Chapitre 2 : Matrices
1. Notion de matrice et vocabulaire
Notation 1.Dans tout le chapitre n, p, q sont des entiers naturels non nuls.
Définition 1.Une matrice Aànlignes et pcolonnes est un tableau défini par n×péléments de Rnotés aij pour
16i6net 1 6j6p
Le nombre aij est le coefficient d’indice (i, j) de la matrice A.
La matrice Aest parfois dite de taille ou de format (n, p) ou tout simplement matrice n×p.
L’ensemble des matrices de taille (n, p) à coefficients dans Rest noté Mn,p(R).
Notation 2.On présente généralement les matrices de cette manière :
j-ème colonne
a11 a12 . . . a1j. . . a1p
a21 a22 . . . a2j. . . a2p
.
.
..
.
..
.
..
.
.
i-ème ligne ai1ai2. . . aij . . . aip
.
.
..
.
..
.
..
.
.
an1an2. . . anj . . . anp
Exemple 1.1B À quels ensembles appartiennent les matrices suivantes ?
(a) A=
1 2 3
4 5 6
7 8 9
(b) B=11 e
π2 0,2(c) Id3=
1 0 0
0 1 0
0 0 1
(d) C=
1
2
3
(e) D=12
2 4 (f) E=2 1
0 0
(g) 02,3=0 0 0
0 0 0(h) F=3
2Écrire sous forme de tableau la matrice M= (ij)16i63
16j64
.
Définition 2.On adopte le vocabulaire suivant :
Mn(R) = Mnn(R) est l’ensemble des matrices carrées de taille nà coefficients dans R.
M1p(R) est l’ensemble des matrices lignes de taille pà coefficients dans R.
Mn1(R) est l’ensemble des matrices colonnes de taille nà coefficients dans R.
A = (aij )∈ Mn(R) est une matrice triangulaire supérieure si aij = 0 dès que i > j.
A = (aij )∈ Mn(R) est une matrice triangulaire inférieure si aij = 0 dès que i < j.
A = (aij )∈ Mn(R) est une matrice diagonale si si aij = 0 dès que i6=j.
A = (aij )∈ Mn(R) est une matrice symétrique si (i, j)J1 ; nK2, aji =aij .
0np ∈ Mnp(R) est la matrice nulle, dont tous les coefficients valent 0.
Idn∈ Mn(R) est la matrice identité : diagonale, de taille n, dont les coefficients diagonaux valent 1.
Exemple 2.B Pour n= 3, donner des matrices triangulaire supérieure (resp. inférieure), diagonale et symétrique.
2. Opérations de base sur les matrices
2.1 Addition de matrices et multiplication d’un réel par une matrice
Définition 3.On définit les opérations suivantes sur l’ensemble Mnp(R) :
Addition : soient A= (aij )16i6n
16j6p∈ Mnp(R) et B= (bij )16i6n
16j6p∈ Mnp(R), alors A+B= (aij +bij )16i6n
16j6p∈ Mnp(R).
Multiplication par un réel : soient λRet A= (aij )16i6n
16j6p∈ Mnp(R), alors λ A = (λaij )16i6n
16j6p∈ Mnp(R).
Exemple 3.B À partir des matrices de l’exemple 1, calculer E+D, 3Bet A3Id3.
Remarque 1.BIl est possible d’additionner deux matrices uniquement lorsqu’elles ont les mêmes dimensions.
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2.2 Multiplication matricielle
Définition 4.On définit le produit d’une matrice Ade nlignes et pcolonnes avec une matrice Bde plignes et q
colonnes comme la matrice de nlignes et qcolonnes suivante :
Soient A= (aij )16i6n
16j6p∈ Mnp(R) et B= (bkj )16k6p
16j6q∈ Mpq(R), alors AB = p
X
k=1
aikbkj !16i6n
16j6q
∈ Mnq(R).
Le coefficient (i, j) du produit AB est le « produit » de la i-ème ligne de Aavec la j-ème colonne de B.
BOn ne peut calculer le produit AB que si le nombre de colonnes de Aest égal au nombre de lignes de B.
Exemple 4.On peut disposer les calculs ainsi :
1 2
3 1
0 2
=B
A=
1 0 0
0 3 1
1 1 3
1 2
9 5
4 9
=AB
Pour obtenir le coefficient entouré, on fait le calcul : 0 ×2 + 3 ×1 + 1 ×2 = 5
B À partir de l’exemple 1, calculer : 1ED 2DE 3AId34AC 502,3A6EB 7Que dire de BE ?
Le produit matriciel . . .
1est associatif : A∈ Mn,p(K),B∈ Mp,q(K),C∈ Mq,r(K),(AB)C=A(BC).
2est distributif à gauche par rapport à :A∈ Mn,p(K),B, C ∈ Mp,q (K), A(B+C) = AB +AC.
3est distributif à droite par rapport à + : A, B ∈ Mn,p(K),C∈ Mp,q (K),(A+B)C=AC +BC.
