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YVES BONNEAU ET L’ÉQUIPE DE CONSEILLER.CA
Une publicité insulte
les conseillers
Une pUblicité de Gestion FÉRIQUE
parue récemment dans le journal Les Affaires soulève l’ire
des conseillers. « Attention aux requins de la finance qui ont
plus à cœur leur enrichissement que le vôtre ! », clame la
brochure du fonds des ingénieurs du Qbec.
Dans le paragraphe d’introduction, Gestion FÉRIQUE
remet en question « l’intégrité et la compétence des
conseillers financiers [qui] ont fait amplement les manchet-
tes de l’actualité ces dernières années ».
Plus loin, on peut lire : « La plupart des courtiers,
conseillers et planificateurs financiers reçoivent des com-
missions des sociétés de fonds lorsqu’ils vendent leurs pro-
duits, ce qui peut remettre en cause leur objectivité en
matière de service-conseil. Heureusement, ce n’est pas le
cas chez Gestion FÉRIQUE. Notre seul intérêt est de vous
offrir des conseils judicieux pour vos placements et vos
finances afin de vous aider à atteindre vos objectifs. »
« Cest de la diffamation ! GestionRIQUE associe les
conseillers munérés à commission à des requins, à des frau-
deurs », sinsurge Larry Bathurst, psident du Regroupement
indépendant des conseillers de l’industrie financière du Qué-
bec (RICIFQ). Il ne comprend pas pourquoi une société de
fonds communs, qui réserve ses produits aux ingénieurs du
MARS 2008
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Québec et à leur parenté, sen prend à l’en-
semble des conseillers. « Gestion FÉRI-
QUE dit que ses frais de gestion sont de
0,69 % et ceux des fonds concurrents, de 2,32 %. Ensuite,
elle laisse croire aux consommateurs que les représentants
inpendants empochent la difrence au triment des inves-
tisseurs. Toute lindustrie sait que cest faux. Le moins quon
puisse dire, cest que ce nest pas de bonne guerre. »
Étonnamment, les entreprises que Gestion FÉRIQUE
attaque par la bande préfèrent garder le silence ou font
montre de circonspection. « Nous ne commentons pas les
publicités de nos concurrents », affirme Chris Pepper, porte-
parole de Fidelity Investments Canada. À AIM Trimark,
nos demandes d’entrevue sont demeurées sans réponse.
Du côté de Standard Life du Canada, on réagit avec pru-
dence. L’entreprise trouve dommage que la publicité de
RIQUE mette l’accent sur des éléments négatifs. « C’est
toujours plus profitable de mettre en lumre ce qu’on fait
de bon », dit Ann-Marie Gag, directrice des communica-
tions externes et des affaires publiques.
La brochure de Gestion FÉRIQUE indique que ses
fonds sont distribués par Placements Banque Nationale.
Comment ce cabinet, l’un des plus importants au Québec,
apprécie-t-il cette publicité ? « Nous ne commentons pas
les réclames produites par les sociétés de fonds autres que
la Banque Nationale. Nous ne faisons que distribuer ces
produits », dit Marie-Claude Lavigne, porte-parole de la
Banque Nationale. Nous avons demandé si la Banque Natio-
nale approuvait qu’un de ses fournisseurs qualifie de
« requins » ceux qui ne travaillent pas pour lui. « Pas de com-
mentaires », répète Mme Lavigne.
Le RICIFQ nentend pas en rester . « C’est fini le temps
nous laissions passer de telles attaques », lance Larry
Bathurst. Le RICIFQ a songé à porter plainte à l’AMF.
Mais il a plut demandé à ses membres d’intervenir indi-
viduellement. « Si l’AMF reçoit 250 ou 300 plaintes au sujet
de Gestion FÉRIQUE, elle va se rendre compte qu’il s’agit
d’une affaire importante », dit Larry Bathurst. Jusqu’ici,
deux plaintes ont été déposées à l’AMF.
