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Rupture organique
Notre monde est soumis à une complexité croissante, autrement dit à
l’augmentation du nombre d’intervenants par action, ainsi que du nombre
d’interactions entre ces intervenants. En corollaire, les managers disposent de
beaucoup moins de temps qu’au siècle dernier pour s’informer auprès de
spécialistes et prendre des décisions. Il en résulte que nos fonctionnements
reposent de moins en moins sur la raison, qui apparaît comme étant
coûteuse, mais de plus en plus sur l’intuition, la réactivité et la rapidité. Or nos
organisations, fondées sur le modèle de la pyramide hiérarchique, ne sont
pas adaptées à cette nouvelle effervescence complexe, ni à cette
multiplication des interactions. Nous sommes en train de passer du modèle
conceptuel pyramidal à celui du réseau, mais il semble que l’appareil
politique n’ait pas encore pris la mesure de cette évolution.
Rupture économique
Notre modèle économique global conditionne l’existence d’une entreprise à
une taille suffisamment grande et, par conséquent, à un volume de ventes
suffisamment important qui n’est atteignable qu’en baissant les prix. Apparue
au début du XXe siècle, cette exigence de baisse des prix de revient
impliquait de standardiser les productions et de tayloriser le travail en
empêchant les salariés de réfléchir et de dévier les processus. Cependant, les
clients veulent aujourd’hui des produits personnalisés et les entreprises
demandent à leurs collaborateurs de se montrer créatifs, adaptatifs et
réactifs, ainsi que de prendre des initiatives et responsabilités. Par ailleurs, pour
diminuer les prix de revient, il convenait jusqu’à présent de réaliser des
économies d’échelle, donc de produire massivement. Cela n’était possible
qu’à condition d’investir, c’est-à-dire d’accéder aux capitaux et d’être en
capacité de les rémunérer. Ensuite, ce ne furent plus la masse et le prix qui
constituèrent les clés de la réussite économique et de la diminution des prix
de revient, mais la baisse de la qualité qui, aujourd’hui, est rejetée par les
clients. Il est donc temps de revoir à la hausse la valeur d’usage des produits
et services et, par conséquent, de recourir davantage à l’intelligence qu’à la
machine, et de remettre l’être humain et ses talents au cœur de l’économie.
Autrement dit, la valeur des produits et services dépend de moins en moins
des investissements matériels, mais de plus en plus des investissements
immatériels tels que le savoir-faire et l’intelligence.