D Projecteurs et symétries I.D.1 Projecteurs Définition 7. Soient F et G deux s.e.v. supplémentaires de E. i.e. ∀~u ∈ E, ∃!(~u1 , ~u2 ) ∈ F × G tel que ~u = ~u1 + ~u2 On appelle projection sur F parallèlement à G (ou projecteur ) l’application : G p: E ~u → E 7→ ~u1 ~ u2 F ~ u ~ u1 = p(~ u) Projection sur F parallèlement à G Remarques 3. 1. Un projecteur est un endomorphisme de E. 5 2. Si E = F ⊕ G, alors l’endomorphisme p est la projection sur F parallèle ∀~u ∈ F p(~u) = ~u ment à G si et seulement si ∀~u ∈ G p(~u) = 0 Exemple 7. On note (~i, ~j, ~k) la base canonique de R3 . R3 → R3 p: (x, y, z) 7→ (x, y, 0) est la projection sur le plan Vect(~i, ~j) parallèlement à la droite R~k Proposition 6. Soit p ∈ L(E), alors : p est un projecteur ⇔ p ◦ p = p Dans ce cas, p est la projection sur Im p parallèlement à Ker p. (on a alors E = Ker p ⊕ Im p ) Démonstration. Si p ◦ p = p, alors montrons tout d’abord que E = Ker p ⊕ Im p : (⇐) •: Soit ~ x ∈ Ker p ∩ Im p : ~ x ∈ Im p donc ∃~ y ∈ E tel que ~ x = p(~ y ), et ~ x ∈ ker p donc p(~ x) = 0. Or : p(~ x) = p ◦ p(~ y ) = p(~ y) = ~ x Donc ~ x = ~0 donc Ker p ⊕ Im p • Soit ~ x ∈ E alors : ~ x = p(~ x) + ~ x − p(~ x) |{z} | {z } ∈Im p ∈Ker p Donc E = Ker p ⊕ Im p. La projection sur Im p parallèlement à Ker p est alors l’application ~ x 7→ p(~ x), c’est à dire p. (⇒) : Si p est la projection sur F parallèlement à G et si ~ x ∈ E, on a : ~ x= ~ x1 + ~ x2 |{z} |{z} ∈F ∈G On a alors p(~ x) = ~ x1 et p ◦ p(~ x) = p(~ x1 ) = ~ x1 , donc p ◦ p = p. I.D.2 Symétries Définition 8. Soient F et G deux s.e.v. supplémentaires de E. i.e. ∀~u ∈ E, ∃!(~u1 , ~u2 ) ∈ F × G tel que ~u = ~u1 + ~u2 On appelle symétrie par rapport à F parallèlement à G l’application : G s: E ~u → E 7→ ~u1 − ~u2 ~ u ~ u2 ~ u1 F −~ u2 s(~ u) Symétrie par rapport à F parallèlement à G 6 Remarques 4. 1. Une symétrie est un endomorphisme de E. 2. Si E = F ⊕ G, alors l’endomorphisme s est la symétrie par rapport à F ∀~u ∈ F s(~u) = ~u parallèlement à G si et seulement si ∀~u ∈ G s(~u) = −~u Exemple 8. On note (~i, ~j, ~k) la base canonique de R3 . R3 → R3 s: (x, y, z) 7→ (x, y, −z) est la symétrie par rapport au plan Vect(~i, ~j) parallèlement à la droite R~k Proposition 7. Soit s ∈ L(E), alors : s est une symétrie ⇔ s ◦ s = IdE Démonstration. admis. Exercice 4. Montrer que les endomorphismes suivants sont des symétries. On déterminera les éléments caractéristiques de celles-ci : C → C 1. Conjugaison : dans le R-e.v. C. z 7→ z K[X] → K[X] 2. Φ : P (X) 7→ P (−X) Solution. 1. Cette application est clairement R-linéaire. De plus, ∀z ∈ C on a (z) = z, donc la conjugaison est une symétrie. Enfin, z = z si et seulement si z ∈ R, et z = −z si et seulement si z ∈ iR, donc s est la symétrie par rapport à R parallèlement à iR. 2. On montre de façon similaire que Φ est la symétrie par rapport au s.e.v des polynômes pairs parallèlement au s.e.v des polynômes impairs. II Applications linéaires en dimension finie E est un K-espace vectoriel de dimension finie II.A Le théoréme fondamental Théorème 1. Une application linéaire est déterminée de manière unique par les