Le médecin rédacteur de rapports: du secret professionel à la

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CHAPITRE 7
Le médecin rédacteur de
rapports: du secret professionnel
à la facturation
7.1. Secret médical (secret professionnel,
secret du patient)
A l’instar des hommes de loi et des ecclésiastiques, les professionnels de la
santé sont liés par le secret professionnel. Le devoir de garder le secret
concerne tout ce dont les médecins ont eu connaissance ou qu’on leur a confié
dans l’exercice de leur profession. Un médecin a le droit de donner des ren-
seignements à des tiers lorsqu’il dispose du consentement du patient, qu’une
loi le prévoit ou que l’autorité cantonale l’a délié du secret professionnel.
La notion traditionnelle de «secret médical» est légitime. Elle fait prendre
conscience du fait que l’exercice de la profession de médecin n’est possible que
si les médecins sont en mesure de garantir la confidentialité. Quiconque met en
jeu le secret médical prive le patient de la possibilité de se confier sans arrière-
pensée à son médecin et réduit ainsi à néant la profession médicale. La notion
de «secret des patients» souligne que l’enjeu est la protection des droits de la per-
sonnalité des patients. Cette perspective est, elle aussi, pertinente. Tout dépend
du contexte. La loi règle la notion de «secret professionnel médical» à l’art. 321
du Code pénal suisse (cf. encadré).
L’obligation de garder le secret concerne tout ce qui a été confié aux médecins
«en vertu de leur profession ou dont ils ont eu connaissance dans l’exercice de
celle-ci»: le secret est donc ce que les patients ou leurs proches ont confié au
médecin, mais aussi tout ce que ce dernier apprend et effectue lui-même dans le
cadre de son activité, tels que résultats d’examen, diagnostics et traitements qui
en découlent.
De nombreux patients paient eux-mêmes les notes d’honoraires de leur méde-
cin, soit en raison d’une franchise annuelle élevée soit pour des motifs de confi-
dentialité particuliers, notamment professionnels ou familiaux. Par ailleurs, si la
caisse-maladie souhaite poser des questions en ligne à un cabinet médical, elle
doit aussi solliciter pour ce faire l’accord du patient, car ainsi elle sait d’entrée de
cause quel patient est traité par quel médecin.
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Le patient est également en droit de décider s’il souhaite présenter sa carte d’as-
suré ou s’il s’accommode du fait que sa caisse exige le cas échéant des frais de dos-
sier parce que le numéro AVS et le numéro de sa carte d’assuré ne figurent pas sur
la facture.
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L’obligation légale de la caisse de verser sa prestation ne dépend pas
du fait que le numéro AVS et le numéro de la carte d’assuré figurent sur la facture.
Même si le médecin confie des analyses à un laboratoire externe et si celui-ci
facture selon le système du tiers payant, le médecin doit au préalable demander
au patient s’il accepte le système de facturation du tiers payant ou s’il souhaite
que la facture lui soit adressée à titre personnel. La FMH est d’avis que l’activité
d’expert médical fait aussi partie de l’«exercice» de la profession médicale et que
cette activité est donc également soumise au devoir de garder le secret du patient
(cf. chap. 8.1): même quand ils établissent des expertises uniquement sur la base
de dossiers sans voir les patients concernés, les médecins n’ont pas le droit, par
exemple, de communiquer leur rapport aux médias.
Par contre, des faits généralement connus ou qui sont de notoriété publique ne
sont pas concernés par le secret médical, même si le médecin en a pris connais-
sance dans l’exercice de sa profession.
Outre les médecins, le personnel travaillant dans un cabinet médical ou un hôpi-
tal est également astreint au secret des patients. Les médecins doivent expressé-
ment attirer l’attention de leur personnel sur ce devoir.
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169 Art. 10 al.2 OCA: «Si [la personne assurée] ne présente pas sa carte d’assuré et qu’elle
occasionne de ce fait des dépenses supplémentaires lors du remboursement des prestations,
l’assureur peut prélever un émolument approprié.»
170 Art. 11 al.2 du Code de déontologie de la FMH: «Le médecin instruit ses collaboratrices et
colla borateurs ainsi que toutes les personnes qui ont accès à des informations touchant
son cabinet médical de leurs obligations en matière de secret, en demandant, dans la mesure
du possible, de s’engager par écrit.»
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Le secret professionnel selon les termes de la loi
Code pénal, article 321
1. Les ecclésiastiques, avocats, défenseurs en justice, notaires, contrôleurs astreints
au secret professionnel en vertu du code des obligations, médecins, dentistes,
pharmaciens, sages-femmes, ainsi que leurs auxiliaires, qui auront révélé un secret
qui leur a été confié en vertu de leur profession ou dont ils avaient eu connaissance
dans l’exercice de celle-ci, seront, sur plainte, punis d’une peine privative de liberté
de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire. Seront punis de la même peine les
étudiants qui auront révélé un secret dont ils avaient eu connaissance à l’occasion
de leurs études. La révélation demeure punissable alors même que le détenteur
du secret n’exerce plus sa profession ou qu’il a achevé ses études.
