MARS 2008
27
WWW.CONSEILLER.CA
Québec et à leur parenté, s’en prend à l’en-
semble des conseillers. « Gestion FÉRI-
QUE dit que ses frais de gestion sont de
0,69 % et ceux des fonds concurrents, de 2,32 %. Ensuite,
elle laisse croire aux consommateurs que les représentants
indépendants empochent la différence au détriment des inves-
tisseurs. Toute l’industrie sait que c’est faux. Le moins qu’on
puisse dire, c’est que ce n’est pas de bonne guerre. »
Étonnamment, les entreprises que Gestion FÉRIQUE
attaque par la bande préfèrent garder le silence ou font
montre de circonspection. « Nous ne commentons pas les
publicités de nos concurrents », affirme Chris Pepper, porte-
parole de Fidelity Investments Canada. À AIM Trimark,
nos demandes d’entrevue sont demeurées sans réponse.
Du côté de Standard Life du Canada, on réagit avec pru-
dence. L’entreprise trouve dommage que la publicité de
FÉRIQUE mette l’accent sur des éléments négatifs. « C’est
toujours plus profitable de mettre en lumière ce qu’on fait
de bon », dit Ann-Marie Gagné, directrice des communica-
tions externes et des affaires publiques.
La brochure de Gestion FÉRIQUE indique que ses
fonds sont distribués par Placements Banque Nationale.
Comment ce cabinet, l’un des plus importants au Québec,
apprécie-t-il cette publicité ? « Nous ne commentons pas
les réclames produites par les sociétés de fonds autres que
la Banque Nationale. Nous ne faisons que distribuer ces
produits », dit Marie-Claude Lavigne, porte-parole de la
Banque Nationale. Nous avons demandé si la Banque Natio-
nale approuvait qu’un de ses fournisseurs qualifie de
« requins » ceux qui ne travaillent pas pour lui. « Pas de com-
mentaires », répète Mme Lavigne.
Le RICIFQ n’entend pas en rester là. « C’est fini le temps
où nous laissions passer de telles attaques », lance Larry
Bathurst. Le RICIFQ a songé à porter plainte à l’AMF.
Mais il a plutôt demandé à ses membres d’intervenir indi-
viduellement. « Si l’AMF reçoit 250 ou 300 plaintes au sujet
de Gestion FÉRIQUE, elle va se rendre compte qu’il s’agit
d’une affaire importante », dit Larry Bathurst. Jusqu’ici,
deux plaintes ont été déposées à l’AMF.
Mais ce sera probablement peine perdue, car rien dans
la loi ne permet à l’AMF d’intervenir. « Ni sur le style, ni
sur le contenu de la publicité », précise Frédéric Alberro,
porte-parole de l’AMF. Certes, les firmes de fonds communs
qui présentent les rendements de leurs produits doivent
respecter plusieurs conditions. Dans le cas de Gestion FÉRI-
QUE, « l’AMF n’a relevé aucune anomalie. » Des juristes
spécialisés en valeurs mobilières consultés nous ont pourtant
confirmé qu’on trouvait au règlement 81-102 sur les orga-
nismes de placement collectif ainsi qu’à l’instruction relative
au règlement 81-102, amplement matière à sévir.
Comme la publicité de Gestion FÉRIQUE vise particu-
lièrement les planificateurs financiers, nous avons demandé
l’avis de Gilles Sinclair, président du conseil de l’Institut qué-
bécois de planification financière (IQPF). « J’aurais aimé savoir
comment sont rémunérés les planificateurs financiers de Ges-
tion FÉRIQUE. On n’en parle nulle part. De plus, si les gens
qui vendent des fonds communs sont des requins, comment
qualifier les représentants de Gestion FÉRIQUE ? Ne sont-ils
pas partie prenante de l’industrie des
services financiers ? Sont-ils les seuls à
être de petits poissons rouges ? »
Gilles Sinclair rappelle que les pla-
nificateurs financiers ne vendent pas de
produits. Ils proposent des conseils,
formulent des recommandations. « La
vente de produits financiers relève d’une
tout autre catégorie de permis », note-t-il. Il espère que les
planificateurs financiers au service de Gestion FÉRIQUE
travaillent avec éthique. « Comment peuvent-ils se prétendre
neutres s’ils ne recommandent que les fonds FÉRIQUE ?
Que feront-ils s’ils se rendent compte que les fonds communs
d’autres sociétés sont meilleurs que les leurs pour un client
donné ? » Se disant « peu fier » de cette publicité, il souligne
que le premier conseil qu’on inculque aux professionnels
des services financiers, c’est « de ne jamais bâtir sa réputation
au détriment des autres ».
C’est d’ailleurs ce que les codes de déontologie de la
Chambre stipulent. À l’article 14 du règlement sur la déon-
tologie dans les discipline de valeurs mobilières, il est écrit:
«Les activités professionnelles du représentant doivent être
menées de manière responsable avec respect, intégrité et
compétence». Aussi, à l’article 32 du code de déontologie de
la Chambre de la sécurité financière, on y lit: «Le représentant
ne doit pas dénigrer, dévaloriser ou discréditer un autre repré-
sentant, un cabinet, une société autonome, un assureur ou
une institution financière.»