images des éléments d’une base quelconque du K-e.v. E de départ, c’est à dire : si E et F sont deux K-e.v. (E de dimension finie), (~e1 , ~e2 , . . . , ~en ) une base de E et (f~1 , f~2 , . . . , f~n ) n vecteurs de F , il existe une application linéaire Φ et une seule telle que : ∀i ∈ [[1, n]] , Φ(~ei ) = f~i 7 Remarque 5. Autrement dit, pour connaître (resp. définir) une application f ∈ L(E, F ), il suffit de connaître (resp. définir) les images d’une base de E par cette application. Démonstration. Unicité : Soit ~ u ∈ E, il existe λ1 , λ2 , . . . , λn ∈ K tels que : ~ u= n X λi~ei i=1 Si Φ ∈ L(E, F ) vérifie Φ(~ei ) = f~i ∀i, alors : ! n n n X X X λi~ei = Φ(~ u) = Φ λi Φ(~ei ) = λi f~i i=1 i=1 i=1 Donc Φ est bien définie de manière unique. Existence : On pose : Φ(~ u) = n X λi f~i i=1 où (λ1 , λ2 , . . . , λn ) sont les coordonnées de ~ u dans la base (~e1 , ~e2 , . . . , ~en ). Φ est clain n X X rement une application. De plus, Φ est linéaire, car si ~ u = λi~ei , ~v = µi~ei et i=1 i=1 λ, µ ∈ K, on a : Φ(λ~ u+µ~v ) = Φ n X ! (λλi + µµi )~ei i=1 = n X (λλi +µµi )f~i = λ i=1 n X λi f~i +µ i=1 n X µi f~i = λΦ(~ u)+µΦ(~v ) i=1 Enfin, l’application Φ vérifie la condition du théorème 1 : ∀i ∈ [[1, n]] , Φ(~ei ) = 0.f~1 + 0.f~2 + · · · + 0.f~i−1 + 1.f~i + 0.f~i+1 + · · · + 0.f~n = f~i Exemples 9. 1. On prend E = F = R3 . (~e1 , ~e2 , ~e3 ) étant application de la manière suivante : Φ(~e1 ) = Φ(~e2 ) = Φ: Φ(~e3 ) = la base canonique, on définit une (1, 3, 1) (0, 0, 0) (2, 1, 0) On a alors, ∀(x, y, z) ∈ R3 : Φ((x, y, z)) = Φ((x~e1 + y~e2 + z~e3 )) = xΦ(~e1 ) + yΦ(~e2 ) + zΦ(~e3 ) = (x, 3x, x) + (0, 0, 0) + (2z, z, 0) = = (x + 2z, 3x + z, x) Donc Φ est l’application : (x, y, z) 7→ (x + 2z, 3x + z, x). 2. L’application linéaire : Kn [X] → Kn [X] Φ: P 7→ P0 est aussi définie par : Φ(1) = 0, Φ(X) = 1, Φ(X 2 ) = 2X, . . . , Φ(X n ) = nX n−1 Ainsi Φ( n X k=0 ak X k ) = n X ak Φ(X k ) = k=0 n X k=0 8 kak X k−1 . Proposition 8. Si (~e1 , ~e2 , . . . , ~en ) est une base (f (~e1 ), f (~e2 ), . . . , f (~en )) est une famille génératrice de Im f . de E, alors Démonstration. soit ~v ∈ Im f , alors ~v = f (~ u) avec ~ u = λ1~e1 + λ2~e2 + · · · + λn~en ∈ E. On peut ainsi écrire : ~v = f (λ1~e1 + λ2~e2 + · · · + λn~en ) = λ1 f (~e1 ) + λ2 f (~e2 ) + · · · + λn f (~en ) Donc Im f est bien engendré par la famille (f (~e1 ), f (~e2 ), . . . , f (~en )). Attention ! Le résultat de la proposition 8 est à retenir car souvent utilisé dans les exercices. Exercice 5. Soit f un endomorphisme d’un R-e.v. de dimension 3 de base (~i, ~j, ~k), défini par : f (~i) = 3~i + 4~j − 5~k f (~j) = −4~i − 7~j + 10~k et f (~k) = −2~i − 4~j + 6~k Démontrer que f est une projection sur un plan vectoriel P~ parallèlement à une ~ dont on déterminera des bases. droite vectorielle D, Solution. Commençons alors : f (~ u) = = = par déterminer l’expression analytique de f . Soit ~ u = x~i + y~j + z~k, f (x~i + y~j + z~k) = xf (~i) + yf (~j) + zf (~k) x(3~i + 4~j − 5~k) + y(−4~i − 7~j + 10~k) + z(−2~i − 4~j + 6~k) (3x − 4y − 2z)~i + (4x − 7y − 4z)~j + (−5x + 10y + 6z)~k On sait que f est un