39-42_dossier05_353 24/03/14 15:56 Page 39 Mimer le vivant pour piéger les radionucléides Utilisés ou produits par les centrales électronucléaires, les actinides sont des radionucléides sans aucune fonction biologique connue et sont toxiques à la fois par leurs propriétés chimiques et radiologiques. C’est pourquoi les chimistes élaborent des molécules pour les piéger à l’intérieur de l’organisme et limiter ainsi leur toxicité en cas de contamination suite à une exposition accidentelle. Une des approches utilisées pour éliminer les actinides de l’organisme repose sur des peptides mimant le vivant. © M. AGLIOLO/BSIP les auteurs Pascale Delangle* et Catherine Berthomieu** es peptides sont des molécules qui ressemblent aux protéines présentes dans les organismes vivants. Ils sont constitués des mêmes briques élémentaires – les acides aminés –, liés entre eux par des liaisons amides primaires, dites « peptidiques » (figure p. 40). Il existe 20 acides aminés naturels, qui diffèrent par la nature de leur chaîne latérale. Ces acides aminés donnent naissance à de très nombreuses combinaisons, caractérisées par la grande variété de protéines du vivant. En général, on considère que les peptides possèdent moins de 70 à 80 acides aminés quand les protéines peuvent être beaucoup plus longues. La présence de liaisons peptidiques dans les peptides et les protéines impose des structures tridimensionnelles particulières, maintenues par de nombreuses liaisons hydrogène. Les plus communes sont les structures en hélice α et en feuillet β, mais il existe aussi des structures aléatoires sans réelle organisation tridimensionnelle. L Les peptides sont très utilisés en chimie médicinale car ils présentent de nombreux avantages pour des utilisations in vivo par rapport aux molécules purement synthétiques. Comme les protéines, ils sont solubles dans les fluides biologiques et leur dégradation conduit à des acides aminés biocompatibles, ce qui limite leur toxicité. Des peptides aux séquences bien choisies peuvent mimer la structure des protéines et donc reproduire des interactions moléculaires essentielles dans le vivant, entre deux protéines ou entre des protéines et l’ADN par exemple. Mimer ces interactions permet non seulement d’étudier les mécanismes du vivant mais aussi de bloquer certaines réactions biologiques indésirables, un point crucial pour qui veut mettre au point des médicaments inhibant ces réactions. Les peptides peuvent également piéger – ou chélater – des ions métalliques. À ce titre, ils sont donc des candidats intéressants pour mettre au point des molé- cules visant à éliminer des métaux toxiques de l’organisme. Ces composés modèles sont également des outils très utiles pour étudier les interactions des métaux avec les protéines, interactions qui sont à l’origine de nombreux processus biologiques vitaux ou néfastes. * Laboratoire de Reconnaissance ionique et de chimie de coordination, Université Joseph Fourier - Grenoble 1, CEA, Institut Nanoscience et Cryogénie, SCIB, UMR-E3, Grenoble ** Laboratoire des Interactions protéine métal (LIPM), CEA-Cadarache, UMR7265 CNRS, CEA, Aix-Marseille Université, Saint-Paul-lez-Durance PIÈGES À MÉTAUX De nombreux ions métalliques essentiels sont efficacement piégés ou chélatés dans des sites bien définis de protéines (1). Certains interviennent ainsi directement dans des réactions chimiques ou biologiques nécessaires à la vie, à l’instar du fer de l’hémoglobine sur lequel se fixe l’oxygène lors du processus de respiration, quand d’autres sont nécessaires pour imposer des structures particulières aux protéines, comme les doigts de zinc. Tout métal, même essentiel, peut néanmoins s’avérer toxique si sa concentration excède les valeurs physiologiques. La concentration cellulaire en métaux est donc finement régulée AVRIL 2014 • BIOFUTUR 353 < 39 39-42_dossier05_353 24/03/14 15:56 Page 40 Liaison peptidique plane Les acides aminés, briques élémentaires des peptides et protéines, peuvent être classés en fonction de leur capacité à lier les métaux. > peptides - protéines 20 briques élémentaires les acides aminés dipeptide Chaîne latérale R ne liant pas les métaux liant les métaux Chaînes R « molles » Acides aminés aliphatiques glycine (Gly) alanine (Ala) Chaînes R « intermédiaires » Acides aminés aromatiques cystéine (Cys) phénylalanine (Phe) valine (Val) histidine (His) méthionine (Met) Cu+, Ag+, Hg2+ Fe2+, Co2+, Ni2+, Cu2+, Zn2+ leucine (Leu) thryptophane (Trp) Chaînes R « dures » isoleucine (IIe) Un acide aminé cyclique acide aspartique (Asp) acide glutamique (Glu) glutamine (Gln) lysine (Lys) asparagine (Asn) Acides aminés polaires sérine (Ser) thréonine (Thr) tyrosine (Tyr) arginine (Arg) afin d’éviter toute carence mais aussi toute surcharge qui deviendrait toxique pour l’organisme. Ce processus