Discours de Eric Ng Ping Cheun, auteur de Mieux comprendre l’économie, lors du lancement du livre à l’Alliance Française, Bell Village, le mercredi 25 mai 2005, à 17h00. Le marché est un instrument de communication Je voudrais d’abord remercier mon ami Stefan Atchia qui a bienveillamment accepté d’être le Event Manager de cette cérémonie. Mes remerciements vont aussi à Kris Seebun, mon associé à PluriConseil, qui a fait la conception du livre. Je remercie beaucoup M. Pierre Dinan pour son excellente présentation qui est très élaborée. Je partage totalement son appréciation critique du livre. Il a bien situé ma pensée, celle d’un économiste convaincu de la supériorité des lois du marché. Je suis effectivement un grand admirateur de Friedrich Hayek et d’Adam Smith. Je dois dire qu’étant mon aîné, Pierre Dinan a tracé un cheminement qu’il sera sans doute difficile de poursuivre. Je salue l’économiste qui a connu une belle carrière, devenant une autorité incontournable à Maurice. Une petite clarification sur le mot “médiocratie”. J’ai utilisé ce terme en le dérivant du mot “médiologie”, inventé par le Français Régis Debray, et qui signifie “la science des médias”. Je peux être dans l’erreur, n’étant pas linguiste, mais disons que je préfère “médiocratie”, qui sonne mieux à l’oreille, plutôt que “médiacratie”. Cela dit, regardons une termitière, qui est une “société” d’insectes. Des milliards d’entités s’affairent en tous sens à des tâches diverses. Que voit-on ? Une construction collective et complexe qui semble parfaitement conçue. Comment cela est-il possible ? Les termites ne parlent pas et ne sont pas dotées individuellement de capacités intellectuelles. On ne peut pas expliquer ces résultats par la présence d’un “chef” qui indiquerait à chacun ce qu’il doit faire, où, comment, à quel moment. La termitière atteste de l’existence de ce que Friedrich Hayek appelle un ordre spontané, un ordre collectif qui n’a été conçu par personne, et qui naît de l’interaction des millions d’individus qui s’organisent comme s’ils étaient guidés par ce que Adam Smith appelle la main invisible. La particularité de cet ordre social est qu’il incorpore dans sa réalisation infiniment plus d’informations que chaque individu n’est individuellement capable d’en gérer. Le principe d’organisation des sociétés humaines est le même que celui de la termitière. Maintenant, vu que l’homme a une capacité intellectuelle, les sociétés humaines ont une plus grande capacité que les sociétés animales à tirer parti des millions d’intelligences individuelles qui les constituent. L’homme n’est pas seulement plus intelligent en tant qu’individu. Il l’est également dans ses relations avec autrui. Si la société humaine est plus performante, c’est parce que l’évolution l’a dotée de mécanismes sophistiqués de communication. La communication, voilà la clé de nos problèmes économiques. Communiquer est source de l’information indispensable à nos projets. Mieux : la communication est le seul moyen de révéler ce dont nous sommes capables. Au fond, nous n’existons qu’au contact des autres. Grâce à la communication, à la circulation de l’information, diverses cultures et divers savoir-faire se mettent en contact, ce qui fournit l’occasion d’entreprendre et de progresser. L’économie est à base de communication. Si l’économie de marché a triomphé sur l’économie planifiée, c’est parce que le marché est un instrument de communication. L’échange, le marché, n’est pas seulement le résultat d’une confrontation entre l’offre et la demande, mais il est aussi et surtout un processus de découverte et un processus de coordination des actions individuelles. La vie économique est découverte permanente. L’information, celle qui est pertinente au succès de l’entrepreneur, elle est divisée, dispersée, éparpillée, éclatée parmi des milliers d’entrepreneurs. Aucun organisme ne peut centraliser toutes ces informations pour faire de la planification économique. Le seul mécanisme capable de rassembler ces informations, et ce de façon impersonnelle, c’est le marché. Les informations sont concentrées dans le prix du marché. Ce qui garantit la qualité des informations, c’est la liberté des prix. Et ce qui permet la bonne communication des informations, c’est la concurrence. La concurrence est le meilleur moyen de guider, d’ajuster et de coordonner les efforts individuels. C’est dire, pour conclure, que l’efficacité économique repose sur la communication. Nos amis les journalistes présents ici savent mieux que moi que la communication ne saurait faire l’objet de contrôle de la part de l’Etat. La communication va de pair avec la liberté qui est constitutive de la personne humaine. Aussi, pour faciliter la communication dans les entreprises, dans la société, il faut un dialogue permanent, une réflexion commune sur l’économie. Puisse ce livre Mieux comprendre l’économie nous aider à vivre un monde plus communicatif, donc plus apaisé et plus humain. Merci pour votre attention.