B PRISE EN CHARGE THÉRAPEUTIQUE DE LA VIDANGE VÉSICALE Progrès en Urologie (2007), 17 540-541 4. LES TRAITEMENTS PAR STIMULATION ÉLECTRIQUE À VISÉE DE VIDANGE Chapitre B-4 B L’électro-stimulation intravésicale E. Chartier-Kastler - A. Ruffion EXPÉRIENCE CLINIQUE RÉSUMÉ Cette thérapie s’est finalement peu développée malgré un concept intéressant. Peu d’équipes ont choisi d’en évaluer l’intérêt clinique et pratique, probablement du fait de la concurrence logique de l’autosondage intermittent apparu dans la même période. Sous réserve que le patient ait conservé une vessie normale et contractile ainsi qu’un système nerveux intègre (permanence des fibres Aδ afférentes), la technique pourrait être discutée pour un patient donné. La technique de l’électro-stimulation intravésicale a pour but d’obtenir une contraction vésicale mictionnelle par stimulation directe dans un objectif immédiat de rééducation de la contraction vésicale. Son efficacité semble réelle et la neurourologie pédiatrique est sans doute le domaine d’élection de cette thérapie. Sa diffusion reste restreinte devant le faible niveau de preuve d’efficacité et l’autosondage reste le traitement de choix de la rétention chronique neurologique aujourd’hui encore en France. Elle nécessite l’introduction d’un cathéter uréthral (cathode). Après remplissage de la vessie au sérum physiologique, un courant électrique est appliqué sur le circuit bouclé par l’anode cutanée abdominale. Les paramètres utilisés sont 2ms (durée d’impulsion), 20 Hz (fréquence) avec un courant de 1 à 10 mA. La stimulation est continue pour une session de 60 à 90 minutes, 5 jours pas semaine [9] . Mots-clés : vessie neurologique, stimulation électrique, sondage intermittent, rétention chronique d’urines, traumatisme médullaire, vessie aréflectique INTRODUCTION Le patient doit recouvrer des sensations de remplissage vésical lui permettant de déclencher son réflexe mictionnel. La stimulation intra-vésicale par voie trans-uréthrale a pour objectif de permettre une réactivation du réflexe mictionnel pour faciliter la miction chez les patients porteurs d’une vessie hypo-contractile. En se référant au fonctionnement du réflexe mictionnel, il faut se souvenir que le déclenchement de la contraction vésicale normale va être au départ «lance» par les stimulis afférents (sensitifs) dont les récepteurs sont situés dans la paroi vésicale. Ce réflexe est médié par le système parasympathique, acteur de la contraction vésicale et de sa vidange. La première description de stimulation intravésicale est due à Saxtorph [11]. Il insérait une électrode dans la vessie et une électrode de surface abdominale fermait le circuit. L’indication était les vessies atones. L’idée était lancée et n’aura pas grande audience. Reprise par Katona [6, 7], des séances de 1 à 2 heures par jour ont pour objectif autant de réactiver un réflexe mictionnel en aidant le patient à retrouver des «sensations» vésicales qu’à contrôler des contractions non inhibées. La thérapie avait donc un objectif mictionnel par stimulation végétative afférente mais un effet de «modulation» a rapidement été également constaté. Des travaux expérimentaux l’ont démontré ainsi que l’influence de la fréquence du courant (basse fréquence 20 Hz) [2,3]. D’après Madersbacher (NP4) [9] qui a fait la revue récente des publications sur le sujet, la plus grosse partie des publications concerne l’enfant et les patients porteurs de myélomeningocèles. Si les résultats ne sont pas uniformes d’une série à l’autre, la seule série publiée randomisée (NP1) n’a pas été capable de trouver de différence entre groupe stimulé et groupe non traité [1]. Cependant le nombre de sessions a été plus faible que ce qui a été utilisé dans les grosses expériences monocentriques (15 sessions d’électrostimulation au démarrage et à trois mois versus plus de 20 le plus souvent [5]). Kaplan, fervent utilisateur et défenseur de la technique (NP4) [4] plaide en faveur de son utilisation du fait de sa très faible inocuité et de la capacité de nombreux patients à retrouver des sensations vésicales , 13 % seulement ne répondant pas du tout pour un nombre moyen de sessions individuelles de 47. Madersbacher lui-même (NP4) [10] a notablement publié à propos de son expérience autrichienne. Il en ressort que les critères d’utilisation de la thérapie chez l’adulte peuvent être ainsi définis: 540 - Lésion neurologique incomplète avec persistance de fibres afférentes intègres de la vessie au cortex cérébral - Persistance de sensations périnéales dans les dermatomes S3 et S4 - RÉFÉRENCES Valeur positive de la normalité de l’étude des potentiels évoqués à point de départ vésical [8]. 