d’« homéostasie » fait intervenir des protéines de transport et de stockage qui permettent de contrôler les concentrations en ions métalliques dans l’organisme. Certains acides aminés possèdent des fonctions chimiques induisant des interactions fortes avec les métaux qui peuvent être décrites et prédites par la théorie des acides et bases durs et mous proposée par le chimiste américain Ralph Pearson en 1963 (2). Dans cette théorie, les ions métalliques sont classés dans trois catégories selon leurs affinités pour des atomes donneurs définis. De petits ions possédant un nombre élevé de charges positives comme le calcium (Ca 2+) sont ainsi appelés « durs » parce qu’ils possèdent une charge très concentrée sur l’ion. Par opposition, des ions métalliques avec un rayon ionique élevé et une faible charge comme le mercure (Hg2+) sont appelés « mous » car leur charge est beaucoup plus diffuse. Il existe également des ions métalliques intermédiaires, comme le zinc (Zn2+), qui se comportent à la fois comme des ions durs et des ions mous. Certains éléments 40 > BIOFUTUR 353 • AVRIL 2014 Na+, K+, Mg2+, Ca2+, Co3+, Fe3+ Actinides comme le cuivre donnent des ions qui peuvent être classés comme mou (Cu+) ou comme intermédiaire (Cu2+). Les propriétés d’un ion métallique, notamment les interactions qu’il établit avec son environnement, étant très dépendantes de sa nature dure, molle ou intermédiaire, il est crucial de connaître son degré d’oxydation – sa charge – pour prédire les interactions privilégiées de cet élément. Les ions métalliques, chargés positivement donc plutôt déficitaires en électrons, ont tendance à s’entourer d’atomes donneurs (bases) plutôt riches en électrons (O, N, S…). Globalement, les acides durs interagissent préférentiellement avec des bases dures en formant des liaisons électrostatiques, tandis que les ions mous ont une plus grande affinité pour les bases molles avec lesquelles ils forment des liaisons covalentes. Une classification similaire a été établie pour les bases ce qui permet de prédire les interactions les plus favorables entre ions métalliques et atomes donneurs (3). Les protéines interagissent avec les ions métalliques majoritairement par les chaînes latérales des acides aminés de leur séquence. Les acides aminés complexant les ions métalliques peuvent ainsi être classés en fonction de leur caractère dur, mou ou intermédiaire (figure ci-dessus). Les ions alcalins (Na+, K+) et alcalino-terreux (Ca2+, Mg2+), très abondants dans l’organisme, sont en général liés à des atomes d’oxygène durs appartenant aux fonctions carboxylates des résidus aspartate et glutamate, ou à des fonctions phénolates des résidus tyrosine, tout comme l’ion ferrique (Fe3+). De même, les ions essentiels intermédiaires Fe2+ et Cu2+ sont couramment liés aux atomes d’azote des résidus histidine. Enfin, des ions mous comme Cu+ ou l’ion toxique Hg2+ sont très fortement associés aux acides aminés portant des atomes de soufre comme la cystéine et la méthionine, connues pour leur caractère mou. Le vivant a ainsi mis au point un système naturel de détoxification à travers les métallothionéines, de petites protéines dédiées à la protection des cellules contre les métaux toxiques qui contiennent de nombreuses cystéines destinées à séquestrer efficacement le Cu+ en excès ainsi que le Hg2+ ou le cadmium (Cd 2+ ) en cas d’intoxication. © DR proline (Pro) 15:56 DES PEPTIDES MIMÉTIQUES » © DR + ions être racaire alins Ca2+, ’ordes rteates mate, ates mme me, aires liés dus ous Hg2+ aux mes e et leur insi urel les ites tion aux de stiment Hg2+ cas La structure adoptée par les sites métalliques dans les protéines permet d’ajuster très finement les propriétés du métal, grâce à des interactions directes entre celui-ci et le ligand mais aussi à des liaisons plus lointaines, de type hydrogène ou électrostatique. Les métalloprotéines catalysent ainsi de très nombreuses réactions chimiques spécifiques en utilisant un petit nombre de métaux essentiels. La dynamique des protéines comme la maîtrise de l’accessibilité du solvant sont également des facteurs qui contrôlent l’affinité des sites pour le métal et leur réactivité. Les protéines sont donc une source inépuisable d’inspiration pour la mise au point de composés piégeant les ions métalliques. Chimistes et biochimistes ont, en particulier, reproduit les sites de chélation des ions essentiels dans des peptides, plus simples que les protéines, à la fois pour étudier les mécanismes biologiques liés à la présence des métaux et obtenir des chélateurs efficaces de ces ions pour des applications thérapeutiques. Le Service de chimie inorganique et biologique (SCIB) du CEA, à Grenoble, a développé des peptides modélisant la boucle de liaison du cuivre présente dans des transporteurs de ce métal, afin d’étudier la