projecteur si et seulement si f ◦ f = f . Or : f ◦ f (~ u) = = f (3x − 4y − 2z)~i + (4x − 7y − 4z)~j + (−5x + 10y + 6z)~k 3(3x − 4y − 2z) − 4(4x − 7y − 4z) − 2(−5x + 10y + 6z) ~i + 4(3x − 4y − 2z) − 7(4x − 7y − 4z) − 4(−5x + 10y + 6z) ~j + − 5(3x − 4y − 2z) + 10(4x − 7y − 4z) + 6(−5x + 10y + 6z) ~k f ◦ f (~ u) = (3x − 4y − 2z)~i + (4x − 7y − 4z)~j + (−5x + 10y + 6z)~k = f (~ u) f est donc un projecteur. On peut alors déterminer Ker f : ~ u ∈ Ker f si et seulement si f (u) = 0, c’est à dire ssi les coordonnées de ~ u vérifient le système : = 0 (1) 3x − 4y − 2z 4x − 7y − 4z = 0 (2) (S) : −5x + 10y + 6z = 0 (3) 3x − 4y − 2z −2x + y (S) ⇔ 4x − 2y = = = 0 0 0 (1) ← (1) (2) ← (2) − 2(1) (3) ← (3) + 3(1) ⇔ 3x − 4y − 2z y = = 0 2x On a finalement (S) ⇔ y = 2x et z = − 52 x, donc Ker f = R(2~i+4~j −5~k). Le vecteur 2~i+4~j −5~k ~ De plus, P ~ = V ect(f (~i), f (~j), f (~k)). On remarque ainsi est donc un vecteur directeur de D. ~. que (3~i + 4~j − 5~k, −4~i − 7~j + 10~k) est une base de P 9 II.B Isomorphismes entre espaces vectoriels de dimension finie Proposition 9. Soient E et F deux K-e.v. de dimension finie, (~e1 , ~e2 , . . . , ~en ) une base de E, et f ∈ L(E, F ). Alors : 1. f est injective si et seulement si (f (~e1 ), f (~e2 ), . . . , f (~en )) est une famille libre de F . 2. f est surjective si et seulement si (f (~e1 ), f (~e2 ), . . . , f (~en )) est une famille génératrice de F . 3. f est bijective si et seulement si (f (~e1 ), f (~e2 ), . . . , f (~en )) est une base de F . Démonstration. Le troisième point étant une conséquence des deux premiers, il reste à montrer 1) et 2) : 1. On suppose que f est injective. Montrons que (f (~e1 ), f (~e2 ), . . . , f (~en )) est une famille libre de F . Soit λ1 , λ2 , . . . , λn ∈ K tels que λ1 f (~e1 ) + λ2 f (~e2 ) + · · · + λn f (~en ) = ~0F . Par linéarité de f , on a : f (λ1~e1 + λ2~e2 + · · · + λn~en ) = ~0F Donc λ1~e1 + λ2~e2 + · · · + λn~en ∈ Ker f et comme f est injective, on a : λ1~e1 + λ2~e2 + · · · + λn~en = ~0E Enfin, (~e1 , ~e2 , . . . , ~en ) étant une base de E, on en déduit : λ1 = λ2 = · · · = λn = 0 La famille (f (~e1 ), f (~e2 ), . . . , f (~en )) est donc une famille libre de F . Réciproquement, on suppose que (f (~e1 ), f (~e2 ), . . . , f (~en )) est une famille libre de F . Soit ~ u = λ1~e1 + λ2~e2 + · · · + λn~en , alors : ~ u ∈ Ker f ⇔ f (λ1~e1 + λ2~e2 + · · · + λn~en ) = ~0F ⇔ λ1 f (~e1 ) + λ2 f (~e2 ) + · · · + λn f (~en ) = ~0F Comme (f (~e1 ), f (~e2 ), . . . , f (~en )) est une famille libre de F , cette dernière condition équivaut à : λ1 = λ2 = . . . = λn = 0 Donc ~ u = ~0E . f est donc injective. 2. On sait, d’après la proposition 8, que Im f = Vect(f (~e1 ), f (~e2 ), . . . , f (~en )). Or f est surjective si et seulement si Im f = F . Donc f est surjective si et seulement si F = Vect(f (~e1 ), f (~e2 ), . . . , f (~en )), ce qui est le résultat annoncé. Théorème 2. Soient E et F deux K-e.v. de dimension finie. Alors E et F sont isomorphes si et seulement si dim E = dim F . Démonstration. Montrons les implications réciproques. (⇒) : On suppose que dim E = dim F . Les bases