
étude de cas
La Dre Diane Thériault
est rhumatologue à
l’Hôpital général de
Dartmouth, Dartmouth,
Nouvelle-Écosse.
Monsieur S. P., 67 ans, est mince et souffre d’une maladie pulmonaire
obstructive chronique (MPOC). Depuis plusieurs années, il est traité
seulement par des corticostéroïdes (CS) inhalés et des bronchodilatateurs,
et ses symptômes se sont aggravés progressivement. L’an dernier, deux poussées
de MPOC ont motivé deux visites au service des urgences; le patient a reçu de
la prednisone orale en dose décroissante pendant deux semaines. La prise de
prednisone à dose faible (5 mg par jour) est envisagée.
Monsieur P. a fumé un paquet de cigarettes par jour pendant des années, mais
il a cessé de fumer il y a cinq ans. Il boit trois grands verres de lait par jour et ne prend
aucun supplément. La marche l’essouffle et le patient sort rarement. L’examen
met en évidence une cyphose légère. Une radiographie thoracique récente révèle
un amincissement d’environ 50 % de la partie antérieure de la vertèbre en T7.
Commentaires de la Dre Diane Thériault : L’ostéo-
porose s’observe souvent dans la MPOC. Chez ces patients,
la densité minérale osseuse (DMO) est souvent plus basse
que chez des sujets en santé du même sexe et du même âge1,2.
Selon une étude menée auprès d’hommes souffrant de
MPOC, le risque d’ostéoporose (selon cette étude,
cote T < –2,5 aux vertèbres ou à la hanche) était quatre
fois plus élevé que chez les sujets témoins dans une
population n’ayant jamais reçu de CS; ce risque était
neuf fois plus élevé chez ceux qui avaient reçu un traite-
ment par des CS (inhalés ou oraux)3.
Les taux de fractures, notamment des vertèbres thora-
ciques (12 % à 63 %), chez les patients souffrant de MPOC
sont plus préoccupants2,4-8. La plupart sont asymptomatiques
et décelées seulement à la radiographie. Les autres fractures
courantes touchent la hanche, les côtes et le sternum9.
Bien que les fractures vertébrales soient plus fréquentes
chez les sujets atteints d’une MPOC qui prennent des
CS oraux, le taux reste élevé chez ceux qui n’ont jamais
pris de CS4. Les données sur les fractures chez les patients
traités par des CS inhalés varient et sont souvent faussées
par les effets défavorables de la MPOC sur les os10,11.
Comme dans le cas de Monsieur P., le mot « fracture »
apparaît rarement dans les rapports de radiographie des
fractures vertébrales. Les radiologistes parlent souvent
d’un amincissement du corps vertébral ou de la réduction
de la hauteur vertébrale. Ces expressions signifient en fait
qu’il y a fracture vertébrale, tout comme les termes de
compression, d’écrasement des vertèbres. L’Association
canadienne des radiologistes vient de publier des lignes
directrices pour la présentation des rapports de radiographie
des fractures vertébrales; on prévoit que ces rapports
seront désormais plus clairs12.
Parmi les facteurs qui contribuent à accroître le risque
de fractures chez les sujets atteints de MPOC, on note :
prise de CS par voie orale;•
Tenir compte de l’ostéoporose
dans le plan de traitement de la MPOC
effets de la MPOC (cytokines pro-inflammatoires,
en particulier le TNF-α);
âge;
tabagisme;
malnutrition ou IMC bas;
abus d’alcool dans le cas de certains patients;
inactivité physique et tendance aux chutes;
déficit en vitamine D (aggravé par le peu de temps
passé à l’extérieur);
hypogonadisme (fréquent dans les maladies chroniques).
Effets de l’ostéoporose sur la fonction pulmonaire
La cyphose (signe d’effondrement vertébral) causée par
l’ostéoporose modifie la forme de la cage thoracique et
pourrait influer indirectement sur la fonction pulmonaire.
Chez les sujets atteints d’ostéoporose et d’une pneumo-
pathie primitive, ceux qui avaient subi une fracture tho-
racique manifestaient un déclin statistiquement significatif
de la capacité vitale13-16. Ce phénomène s’expliquerait
par l’effet combiné de la cyphose et de la réduction de la
taille. La mobilité réduite de la cage thoracique s’observe
aussi dans la cyphose16 et elle nuirait aussi à la ventilation.
Lorsque la fonction pulmonaire est compromise, les
moindres changements de la capacité vitale et de la
mobilité costale risquent d’avoir une incidence clinique.
Harrison et coll. ont examiné cette question récemment17.
Les résultats des épreuves de la fonction pulmonaire
sont standardisés pour une stature normale. Chez les patients
affichant une cyphose et une perte de taille importante,
on risque de surestimer la fonction pulmonaire si la taille
mesurée en position debout sert de paramètre. On pourrait
utiliser la taille qu’avait le sujet à l’âge de 25 ans14 ou l’en-
vergure des bras13 pour une évaluation plus juste.
Lacunes en matière de diagnostic
Le diagnostic précoce et le traitement de l’ostéoporose
doivent faire partie du plan de traitement usuel des MPOC,
mais on néglige souvent les anomalies squelettiques,
signes d’une ostéoporose asymptomatique, au profit de
la maîtrise des symptômes respiratoires. Une analyse récente
portant sur des patients hospitalisés atteints de MPOC5
a montré que moins de 20 % des patients qui avaient subi
une fracture vertébrale visible à la radiographie thoracique
de profil avaient vu noter cette fracture dans le rapport
de radiographie; seulement 18,5 % porteurs d’une MPOC
et d’une fracture vertébrale ont reçu un traitement anti-
ostéoporose à leur départ de l’hôpital (calcium ± vitamine D,
HTS, raloxifène, bisphosphonates ou calcitonine).
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le point sur l’ostéoporose printemps/été 2007 3