L'apprentissage dans l'approche cognitive
L’approche cognitive de l’apprentissage constitue un élargissement, et parfois une remise en question, du paradigme
cognitiviste «classique » de traitement de l’information. Depuis les années 1990, elle prend en considération
l’inscription corporelle, sociale et historique de la cognition humaine, de même que son caractère distribué entre les
humains et les diverses composantes de l’environnement culturel et matériel.
Les sections suivantes présentent les principales caractéristiques du concept d'apprentissage dans l'approche
cognitive.
Comment définit-on l'apprentissage dans l'approche cognitive? Quelles
sont les principales composantes conceptuelles des définitions courantes
de l'apprentissage ?
Les définitions de l’apprentissage proposées dans les encyclopédies ou dans les manuels en psychologie ou en
sciences de l’éducation décrivent habituellement l’apprentissage comme :
«... toute modification stable des comportements ou des activités psychologiques attribuable à l'expérience du
sujet" (Le Ny, 1990, np) ;
« ... un changement dans le comportement d’un organisme résultant d’une interaction avec le milieu est se
traduisant par un accroissement de son répertoire. (…) tout apprentissage implique évidemment la mémoire
et on pourrait soutenir que l’apprentissage et mémoire se confondent.» (Simon, 1991, p. 49);
« Chez un individu, modification de sa capacité de réaliser une tâche sous l’effet des interactions avec son
environnement. Selon le contexte, le terme désigne le processus ou le résultat du processus. Il est
généralement entendu que la modification consiste en un progrès. Dans les sciences de l’éducation, modalité
d’acquisition des connaissances, des compétences ou des aptitudes.» (George, 1994, p. 58 );
« L’apprentissage, c’est le changement produit dans le comportement ou le potentiel de comportement d’un
sujet dans une situation donnée par la suite d’expériences répétées du sujet dans cette situation, à condition
que ce changement de comportement ne puisse s’expliquer par des tendances innés du sujet, la maturation ou
des états temporaires (ex. fatigue, ivresse, moments d’exaltation » (Bower et Hilgard, 1981, cit. par Goupil et
Lusignan, 1993, p. 9).
Comme la plupart de définitions du concept de l’apprentissage, les quatre exemples de définitions citées plus haut
partagent les idées suivantes :
l’apprentissage est une modification ou un changement constaté chez un « sujet », qui est un être vivant
individuel, animal ou homme. Bien que l’approche cognitive étudie également l’apprentissage à d’autres
niveaux d’analyse, notamment au niveau de la dyade, du groupe ou de l’organisation et s'intéresse à leurs
relations avec l’apprentissage individuel, du point de vue éducatif, on s’entend généralement pour dire que le
sujet de l’apprentissage est une personne humaine. Cette perspective se traduit par des affirmations selon
lesquelles c’est « l’apprenant qui apprend » (sous-entendu: personne ne peut apprendre à sa place, et surtout
pas un enseignant).
l'apprentissage est un "produit" ou un "résultat" de l'expérience mais aussi un « processus » dans lequel
l’expérience joue un rôle clé;
l'expérience est décrite généralement en termes de l’interaction du sujet avec le milieu (physique, social,
culturel, historique, etc.) ;
L'apprentissage dans l'approche cognitive 1
pour être considéré comme relevant de l'apprentissage, le changement ne doit pas résulter principalement ou
uniquement de la maturation biologique ou psychophysiologique de l’organisme. Autrement dit,
l’apprentissage est de l’ordre de l’acquis et non pas de celui de l’inné. Contrairement aux comportements
innés, les comportements appris ne sont pas transmis d’une génération à l’autre par le truchement du code
génétique. L’apprentissage de ces comportements doit donc recommencer à chaque génération et pour
chaque individu. Toutefois, l’apprentissage – et la possibilité même de ce que les individus appartenant à une
même espèce peuvent potentiellement apprendre - dépend inévitablement du bagage génétique de l’espèce.
Les extraordinaires possibilités d'apprentissage qui caractérisent l’espèce humaine la distinguent
profondément des autres espèces animales;
le changement doit être stable, c'est-à-dire perdurer dans le temps et il ne doit pas résulter d’un mécanisme
psychophysiologique tel que la fatigue, le stress, le vieillissement ou de l’action d’une substance extérieure
agissant sur le comportement ou sur le psychisme;
le changement se traduit par un accroissement du répertoire comportemental du sujet ou de ses capacités à
réaliser une tâche, autrement dit le résultat de l’apprentissage est considérée comme un « progrès » dans le
développement du sujet. L’idée de « progrès » souvent considérée comme une « meilleure adaptation » à
l’environnement, implique un jugement sur la « valeur » de ce qui est appris, et indique l’importance de la
dimension éthique et normative du concept d’apprentissage.
Un peu d'histoire : le développement de l'approche cognitive de
l'apprentissage
Les quatre définitions citées plus haut partagent une autre idée importante. Elles décrivent l’apprentissage à la fois
en tant que changement dans le comportement (sous-entendu : phénomène qui peut être observé "publiquement",
en anglais on le qualifie aussi de "overt") et dans l’activité psychologique : mémoire, connaissances, compétences,
attitudes, habiletés, potentiel...) (sous-entendu : phénomène inobservable "publiquement", en anglais qualifié de
"covert").
Ces définitions intègrent donc des deux grands paradigmes de l’étude scientifique de l’apprentissage qui se sont
succédé au XXième siècle : le paradigme béhavioriste et le paradigme cognitif :
le paradigme béhavioriste était centré sur l'étude du comportement observable, excluant les "activités
psychologiques". Il a permis d'élaborer des connaissances sur lesapprentissages élémentaires, dans lesquels
les réponses comportementales sont sous le contrôle des stimuli environnementaux et qui sont réalisés sans
l'intervention de processus de symbolisation liés au langage.
le paradigme cognitif centré sur l'étude du comportement incluant des "activités psychologiques". En fait, ce
paradigme a proposé qu'il est possible d'étudier scientifiquement non seulement le comportement
"observable" mais aussi le comportement "inobservable" car "situé dans la tête" d'un individu. Il est centré
sur l'étude des apprentissages complexes assimilés aux apprentissages "symboliques" car médiatisées par
les processus symboliques liés au langage.
Notes et références
George, C. (1994). Apprentissage. Dans Bloch, H., Chemama, R. Gallo, A., Leconte, P. Le Ny, J-F. et al. (Éd).
Grand dictionnaire de la psychologie (pp. 58-64). Paris : Larousse.
Goupil, G. et Lusignan, G. (1993). Apprentissage et enseignement en milieu scolaire. Montréal : Gaëtan Morin.
L'apprentissage dans l'approche cognitive 2
Le Ny,J.-F. (1990), Apprentissage. Dans Encyclopaedia Universalis, Paris. En ligne (accès payant) :
http://www.universalis.fr/encyclopedie/apprentissage/
Simon, H. (1991). Apprentissage. Dans Doron, R. et Parot, F. (Éd.) Dictionnaire de psychologie.(pp. 49-52). Paris :
PUF.
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