Matériels et sécurité :
bilan de la matériovigilance
À LA LOUPE
20 VIGILANCE N° 23 AVRIL 2011
2005-2006 et résolues dans 59 % des cas, les mésusages
ont augmenté (toutes gravités confondues) de 10 %
(p< 0,05). Le taux d’incidents sévères est resté stable sur
la période étudiée.
Les mésusages constituent donc le cœur de la réflexion. Ils
sont, par nature, amendables et constituent un enjeu
important pour notre spécialité.
On peut envisager plusieurs axes de travail pour améliorer
la situation.
–Une offre pédagogique intégrée qui unirait les données
issues de l’Afssaps, des industriels et de la SFAR. On
peut imaginer l’intérêt d’une base d’informations en ligne
offrant, pour chaque type de matériels, des informations
utiles pour comprendre les causes d’incidents, les
bonnes pratiques. Une réflexion est en cours entre la
SFAR et les industriels via leur syndicat (SNITEM). La
mise en commun des causes pour nourrir une réflexion
commune sous forme d’un observatoire tripartite présen-
terait un réel intérêt. Par ailleurs, des articles orientés
autour des matériels ont été publiés dans les Annales
Françaises d’Anesthésie et de Réanimation, mais méri-
teraient d’être encouragés.
–Penser et promouvoir la fonction de « référent matériel »
pour les dispositifs médicaux, dans les services : cette
fonction de référent qu’on imagine comme un binôme
(médecin/infirmier) aurait de nombreux avantages. Il
permettrait d’assurer la formation sur site des acteurs
dont le turn over est important, mais aussi de faciliter les
contacts avec les industriels qui déplorent de ne pas avoir
d’interlocuteurs fiables au niveau clinique. Cette fonction
de référent semble suffisamment pertinente pour justifier
une prise en compte des tutelles du gain qu’apporterait
cette fonction sur la qualité des soins.
–Renforcer la culture de check-list et de suivi des parcs
installés : l’arrêté du 3 octobre 1995 (relatif aux moda-
lités d’utilisation et de contrôle des matériels et dispositifs
médicaux assurant les fonctions et actes cités aux articles
D. 712-43 et D. 712-47 du Code de la santé publique)
formalise le contrôle avant ouverture de salle d’opération,
la formation des utilisateurs à la mise en service de
nouveaux appareils, la maintenance organisée.
Néanmoins, force est de constater que ces opérations de
contrôle ont vieilli, ne sont souvent pas réactualisées, et
mériteraient d’être revisitées au niveau local.
Ainsi, on ne peut nier le fait que nous sommes confrontés
à un réel enjeu de sécurité et de formation dans ce
domaine. Un travail concerté, où les données utiles
seraient accessibles de façon commode par les utilisa-
teurs, constitue à notre avis la clé du débat. Les Allemands
ont rendu obligatoire la formation de tout utilisateur à l’en-
semble des DM qu’il est susceptible d’utiliser. Cette
approche réglementaire contraignante, si son efficacité
était démontrée, ne pourrait s’envisager qu’une fois que
l’utilisateur pourrait, de façon commode, disposer de la
formation requise.
Le moment est venu de créer un outil informatique en ligne,
vivant, actualisé et issu des sources indépendantes que
détiennent les industriels et l’Afssaps, d’une part, et corro-
borées par les données issues de la littérature, d’autre part.
Ensemble, mettons-nous au travail, le besoin est là ! Á
LAURENT BEYDON
CHU D’ANGERS, PÔLE D’ANESTHÉSIE-RÉANIMATION
lbeydon.angers@invivo.edu
* Réalisée sous l’égide de la SFAR, de l’AFIB (Association Française des Ingénieurs
Biomédicaux) et de l’Afssaps.
RÉFÉRENCES
1. Beydon L, Conreux F, Le Gall R, Safran D, Cazalaa JB. Analysis of the French
health ministry’s national register of incidents involving medical devices in
anaesthesia and intensive care. Br J Anaesth 2001 ; 86 : 382-387.
2. Beydon L, Ledenmat PY, Soltner C et al. Adverse events with medical devices in
anesthesia and intensive care unit patients recorded in the French safety
database in 2005-2006. Anesthesiology 2010 ; 112 : 364-372.