2. La révélation ne sera pas punissable si elle a été faite avec le consentement de
l’intéressé ou si, sur la proposition du détenteur du secret, l’autorité supérieure
ou l’autorité de surveillance l’a autorisée par écrit.
3. Demeurent réservées les dispositions de la législation fédérale et cantonale sta-
tuant une obligation de renseigner une autorité ou de témoigner en justice.
La communication d’une information soumise au secret médical est autorisée
aux quatre conditions suivantes:
1. consentement du patient;
2. dérogation prévue dans une loi fédérale ou cantonale;
3. levée du secret médical par l’autorité cantonale compétente;
4. état de nécessité imminent selon les art. 17 s et 48a du Code pénal.
Ces quatre motifs justificatifs sont brièvement expliqués ci-après.
Communication d’informations sur la base du consentement du patient
La communication d’informations sur la base du consentement du patient consti-
tue le cas normal. Les règles du «consentement éclairé» sont applicables en l’oc-
currence. Pour que le consentement soit valable, le patient doit savoir de façon
suffisante quelles informations le médecin communiquera à des tiers. Ce consen-
tement peut être obtenu par écrit, par oral, mais il peut aussi être tacite, voire pré-
sumé. Néanmoins, pour éviter tout malentendu, le médecin ne devrait s’appuyer
sur un consentement tacite ou présumé qu’en cas d’urgence (cf. chap. 4.3.). Si
le patient délie son médecin du secret professionnel en vue d’une déclaration à
titre de témoin devant un tribunal, le CPC et le CPP obligent alors le médecin à
témoigner, à moins que celui-ci ne rende «vraisemblable que l’intérêt du maître
au maintien du secret l’emporte sur l’intérêt à la manifestation de la vérité»
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.
171 Art. 166 al. 2 du Code de procédure civile et art. 171 al. 3 du Code de procédure pénale.
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Le secret médical s’applique également à ses proches: il est judicieux de tou-
jours demander aux patients quels sont les membres de leur famille qui peuvent
ou doivent être informés, le cas échéant, sur leur état de santé. En revanche, les
parents d’enfants incapables de discernement disposent d’un droit légal d’infor-
mation sur les questions de santé touchant leur enfant (y compris le parent qui
n’a pas l’autorité parentale). Toutefois, si l’enfant ou le jeune est capable de dis-
cernement au sujet de son traitement (cf. chap. 4.3.), le secret médical doit être
respecté.
Le médecin est certes autorisé à donner des renseignements par téléphone, mais
il doit s’assurer dans toute la mesure du possible qu’il ne renseigne que des per-
sonnes ayant droit à ces informations. Si l’on ne peut pas reconnaître avec certi-
tude la personne au bout du fil d’après la voix, on devrait demander le numéro
de téléphone, le vérifier puis rappeler.
En cas de facturation effectuée par un tiers (caisse de médecins ou autre organisa-
tion de facturation), le cabinet médical doit informer ce dernier de chaque pres-
tation fournie. Etant donné que les positions tarifaires indiquées permettent à
un spécialiste du domaine de se faire une idée de l’étendue du traitement, il est
impor tant de communiquer d’emblée aux patients quelle est l’instance chargée
de la facturation externe. Si cela crée un problème, une autre solution pourra être
cherchée avec le patient concerné.
Communication d’information sur la base de dispositions légales
déliant le médecin du secret professionnel
Même lorsqu’il est probable ou explicite que le patient ne le veut pas, les méde-
cins ont le droit ou même le devoir d’informer des tiers dans des cas précis (cf.
chap. 7.3.). Ainsi, toutes les lois sur l’assurance sociale contiennent des disposi-
tions autorisant et contraignant les médecins à fournir à l’assurance les informa-
tions dont elle a besoin pour remplir les tâches que lui confie la loi. Dans le cas
de l’assurance-maladie, le consentement du patient est toutefois déterminant
car ce dernier peut décider de payer lui-même son traitement. Dans un tel cas, la
caisse-maladie ne doit rien apprendre du médecin.
Levée du secret médical par l’autorité cantonale compétente
Si une information doit être transmise alors que le patient n’y consent pas, le méde-
cin peut demander à l’autorité cantonale concernée, généralement la direction can-
tonale de la santé publique, de le délier du secret professionnel. Certains cantons
ont institué des commissions spéciales à cet effet. Il est recommandé de discuter
auparavant brièvement du cas par téléphone avec le médecin cantonal ou le ser-
vice juridique de la direction de la santé publique sans indiquer le nom du patient
ni livrer d’autres informations qui permettraient de l’identifier.
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