AK1984_11_10_439-442

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,
Ann. Kinésithér.,
1984, t. 11,
nO
10, pp. 439-442
© Masson, Paris, 1984
MÉMOIRE
La contention élastique et la prévention
des thromboses veineuses profondes
J.Y. BOUCHET (1) (2), C. RICHAUD (1), A. FRANCO (1)
(1) Service d'Angiologie
(Pr. Ag. A. Franco), (2) École de massa-kinésithérapie,
Introduction
LES MOBILISATIONS
La prophylaxie
de la maladie thromboembolique utilise des moyens mécaniques et
médicamenteux (5) (6). Au niveau des membres
inférieurs, les moyens mécaniques (2) luttent
contre la stase veineuse, principal facteur pathogénique
de la thrombose veineuse profonde (TVP) chez le sujet alité. L'efficacité de
ces techniques est améliorée par la sommation
et la répétition des méthodes mises en œuvre.
La kinésithérapie et ses moyens mécaniques
Déjà développés par ailleurs (1), ils sont ici rappelés.
L'INSTALLATION
CHR U, F38043 Grenoble Cedex.
Au niveau des tibio-tarsiennes, le but est de vider les
sinus des soléaires. Les flexions plantaires actives mettent
. enjeu la pompe musculo-veineuse du mollet et provoquent
une accélération de la vidange qui se manifeste par une
diminution des pressions veineuses. La flexion dorsale
passive ou active provoque un étirement de l'aponévrose
surale qui comprime le triceps. Grâce à la présence des
valvules, le sang est envoyé vers la racine du membre.
Ces deux techniques sont efficaces (8). Le rythme adopté
est lent. Le malade répète l'exercice pendant une dizaine
de minutes toutes les heures.
A un niveau plus global, le but est d'accélérer le flux
sanguin dans tout le système circulatoire et d'augmenter
l'activité des enzymes fibrinolytiques par l'exercice du plus
grand volume musculaire possible.
Lorsque le patient est incapable d'assurer des contractions actives, des moyens passifs comme l'électrostimulation (2), les mobilisations mécaniques (2) ou la
compression pneumatique intermittente (3) peuvent être
utilisés. C'est le cas notamment
des malades non
coopérants, inconscients ou paralysés.
EN DÉCLIVE
Le patient est placé, les membres inférieurs surélevés
de 10 à 15 cm, en discrète flexion, abduction, rotation
externe de hanche et en légère flexion de genoux. La
pesanteur accélère le flux veineux, la position du malade
évite la compression des veines entre l'aponévrose et les
reliefs osseux sous-jacents ..
LE LEVER PRÉCOCE
Il reste l'une des meilleures méthodes lorsqu'elle peut
être utilisée. Le lever et la marche immédiate sont du
domaine de la prescription médicale.
LA CONTENTION
LES EXERCICES RESPIRATOIRES
Ils favorisent d'une part la vis-a-fronte, c'est-à-dire
l'aspiration du sang veineux par le jeu thoraco-diaphragmatique (8) ; d'autre part, une phléboconstriction
globale
synchrone des mouvements inspiratoires. Les mouvements
respiratoires amples et non forcés sont enseignés au patient
pour qu'il puisse les répéter seul tout au long de la journée.
Elle complète cet arsenal thérapeutique
l'objet d'une attention particulière.
et doit faire
La contention élastique
LES OBJECTIFS DE LA CONTENTION
Les auteurs remercient les laboratoires Thuasne de leur avoir
. fourni gracieusement le matériel de contention.
Tirés à part:
J.Y.
BOUCHET,
à l'adresse ci-dessus.
Il s'agit d'exercer une pression externe contrôlable qui, ajoutée à celle des tissus, s'oppose à
440 Ann. Kinésithér., 1984, t. II, n° 10
la pression hydrostatique veineuse et limite ainsi correspondent aux normes recherchées. Enfin la
la distensibilité des parois. Le calibre des veines survenue d'une thrombose impose le recours à
diminue, ce qui provoque une augmentation de une contention plus adaptée et doit faire
la vitesse circulatoire.
abandonner les bas.