4commute avec le produit externe : λK,(A, B)∈ Mn,p(K)× Mp,q(K),(λA)B=λ(AB) = A(λB).
5vérifie A∈ Mn,p(K), AIdp=Aet IdnA=A.
6Bn’est pas commutatif.
7Bne vérifie pas la propriété du produit nul.
Proposition 1. Propriétés du produit
Démonstration. Se vérifie avec la définition. Les premiers produits de l’exemple 4 justifient les derniers points.
Exemple 5.M Soit M=13
2 4 . Vérifier que M23M+ 2Id2= 02,2puis factoriser l’expression de gauche dans
l’égalité précédente.
3. Puissances de matrice
Définition 5.Soit kNet soit Aune matrice carrée de Mn(R).
On appelle puissance k-ième de A, et on note Ak, la matrice A× ··· × A(kfois).
Par convention A0=In.
Le produit matriciel ne commutant pas en général, la puissance de matrice garde seulement certaines propriétés des réels :
Soient k, l, n trois entiers naturels et Aet Bdeux matrices de Mp(R).
1AkAl=Ak+l.
2(Ak)l=Akl
3BLorsque Aet Bcommutent, on a : (a) (AB)k=AkBk(b) (AB)(A+B) = A2B2
(c) (A+B)2=A2+ 2AB +B2(d) (AB)2=A22AB +B2(e) (A+B)n=
n
X
i=0 n
iAiBni
Proposition 2.
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Remarque 2.Deux exemples fondamentaux de matrices qui commutent.
Pour tout A∈ Mn(R), pour tout λR:Aet λIncommutent.
Pour toute matrice carrée A: toutes les puissances de Acommutent entre elles.
Exemple 6.B Calculer, si possible :
1A2pour A=1 1 2
2 1 0
2A2,A3,B2,AB,BA,A+B, (A+B)2,A2+ 2AB +B2pour A=21
0 1 et B=31
0 3
3M0,M1,M2,M3,M4,M100 pour M=
0 0 0 0
1 0 0 0
0 1 0 0
0 0 1 0
Remarque 3.Une application importante du calcul de puissances de matrices est l’étude des suites récurrentes (notamment
les suites récurrentes couplées qui interviennent en probabilités).
4. Inverse d’une matrice
Définition 6.Soit A∈ Mn(R) une matrice carrée. On appelle matrice inverse de Aet on note A1∈ Mn(R) une
matrice qui vérifie
AA1= Idn=A1A
L’ensemble des matrices carrées de taille nà coefficients dans Rqui admettent une inverse est noté GLn(R).
Soient A, B GLn(R).
1A1est unique : si BA = Idnou si AB = Idnalors B=A1.
2(A1)1=A
3B(AB)1=B1A1.
Proposition 3.
Exemple 7.
1MVérifier que B=
1 0 1
1
2
1
21
1 0 2
est l’inverse de la matrice A=
2 0 1
0 2 1
1 0 1
.
2MSoit nN. Montrer que si A2A=Inalors Aest inversible, et préciser son inverse.
3Soit nN, λ R. Vérifier que λInest inversible, d’inverse 1
λInet que 0nn’est pas inversible.
Remarque 4.Pour des matrices inversibles, les propriétés de calcul des puissances sont valables pour des puissances
négatives.
Remarque 5.BLa somme de deux matrices inversibles n’est pas inversible en général. Par exemple Inet Insont
inversibles mais InIn= 0nne l’est pas.
Exemple 8.
1Soit AGLn(R). Montrer que pour tout pN,Apest inversible et préciser son inverse.
2Soit A∈ Mp(R) et PGLp(R). Simplifier (P1AP )2, (P1AP )3.
Conjecturer une formule pour (P1AP )nvalable pour nNet la prouver par récurrence. Est-elle encore valable
pour n= 0 ?
Si de plus Aest inversible, vérifier que pour tout nN,(P1AP )nest inversible et préciser son inverse.
Déduire que la formule démontrée est encore vraie pour les entiers négatifs.
En calcul matriciel, lorsqu’une matrice est inversible cela permet d’obtenir de nouvelles règles de calcul. On peut « simplifier »
par cette matrice dans les égalités, comme on le fait dans Rà l’aide de la divisions. Cependant il ne faut pas oublier de
tenir compte de la non commutativité des matrices.
Pour ne pas faire d’erreur, il faut multiplier, à gauche ou à droite, par l’inverse de la matrice. En conséquence :
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Soit CGln(R), et Aet Bdes matrices telles que les produits suivants aient un sens.
Simplification à gauche : CA =BA=C1B
CA =CB A=B
Simplification à droite : AC =BA=BC1
AC =BC A=B
Proposition 4.
Exemple 9.M+
1Soient A, B telles que AB = 0. Montrer que si A6= 0 et B6= 0 alors ni Ani Bne sont inversibles.
2Soit B=1 1
0 0Calculer B2+Bet déduire que Bn’est pas inversible.
