Cours d’initiation `a la physique quantique
MODULE III
M´ecanique Quantique et Relativit´e Restreinte:
Derni`ere ´etape sur la route vers
la Th´eorie Quantique des Champs Relativistes
et
le Mod`ele Standard des Interactions Fondamentales
Jan Govaerts
Center for Particle Physics and Phenomenology (CP3)
Institut de Physique Nucl´eaire, Universit´e catholique de Louvain
2, Chemin du Cyclotron, B-1348 Louvain-la-Neuve, Belgique
Jan.Govaerts@fynu.ucl.ac.be
Ann´ee 2007–2008
Table des mati`eres
1 Introduction 1
2 Particules et Champs 4
2.1 L’oscillateur harmonique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5
2.2 Particules relativistes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
2.3 Le champ scalaire r´eel relativiste . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11
2.4 Particules scalaires charg´ees . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
2.5 Particules relativistes de spin non nul . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
2.6 Particulesdespin1.................................. 22
2.7 Particules de spin 1/2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24
3 Sym´etries et Interactions 31
3.1 L’´electrodynamique quantique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
3.2 D´eriv´ee covariante . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
3.3 Invariance de jauge non ab´elienne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36
3.4 Brisure spontan´ee d’une sym´etrie globale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 40
3.5 Brisure spontan´ee d’une sym´etrie locale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45
4 Le Mod`ele Standard 47
4.1 Groupe de jauge et champs de mati`ere . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
4.2 Le Lagrangien du Mod`ele Standard Minimal . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
4.3 M´ecanisme de Higgs et bosons de jauge . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 52
4.4 Spectrefermionique.................................. 54
4.5 Courants neutres et charg´es . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
4.6 Quelques remarques additionnelles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 62
G´en´erations Q
νeνµντ0
(<2 eV/c2) (<190 keV/c2) (<18 MeV/c2)
Leptons
eµτ1
(511 keV/c2) (106 MeV/c2) (1.78 GeV/c2)
u c t +2/3
(5 MeV/c2) (1.6 GeV/c2) (174 GeV/c2)
Quarks
d s b 1/3
(10 MeV/c2) (150 MeV/c2) (4.3 GeV/c2)
Tableau 1: Les leptons et quarks, constituants fondamentaux de la mati`ere, et les valeurs de
leurs masses et de leurs charges ´electriques.
1 Introduction
Ces notes pr´esentent un bref tour d’horizon du cadre conceptuel du Mod`ele Standard des
particules ´el´ementaires et de leurs interactions fondamentales.
Depuis l’Antiquit´e, la compr´ehension de la structure ultime de la mati`ere a toujours ´et´e
l’une des motivations fondamentales pour le physicien dans son exploration de l’univers que nous
habitons. C’est avec le tableau p´eriodique des ´el´ements chimiques de Mendeleev et l’hypoth`ese
atomistique, toutes deux propos´ees au XIXi`eme si`ecle dans le contexte de la m´ethodologie
scientifique, que nous pouvons sans doute situer les d´ebuts d’une recherche exp´erimentale
syst´ematique de l’“infiniment petit”. Aujourd’hui, cette quˆete encore toujours aussi f´econde de
ses succ`es r´ep´et´es, trouve son expression fondamentale en terme des six quarks et six leptons
identifi´es dans la nature. De la mˆeme mani`ere que l’´electron, le proton et le neutron ´etaient
consid´er´es jusqu’il y a peu comme les trois seuls constituants fondamentaux de toute la mati`ere,
aujourd’hui ce rˆole est jou´e par trois autres types de particules, en l’occurrence l’´electron eet
les deux quarks uet d, et au travers de leurs interactions ces particules sont `a la base de toute
la mati`ere qui nous entoure et dont nous sommes faits. Ce n’est qu’`a plus hautes ´energies que
l’existence des autres quarks et leptons peut ˆetre mise en ´evidence.
La liste de ces particules ´el´ementaires est dress´ee dans la Table 1. Dans cette Table sont
´egalement indiqu´ees les valeurs (ou limites sup´erieures dans le cas des neutrinos) des masses de
ces particules, poss´edant toutes un spin 1/2. De plus, leurs charges ´electriques normalis´ees `a
la charge ´electrique du proton sont donn´ees dans la colonne de droite.
