I. INTRODUCTION
L’agrandissement vésical a pour but de protéger, à long terme, le
haut appareil urinaire en diminuant le risque de dégradation
consécutif à un régime de hautes pressions vésicales, et d’améliorer
le confort mictionnel des patients [1].
Réalisée pour la première fois chez l’homme avec un segment
d’intestin grêle par Von Mickulicz en 1889 [2], cette technique a
été introduite et diffusée en France dans les années cinquante par
Couvelaire pour la prise en charge des vessies tuberculeuses [3].
Avec l’apparition dans les années 70 du cathétérisme intermittent
[4], l’agrandissement vésical a connu un nouvel essor.
Le principe d’un agrandissement digestif de vessie, à l’inverse
d’une substitution vésicale complète, est de garder l’ensemble du
trigone avec l’urètre et les uretères intacts sans devoir les
réimplanter et de prélever une portion de tube digestif pour la
suturer à la vessie. De multiples techniques d’agrandissement
digestif ont ainsi été décrites utilisant différents segments de tube
digestif (caecum, colon, iléon, estomac) [5-7].
Notre objectif est de présenter les indications, les différentes
techniques actuelles et à l’étude et de donner les résultats des
agrandissements de vessie utilisant des segments digestifs ou
d’autres artéfacts techniques ou des biomatériaux.
II. INDICATIONS
L’agrandissement vésical est indiqué en cas de diminution de la
capacité et/ou de la compliance vésicales ou d’hyperactivité
détrusorienne lorsque tous les traitements conservateurs ont échoué
[8, 9]. Il est donc réservé aux patients en échec ou intolérants aux
traitements par anticholinergiques, par injections intra-détrusorienne
de toxine botulique et/ou par neuromodulation des racines sacrées
postérieures [1, 8-10].
III. AVANT DE RÉALISER UN
AGRANDISSEMENT VÉSICAL
Avant de réaliser un agrandissement vésical, il est indispensable
de s’assurer de l’absence d’affections malignes de la vessie, de
la normalité de la fonction rénale, de l’absence de pathologie
digestive (maladie de Crohn, rectocolite hémorragique, grêle
court…) et de vérifier que le patient est capable et accepte la
pratique des autosondages [9].
En cas d’antécédent d’irradiation pelvienne, le patient devra être
prévenu du risque majoré de fistule entéro-ou colo-vésicale.
Le bilan préopératoire comprend la réalisation d’un calendrier
mictionnel, d’un bilan urodynamique pour confirmer l’indication,
une mesure de la clairance de la créatinine sur 24 heures, une
échographie réno-vésicale, un examen cytobactériologique des
urines (ECBU), une endoscopie uréthro-vésicale voire des biopsies
de vessie, une uréthro-cystographie rétrograde et mictionnelle,
une urographie intra-veineuse optionnelle pour avoir une image
de référence du haut appareil urinaire et s’assurer de l’absence de
duplication urétérale.
IV. AGRANDISSEMENT VÉSICAL DIGESTIF
Avant de réaliser une entérocystoplastie d’agrandissement, il est
indispensable de se poser les questions suivantes : comment
préparer la vessie, quel segment digestif utiliser,quelle longueur
de tube digestif prélever, comment le configurer, les uretères
nécessitent-ils d’être réimplantés, faut-il y associer une
dérivation [9]? Le choix de préparation vésicale se fait entre une
cystoplastie bivalve et une cystectomie sus-trigonale. Il dépend
de la qualité du détrusor et, en particulier, de la persistance des
propriétés visco-élastiques de la vessie. Cependant, lorsque le
RÉSUMÉ
L’importance d’un réservoir vésical de bonne capacité capable
de se remplir à basse pression est aujourd’hui établie. Ces
qualités ont un double avantage. Elles permettent aux patients
d’avoir une continence urinaire et, préviennent les altérations
du haut appareil urinaire. En cas d’échec des différents
traitements médicaux, incluant les injections de toxine, un
agrandissement chirurgical de la vessie peut être discuté. Il
s’impose notammentt en cas de défaut de compliance du
réservoir vésical. Nous présentons ici les détails techniques de
l’agrandissement vésical par un segment digestif ou par des
techniques alternatives, puis nous présentons leurs résultats à
moyen et long terme, afin de connaître la surveillance à mettre
en place dans les suites de ces chirurgies.
