18 Infection par le VIH chez l`enfant et l`adolescent

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Infection par le VIH
chez l’enfant et l’adolescent
Le nombre d’enfants infectés par le VIH vivant en France n’est pas connu avec
précision mais estimé à moins de 1 000. À titre de comparaison, l’OMS estime
que plus de 1 500 enfants sont contaminés chaque jour dans le monde,
principalement en Afrique subsaharienne. Grâce au traitement préventif de la
transmission mère-enfant durant la grossesse, environ 10 à 20 nouveau-nés
infectés sont diagnostiqués chaque année depuis 1999, auxquels il faut toutefois
ajouter les enfants nés en pays de forte endémie récemment arrivés en France.
La complexité du traitement, l’évolution rapide des connaissances et le faible
nombre d’enfants infectés en France imposent que le suivi thérapeutique se fasse
dans – ou en étroite collaboration avec – un centre spécialisé. S’il existe
quelques particularités pédiatriques d’utilisation des antiviraux, l’essentiel des
connaissances reste toutefois extrapôlé de l’expérience du traitement des
adultes, qu’il importe donc de bien connaître avant de prendre en charge un
enfant.
Le médecin qui suit la mère peut, si elle le souhaite, être tenu au courant des
décisions concernant son enfant.
PRISE EN CHARGE DES NOUVEAU-NES
DE MERES INFECTEES PAR LE VIH
En salle de travail
À la naissance, la mise en œuvre rapide d’un bain du nouveau-né est
recommandée, bien que l’intérêt de cette mesure n’ait jamais été démontré.
L’utilisation d’un antiseptique virucide dilué dans le bain, tel que la chlorhexidine,
peut être discutée, mais là aussi sans preuve de son intérêt. La désinfection
oculaire habituellement réalisée en salle de travail a aussi un intérêt théorique.
L’aspiration gastrique doit être la moins traumatique possible compte tenu de la
présence quasi constante de virus dans l’estomac et les sécrétions naso-
pharyngées.
Traitement antirétroviral préventif. Phase post-natale
La zidovudine (Rétrovir®) doit être systématiquement prescrite
L’essai initial de prévention par zidovudine (essai ACTG076-ANRS024)
comportait une phase post-natale de traitement du nouveau-né arbitrairement
fixée à 6 semaines. Le rôle préventif de cette phase post-natale du traitement est
toutefois difficile à apprécier par rapport à celui des phases pré et per-natales,
surtout quand la charge virale maternelle est indétectable en peri-partum. Le
traitement par zidovudine en monothérapie est débuté le plus tôt possible, dans
les heures qui suivent la naissance, à la dose de 2 mg/kg toutes les 6 heures.
Chez le nouveau-né prématuré de moins de 34 semaines, il est nécessaire
d’adapter les doses à 1,5 mg/kg toutes les 12 heures par voie orale ou
intraveineuse pendant les 2 premières semaines de vie, puis 2 mg/kg toutes les 8
heures jusqu’à la fin du traitement. La voie intraveineuse peut être utilisée si le
nouveau-né est dans l’incapacité de prendre la forme orale ; la dose est alors de
1,5 mg/kg toutes les 6 heures. La posologie sera adaptée en fonction de la
concentration plasmatique résiduelle.
Plusieurs questions peuvent être soulevées concernant l’administration de la
zidovudine au nouveau-né. L’administration de la dose totale en 2 prises a été
évaluée et semble donner des résultats pharmacologiques identiques à
l’administration en 4 prises. Il n’existe toutefois pas de donnée d’équivalence
d’efficacité de ces deux schémas posologiques. La réduction de la durée du
traitement de 6 à 4 semaines a aussi été envisagée. Là encore, l’efficacité d’un
traitement plus court n’a pas été validée et les 6 semaines de traitement restent
la référence. Le risque potentiel de toxicité de la zidovudine doit conduire à une
surveillance étroite du nouveau-né, incluant un contrôle de la NFS et des
transaminases au minimum à J5 et J30. L’intérêt potentiel de la mesure des
lactates – très fréquemment élevés en pratique quotidienne – est actuellement
étudié dans la cohorte française. La zidovudine est arrêtée précocement en cas
de toxicité supérieure à un grade II (critères PACTG). Cet arrêt prématuré doit être
mis en perspective avec le risque potentiel d’infection de l’enfant, évalué
principalement sur la charge virale maternelle et les conditions d’accouchement.
Au cas par cas, on envisagera un arrêt définitif du traitement ou une substitution
de la zidovudine par une autre molécule.
Situations particulières
Lorsque la mère n’a pas reçu de traitement préventif, que le traitement a été
mal pris ou qu’il n’a pas permis de rendre la charge virale inférieure à 1 000
copies/ml en pre-partum, le renforcement du traitement post-natal doit être
envisagé, bien que l’efficacité d’une telle démarche n’ait pas été validée. Une
alternative ou une association à la zidovudine s’impose aussi en cas de résistance
prouvée (ou raisonnablement envisagée) à la zidovudine du virus maternel.
Les autres molécules dont la pharmacocinétique et la tolérance ont été
étudiées en période néonatale sont la lamivudine à la posologie de 2 mg/kg x 2 et
la névirapine en monodose post-natale à la posologie de 2 mg/kg. D’autres
molécules ont des présentations galéniques adaptées mais les données
pharmacocinétiques chez le nouveau-né sont beaucoup plus limitées : il s’agit de
la didanosine, du nelfinavir (évaluation en cours dans le PACTG 353), et de la
stavudine (évaluation en cours dans le PACTG 332). Une bithérapie associant
zidovudine + lamivudine est l’association la plus souvent proposée en cas de
risque élevé de transmission, éventuellement associée à une monodose de
névirapine. L’utilisation des autres molécules doit être prudente et menée en
centre spécialisé, si possible dans le cadre d’un protocole de recherche ou d’un
programme spécifique de surveillance et d’évaluation de la toxicité. Les dosages
d’antirétroviraux sont ici indispensables à l’adaptation du traitement.