de ces deux espaces ont donc le même nombre d’éléments. Soit (~e1 , ~e2 , . . . , ~en ) et (f~1 , f~2 , . . . , f~n ) des bases respectives de E et F . On sait d’après le théorème fondamental qu’il existe une application linéaire ϕ : E → F vérifiant : ∀i ∈ [[1, n]] , ϕ(~ei ) = f~i Comme de plus (ϕ(~e1 ), ϕ(~e2 ), . . . , ϕ(~en )) = (f~1 , f~2 , . . . , f~n ) est une base de F alors, d’après la proposition 9, l’application ϕ est bijective, donc c’est un isomorphisme. (⇐) : On suppose qu’il existe un isomorphisme ϕ : E → F . D’après la proposition 9, si (~e1 , ~e2 , . . . , ~en ) est une base de E, alors (f (~e1 ), f (~e2 ), . . . , f (~en )) est une base de F . Ces bases respectives de E et F comptent le même nombre d’éléments, donc dim E = dim F . 10 Conséquences : Deux e.v. de dimensions différentes ne sont pas isomorphes. Par exemple, R2 et R2 [X] ne sont pas isomorphes. En revanche on a R3 ∼ R2 [X], car ces deux espaces ont même dimension (et l’isomorphisme canonique est (a, b, c) 7→ aX 2 + bX + c). II.C Théorème du rang et conséquences Théorème 3 (théorème du rang). Soit f ∈ L(E, F ), alors : dim E = dim(Ker f ) + dim(Im f ) Démonstration. Admise Proposition 10. Si dim E = dim F et f ∈ L(E, F ), alors : f bijective ⇔ f injective ⇔ f surjective Démonstration. Il suffit de montrer : f injective ⇔ f surjective. Or, f est injective si et seulement si Ker f = {~0} c’est à dire dim(Ker f ) = 0. D’après le théorème 3, ceci équivaut à : dim(Im f ) = dim E = dim F donc à Im f = F et f est surjective. Remarques 6. 1. Si dim E 6= dim F , tout f ∈ L(E, F ) n’est évidemment jamais bijective. 2. En particulier, si E est de dimension finie et f ∈ L(E), alors la proposition 10 s’applique. Attention ! c’est faux en dimension infinie comme on le voit à l’exercice 2.1). Exercice 6. Démontrer que l’application : R3 → R2 [X] Φ: (a, b, c) 7→ (a + b)X 2 + (b + c)X + (a + b + c) est un isomorphisme. Solution. On vérifie facilement que f est linéaire. Cherchons Ker f . Soit (a, b, c) ∈ Ker f , on a Φ(a, b, c) = 0, donc (a + b)X 2 + (b + c)X + (a + b + c) = 0, ce qui donne, par identification, le système : a+b = 0 b+c = 0 a+b+c = 0 D’où a = −b = c et a + b + c = −b + b − b = −b = 0, donc a = b = c = 0. Ainsi, Ker f = {(0, 0, 0)} donc f est injective. Enfin, on remarque que : dim R3 = dim R2 [X] = 3 Donc f est un isomorphisme. 11 Exercice 7. Soient a1 , a2 , . . . , an ∈ R deux à deux distincts et Φ: Rn−1 [X] → P 7→ Rn (P (a1 ), P (a2 ), . . . , P (an )) Montrer que Φ est un isomorphisme. Solution. Φ est clairement une application linéaire. Si Φ(P ) = 0, alors P est un polynôme de degré 6 n − 1 qui admet n racines distinctes, donc P est le polynôme nul d’où Ker Φ = {0}. Comme de plus dim Rn−1 [X] = dim Rn , Φ est donc un isomorphisme. II.D Rang d’une application linéaire Définition 9. Soit f ∈ L(E, F ). On appelle rang de f , la dimension de Im f . Notation : rg f = dim(Im f ). Proposition 11. Soit f ∈ L(E, F ) et (~e1 , ~e2 , . . . , ~en ) une base de E. Alors le rang de f est égal au rang de la famille (f (~e1 ), f (~e2 ), . . . , f (~en )). Démonstration. C’est