INTRODUCTION
La stimulation intra-vésicale par voie trans-uréthrale a pour objectif
de permettre une réactivation du réflexe mictionnel pour faciliter
la miction chez les patients porteurs d’une vessie hypo-contractile.
En se référant au fonctionnement du réflexe mictionnel, il faut se
souvenir que le déclenchement de la contraction vésicale normale
va être au départ «lance» par les stimulis afférents (sensitifs) dont
les récepteurs sont situés dans la paroi vésicale. Ce réflexe est médié
par le système parasympathique, acteur de la contraction vésicale
et de sa vidange. La première description de stimulation intra-
vésicale est due à Saxtorph [11]. Il insérait une électrode dans
la vessie et une électrode de surface abdominale fermait le circuit.
L’indication était les vessies atones. L’idée était lancée et n’aura
pas grande audience. Reprise par Katona [6, 7], des séances de
1à2heures par jour ont pour objectif autant de réactiver un
réflexe mictionnel en aidant le patient à retrouver des «sensations»
vésicales qu’à contrôler des contractions non inhibées. La thérapie
avait donc un objectif mictionnel par stimulation végétative
afférente mais un effet de «modulation» a rapidement été également
constaté. Des travaux expérimentaux l’ont démontré ainsi que
l’influence de la fréquence du courant (basse fréquence 20 Hz)
[2,3].
EXPÉRIENCE CLINIQUE
Cette thérapie s’est finalement peu développée malgré un concept
intéressant. Peu d’équipes ont choisi d’en évaluer l’intérêt clinique
et pratique, probablement du fait de la concurrence logique de
l’autosondage intermittent apparu dans la même période. Sous
réserve que le patient ait conservé une vessie normale et contractile
ainsi qu’un système nerveux intègre (permanence des fibres Aδ
afférentes), la technique pourrait être discutée pour un patient
donné.
Elle nécessite l’introduction d’un cathéter uréthral (cathode).
Après remplissage de la vessie au sérum physiologique, un courant
électrique est appliqué sur le circuit bouclé par l’anode cutanée
abdominale. Les paramètres utilisés sont 2ms (durée d’impulsion),
20 Hz (fréquence) avec un courant de 1 à 10 mA. La stimulation
est continue pour une session de 60 à 90 minutes, 5 jours pas
semaine [9] .
Le patient doit recouvrer des sensations de remplissage vésical lui
permettant de déclencher son réflexe mictionnel.
D’après Madersbacher (NP4) [9] qui a fait la revue récente des
publications sur le sujet, la plus grosse partie des publications
concerne l’enfant et les patients porteurs de myélomeningocèles.
Si les résultats ne sont pas uniformes d’une série à l’autre, la seule
série publiée randomisée (NP1) n’a pas été capable de trouver de
différence entre groupe stimulé et groupe non traité [1]. Cependant
le nombre de sessions a été plus faible que ce qui a été utilisé dans
les grosses expériences monocentriques (15 sessions
d’électrostimulation au démarrage et à trois mois versus plus de
20 le plus souvent [5]). Kaplan, fervent utilisateur et défenseur de
la technique (NP4) [4] plaide en faveur de son utilisation du fait
de sa très faible inocuité et de la capacité de nombreux patients
àretrouver des sensations vésicales , 13 % seulement ne répondant
pas du tout pour un nombre moyen de sessions individuelles de
47.
Madersbacher lui-même (NP4) [10] a notablement publié à propos
de son expérience autrichienne. Il en ressort que les critères
d’utilisation de la thérapie chez l’adulte peuvent être ainsi définis:
-Lésion neurologique incomplète avec persistance de fibres
afférentes intègres de la vessie au cortex cérébral
-Persistance de sensations périnéales dans les dermatomes S3
et S4
RÉSUMÉ
La technique de l’électro-stimulation intravésicale a pour but
d’obtenir une contraction vésicale mictionnelle par stimulation
directe dans un objectif immédiat de rééducation de la
contraction vésicale. Son efficacité semble réelle et la neuro-
urologie pédiatrique est sans doute le domaine d’élection de cette
thérapie.
Sa diffusion reste restreinte devant le faible niveau de preuve
d’efficacité et l’autosondage reste le traitement de choix de la
rétention chronique neurologique aujourd’hui encore en France.
Mots-clés :vessie neurologique, stimulation électrique, sondage
intermittent, rétention chronique d’urines, traumatisme
médullaire, vessie aréflectique
Progrès en Urologie (2007), 17 540-541
Chapitre B-4 B
L’électro-stimulation intravésicale
E. Chartier-Kastler - A. Ruffion
540
PRISE EN CHARGE THÉRAPEUTIQUE DE LA VIDANGE VÉSICALE
4. LES TRAITEMENTS PAR STIMULATION ÉLECTRIQUE À VISÉE DE VIDANGE
B
-Valeur positive de la normalité de l’étude des potentiels évoqués
àpoint de départ vésical [8].