La structure de la Table 1 indique comment ces six quarks et six leptons sont organis´es en
trois g´en´erations de particules poss´edant essentiellement des propri´et´es identiques, `a l’exception
des valeurs de leurs masses. L’existence de telles g´en´erations, et de seulement trois d’entres
elles, est l’une des nombreuses questions pos´ees par la description que nous avons aujourd’hui
de ces particules et de leurs interactions. Cette description est celle du “Mod`ele Standard”,
1
c’est-`a-dire le cadre conceptuel et th´eorique devenu le standard par rapport auquel toutes les
exp´eriences et ´elaborations de projets exp´erimentaux sont analys´ees. L’objet de ces notes est
de pr´esenter une br`eve introduction `a la construction du Mod`ele Standard, et `a quelques-unes
de ses cons´equences ph´enom´enologiques les plus imm´ediates, de mani`ere `a en souligner tout au
moins les points essentiels et fondamentalement ´el´egants, et ainsi servir le cas ´ech´eant de point
de d´epart `a une ´etude en profondeur de la physique de la structure fondamentale de la mati`ere.
De par la nature de ces notes, il n’est ´evidemment pas possible de donner une discussion
d´etaill´ee ni des diverses cons´equences ph´enom´enologiques fondamentales du Mod`ele Standard,
ni d’ailleurs des outils math´ematiques n´ecessaires `a la mise en place du Mod`ele Standard. Ainsi
`a titre d’illustration, seuls les quarks participent aux interactions fortes en raison de leur degr´e
de libert´e de couleur. Cette interaction est caract´eris´ee par la propri´et´e du confinement de
ce degr´e de libert´e, conduisant ainsi aux m´esons´etats li´es d’un quark et d’un antiquark—et
aux baryons´etats li´es de trois quarks. Or, ces divers ´etats hadroniques s’organisent dans
des repr´esentations sp´ecifiques des groupes de sym´etries approximatives de saveur, `a savoir la
sym´etrie d’isospin SU(2)Fou la sym´etrie SU(3)F. L’existence de ces sym´etries approximatives
est possible de par ce que les masses des quarks u,det ssont petites en comparaison de
l’´echelle des interactions fortes1, typiquement la masse des nucl´eons ou la masse du m´eson
vectoriel ρ(Mρ=770 MeV/c2). Cependant, ces sym´etries approximatives de saveur sont en
fait encore plus larges, sous la forme des sym´etries de l’alg`ebre des courants associ´ees aux deux
´etats de chiralit´e possibles des quarks, soit la sym´etrie SU(2)L×SU(2)R×U(1)Bdans le cas
de deux saveurs de quarks de masse nulle, ou encore la sym´etrie SU(3)L×SU(3)R×U(1)B
dans le cas de trois saveurs de quarks de masses nulles. Ces sym´etries chirales ne sont pas
explicitement ealis´ees dans le spectre de la th´eorie, mais sont dynamiquement bris´ees par la
structure du vide—c’est-`a-dire l’´etat d’´energie minimale—avec pour cons´equences, en raison
de ces sym´etries eme approximatives, d’une part l’existence de bosons pseudo-scalaires de
faible masse en comparaison `a l’´echelle typique des interactions fortes, `a savoir les pions, les
kaons et le η, et d’autre part une justification a posteriori de l’hypoth`ese de PCAC. Or, la
dynamique des interactions fortes entre quarks, telle que d´ecrite en terme du Lagrangien de
la chromodynamique quantique, poss`ede ces sym´etries de mani`ere explicite, constituant ainsi
l’une des nombreuses raisons pour lesquelles cette th´eorie fournit certainement la description
correcte des interactions fortes, bien qu’il ne soit pas possible `a l’heure actuelle de faire des
pr´edictions etaill´ees dans le egime non perturbatif de cette th´eorie, except´e par simulations
num´eriques pour quelques observables hadroniques statiques, mais certainement pas pour les
collisions d’ions lourds par exemple.
Cet exemple est mentionn´e ici afin d’indiquer que de nombreux aspects fondamentaux du
Mod`ele Standard ne seront pas mˆeme effleur´es dans ces notes. Avant tout, l’accent est mis sur
le secteur des interactions ´electrofaibles telles que d´ecrites dans le cadre de ce mod`ele. Avec
pour vis´ee premi`ere une compr´ehension du m´ecanisme de Higgs `a l’origine des masses de toutes
les particules tel que le Mod`ele Standard en rend compte.
Jusqu’ici, nous avons rappel´e quelle est la connaissance actuelle que nous avons de la
structure fondamentale de la mati`ere en terme des quarks et leptons. Il convient ´egalement
de consid´erer les interactions fondamentales agissant entre ces diverses particules ´el´ementaires.