L’association de deux analogues nucléosidiques est un choix classique dont
l’effet additif, voire synergique, pour l’inhibition de la réplication virale se justifie.
Toutefois, les craintes d’une toxicité accrue – bien que non formellement
démontrée dans le domaine de la prophylaxie materno-fœtale – pourrait justifier à
court terme d’autres types d’association. Dans tous les cas, la mère doit être
informée des incertitudes concernant la toxicité potentielle des antirétroviraux
chez le nourrisson et des raisons du choix proposé par l’équipe médicale.
Surveillance des enfants exposés aux antirétroviraux
pendant la grossesse
Actuellement, plus de 95 % des enfants nés de mères séropositives ne sont
pas infectés. Les conséquences à long terme de l’exposition aux antiviraux durant
la période embryonnaire et/ou fœtale ne sont pas connues avec précision mais la
possibilité d’une dysfonction mitochondriale à expression neurologique est
désormais bien démontrée dans la cohorte française. Son incidence à 18 mois est
de l’ordre de 0,3 % pour les formes les plus sévères mais pourrait être plus élevée
si l’on rapproche des observations cliniquement très similaires où la dysfonction
mitochondriale n’est pas totalement établie, mais très fortement suspectée sur un
ensemble d’arguments cliniques, neuroradiologiques, biochimiques et
histologiques. Enfin, les données récentes issues de la cohorte française
suggèrent un risque plus élevé de convulsions fébriles de 3 à 18 mois, chez les
enfants exposés aux antirétroviraux. Les enfants exposés in utero aux
antirétroviraux doivent donc être suivis attentivement au moins jusqu’à 18 mois, en
s’assurant notamment de l’absence de symptôme neurologique. En l’absence de
symptômes cliniques, aucun autre examen que ceux requis par la procédure
diagnostique vis-à-vis du VIH (voir plus haut) ou pour un protocole particulier n’est
nécessaire. À l’inverse, la survenue de symptômes inexpliqués – quels qu’ils
soient – justifie une démarche diagnostique active. Tout effet indésirable grave ou
inattendu doit être signalé aux Centres de Pharmacovigilance avec lesquels
travaille étroitement la cohorte française. Le Ministère de la Santé a mis en place
un registre de femmes ayant reçu un traitement antirétroviral pendant la
grossesse (circulaire DH/DGS n° 42 du 27 octobre 1995) coordonné par la
Direction des Hôpitaux. La trace de délivrance des antirétroviraux doit être
conservée dans les pharmacies hospitalières pour permettre d’examiner un
éventuel effet retardé. Il est donc nécessaire que tout traitement antirétroviral chez
une femme enceinte soit signalé à la pharmacie hospitalière, qu’il s’agisse d’une
première prescription ou bien de la survenue d’une grossesse chez une femme
antérieurement traitée.
DIAGNOSTIC DE L’INFECTION CHEZ LE NOUVEAU-NE
ET L’ENFANT
Le diagnostic de l’infection à VIH chez un enfant né de mère séropositive se fait
différemment selon l’âge auquel sont effectués les prélèvements sanguins.
Diagnostic de l’infection à VIH-1 chez le nouveau-né
Le diagnostic utilise les techniques de détection du virus lui-même, puisque la
présence d’anticorps maternels empêche toute approche sérologique jusqu’à l’âge
de 16-18 mois. La recherche du virus peut se faire par PCR-ADN à partir des
cellules sanguines pour la recherche de génome viral intégré, ou par détection de
l’ARN-VIH plasmatique avec les techniques habituellement utilisées pour le suivi
de patients séropositifs.
La recherche de virus par culture reste intéressante en cas de virus variants non
reconnus par les techniques moléculaires. Il s’agit le plus souvent d’infections
survenant chez des femmes d’origine africaine ; pour faciliter le diagnostic chez le
nouveau-né, il est parfois nécessaire d’adresser un prélèvement maternel en cours
de grossesse au laboratoire de virologie qui réalisera le diagnostic, afin qu’il
puisse sélectionner les techniques adaptées au virus maternel avant de les
appliquer aux échantillons de l’enfant (exemple : infection par un virus VIH-1
Groupe O).
En l’absence de traitement de l’enfant, les sensibilités des deux techniques de
PCR-ADN et ARN-VIH plasmatiques sont équivalentes. Pour affirmer le diagnostic
d’infection, il est nécessaire d’avoir deux prélèvements positifs quels que soient la
technique utilisée et le moment du prélèvement. Inversement, pour éliminer une
infection, il faut deux prélèvements négatifs après l’âge d’un mois.
En cas de traitement préventif de la transmission virale, le diagnostic est peu
fiable tant que l’enfant est sous traitement antirétroviral. Il faut donc deux
prélèvements négatifs hors période de traitement pour affirmer qu’un enfant n’est
pas infecté. Les prélèvements précoces, à la naissance et durant les premières
semaines de vie, peuvent être informatifs en cas de résultats positifs ; ils
permettent notamment d’affirmer une infection in utero en cas de positivité dès la
naissance.
En pratique, la recherche du virus est effectuée à la naissance, à 1, 3 et 6 mois.
Un résultat positif est bien sûr immédiatement contrôlé sans attendre l’échéance
suivante.
En cas d’allaitement maternel, il est nécessaire de rechercher l’infection dans
les trois mois qui suivent l’arrêt définitif de l’allaitement. Cette situation peut se
rencontrer chez des nourrissons d’origine africaine.
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