Mots-clés : vessie neurologique, traumatisé médullaire,
entérocystoplastie, agrandissement vésical, incontinence
Progrès en Urologie (2007), 17 584-596
Chapitre C-2 C
Traitement de l’hyperactivité détrusorienne neurologique :
entérocystoplasties
X. Gamé - G. Karsenty - E. Chartier-Kastler - A. Ruffion
584
INCONTINENCE URINAIRE EN NEUROUROLOGIE
2. LES TRAITEMENTS CHIRURGICAUX
C
détrusor apparaît très fibreux, épaissi, il est nécessaire d’envisager
une cystectomie sus-trigonale car le patch iléal risque de s’exclure.
Actuellement, cette dernière situation est la plus fréquente, les
troubles de compliance associés à une vessie ayant conservé ses
propriétés visco-élastiques répondant bien aux injections
intradétrusoriennes de toxine botulique [10]. Le choix du segment
de tube digestif dépend des antécédents du patient et des conditions
locales. Tous les segments du tube digestif peuvent être utilisés,
excepté le jéjunum en raison du risque de troubles hydroé-
lectrolytiques. Le segment le plus fréquemment utilisé est l’iléon
du fait de sa facilité de prélèvement, sa proximité avec la vessie,
ses propriétés visco-élastiques et sa modularité parfaite pour
former un réservoir. La longueur de segment digestif prélevé
dépend du type de préparation vésicale et du type de configuration
de l’entéroplastie. Une réimplantation urétérale est réalisée en
cas de reflux vésico-rénal. Cependant, elle n’est nécessaire que
si le reflux vésico-rénal est indépendant du trouble de compliance,
ce qui est rarement le cas. En cas d’impossibilité prévisible
d’autosondage par l’urèthre, une dérivation urinaire selon le
procédé de Monti ou de Mitrofanoff peut être associée [11, 12].
V. PRÉPARATION DU PATIENT
1. Préparation digestive
La préparation intestinale a pour but de diminuer le risque septique
et de faciliter la reprise du transit. Elle est d’autant plus utile qu’il
s’agit de patients neurologiques ayant un transit digestif ralenti.
Il n’existe aucun consensus ni étude comparant les différentes
manières de réaliser cette préparation. Cependant, elle peut se
faire selon les protocoles suivants :
régime sans résidu pendant 1 semaine avant la date de
l’intervention associé à un lavement rectal la veille de
l’intervention;
pas de régime particulier avant l’intervention mais un lavement
per os à raison de 2 litres à j–2 et 2 litres à j–1 jusqu’à obtenir
des selles parfaitement claires sans résidu ;
association des deux types de préparation.
2. Antibioprophylaxie
Avant l’hospitalisation, le patient fait réaliser un ECBU. Si ce
dernier révèle une infection urinaire ou est en faveur d’un portage
chronique, une antibiothérapie adaptée est mise en place au moins
48 heures avant le geste. En l’absence d’infection, comme il s’agit
d’une chirurgie propre contaminée avec ouverture du tube digestif
une antibiothérapie prophylactique est prescrite à l’induction [13].
Elle sera renouvelée si l’intervention dure plus de trois heures.
L’antibiotique recommandé est une céphalosporine de 2ème
génération. En cas d’allergie, on utilise une association de
cotrimoxazole et de gentamicine.
VI. TECHNIQUES OPÉRATOIRES
1. Installation du patient
L’intervention se déroule sous anesthésie générale. Une sonde
gastrique est mise en place.
Deux installations sont possibles :
Malade en décubitus dorsal, à plat, jambes étendues. Une
inclinaison en Tredelenburg peut être réalisée pour refouler les
éléments du tube digestif. L’opérateur est à gauche du patient,
l’aide en face avec l’instrumentiste à sa droite. La table pont est
placée au-dessus des cuisses.
Malade en décubitus dorsal, jambes reposant sur des appuis en
flexion et en abduction modérée. L’instrumentiste peut alors être
placée au milieu.
2. Voie d’abord
Une incision médiane sous-ombilicale est réalisée, pouvant être
prolongée en sus-ombilical à cheval sur l’ombilic, en fonction du
type de segment digestif prélevé.
Cette intervention peut aussi être réalisée par une incision de
Pfannenstiel.
La peau, le tissu sous-cutané et l’aponévrose des grands droits sont
incisés. Les muscles droits sont séparés sur la ligne médiane
jusqu’au contact de la symphyse pubienne. L’arcade de Douglas
est incisée selon nécessité sur la ligne médiane le plus haut possible
sans ouvrir le péritoine. L’espace de Retzius est abordé. L’index
et le médian droit de l’opérateur abaissent de part et d’autre de la
ligne médiane la face antérieure de la vessie et ramènent vers le
haut la graisse pré- et latéro-vésicale.