Mais ce sera probablement peine perdue, car rien dans
la loi ne permet à l’AMF d’intervenir. « Ni sur le style, ni
sur le contenu de la publici », précise Fréric Alberro,
porte-parole de l’AMF. Certes, les firmes de fonds communs
qui présentent les rendements de leurs produits doivent
respecter plusieurs conditions. Dans le cas de Gestion FÉRI-
QUE, « l’AMF n’a relevé aucune anomalie. » Des juristes
spécialis en valeurs mobilières consuls nous ont pourtant
confirqu’on trouvait auglement 81-102 sur les orga-
nismes de placement collectif ainsi qu’à l’instruction relative
au règlement 81-102, amplement matière à sévir.
Comme la publici de Gestion FÉRIQUE vise particu-
lièrement les planificateurs financiers, nous avons demandé
l’avis de Gilles Sinclair, président du conseil de lInstitut qué-
bécois de planification financre (IQPF). « Jaurais aimé savoir
comment sont rémurés les planificateurs financiers de Ges-
tion RIQUE. On nen parle nulle part. De plus, si les gens
qui vendent des fonds communs sont des requins, comment
qualifier les repsentants de Gestion FÉRIQUE ? Ne sont-ils
pas partie prenante de l’industrie des
services financiers ? Sont-ils les seuls à
être de petits poissons rouges ? »
Gilles Sinclair rappelle que les pla-
nificateurs financiers ne vendent pas de
produits. Ils proposent des conseils,
formulent des recommandations. « La
vente de produits financiers relève dune
tout autre catégorie de permis », note-t-il. Il espère que les
planificateurs financiers au service de Gestion FÉRIQUE
travaillent avec éthique. « Comment peuvent-ils se prétendre
neutres s’ils ne recommandent que les fonds FÉRIQUE ?
Que feront-ils sils se rendent compte que les fonds communs
d’autres socs sont meilleurs que les leurs pour un client
donné ? » Se disant « peu fier » de cette publicité, il souligne
que le premier conseil qu’on inculque aux professionnels
des services financiers, c’est « de ne jamais tir sa putation
au détriment des autres ».
C’est d’ailleurs ce que les codes de déontologie de la
Chambre stipulent. À l’article 14 du règlement sur la déon-
tologie dans les discipline de valeurs mobilières, il est écrit:
«Les activités professionnelles du représentant doivent être
menées de manière responsable avec respect, intégrité et
compétenc. Aussi, à l’article 32 du code de ontologie de
la Chambre de la sécuri financière, on y lit: «Le représentant
ne doit pas dénigrer, dévaloriser ou discréditer un autre repré-
sentant, un cabinet, une socié autonome, un assureur ou
une institution financière.»
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Une publicité insulte les conseillers
Encore une fois, les conseillers devront rele-
ver leurs manches. « Cette publici est honteuse.
Elle dénigre le réseau de distribution dans son
entier et l’intégrité de tous les conseillers. Après
Norbourg, Mount Real et Triglobal, nous n’avi-
ons vraiment pas besoin de ça », tonne André Gagnon, repré-
sentant en épargne collective, conseiller en curi financre
et conseiller en assurances collectives.
En exercice depuis une dizaine d’années, André Gagnon
est un conseiller indépendant rattaché aux cabinets Mica
Capital, à Québec : il s’apprêtait à envoyer son formulaire
de plainte. « Il faut mettre fin à ces attaques qui viennent de
toutes parts. » Il pense notamment à l’enquête du groupe
Option consommateurs, « menée de manière non profes-
sionnelle et qui s’est ramassée dans tous les médias ». Le
magazine Protégez-vous continue toujours d’utiliser la pre-
mière page du nuro conspué dans sa campagne d’abon-
nement, malgré le désaveu de l’AMF.
