Introduction à l’Algèbre Linéaire
7 février 2008
Dans tous les chapitres du cours d’algèbre, la lettre Kdésigne l’ensemble Rou C.
1 Espaces Vectoriels
1.1 Définition et exemples
Définition 1.1
E E K
E×EE
(x,y)7−x+y
K×EE
(λ,x)7−λ·x
1. (x,y,z)E3(x+y)+z=x+(y+z)
2. (x,y)E2x+y=y+x
3. 0E, : xEx+0=0+x=x
4. xEyEx+y=y+x=0
5. (x,y)E2λKλ·(x+y)=λ·x+λ·y
6. (λ,µ)K2xE (λ+µ)·x=λ·x+µ·y
7. (λ,µ)K2xEλ·(µ·x)=(λµ)·x
8. xE 1·x=x
EK
+ ·
Beaucoup d’objets étudiés jusqu’à présent sont des espaces vectoriels. Voici quelques exemples :
Exemple 1.2
1. Rest un R-espace vectoriel.
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TSI1 Lycée LECORBUSIER
2. Cest un R-espace vectoriel et un C-espace vectoriel.
3. Le plan vectoriel
Pest un espace vectoriel sur R.
4. L’espace vectoriel de dimension 3
Eest un R-espace vectoriel.
5. Plus généralement, si nÊ1, l’ensemble Knest un R-espace vectoriel lorsqu’on a défini les opé-
rations suivantes :
(x1,...,xn)Kn(y1,...,yn)Kn(x1,...,xn)+(y1,...,yn)=
(x1+y1,...,xn+yn)
et (x1,...,xn)KnλRλ·(x1,...,xn)=(λx1,...,λxn)
De même, si K=C, on peut faire de Cnun C-espace vectoriel.
6. Si A est un ensemble non vide et E est un K-espace vectoriel, l’ensemble F(A,E) est un K-
espace vectoriel lorsqu’on le munit des opérations
(f,g)F(A,E)2aA (f+g)(a)=f(a)+g(a)
et fF(A,E) λKaA (λ·f)(a)=λ·(f(a))
En particulier, l’ensemble des fonctions de A dans Kest un espace vectoriel sur K.
1.2 Règles de calcul
Les propriétés définissant un espace vectoriel sont le minimum vital pour pouvoir tra-
vailler avec ces objets. Elles ne nous disent pas immédiatement, par exemple, que 0Eest
unique, ou comment calculer 0K·xpour tout xde E.
Nous allons donc, dans cette partie, élaborer sur la définition 1.1 pour obtenir les règles
de calcul les plus élémentaires dans un espace vectoriel.
On commence par écarter le gros problème qui nous empêche de dormir la nuit : l’unicité
du 0E. Ceci implique que le point
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de la définition 1.1 est bien posé.
Proposition 1.3
Soit Eun K-espace vectoriel. L’ensemble
{eE| ∀xEx+e=e+x=x}
est un singleton.
Preuve : D’après la définition 1.1, cet ensemble contient au moins 0E. Soit eun autre élément
de cet ensemble. On a alors d’une part,
0E+e=e
et 0E+e=0E
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Par suite, e=0Eä
La prochaine étape est d’établir l’unicité de l’élément dont l’existence est garantie par le
point
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de la définition 1.1 :
Proposition 1.4
Soit Eun K-espace vectoriel, soit x E. L’ensemble
{yE|x+y=y+x=0E}
est un singleton. L’unique élément qu’il contient est noté x.