L’histoire naturelle des vessies de myéloméningocèles (altération
de la paroi vésicale et de ses récepteurs) pourrait expliquer les
résultats hétérogènes et discordants.
CONCLUSION
Cette technique a de grandes difficultés à s’installer dans l’arsenal
thérapeutique neuro-urologique. L’absence d’industriel assurant
la promotion d’un matériel adapté en est peut être pour partie
responsable. Cela n’est pas la seule raison. Les résultats cliniques
discordants, et dont l’évaluation n’a jamais été poussée à son
maximum, restent décevants. Une nouvelle étude contre placebo
serait réellement nécessaire. L’expérience surtout pédiatrique
trouve peu de justification à l’âge adulte du fait des facilités,
notamment françaises, d’accès à l’autosondage. Cette technique
nécessite des sondages réguliers et impose des contraintes de
durée quotidienne de la période de stimulation (90 minutes environ).
Au total, si le concept est intéressant sur le plan physiologique,
ses applications actuelles en France paraissent peu évidentes.
RÉFÉRENCES
1. Boone T, Roehrborn C, Hurt G: Transurethral intravesical electrotherapy for
neurogenic bladder dysfunction in children with myelodysplasia: a prospective,
randomized clinical trial. J Urol, 1992, 148, 550-4.
2. Jiang C: Modulation of the micturition reflex pathway by vesical electrical
stimulation: an experimental study in the rat. Neurourol Urodyn, 1998, 17,5,
543-553.
3. Jiang C, Lindström S, Mazieres L: Segmental inhibitory control of ascending
sensory information from bladder mechanoreceptors in cat. Neurourol Urodyn,
1991, 10, 286-288.
4. Kaplan W: Intravesical electrical stimulation of the bladder: Pro. Urology, 2000,
56,1, 2-4.
5. Kaplan W, Richards I: Intravesical bladder stimulation in myelodysplasia. J
Urol, 1988, 140,5 (Pt 2), 1282-4.
6. Katona F: Stages of vegetative afferentation in reorganization of bladder
control during electrotherapy. Urol Int, 1975, 30, 182-203.
7. Katona F, Eckstein H: Treatment of neuropathic bladder by transurethral
electrical stimulation. Lancet, 1974, 7861,7, 780-1.
8. Kiss G, Madersbacher H, Poewe W: Cortical evoked potentials of the
vesicourethral junction—a predictor for the outcome of intravesical
electrostimulation in patients with sensory and motor detrusor dysfunction.
World J Urol, 1998, 16,5, 308-12.
9. Madersbacher H. Intravesical electrical stimulation of the bladder. In: Textbook
of the neurogenic bladder adults and children. Edited by Corcos J, Schick E.
London: Martin Dunitz Ltd., 2004, 551-5.
10. Madersbacher H, Pauer W, Reiner E, Hetzel H, Spanudakis S: Rehabilitation
of micturition in patients with incomplete spinal cord lesions by transurethral
electrostimulation of the bladder. Eur Urol, 1982, 8,2, 111-6.
11. Saxtorph M: Stricture urethrae, fistula perinee, retentio urinae. Clinisk Chirurgi
Copenhagen Gyldenldalske Fortlag, 1887, 265-280.
____________________
SUMMARY
Intravesical electrostimulation
The intravesical electrostimulation technique is designed to induce
avoiding bladder contraction by direct stimulation as an immediate
objective and for bladder retraining. This technique appears to
be truly effective and is primarily used in paediatric neurourology.
It is not widely used at the present time due to the low level of proof
of its efficacy and intermittent self-catheterization still remains the
treatment of choice in France for neurogenic chronic urinary
retention.
Key-Words: neurogenic bladder, electrical stimulation, clean
intermittent self-catheterization, chronic urinary retention, spinal
cord injury, underactive bladder
CE QU’IL FAUT RETENIR
1L’électrostimulation intravésicale est capable d’améliorer
la fonction des vessies neurologiques en améliorant la
perception du contrôle de la miction.
2L’électrostimulation intravésicale est une technique en
neuro-urologie qui a la capacité d’induire ou d’améliorer
le réflexe mictionnel chez des patients aux lésions
incomplètes du système nerveux central ou périphérique.
3L’indication idéale serait la vessie neurologique hypoactive,
hypoesthésique et hypocontractile.
4En France ce traitement n’a pas de place dans l’arsenal
thérapeutique.
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