André Gagnon estime que toute la soc sort perdante
de ce genre de pratique. Selon lui, les consommateurs, mal
informés à propos du travail des professionnels de lindustrie
des services financiers, se tournent vers les grandes institu-
tions financres pour s’y procurer des CPG et autres pro-
duits apparemment sans risque. « Ce faisant, les clients se
nalisent eux-mêmes, car leurs portefeuilles sont mal équi-
librés. » La planification financière de leur retraite, par
exemple, est loin d’être optimale. Ils risquent de manquer
d’argent durant leurs vieux jours et de réclamer l’aide de
l’État (par le programme du Supplément de revenu garanti,
entre autres) pour boucler leurs fins de mois. « Quand on
voit les efforts que ploient les conseillers pour répondre
aux besoins de leurs clients, j’aurais honte d’être à la place
de Gestion FÉRIQUE. »
Rejointe aux bureaux de l’organisme à but non-lucratif,
la directrice du marketing de GestionRIQUE, Manon
Duhamel, ne voit pas les choses du même œil. L’encart
inséré dans le journal Les Affaires et dans plusieurs autres
journaux à travers le Québec (elle a refusé de dévoiler le
tirage) à la fin janvier est, selon elle, un appel à la prudence
et visait surtout les responsables de scandales financiers « à
la Vincent Lacroix ».
« La plupart des gens (épargnants) comprennent de quoi
on parle et font le lien en général. On ne peut nier que ça
existe. Pris dans son ensemble, c’est une taphore qui veut
dire : ‘on fait attention à
ceux qui ne veulent pas
que le bien des investis-
seurs, commence-t-elle.
On ne ciblait pas les
conseillers en particulier. Si cela a été peu ainsi par certaines
personnes, ce n’était pas l’objectif que nous visions. Est-ce
que le texte aurait pu être plus nuancé ? Je vous laccorde ! »
admet enfin Mme Duhamel.
La directrice du marketing de Gestion FÉRIQUE insiste
pour dire que la campagne ne fait pas de généralisation, mais
met seulement les gens en garde contre ceux qui ne sont pas
honnêtes « et il y en a, vous ne pouvez nier ça ! », souligne-t-
elle. Toujours selon Mme Duhamel, cette campagne élaborée
à linterne qui a été produite pour la première fois en janvier
2007, a eu le mérite dinitier le dialogue entre les conseillers
et les clients au sujet de la rémuration. Plusieurs épargnants
auraient confié à Gestion FÉRIQUE ne pas être au courant
que leur conseiller actuel touchait des commissions pour ses
conseils en placement. « On déplore
que des conseillers se sentent visés,
mais dites-le (aux clients) : Nous,
on n’est pas comme ça…’ »,
conseille-t-elle.
Mme Duhamel conclut en
faisant remarquer que la cam-
pagne ne fait qu’expliquer que
les trois planificateurs finan-
ciers de Gestion FÉRIQUE
sont salars et, donc, entiè-
rement objectifs. « Si vous travaillez dans
le domaine, vous savez très bien quil y en a qui sont drivés
par les commissions et qui ne donnent pas les conseils auxquels
le client devrait s’attendre. On ne dit pas que c’est lensemble
de l’industrie, mais on dit que ça existe. On dit aux gens de
faire attention, cest tout », rencrit Mme Duhamel.
« C’est une industrie basée sur la confiance, et nous
sommes un organisme à but non lucratif, nos conseillers
sont à salaire, notre conseil d’administration est bénévole.
Nous, on ne travaille pas pour les profits, on travaille pour
vous (le client). Tout le monde sait que dans l’industrie, il
y a des frais cachés (en parlant du rendement), chez nous
il n’y en a pas », laisse-t-elle tomber.
n.d.l.r. : Au moment d’aller sous presse, Mme Duhamel a
communiqué à Objectif Conseiller que la dite campagne
avait été retirée de leur site. Elle a présenté ses excuses au
nom de Gestion Férique à ceux qui ont été offensés par le
texte de cette publicité.
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