Preuve : Soient yet zdans cet ensemble, dont on sait qu’il n’est pas vide. D’après leur défi-
nition,
x+z=z+x=0Eet x+y=y+x=0E
On obtient successivement :
y=y+0E=y+(x+z)=(y+x)+z=0E+z=z
ce qui achève la démonstration. ä
Corollaire 1.5
Soit Eun espace vectoriel. Alors
xE 0K·x=0E
λKλ·0E=0E
et enfin λKxEλ·x=0Ex=0Eou λ=0K
Preuve : Soit xE. D’après le point
6
de la définition 1.1,
0K·x=(0K+0K)·x=0K·x+0K·x
On ajoute aux deux membres de cette égalité le vecteur 0K·xpour conclure :
0E=0K·x
Pour le second point, on procède de manière similaire. Soit λK. D’après les points
6
et
3
de la définition 1.1,
λ·0E=λ·(0E+0E)=λ·0E+λ·0E
On ajoute alors aux deux membres le vecteur (α·0E) pour obtenir
0E=λ·0E
Le dernier point est une équivalence, dont une direction vient d’être démontrée. On
prouve l’autre direction. Soient xE et λKtels que λ·x=0E. Soit λest nul, auquel cas
3
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on a fini ; soit λn’est pas nul, auquel cas on peut écrire, d’après les règles
7
et
8
de la défini-
tion 1.1,
x=1·x=(λ1λ)·x=λ1·(λ·x)=λ1·0E=0Eä
Corollaire 1.6
Soit Eun K-espace vectoriel. Alors
xE (1)·x= −x
Preuve : Soit xun élément quelconque de E. Pour établir que (1) ·xn’est autre que x, il
suffit de montrer, d’après la proposition 1.4, que (1) ·x+x=0E. On utilise les règles
8
et
6
de la définition 1.1 ainsi que le corollaire 1.5 :
(1)·x+x=(1)·x+1·x=(1+1)·x=0K·x=0Eä
Corollaire 1.7
Soit Eun espace vectoriel. On a
λKxE(λ·x)=(λ)·x
Preuve : Soient xE et λK. D’après le corollaire 1.5 et le point
7
de la définition 1.1,
(λ·x)=(1)·(λ·x)=(1×λ)·x=(λ)·xä
Corollaire 1.8
Soit Eun espace vectoriel. On a
λK(x,y)E2α·(xy)=λ·xα·y
et (λ,µ)KxE (λµ)·x=λ·xµ·y
Preuve : C’est simple, d’après tout ce qui précède. En effet, si λest un scalaire et x,ysont
deux vecteurs,
λ·(xy)=λ·x+λ·(y)=λ·x+λ·(1·y)=λ·x+(λ·y)=λ·xλ·y
De même, si λet µsont deux scalaires et xest un vecteur,
(λµ)·x=λ·x+(µ·x)=λ·xµ·xä
Toutes ces propriétés montrent qu’au nal, la multiplication externe et l’addition se ma-
nipulent de la même manière que le produit ou l’addition usuels sur les réels, avec les mêmes
règles de distributivité, de signes, le fait qu’un produit est nul si et seulement si l’un des
termes est nul, etc. Donc, comme tout marche comme d’habitude, on laisse tomber la nota-
tion λ·xet on écrira simplement λx.
De même, on abandonne les 0Eet 0Kpour la notation uniforme 0, en sachant que le
contexte rendra clair à chaque fois de quel 0 il s’agit.
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1.3 Sous-espaces vectoriels
L’un des buts de l’algèbre est d’étudier des ensembles, munis d’une structure (règles de
calcul), de la manière la plus générale possible. Pour certaines structures algébriques, il y
a besoin de livres entiers pour faire cela. Pour d’autres, comme les espaces vectoriels, deux
années de cours suffisent. Mais dans tous les cas, le plan d’étude est de décomposer notre
gros ensemble en sous-ensembles ayant la même structure algébrique, puis de les décom-
poser eux-mêmes, et encore et encore, en espérant qu’à un moment on aura atteint un état
« irréductible » de la structure étudiée, suffisamment simple pour qu’il puisse être compris
entièrement. C’est la raison pour laquelle on introduit la notion de sous-espace :
Définition 1.9
EKFE F KE
F F×FK×F
K
Montrer qu’une partie F d’un espace vectoriel E est un sous-espace vectoriel requiert
a
priori
la vérification des 8 propriétés de la définition 1.1. C’est douloureux et on donne un
critère permettant de vérifier sans trop de peine si F est ou pas un sous-espace vectoriel de
E.
Théorème 1.10
Soit Eun K-espace vectoriel. Soit Fun sous-ensemble de E.Fest un sous-espace vectoriel de E
si et seulement si Fn’est pas vide et
(x,y)F2λKλxyF (1)
Preuve : Il est clair que si F est un sous-espace vectoriel de E, il n’est pas vide (il contient 0)
et il vérifie la propriété énoncée dans la proposition.
Réciproquement, soit F un sous-ensemble de E, non vide, tel que
(x,y)F2λKλxyF
En prenant xet yquelconques dans F (non vide) et λ=1 dans la propriété (1), on voit
que x+yF. L’addition, restreinte à F2, prend bien ses valeurs dans F.
Puis on prend xquelconque dans F, y=0 et λquelconque dans Ket on applique la
propriété (1). On conclut que λxF. Donc la multiplication externe, restreinte à K×F prend
bien ses valeurs dans F.
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