Soit A=a b
c d, où a, b, c, d sont quatre nombres réels. Alors,
1Si ad bc = 0, An’est pas inversible.
2Si ad bc 6= 0, Aest inversible et A1=1
ad bc db
c a .
Proposition 5.
Démonstration. 1Considérer B=d d
cc.2Calcul direct
Remarque 6.Le calcul explicite de l’inverse d’une matrice carrée de petite dimension (3 ×3, voire plus rarement 4 ×4),
qui repose essentiellement sur une séries de manipulations techniques, sera vu dans le chapitre consacré à la résolution de
systèmes linéaires. Ceci signifie qu’une bonne partie des exercices sur les matrices n’est pas encore faisable.
Exemple 10.B Chercher des matrices 2 ×2 inversibles ou non et donner si possible l’ inverse.
5. Transposition et matrices symétriques
Définition 7.Soit A= (aij )16i6n
16j6p∈ Mnp(R). La transposée de Aest la matrice
A= (a
ij )16i6p
16j6n∈ Mpn(R) où :
(i, j)J1 ; pK×J1 ; nK, a
ij =aji
La transposition est une opération qui « échange » les lignes et les colonnes d’une matrice.
Exemple 11.B Calculer la transposée de chacune des matrices de l’exemple 1.
On a :
1A∈ Mn,p(K),
A=A.
2BA∈ Mn,p(K),B∈ Mp,q(K),
(AB) =
B
A.
3λR,A, B ∈ Mn,p(K),
(λA +B) = λ
A+
B.
4AGLn(R),
(A1) = (
A)1.
5L’ensemble {A∈ Mn(R) : A=
A}est l’ensemble des matrices symétriques d’ordre n(parfois noté Sn(R)).
Proposition 6. Propriétés de la transposition
Démonstration. À partir de la définition 7
Exemple 12.B Vérifier la deuxième formule sur les matrices Bet Ede l’exemple 1.
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TD du chapitre 2
Exercice 1. Puissances d’une matrice : méthode 1
But : calculer les puissances d’une matrice semblable à une matrice diagonale (uniquement 2 ×2 dans ce chapitre).
1Soit M=0 1
21et P=11
1 2 . Déterminer P1et calculer D=P1MP .
2Calculer Mkpour tout entier naturel k, à l’aide du résultat de l’exemple 8.
Exercice 2. Puissances d’une matrice : méthode 2
But : calculer les puissances de la somme d’une matrice nilpotente et d’une homothétie.
1Soit T=
1 2 3
0 1 2
0 0 1
et N=TId3(on a donc T= Id3+N).
(a) Calculer Nkpour tout entier naturel k.
(b) En déduire Tkà l’aide de la formule du binôme de Newton, dont on justifiera l’emploi.
2Reprendre la méthode précédente pour calculer Ukpour tout entier naturel k, avec U= 2Id3+N.
3Reprendre la méthode précédente pour calculer
1 1 1 1
0 1 1 1
0 0 1 1
0 0 0 1
n
pour tout entier naturel n.
Exercice 3. Puissances d’une matrice : méthode 3
But : calculer les puissances d’une matrice par conjecture et récurrence.
Pour les matrices suivantes, calculer les premières puissances, deviner une formule pour la puissance n-ième, puis la montrer
par récurrence : A=
a0 0
0b0
0 0 c
(a, b et csont trois nombres réels), ⋆B =
1 1 1
1 1 1
1 1 1
et ⋆ ⋆ C =1 1
0 2
Exercice 4. Somme et matrice
But : apprendre à manipuler des sommes particulières de matrices.
Soient nNet pN.
1Simplifier pour tout A∈ Mn(R) l’expression : (InA)
p
X
k=0
Ak
2Soient A, B ∈ Mn(R) deux matrices qui commutent, simplifier (AB)
p
X
k=0
AkBpk.
Exercice 5. Autour des matrices nilpotentes (variante de la méthode 2)
Soit A∈ Mn(R) une matrice non nulle nilpotente, c’est à dire pour laquelle il existe un entier r>2 tel que Ar= 0.
On suppose dans la suite que rest son indice de nilpotence, c’est à dire le plus petit entier tel que Ar= 0 ainsi Ar16= 0).
1⋆⋆ Montrer que An’est pas inversible.
2⋆⋆ Simplifier (InA)
p
X
k=0
Ak, pour pR. Déduire que InAest inversible, et préciser son inverse.
3Appliquer les questions 1. et 2. à 0a
0 0 et
01 3
0 0 8
0 0 0
Exercice 6. Polynômes de matrices et inversibilité
But : voir si une matrice est inversible ou pas à l’aide d’un polynôme de matrices.
1Soit A=
010
1 2 0
1 0 1
. Calculer A3A2A. Déduire que Aest inversible, et déterminer son inverse.
2Soit B=
1 0 1
010
1 1 1
. Calculer B33B2+ 2B. Déduire que Bn’est pas inversible.
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