i modelli di democrazia di lijphart tra `ideale` ed `empirico`

LUISS
Libera Università
Internazionale
degli Studi Sociali
Guido Carli
Centro di metodologia
delle scienze sociali
LE LIBERALISME COME ETHIQUE CRITIQUE
CHEZ FRIEDRICH VON HAYEK
Jean Petitot
Working Papers
n. 100, 2005
© 2005, Pubblicazioni a cura del Centro di Metodologia delle Scienze Sociali, Luiss Guido Carli, Roma -
Via Oreste Tommasini, 1 - 00162 Roma - Tel. 06/86506762 - Fax 06/86506503 - E-mail: [email protected].
Centro di metodologia delle scienze sociali
Luiss Guido Carli
LE LIBERALISME COME ETHIQUE CRITIQUE
CHEZ FRIEDRICH VON HAYEK*
Jean Petitot
Introduction
C’est pour moi une grande joie et un grand honneur que d’être ici et je
remercie le Professeur Antiseri et le Docteur Nuoscio pour leur aimable
invitation à ce séminaire du Centro di Metodologia delle Scienze Sociali de la
LUISS (28 Avril 2004).
J’aimerais d’une part mettre en relation la modélisation des systèmes
complexes cognitifs, économiques et sociaux avec les travaux précurseurs du
Prix Nobel d’Economie 1974 Friedrich von Hayek afin de souligner que
l’actualité scientifique de ces modèles donne sur bien des points raison à Hayek.
J’aimerais d’autre part montrer que la rationalité de la critique hayekienne de
l’idéologie constructiviste fait de son libéralisme une éthique critique au sens de
l’illuminisme kantien. Philosophiquement, il y aura en arrière fond de mon
exposé l’opposition irréductible entre deux types de rationalisme: le rationalisme
critique kantien fondé sur l’autolimitation de la raison et le rationalisme
inconditionné hegelien.
1. Hayek et le problème de la complexité
Hayek a beaucoup insisté sur les caractères spécifiques de l’ordre spontané
complexe qu’est l’ordre socio-économique dans les sociétés libérales modernes.
C’est un ordre social sophistiqué fondé sur la liberté économique qui ne produit
ni anarchie, ni désorganisation, et qui se révèle impossible à obtenir autrement.
C’est un ordre cognitivement fondé. Sa complexité endogène auto-
organisationnelle est irréductible et voue selon Hayek nécessairement à l’échec
le constructivisme rationaliste inconditionné des états planificateurs qui veulent
mettre en tutelle l’économie et la société civile.
La complexité résulte du fait que les connaissances, les compétences et les
informations sont distribuées entre une multitude d’agents cognitivement limités
constituant des systèmes ouverts dont l’équilibre est dynamique. Par essence, la
complexité est acentrée. Les propriétés systémiques de ces mécanismes interdit
leur contrôle au sens classique. Le contrôle politique du social et de
l’économique repose par conséquent sur une erreur méthodologique car il refuse
* Testo dell’intervento al seminario organizzato dal Centro di metodologia delle scienze
sociali della Luiss Guido Carli il 28 aprile 2004.
2
Centro di metodologia delle scienze sociali
Luiss Guido Carli
de tenir compte du fait que c’est leur complexité même qui rend les systèmes
complexes opaques aux agents.
La conséquence de ce fait fondamental est triple:
(i) D’abord la complexité interdit à la fois une organisation hiérarchique
centralisée et une organisation associative contractuelle par concertation.
Dans Law, Legislation and Liberty, Hayek explique que la morale des petites
sociétés closes traditionnelles peut être fondée sur l’amour, la charité, la
compassion, la justice, la loyauté, la solidarité, la réciprocité des dons, mais
que les grandes sociétés ouvertes ne le peuvent pas pour des raisons
structurelles. Dans les grandes sociétés ouvertes, l’échange se fait dans le
cadre de règles de droit abstraites et de systèmes de prix. La liberté
individuelle, la division du travail, la division du savoir et la productivité en
sont constitutives.
Dans ces sociétés, la communication entre agents ne peut plus être assurée par
des consensus communautaristes mais uniquement par des signaux (comme les
prix dans un marché) permettant d’échanger. D’où le rôle essentiel (mais souvent
incompris) du marché. Le marché est avant tout une forme de circulation de
l’information et de coordination des actions dans une société multi-agents que
son auto-organisation même rend opaque.
Précisons ce point en nous référant à l’ouvrage de Philippe Nemo: La société
de droit selon Hayek. Dans ce que Hayek a appelé la catallaxie (du grec échanger
et coopérer), l’auto-organisation du marché (la “main invisible” d’Adam Smith)
est la seule façon de créer un lien social viable fondé sur la pluralité des
différences individuelles. Elle remplace une impossible communauté de fins (où
la différence des objectifs ne peut qu’engendrer la guerre de tous contre tous) par
une communauté de moyens. Dans un marché, chacun coopère avec chacun, mais
indépendamment de visées communes. Le marché garantit la coopération malgré
la divergence des intérêts et la concurrence des fins.
(ii) Ensuite le constructivisme rationaliste en matière de politique, de droit et de
morale est un rationaliste inconditionné qui doit être rejeté pour des raisons
de principe. En effet la complexité est évolutionnaire. Elle résulte d’un
processus de sélection - une sélection historico-culturelle de règles de
comportement, de pratiques, d’institutions - qu’il est impossible de maîtriser
conceptuellement (mais qu’il est possible de simuler, ce que Hayek ne
pouvait pas prévoir). Le constructivisme politique, juridique et social est la
mauvaise part (hegelienne) des Lumières. C’est lui qui conduit aux drames de
la planification économique et du contrôle social.