Aujourd’hui, toutes ces interactions, au nombre de quatre, sont comprises comme ´etant dues
`a l’´echange entre les quarks et leptons de particules de spin entier, des bosons interm´ediaires,
1C’est pour cette raison que les effets de brisure explicite de la sym´etrie d’isospin sont moins importants que
ceux de la brisure de la sym´etrie SU(3)F, puisque la masse du quark sest plus grande que celles des quarks u
et d, mais ces trois types de masses restant malgr´e tout nettement plus petites que l’´echelle d’´energie typique
des interactions fortes, `a savoir essentiellement la masse du proton, mp938 MeV/c2. De plus, les charges
´electriques non nulles des quarks elles-aussi contribuent aux effets de brisure explicite des sym´etries de saveur.
2
s’aerant ˆetre en fait des bosons de jauge associ´es soit `a une sym´etrie interne ou soit `a une
sym´etrie de l’espace-temps, ces sym´etries ´etant r´ealis´ees localement en chaque point de l’espace-
temps et ´etant caract´eristiques de l’interaction correspondante.
Ainsi, par ordre d’intensit´e d´ecroissante, nous avons tout d’abord l’interaction forte en-
tre quarks, d´ecrite par la th´eorie de la chromodynamique quantique, c’est-`a-dire la dynamique
du degr´e de libert´e de couleur. Cette interaction est engendr´ee par l’´echange de huits types
de gluons de spin unit´e, de masse nulle mais confin´es, se couplant `a la charge de couleur des
quarks. Le groupe de sym´etrie associ´e est SU(3)C, dont la th´eorie de jauge est renormalis-
able, et poss`ede la propri´et´e remarquable de la libert´e asymptotique, c’est-`a-dire que l’intensit´e
de cette interaction d´ecroˆıt lorsque l’´energie transf´er´ee augmente permettant ainsi d’´etudier
cette th´eorie dans un egime perturbatif `a hautes ´energies. A basses ´energies cependant, en
raison du confinement et du r´egime non-perturbatif de la th´eorie, il devient difficile d’´etudier
les propri´et´es du spectre hadronique auquel elle conduit. Ce spectre, outre les m´esons et
baryons ej`a mentionn´es, doit ´egalement compter des ´etats li´es de quarks et de gluons en
des m´esons et baryons hybrides ou des glueballs, dont l’existence semble finalement se con-
firmer exp´erimentalement. N´eanmoins, il existe des approches ph´enom´enologiques effectives
d’application `a basses ´energies pour les interactions fortes, constituant ainsi le domaine de la
physique nucl´eaire, pour lesquelles des r´ealisations non lin´eaires des sym´etries chirales men-
tionn´ees plus haut permettent une ´evaluation pr´ecise de divers processus physiques impliquant
les pions par exemple.
Ces derni`eres ann´ees ont ´egalement vu des tentatives d’approches non perturbatives origi-
nales apparaˆıtre, inspir´ees par des d´eveloppement fascinants trouvant leur origine dans certaines
propri´et´es physico-math´ematiques de la th´eorie Mdes supercordes `a 11 dimensions d’espace-
temps, dont aucun mot ne sera ´evoqu´e ici.
L’interaction ´electromagn´etique est d´ecrite par la th´eorie de l’´electrodynamique quantique
dans laquelle le photon, γ, boson interm´ediaire de cette interaction, couple `a la charge ´electrique
des quarks et leptons. Ce photon est de masse nulle et de spin unit´e, et est associ´e `a la sym´etrie
locale U(1) de phase des champs d´ecrivant les particules ´el´ementaires. Les manifestations
physiques de cette interaction sont nombreuses, qu’il n’est certes pas n´ecessaire de rappeler ici.
Ensuite, nous avons l’interaction faible qui aujourd’hui, dans le contexte du Mod`ele Stan-
dard, est d’une certaine mani`ere unifi´ee mais non compl`etement `a l’interaction ´electromagn´eti-
que. L’interaction faible est responsable, par exemple, de la d´esint´egration βdu neutron,
np+e+νe,(1)
de la d´esint´egration du muon,
µe+νe+νµ,(2)
ou encore de la d´esinegration du pion charg´e,
πµ+νµ.(3)
Le fait que ce soit la mˆeme interaction qui est responsable de ces divers processus de d´esin-
t´egration est en soi d´ej`a remarquable, et correspond `a l’universalit´e de l’interaction faible,
une propri´et´e inclue dans la construction du Mod`ele Standard. Les interactions ´electrofaibles,
outre l’interaction ´electromagn´etique, sont dues d’une part `a l’´echange de bosons charg´es W±
ayant un spin unit´e et une masse d’environ 80.40 GeV/c2, conduisant aux courants charg´es,
et d’autre part `a l’´echange d’un boson neutre Z0ayant ´egalement un spin unit´e et une masse
d’environ 91.19 GeV/c2, conduisant aux courants neutres. Outre ces bosons massifs, la th´eorie
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