Après ouverture du fascia ombilico-prévésical, la face antérieure
de la vessie est libérée jusqu’au niveau du col vésical. L’exposition
du pelvis est réalisée à l’aide d’un écarteur orthostatique de Gosset
et d’une valve médiane permettant de rétracter le péritoine. Débute
ensuite le temps de préparation vésicale. Lui succédera le temps
d’agrandissement vésical digestif.
VII. PRÉPARATION VÉSICALE
1. Cystoplastie bivalve ou Clam
Le principe de la cystoplastie bivalve est de libérer la face
antérieure, le dôme et la face postérieure de la vessie puis de
l’inciser, dans le plan sagittal, d’avant en arrière.
La face antérieure de la vessie est libérée jusqu’au niveau du col
vésical. Le dôme et la face postérieure de la vessie sont libérés
du péritoine jusqu’au trigone qui est respecté. Les faces latérales
de la vessie ne sont pas libérées. Les artères ombilicales sont
respectées afin de conserver une bonne vascularisation du dôme
vésical.
La face antérieure, le dôme et la face postérieure de la vessie sont
ainsi libérés et mobiles. La vessie est ouverte dans le plan sagittal
par une incision menée au bistouri électrique d’avant en arrière,
débutant 2 cm au-dessus du col vésical repéré grâce au ballon de
la sonde vésicale, puis se prolongeant, en arrière, jusqu’à 2 cm au-
dessus de la barre interurétérale (Figure1a). Les berges vésicales
sont exposées par des fils repères ainsi que les deux extrémités
de l’incision. Ce geste donne une bonne exposition du trigone
vésical et permet d’intuber les uretères par des sondes urétérales
servant de repère pour la cystoplastie.
La vessie peut aussi être ouverte dans le plan transversal par une
incision menée au bistouri électrique, débutant latéralement 2 cm
au-dessus du col vésical repéré grâce au ballon de la sonde vésicale,
585
puis se prolongeant, au niveau du dôme, jusqu’à la face
controlatérale, 2 cm au-dessus de la barre interurétérale (Figure
1b). Les berges vésicales sont exposées par des fils repères ainsi
que les deux extrémités de l’incision.
2. Cystectomie sus-trigonale (voir photo)
Le principe de la cystectomie sus-trigonale est de réaliser une
résection de la calotte vésicale en respectant le trigone vésical.
La face antérieure de la vessie est libérée jusqu’au col vésical et
les aponévroses pelviennes sans les inciser. Les faces latérales
de la vessie sont libérées en remontant en dehors et en arrière
vers les uretères. Les artères ombilicales droite et gauche sont
liées et sectionnées. La dissection systématique des uretères est
inutile. Cependant, si ils sont disséqués, ils sont placés sur lacs
repères. Le dôme et la face postérieure de la vessie sont libérés
du péritoine jusqu’au trigone qui est respecté. Le dôme vésical est
saisi par une pince confiée à l’aide afin d’effectuer une traction
vers le haut et l’avant. Ce geste permet d’ouvrir, chez l’homme,
l’espace intervésicorectal pour faciliter sa dissection vers le trigone
vésical en passant en avant du plan des vésicules séminales et
des canaux déférents. Chez la femme, l’isthme utérin est repéré
puis le clivage vésicovaginal est réalisé jusqu’au dessus du trigone
vésical. Ce temps est facilité par la mise en place d’une valve
malléable au niveau du cul de sac vaginal antérieur.
La calotte vésicale est ainsi complètement libérée en ligaturant et
sectionnant latéralement les pédicules vésicaux jusqu’au niveau
du trigone vésical qui est respecté. La cystectomie sus-trigonale
est réalisée par une incision circulaire de la calotte vésicale 1 à 2
cm au-dessus du trigone à l’aide du bistouri électrique (Figure 1c).
Elle peut être réalisée par une voie extravésicale pure ou par une
voie mixte intra- et extravésicale. Cette dernière permet de
simplifier le geste et de mieux contrôler le trigone. Des hémostases
de la tranche de section sont réalisées à la demande. Les uretères
sont intubés par des sondes urétérales Charrière 6 ou 7. Les berges
de section du trigone sont marquées par des fils repères.
Prélèvement du segment digestif et réalisation de la plastie
d’agrandissement
En dehors du jéjunum, tous les segments du tube digestif peuvent
être utilisés pour réaliser l’agrandissement. Il doit systématiquement
être détubulisé afin de diminuer au maximum ses contractions
péristaltiques pour obtenir un réservoir à basse pression. Il est
ensuite disposé et suturé à la vessie sous forme d’une poche ou
d’un patch.
3. Plastie iléale d’agrandissement
L’avant dernière anse grêle est repérée à 20–30 cm de la valvule
iléocæcale. Un greffon de 15 à 45 cm est prélevé selon le type de
préparation vésicale et d’entérocystoplastie. Au préalable, la bonne
descente de l’anse iléale sans traction au contact de la vessie est
vérifiée. La vascularisation de l’anse est repérée par transparence
àl’aide du scialytique. Le méso est sectionné entre plusieurs
ligatures ou en utilisant le bistouri harmonique ou le ligasure®.
Des clamps digestifs sont mis en place de part et d’autre de l’anse.
L’anse iléale est sectionnée au ciseau ou au bistouri électrique. Le
greffon est isolé et le rétablissement de continuité digestive iléo-
iléale est réalisé soit par anastomose manuelle soit par une suture
mécanique utilisant une pince GIA®avec fermeture en
triangulation par une pince TA®.Les clamps digestifs sont ôtés
et l’étanchéité de la suture est vérifiée. Le méso de l’iléon est
fermé pour éviter toute incarcération d’une anse intestinale. Le
greffon est nettoyé et lavé à l’aide de bétadine® diluée ou d’eau
stérile. L’anse est détubulisée en sectionnant longitudinalement
le tube digestif sur le bord antimésentérique au bistouri électrique.
En cas de vessie bivalve, une longueur de 15 cm de segment
digestif suffit. Après détubulisation, le patch décrit un rectangle.
Il est placé en losange au niveau de l’incision vésicale avec une
pointe placée au niveau des commissures antérieure et postérieure
586
Figure 1 : Préparation de la vessie.
aet b :Cystoplastie bivalve ou Clam en incisant la vessie sagittalement
(a) ou transversalement (b)
c:cystectomie sus-trigonale
Vision per-opératoire de la pièce de cystectomie sus-trigonale : son-
des urétérales en place pour la disection et sonde urétrale sortant par
le col.
dela cystotomie et une pointe sur les faces latérales du dôme
vésical. Des points de fixation sont placés à chaque extrémité du
losange. La suture vésicodigestive est débutée au niveau de la
commissure postérieure et poursuivie jusqu’au sommet de la
vessie. Le même geste est réalisé en partant de la commissure
antérieure et en remontant vers le dôme vésical. Quatre surjets
débutant à la pointe de chaque commissure sont donc réalisés.
En cas de cystectomie sus-trigonale, la longueur du segment
digestif est plus long (30–45 cm). Elle est déterminée par le type
d’entérocystoplastie : Camey II, Hautmann ou en Z. Nous ne
décrirons pas ici les techniques opératoires des différentes
entérocystoplasties [14]. Lors de la confection du réservoir, une
ouverture de la taille du trigone est laissée libre à sa partie inférieure.
Le réservoir est descendu au contact du trigone vésical. Un bâti
de la cystoplastie est réalisé avec les fils repères laissés sur le
trigone lors du premier temps opératoire. Le réservoir est suturé
directement au trigone vésical par quatre surjets.
Avant de fermer totalement la cystoplastie, si les deux sondes
urétérales sont conservées, elles sont ressorties en
transvésicopariétal ou à travers le patch intestinal (Figure 2). Une
sonde de Foley Charrière 20 est mise en place dans la vessie
(sonde type “néo-vessie”). Un drain aspiratif de Redon est placé
au niveau du cul-de-sac de Douglas, en arrière de la plastie. Les
anses grêles sont remises en place, l’épiploon est descendu si
possible autour de la plastie. La paroi est fermée plan par plan.
En post- opératoire, si deux sondes urétérales ont été laissées en
place, elles sont retirées aux 10ème et 11ème jours. La sonde de
Foley est retirée au 12ème jour après réalisation d’une cystographie
de contrôle.
4. Plastie sigmoïdienne d’agrandissement
Avant d’utiliser un segment de sigmoïde, il est indispensable de
s’assurer de l’absence de diverticule. Un examen endoscopique
ou radiologique préopératoire sera donc systématiquement réalisé.
L’utilisation d’un greffon sigmoïdien a l’avantage qu’il soit
facilement abaissable sur la calotte vésicale ou le trigone vésical
du fait de la proximité entre la vessie et le sigmoïde. La longueur
de sigmoïde prélevé est de 15 à 20 cm en le pédiculisant sur une
artère sigmoïdienne. Le prélèvement et le rétablissement de la
continuité digestive sont identiques à celui de l’anse iléale. Le
greffon est nettoyé et lavé à l’aide de bétadine® diluée ou d’eau
stérile. L’anse est détubulisée en sectionnant longitudinalement
le tube digestif sur le bord antimésentérique au bistouri électrique.
Un patch rectangulaire est obtenu. Il est placé en losange au niveau
de l’incision vésicale soit, en cas de cystoplastie bivalve, avec une
pointe dans chaque commissure antérieure et postérieure de la
cystotomie et une pointe sur les faces latérales du dôme vésical,
soit, en cas de cystectomie sus-trigonale, au contact du trigone fixé
par quatre points placés à chaque extrémité de ce losange en
utilisant les fils repères du temps de préparation vésicale. La suite
de l’intervention est identique à celle réalisée avec un greffon
iléal.
5. Plastie iléocæcale d’agrandissement
Le segment iléocæcal est utilisé en cas de méso court ou rétracté
empêchant l’abaissement d’un greffon iléal [6]. Le cæcum seul
peut aussi être utilisé. Le fascia de Toldt droit est incisé. Les 15
587
Figure 2 : Plastie iléale d’agrandissement. Une plastie d’agrandissement
est réalisée selon la technique d’entérocystoplastie en W décrite par
Hautmann (1 et 2). Le réservoir est suturé au trigone vésical (3). Avant
de fermer la cystoplastie, les deux sondes urétérales sont ressorties à
travers le patch intestinal (4).
derniers centimètres d’iléon terminal et les 15 premiers centimètres
ducôlon droit sont prélevés. Le prélèvement et le rétablissement
de continuité digestive sont identiques à celui de l’anse iléale. Le
greffon est nettoyé et lavé à l’aide de bétadine® diluée ou d’eau
stérile. L’anse est détubulisée en sectionnant longitudinalement
le tube digestif sur le bord antimésentérique au bistouri électrique.
L’incision est débutée au niveau de l’iléon en direction de la
valvule iléocæcale pour la traverser et ensuite remonter le long
de la bandelette antérieure du cæcum et du côlon droit. En cas
d’appendice en place, une appendicectomie est associée.
Le segment digestif prélevé peut être utilisé soit comme un patch
rectangulaire placé en losange au niveau de l’incision vésicale, soit
comme une poche, les deux berges iléale et colique suturées
l’une à l’autre pour obtenir une poche qui devra subir une rotation
de 180° sur son méso pour être anastomosée à la vessie.
6. Plastie gastrique d’agrandissement
Un greffon gastrique est utilisé en cas de blindage pelvien avec
des antécédents de radiothérapie ou en cas d’impossibilité d’utiliser
l’iléon ou le sigmoïde. Il est aussi très utilisé chez l’enfant. Cette
technique a pour avantages l’absence de sécrétion de mucus, une
diminution du risque infectieux et une réduction des troubles
métaboliques. Cependant, elle peut être responsable d’un syndrome
«douleur-hématurie » secondaire à la sécrétion acide.
Le prélèvement gastrique consiste à isoler et à prélever le pédicule
gastroépiploïque droit pour vasculariser le greffon. Le grand
épiploon est incisé le long de la grande courbure gastrique en
préservant la portion située en regard du patch. L’épiploon est
libéré du côlon transverse. L’artère gastroépiploïque gauche est
liée. Les deux clamps digestifs sont disposés en coin sur la partie
médiane de l’estomac. L’estomac est sectionné pour prélever le
greffon dont la base se situe sur la grande courbure et la pointe
se dirige à 1 ou 2 cm vers la petite courbure. L’estomac est suturé
pour sa remise en continuité. Le greffon correspond à un tiers de
l’estomac. Le patch gastrique est ensuite descendu dans le pelvis
en allongeant le plus possible son pédicule vasculaire. Il est passé
en arrière du mésocôlon transverse puis de la racine du péritoine
en position rétropéritonéale. Le greffon est basculé de 180° sur
son axe afin d’amener la pointe vers le col vésical [5, 15]. Il est
placé en losange au niveau de l’incision vésicale soit, en cas de
cystoplastie bivalve, avec une pointe au niveau de la commissure
antérieure et postérieure de la cystotomie et une pointe sur les faces
latérales du dôme vésical, soit, en cas de cystectomie sus-trigonale,
au contact du trigone fixé par quatre points placés à chaque
extrémité de ce losange en utilisant les fils repères du temps de
préparation vésicale. La suite de l’intervention est identique à
celle réalisée avec un greffon iléal.
7. Entérocystoplastie par voie cœlioscopique
La réalisation d’un agrandissement vésical digestif a été décrite
par voie laparoscopique [16]. Les temps opératoires sont identiques
àceux de la chirurgie ouverte. Le segment digestif utilisé était dans
chaque cas de l’iléon. Toutefois, il s’agissait de séries limitées à
un petit nombre de patients et aucune étude n’a, à ce jour, comparé,
l’agrandissement vésical laparoscopique à l’agrandissement vésical
par chirurgie à ciel ouvert [16-18].
VIII. SUITES OPÉRATOIRES
La sonde naso-gastrique est retirée précosément en salle de réveil
ou le lendemain de l’intervention, ou à la reprise du transit gazeux
pour prévenir une surdistension abdominale. Le drain de Redon
est retiré au bout de 48 à 72 heures. Un lavage vésical à la seringue
par la sonde uréthrale 3 à 4 fois par jour est maintenu pendant toute
la durée du drainage vésical. La reprise alimentaire est progressive
et débutée quelques heures après l’ablation de la sonde naso-
gastrique. Les sondes urétérales sont retirées précosément si elles
ont été maintenues, la sonde vésicale au 10ème jour. Les patients
débutent alors les autosondages avec une fréquence au départ de
toutes les trois heures jour et nuit qui sera allongée, au bout de
quelques semaine, à toutes les quatre heures le jour et toutes les
huit heures la nuit.
Une échographie rénale et vésicale et un dosage de la créatininémie
ou une mesure de la clairance de la créatinine sur 24 heures sont
réalisés à un et 6 mois. A un an, une uréthro-cystographie rétrograde
et mictionnelle, une cystoscopie et un bilan urodynamique sont
aussi réalisés. Au-delà, une échographie rénale et vésicale et un
dosage de la créatininémie ou une mesure de la clairance de la
créatinine sur 24 heures annuels sont pratiqués. En cas d’anomalie
ou de modifications de fonctionnement de cet agrandissement, une
uréthro-cystographie rétrograde et mictionnelle et un bilan
urodynamique seront réalisés. Un catalogue mictionnelle doit être
réalisé à chaque visite pour contrôler la durèse et le rythme des
sondages.
IX. RÉSULTATS DES AGRANDISSEMENTS
VÉSICAUX DIGESTIFS
1. Morbidité et mortalité
Le taux de mortalité est estimé entre 0 et 3,2 %. La morbidité post-
opératoire précoce de la chirurgie d’agrandissement de vessie par
un segment de tube digestif est présentée tableau 1.La morbidité
précoce la plus fréquemment rapportée est l’iléus post-opératoire
prolongé. Il survient jusque dans 11,7 % des cas [19-22].
La morbidité tardive est principalement liée à l’apport d’une
muqueuse digestive. Elle est responsable de la production de mucus
et donc de lithiases dont l’incidence est de 10 à 50 % [19, 23-26],
principalement dans les deux premières années, de bactériurie
chronique dans 70 % des cas [27], de troubles électrolytiques
(acidose hyperchlorémique dans 0 à 15 % des cas pour le grêle,
alcalose hypochlorémique pour l’estomac) [28, 29], du syndrome
“douleur-hématurie” dû à une cystite peptique en cas d’utilisation
d’estomac [28]. Il existe un risque de dégénérescence néoplasique
au bout de 5 à 10 ans estimé a 1 % des cas par Shaw [30].
La complication la plus grave est la perforation de la cystoplastie
d’agrandissement. Il s’agit d’une complication grave pouvant
mettre en jeu le pronostic vital. Elle peut survenir quelque soit le
segment digestif utilisé mais se voit plus fréquemment en cas
d’iléocystoplastie [31]. Sa fréquence est estimée entre 5 et 13 %
[19]. Habituellement, elle survient au niveau du greffon digestif
ou de la jonction entre la vessie et la plastie digestive. Elle est le
plus souvent la conséquence d’une hyperpression dans
l’entérocystoplastie et plus rarement secondaire à un sondage
traumatique.
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