(iii) Une troisième conséquence de la complexité est que les règles qui régissent
les échanges et la communication sociale sont nécessairement abstraites et
formelles. Les systèmes sociaux complexes auto-organisés sont régis par les
règles d’un droit civil abstrait (nomos) et non pas par celles d’un droit public
3
Centro di metodologia delle scienze sociali
Luiss Guido Carli
finalisé (thesis) (droit positif ayant pour source la volonté constructiviste
d’une souveraineté, qu’il s’agisse de celle de l’absolutisme monarchique ou
de celle du peuple). La fonction de l’État dans une démocratie libérale
avancée n’est donc pas l’organisation planifiée mais la garantie par le droit
public du droit civil garantissant lui-même l’auto-organisation socio-
économique. Il est aussi de garantir la justice sociale mais sans, pour autant,
au nom d’une redistribution qui ne recouvre souvent que la négociation
d’intérêts corporatistes entre groupes cratiques, passer de l’auto-organisation
et de l’ordre spontané à l’hétéro-organisation d’une mise sous tutelle qui
brise les mécanismes de la production de richesse et de la prospérité.
C’est parce qu’il dénie la complexité que le “progressisme” constructiviste qui
continue à dominer notre culture politique est en définitive fondamentalement
régressif. Il refuse d’admettre que le libéralisme démocratique fondé sur le droit,
les sciences, les techniques et l’économie de marché constitue un mode supérieur
d’action, de socialisation et de communication produit par l’évolution historico-
culturelle.
Sur le plan de la psychologie cognitive, Hayek a par ailleurs beaucoup insisté
sur le rôle fondamental des connaissances de situations typiques et génériques au
moyen de schèmes abstraits simplifiant la complexité et permettant des
anticipations plausibles. Ces schèmes sont sélectionnés de façon évolutionniste et
dominent l’ordre communicationnel du social sous la forme de conventions, de
règles et de normes.
2. Justification rationnelle de l’antirationalisme hayekien
Ces dernières décénies, l’ensemble de ces problèmes sont devenus
susceptibles d’une approche scientifique. Je pense que l’on peut non seulement
confirmer Hayek quant à sa vision de la modernité, mais que l’on peut même
aller au-delà de sa critique du rationalisme inconditionné pour développer un
nouveau rationalisme critique. En général, même les hayekiens les plus engagés
émettent de sérieuses réserves sur certaines thèses, en particulier celles
concernant la justice sociale. Mon point de vue est tout différent. On peut le
formuler en quelques mots de la façon suivante.
1. Dans la critique hayekienne du rationalisme politique et juridique classique
hérité des idéologues de la mauvaise part des Lumières, il existe une
ambiguïté entre:
(i) une étonnante clairvoyance à propos de sciences d’un nouveau type
gnoséologique, disons pour aller vite les sciences évolutionnistes des
organisations complexes et les neurosciences cognitives, et, dans le
même temps,
4
Centro di metodologia delle scienze sociali
Luiss Guido Carli
(ii) la défense - en matière de sens commun, de règles de conduite et de
droit - d’un traditionalisme pré-scientifique.
On a souvent souligné chez Hayek cette ambiguïté profonde entre un avant-
gardisme scientifique et un conservatisme politique et on l’a traitée comme une
sorte de péché originel conservateur qui vicierait sa défense et illustration du
libéralisme.
2. Mais je pense qu’il est possible d’affranchir cette défense et illustration d’un
tel handicap en justifiant scientifiquement le conservatisme apparent du
libéralisme hayekien. Certains développements récents de certaines sciences
changent en effet radicalement les données du problème et permettent
d’unifier la pensée hayekienne en justifiant (ii) (le traditionalisme) au nom
même de (i) (l’avant-gardisme scientifique). Les traditions et les règles du sens
commun sont le résultat d’une évolution culturelle qui, comme toute
évolution, peut être assimilée à un apprentissage collectif sélectionnant des
stratégies qui, même si elles ne sont pas optimales, sont en tout cas
extrêmement performantes et impossible à trouver de façon planifiée. Or,
comme il en va actuellement dans les théories de la phylogenèse biologique, la
maîtrise de la complexité de tels processus évolutionnistes permet d’engendrer
par synthèse computationnelle des évolutions culturelles virtuelles et
d’enrichir expérimentalement le domaine des stratégies héritées du sens
commun.
On pourrait dire grosso modo que, chacun à leur façon, (i) (l’avant-gardisme
scientifique: les nouvelles sciences) est post-galiléen et (ii) (le traditionalisme)
pré-galiléen ou néo-aristotélicien. A ce titre, Hayek fait partie de ces courants
néo-aristotéliciens (en particulier autrichiens) qui ont critiqué la crise du
rationalisme mécaniciste et n’y voyaient comme alternative qu’un retour à une
conception préscientifique du vivant, du mental, du social et du sens commun.
Quand je parle ici d’Aristote et de Galilée, il s’agit évidemment d’une
périodisation très grossière désignant seulement ce avec quoi le rationalisme
mécaniciste moderne a fait rupture. Il est bien connu qu’en matière d’économie
politique Hayek a souvent accusé Aristote de n’avoir rien compris à la forme de
marché qui avait émergé dans le commerce (en particulier maritime) athénien.
Pour Aristote l’oikonomia concernait les comptes du foyer et il méprisait le
marché, les chrematistika (PF: The Fatal Conceit, p. 64).1 Selon Hayek, le
Stagyrite serait ainsi, à partir de sa systématisation morale du micro-ordre
économique, à l’origine du mépris traditionnel pour la production, l’échange et le
profit.
Disons pour faire encore plus bref que, de par certains de leurs
développements les plus féconds et les plus originaux, les sciences post-
1 PF= La Présomption fatale, Hayek [1988].
5
1 / 27 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !