La Lettre du Pharmacologue • Vol. 30 - n° 3-4 - juillet-décembre 2016 | 87
Points forts
10 000 patientes/ an était de 8 cas supplémen-
taires de cancer du sein (2). Dans l’étude MWS, les
patientes sous THM avaient un risque plus élevé de
développer un cancer du sein que les non-utilisatrices
(RR = 1,66 ; IC95 : 1,58-1,75), et une surmortalité
par cancer du sein (RR = 1,22, IC95 : 1,00-1,48) [3].
L’étude EPIC retrouvait un RR à 1,2 (IC95 : 1,1-1,4) [5].
◆Le surrisque de cancer sous THM semble lié
aux progestatifs
Les différentes études mettent en évidence des
RR plus élevés pour les THM combinés associant
estrogènes et progestatifs que pour les estrogènes
seuls, comme illustré dans le tableau.
L’étude E3N a analysé de façon plus précise le risque
en fonction du type de progestatifs : progestatifs de
synthèse ou progestérone micronisée. Le MPA est un
progestatif de synthèse qui possède une action gluco-
corticoïde, exerce in vitro un effet antiandrogénique
sur les cellules épithéliales mammaires (12) et stimule
la prolifération cellulaire (13). C’est ce progestatif
qui a été utilisé dans l’étude randomisée WHI et en
grande partie dans l’étude MWS. L’étude française E3N
comportait en majorité des patientes sous progesté-
rone micronisée et dydrogestérone, ce qui explique
probablement les différences de RR observées (14).
L’étude MWS montre un surrisque quelle que soit
la voie d’administration des estrogènes (orale
RR = 1,32 ; IC95 : 1,21-1,45, transdermique RR = 1,24 ;
IC
95
: 1,11-1,39 et sous-cutanée RR = 1,65 ; IC
95
:
1,26-2,16) et quel que soit le schéma (séquentiel
RR = 2,12 ; IC95 : 1,95-2,30 et combiné RR = 2,40 ;
IC95 : 2,5-2,67) [3].
En association avec les estrogènes, la progestérone
micronisée semble ne pas augmenter le risque
de cancer du sein à la différence des progestatifs
de synthèse. Les études ne permettent pas de
conclure sur les risques en fonction de la voie
d’administration des estrogènes et des schémas
continus ou séquentiels.
Un démarrage précoce du THM
après le début de la ménopause
semble associé à un risque accru
L’étude WHI a retrouvé une augmentation du
risque de cancer du sein sous THM lorsque celui-ci
était mis en place tôt (< 5 ans HR = 1,77 ; IC95 :
1,07-2,93) par rapport à un début plus tardif
(> 5 ans HR = 0,99 ; IC
95
: 0,74-1,31) [15]. L’étude
E3N a également mis en évidence une augmenta-
tion du risque lorsque le délai entre la ménopause
et la prise du traitement était inférieur ou égal
à 3 ans (HR = 1,54 ; IC95 : 1,28-1,86) par rapport
à un délai supérieur à 3 ans (HR = 1,00 ; IC95 :
0,68-1,47), mais uniquement lorsque les durées
de traitement étaient courtes (≤ 2 ans). Cette
différence n’était pas retrouvée pour les patientes
ayant reçu des estrogènes seuls ou une asso-
ciation estrogènes-progestérone micronisée (16).
L’étude MWS retrouve les mêmes résultats pour
les THM estroprogestatifs : RR = 1,53 ; IC
95
:
1,38-1,69 pour une initiation tardive (> 5 ans)
et RR = 2,04 ; IC
95
: 1,97-2,12 pour une initiation
précoce (< 5 ans) [17].
»
Cancer du sein : le surrisque de cancer du sein sous traitement hormonal de la ménopause (THM)
semble lié aux progestatifs. En association avec les estrogènes, la progestérone micronisée ne paraît
pas augmenter le risque de cancer du sein, à la différence des progestatifs de synthèse. Une instauration
précoce du traitement après le début de la ménopause (<5ans) semble associée à un risque accru, et le
risque est d’autant plus important que la durée de traitement est longue.
»Cancer de l’endomètre : le THM combiné, tout type de progestatif inclus, diminue le risque de ce cancer.
La progestérone micronisée ne permet pas de compenser les estrogènes et entraîne une augmentation du
risque de cancer de l’endomètre. Le traitement continu réduit le risque par rapport à un traitement séquentiel.
»
Autres cancers : le THM entraîne une augmentation du risque de cancer de l’ovaire. Ce risque ne semble
pas modifié par les caractéristiques du produit.
»Une durée de traitement supérieure à 5ans est associée à un risque accru de cancer.
Mots-clés
Traitements
hormonaux
delaménopause
Cancer
Sein
Ovaire
Endomètre
Côlon
Highlights
»
Breast cancer: the excess
risk of breast cancer in HT
seems bound with progestin.
In combination with estrogen,
micronized progesterone does
not appear to increase the
risk of breast cancer, unlike
synthetic progestins. Early
initiation of treatment after the
onset of menopause (<5years)
seems to be associated with
an increased risk, and risk is
even more important that the
processing time is long.
»
Endometrial cancer:
combined HT, included all
type of progestin decreases
the risk of endometrial cancer.
Micronized progesterone does
not compensate for estrogen
and causes an increased risk
of endometrial cancer. Contin-
uous treatment reduces the risk
versus sequential treatment.
»
Other cancers: HT causes
an increased risk of ovarian
cancer. This risk does not
seem to change by the product
characteristics. Aduration of
treatment greater than 5years
is associated with an increased
risk of cancer.
Keywords
Menopausal hormone
therapy
Cancer
Breast
Ovarian
Endometrial
Colorectal
Tableau. Augmentation du risque du cancer du sein en fonction du THM dans les principales études (RR et IC95).
Estrogènes seuls Traitement combiné estrogènes +progestatifs
Étude WHI RR = 0,77 (0,59-1,01) [11] RR = 1, 26 (1,00-1,59) [2]
Étude MWS
(3)
RR = 1,30 (1,21-1,40) RR = 2,00 (1,88-2,12)
Étude EPIC
(5)
RR = 1,42 (1,23-1,64) RR = 1,77 (1,40-2,24)
Étude E3N
(4)
RR = 1,1 (0,8-1,6) Si progestatifs de synthèse : RR = 1,4 (1,2-1,7)
Si progestérone micronisée : RR = 0,9 (0,7-1,2)
EPIC :
European Prospective Investigation into Cancer and Nutrition ; MWS : Million Women Study ;
RR : risque relatif ; WHI :
Women’s Health Initiative
.
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