Ainsi l'amélioration de la continence valvuLa contention tubulaire
laire par le rapprochement des parois permet un
meilleur rendement de la pompe musculo- . Elle se présente sous forme d'un tube de
veineuse du mollet.
coton + viscose de longueur de 1 à 10 mètres,
Il faut observer un gradient de pression de sans couture longitudinale et transversalement
la distalité vers la proximalité. Il est estimé de élastique. L'élasticité est assurée par un fil de
18 à 10 mmHg pour le segment jambier chez caoutchouc unique et spiralé .coulissant dans sa
le patient alité (7). L'effet garrot, inconvénient gaine et permettant une certaine adaptation aux
majeur de la contention élastique, survient formes du membre à contenir. Il existe de
lorsque la somme des pressions externes et nombreux diamètres qui sont choisis en fonction
tissulaires dépasse la pression hydrostatique de la circonférence du membre et de la pression
veineuse. La stase est alors augmentée, ce qui recherchée. Les valeurs de pressions considérées
va à l'encontre de l'effet recherché.
sur le ruban de mesure de la circonférence,
Dans les zones à fort rayon de courbure, fourni par le fabricant, correspondent à la
comme le mollet, la pression exercée est plus superposition de deux épaisseurs du bandage. La
faible. Au contraire, un faible rayon de courbure zone recouverte se limite au segment jambier
correspond à des zones de surpression comme dans la plupart des cas car, pour s'étendre
la crête tibiale, les malléoles ou le tendon jusqu'à la racine du membre, il est nécessaire
d'Achille.
de rajouter une deuxième portion de tube d'un
Ceci impose de la rigueur dans le choix de diamètre supérieur. La zone de jonction devient
la contention, dans sa mise en place et dans sa un secteur critique et on peut observer soit une
surveillance.
surpression par accumulation de plusieurs épaisseurs, soit une absence de recouvrement de la
région du genou après quelques mouvements.
LES MÉTHODES DE ÇONTENTION
Il faut de toute façon surveiller les extrémités
de la contention pour éviter l'enroulement du
Le choix entre les divers procédés actuelle- tube sur lui-même..
. ment proposés reste ouvert : bas, contention
Les modalités usuelles de mise en place de
tubulaire ou bandes élastiques sont disponibles. ce type de contention 'càmmencent par la mesure
du plus grand périmètre du mollet qui détermine
La contention par bas
la largeur du tube. L'utilisateur coupe ensuite
Elle est esthétique et confortable. Son applica- une longueur double de celle du segment à
tion par l'équipe soignante, le malade ou sa contenir. IlIa met en place afin de recouvrir la
famille, est aisée. La bonne mise en place n'est zone choisie et replie la demi-longueur restée
pas remise en cause par les mouvements ou libre en l'inversant. La ligne de réflexion située
mobilisations du patient tout au long de la au pied laisse les orteils libres.
journée. Les segments jambiers des Orteils
De faible coût, cette contention est généralejusqu'au creux poplité ou les membres inférieurs ment très bien tolérée par les patients mais elle
dans leur totalité sont recouverts. Il existe de nécessite une vérification régulière de sa bonne
nombreux modèles en taille et en longueur. Il application. En cas de modification rapide du
faut donc disposer d'un échantillonnage large volume du. membre contenu, un nouveau tube
pour pouvoir adapter la contention à la morpho- est adapté.
logie du patient. Mais en pratique l'ajustement
La contention par bandes
n'est pas toujours parfait, ce qui rend plus
douteuse l'efficacité du procédé même si, sur un
Elles sont élastiques dans le sens de la
sujet idéal, les gradients des pressions obtenus longueur et pour certaines dites «bi-élasti1
L
Ann. Kinésithér., 1984, t. 11, n° 10
----..-.
"
a
b
Fig. 1. - Mise en place d'une contention par bande biélastique.
Ici une bande Biflex (R) avec son artifice graphique. L'étirement
de 30 % transforme le rectangle en carré. a - et la triple
épaisseur le cachera totalement. b - pour l'obtention d'une
contention moyenne de 10 à 20 mmHg.
ques » également en largeur. Les bandes biélastiques sont préférées car elles permettent une
meilleure adaptabilité aux reliefs et aux morphologies particulières. La pression exercée sous la
contention dépend du degré d'allongement de
la bande et du nombre de couches superposées
les unes sur les autres. La mise en place débute
à la racine des orteils, puis recouvre le segment
jambier, talon compris, jusqu'au creux poplité.