évident d’après la proposition 8. Exercice 8. Soit f: R3 → R3 (x, y, z) 7→ (x + y, y − z, z + x) Déterminer le rang de l’application f , ainsi qu’une base de Im f . Solution. On calcule : f ((1, 0, 0)) = (1, 0, 1) f ((0, 1, 0)) = (1, 1, 0) f ((0, 0, 1)) = (0, −1, 1) D’après la proposition 11, on a alors : rg f = rg((1, 0, 1), (1, 1, 0), (0, −1, 1)) et on constate la relation : (0, −1, 1) = (1, 0, 1) − (1, 1, 0), donc rg f = rg((1, 0, 1), (1, 1, 0)) = 2 et une base de Im f est ((1, 0, 1), (1, 1, 0)). 12 II.E Noyau d’une forme linéaire, hyperplans Définition 10. Soit E un K-e.v. (de dimension finie ou infinie). On appelle hyperplan de E tout s.e.v. de E qui admet un s.e.v. supplémentaire de dimension 1. Remarques 7. 1. Si dim E = n, les hyperplans de E sont les s.e.v. de E de dimension n − 1. 2. Si n = 3 : Si n = 2 : Si n = 1 : les hyperplans sont les plans vectoriels. les hyperplans sont les droites vectorielles. le seul hyperplan est {~0E }. Théorème 4. Soit E un K-e.v. de dimension finie et H une partie de E. Alors H est un hyperplan de E si et seulement si H est le noyau d’une forme linéaire non nulle. Démonstration. ⇐ : Soit Φ : E → K une forme linéaire non nulle, alors Im Φ 6= {0}. Im Φ est donc un s.e.v. de K de dimension > 1, donc dim(Im Φ) = 1 et Im Φ = K (car dim K = 1). D’après le théorème 3, on a : dim(Ker Φ) = dim E − dim(Im Φ) = n − 1 Donc H = ker Φ est un hyperplan de E. ⇒ : Soit H un hyperplan de E, alors dim H = n−1. On choisit une base (~e1 , ~e2 , . . . , ~en−1 ) de H, qu’on complète en une base (~e1 , ~e2 , . . . , ~en−1 , ~en ) de E. On définit alors la forme linéaire Φ par : Φ(~ei ) = 0 ∀i ∈ [[1, n − 1]] et Φ(~en ) = 1 Φ est non nulle donc dim(Ker Φ) = n − 1 = dim H. De plus, H ⊂ Ker Φ car ∀~ u = λ1~e1 + λ2~e2 + · · · + λn−1~en−1 ∈ H, on a : Φ(~ u) = = Φ(λ1~e1 + λ2~e2 + · · · + λn−1~en−1 ) λ1 Φ(~e1 ) + λ2 Φ(~e2 ) + · · · + λn−1 Φ(~en−1 ) = 0 Donc H = ker Φ. Définition 11. Soit Φ : E → K une forme linéaire non nulle de noyau l’hyperplan H. On dit que l’équation Φ(~u) = 0 est une équation cartésienne de H. Remarque 8. Soit (~e1 , ~e2 , . . . , ~en ) une base du K-e.v. E et Φ : E → K une forme linéaire non nulle, avec H = Ker Φ. On pose ai = Φ(~ei ) ∀i ∈ [[1, n]]. On a alors : ~u ∈ H ⇔ Φ(~u) = 0 ⇔ Φ(x1~e1 + x2~e2 + · · · + xn~en ) = 0 ⇔ x1 Φ(~e1 ) + x2 Φ(~e2 ) + · · · + xn Φ(~en ) = 0 Donc, avec les notations précédentes, l’équation de H s’écrit : a1 x1 + a2 x2 + · · · + an xn = 0 (avec (a1 , a2 , . . . , an ) 6= (0, 0, . . . , 0), car Φ est non nulle). 13 Cas particuliers : n = 2 : L’équation cartésienne d’une droite vectorielle est de la forme ax + by = 0 avec (a, b) 6= (0, 0), (x, y) étant les coordonnées d’un vecteur dans une base (~e1 , ~e2 ) quelconque. n = 3 : L’équation cartésienne d’un plan vectoriel est de la forme ax + by + cz = 0 avec (a, b, c) 6= (0, 0, 0), (x, y, z) étant les coordonnées d’un vecteur dans une base (~e1 , ~e2 , ~e3 ) quelconque. Exercice 9. 1. Soit φ : R4 → (x, y, z, t) 7→ R x+y+z+t Déterminer une base de Ker φ. 2. Soit H = Vect (2, 1, 0), (1, 1, 1) . Déterminer une équation cartésienne de H. 14