1. L’histoire naturelle des vessies de myéloméningocèles (altération de la paroi vésicale et de ses récepteurs) pourrait expliquer les résultats hétérogènes et discordants. Boone T, Roehrborn C, Hurt G: Transurethral intravesical electrotherapy for neurogenic bladder dysfunction in children with myelodysplasia: a prospective, randomized clinical trial. J Urol, 1992, 148, 550-4. 2. CONCLUSION Jiang C: Modulation of the micturition reflex pathway by vesical electrical stimulation: an experimental study in the rat. Neurourol Urodyn, 1998, 17,5, 543-553. 3. Jiang C, Lindström S, Mazieres L: Segmental inhibitory control of ascending sensory information from bladder mechanoreceptors in cat. Neurourol Urodyn, 1991, 10, 286-288. 4. Kaplan W: Intravesical electrical stimulation of the bladder: Pro. Urology, 2000, 56,1, 2-4. 5. Kaplan W, Richards I: Intravesical bladder stimulation in myelodysplasia. J Urol, 1988, 140,5 (Pt 2), 1282-4. 6. Katona F: Stages of vegetative afferentation in reorganization of bladder control during electrotherapy. Urol Int, 1975, 30, 182-203. 7. Katona F, Eckstein H: Treatment of neuropathic bladder by transurethral electrical stimulation. Lancet, 1974, 7861,7, 780-1. 8. Kiss G, Madersbacher H, Poewe W: Cortical evoked potentials of the vesicourethral junction—a predictor for the outcome of intravesical electrostimulation in patients with sensory and motor detrusor dysfunction. World J Urol, 1998, 16,5, 308-12. 9. Madersbacher H. Intravesical electrical stimulation of the bladder. In: Textbook of the neurogenic bladder adults and children. Edited by Corcos J, Schick E. London: Martin Dunitz Ltd., 2004, 551-5. Cette technique a de grandes difficultés à s’installer dans l’arsenal thérapeutique neuro-urologique. L’absence d’industriel assurant la promotion d’un matériel adapté en est peut être pour partie responsable. Cela n’est pas la seule raison. Les résultats cliniques discordants, et dont l’évaluation n’a jamais été poussée à son maximum, restent décevants. Une nouvelle étude contre placebo serait réellement nécessaire. L’expérience surtout pédiatrique trouve peu de justification à l’âge adulte du fait des facilités, notamment françaises, d’accès à l’autosondage. Cette technique nécessite des sondages réguliers et impose des contraintes de durée quotidienne de la période de stimulation (90 minutes environ). Au total, si le concept est intéressant sur le plan physiologique, ses applications actuelles en France paraissent peu évidentes. CE QU’IL FAUT RETENIR 10. Madersbacher H, Pauer W, Reiner E, Hetzel H, Spanudakis S: Rehabilitation of micturition in patients with incomplete spinal cord lesions by transurethral electrostimulation of the bladder. Eur Urol, 1982, 8,2, 111-6. 1 L’électrostimulation intravésicale est capable d’améliorer la fonction des vessies neurologiques en améliorant la perception du contrôle de la miction. 11. Saxtorph M: Stricture urethrae, fistula perinee, retentio urinae. Clinisk Chirurgi Copenhagen Gyldenldalske Fortlag, 1887, 265-280. 2 L’électrostimulation intravésicale est une technique en neuro-urologie qui a la capacité d’induire ou d’améliorer le réflexe mictionnel chez des patients aux lésions incomplètes du système nerveux central ou périphérique. ____________________ 3 L’indication idéale serait la vessie neurologique hypoactive, hypoesthésique et hypocontractile. SUMMARY 4 En France ce traitement n’a pas de place dans l’arsenal thérapeutique. Intravesical electrostimulation The intravesical electrostimulation technique is designed to induce a voiding bladder contraction by direct stimulation as an immediate objective and for bladder retraining. This technique appears to be truly effective and is primarily used in paediatric neurourology. It is not widely used at the present time due to the low level of proof of its efficacy and intermittent self-catheterization still remains the treatment of choice in France for neurogenic chronic urinary retention. Key-Words: neurogenic bladder, electrical stimulation, clean intermittent self-catheterization, chronic urinary retention, spinal cord injury, underactive bladder 541