On peut remonter jusqu'à la racine du membre
avec une longue bande de 5 m ou une deuxième
bande; mais, là encore, la zone du genou est
difficile à· recouvrir et le risque de mauvaise
application augmente. Cet inconvénient incite
le plus souvent, en prophylaxie, à limiter la
contention au-dessous du genou, le mollet
représentant la zone d'élection des TVP. Il est,
même dans ce cas, impératif de surveiller la
bonne mise en place de la contention et de
renouveler son application toutes les six ou huit
heures. Elle est portée jour et nuit.
Il importe de déterminer avec précision la
longueur de la bande choisie (3,5 ou 4 ou
. 5 mètres) en fonction de la morphologie du
segment de membre considéré. On évite ainsi
441
l'accumulation d'épaisseurs en fin d'application
si la bande est trop longue ou, un étirement plus
important si elle est trop courte.
Ainsi avec la bande Biflex + N' 16 (R) utilisée
par notre équipe (fig. 1), on obtient une pression
de 10 à 20 mmHg lors d'un étirement de 30 %
et une superposition de 3 épaisseurs. La quantification de l'allongement et la précision du
nombre de couches sont en partie résolues par
un artifice surajouté à la bande. De petits
rectangles imprimés sur le tiers'moyen de cette
bande se déforment et deviennént carrés lorsque
l'allongement atteint les 30 % requis. Pour
obtenir 3 épaisseurs de bandage, on recouvre à
chaque tour les carrés du tour précédent,
c'est-à-dire les 2/3 de la largeur. L'artifice des
rectangles surajoutés permet une meilleure
fiabilité des pressions exercées. Pour une bande
très extensible comme la Biflex N' 16, la tolérance dans les variations de l'étirement est
relativement large pour l'obtention de la pression de contention désirée. Par contre, le nombre
d'épaisseurs doit être respecté car la pressionréalisée lui est directement proportionnelle (4).
Depuis quatre ans, nous utilisons ce type de
bande étalonnée. L'apprentissage de la pose de
la contention par des personnes non initiées
(étudiants, patients, entourage familial) est
grandement facilité. Les pressions vérifiées sous
la contention n'ont ainsi jamais mis ,en évidence
de valeurs dépassant 40 mmHg qui puissent faire
craindre un effet de garrot'·veineux.
Indications
et contre-indications
Les indications sont déterminées par la
présence d'un risque thrombo-embolique et en
particulier d'un risque de stase veineuse.
Les contre-indications sont limitées. Ainsi,
une artériopathie sévère des membres inférieurs
contre-indique la déclive et la contention qui
risquent de réduire une perfusion artérielle déjà
inférieure.à 70 mmHg.
Le traitement orthopédique interdit parfois les
mobilisations ou la contention .
Dans ce cas, les autres moyens disponibles
sont d'autant plus utilisés.
442
Ann. Kinésithér., 1984, t. JI, nO10
Conclusion
La prévention des thromboses veineuses profondes représente un souci permanent, en
particulier en milieu hospitalier. Son efficacité
dépend de sa précocité et de l'assiduité de sa
mise en œuvre par l'équipe soignante et le
patient lui-même. La contention portée en
permanence pendant la période de risque doit
faire l'objet d'une attention particulière afin d'en
garantir l'efficacité et l'inocuité.
Bibliographie
1. BOUCHET J.-Y., RICHAUD C., VERNET J.-M., DE ANGELIS M.-P., FRANCO A. - Les phases de la rééducation au
cours des thromboses
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Journée de médecine physique et de rééducation. Expansion
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2. BROWSE N.L. - The prevention ofvenous thrombo-embo/ism
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problems. Year book medical publishers, edit., Chicago, 1978,
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Year book medical publishers, edit., Chicago, 1978,553-557.
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5. SAMAMA M., KHER A. - Mécanismes de la thrombose
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Anesthésie réanimation, fasc. 36827 A-3D.
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FELIX R. - Type of compression for reducing venous stasis.
A study of lower extremities during inactive recumbency.
Arch. Surg., 1975, 10, 171.
8. THEYS S., SCHOEVAERDTS J.-c., CLERIN M., BILLY V. Résultats préliminaires
de l'effet de certaines manœuvres
kinésithérapiques
sur la circulation veineuse. Rev. Semin.
Belges Réadap., 31-41, 1, 1979.
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