sélectivité de ces motifs visà-vis des métaux essentiels et toxiques. Ces transporteurs lient le cuivre au degré d’oxydation +I (Cu+) au sein des cellules grâce à deux cystéines portant des chaînes latérales soufrées – Cu+ est un ion mou. Un paramètre important pour décrire l’interaction métal-ligand est la constante d’affinité K de la réaction entre ces deux partenaires. Plus cette constante est élevée, plus l’équi- Page 41 libre est déplacé vers la formation du complexe métal-peptide et plus la concentration résiduelle en métal libre est faible. Il s’avère que ces peptides modèles complexent très efficacement leur métal cible (KCu+ ~ ~ 1017) par rapport à d’autres métaux endogènes abondamment présents dans les cellules comme le zinc (KZn2+ ~ ~ 107) (4,5). Ces propriétés de chélation ont donc conduit à envisager l’utilisation de tels peptides puis de pseudopeptides plus riches en cystéines pour la détoxification du cuivre chez les patients atteints de la maladie de Wilson, pathologie génétique rare conduisant à une surcharge en cuivre dans le foie (6). La fonctionnalisation de ces peptides par des unités glucidiques permet leur internalisation dans les hépatocytes et la chélation du cuivre en excès au niveau intracellulaire (7,8). Ces dérivés peptidiques sont actuellement considérés comme des candidats médicament novateurs pour traiter la maladie. ET LES ACTINIDES ? Les actinides n’ont aucun rôle in vivo. La plupart de ces éléments ne sont pas naturels et ne participent donc à aucune fonction biologique. Ils sont, en revanche, toxiques en cas d’inhalation, d’ingestion ou d’absorption et possèdent une toxicité à la fois chimique et radiologique. Afin de prédire et de mimer leurs interactions avec le vivant, il faut d’abord s’intéresser à leur forme chimique in vivo. Les radionucléides comme le plutonium et l’américium sont présents dans les milieux biologiques, respectivement au degré d’oxydation IV et III, sous la forme des cations Pu4+ et Am3+, fortement chargés et sphériques. L’uranium est, lui, présent à son degré d’oxydation le plus élevé VI, sous forme de dioxo cation uranyle (UO22+), une espèce chimique en forme de bâtonnet qui ne présente pas les mêmes géométries de coordination que Pu4+ et Am3+. L’encombrement stérique dû aux deux atomes d’oxygène impose, en effet, des liaisons avec les ligands dans le plan équatorial de l’uranyle, perpendiculairement à l’axe O=U=O. À l’inverse, les liaisons avec Pu4+ et Am3+ se répartissent sphériquement dans l’espace en minimisant l’encombrement entre les différents ligands (figure cidessous). Malgré ces différences, les actinides, dans leur ensemble, sont considérés comme des ions durs et établissent donc préférentiellement des liaisons avec des ligands durs oxygénés. Il n’existe pas de site de liaison spécifique de ces éléments naturellement présents dans les protéines. Cependant, les cations actinides se lient dans les sites connus des ions essentiels durs comme le Fe3+. Par exemple, in vitro, UO22+ se lie à l’apotransferrine à la place de Fe3+. La coordination de l’ion UO22+ est alors assurée par des ligands purement oxygénés provenant notamment de chaînes latérales carboxylates (acide aspartique) et phénolates (tyrosine), alors que dans le cas de Fe3+, un ligand azoté imidazole (histidine) est également impliqué dans la sphère de coordination du cation (9). Il a par ailleurs été montré que les ions actinides se lient aux sites à calcium dans des protéines comme la calmoduline, présente dans la signalisation calcique de toutes les cellules eucaryotes, ou la protéine C Reactive, synthétisée notamment dans le foie, qui intervient dans les processus immunitaires (10), ainsi qu’à des protéines fortement phosphorylées Géométrie de coordination de quelques ions actinides Caractère dur (en rouge), mou (en bleu) ou intermédiaire (en jaune) des acides aminés. © DR 24/03/14 > 39-42_dossier05_353 AVRIL 2014 • BIOFUTUR 353 < 41 39-42_dossier05_353 24/03/14 15:56 Page 42 comme l’ostéopontine, qui participe à l’homéostasie osseuse (11). Ces ions durs présentent, en effet, des affinités très élevées pour l’oxygène des groupes phosphoryles (P=O), une fonction présente in vivo dans des protéines lorsque les acides aminés portant des alcools comme la sérine, la thréonine ou la tyrosine sont phosphorylés pour donner des chaînes latérales phosphates (-OP(O)(OH)2) à forte affinité pour les ions durs comme les actinides. PIÉGER L’URANYLE AVEC DES MIMES DE PROTÉINES À CALCIUM… (1) Holm RH et al. (1996) Chem Rev 96, 2239-314 (2) Pearson RG (1963) J Am Chem Soc 85, 3533-9 (3) Pearson RG, Songstad J (1967) J Am Chem Soc 89, 1827-36 (4) Rousselot-Pailley P et al. (2006) Inorg Chem 45, 5510-20 (5) Sénèque O et al. (2004) Chem Commun (7), 770-1 (6) Delangle P, Mintz E (2012) Dalton Trans 41, 6359-70 (7) Pujol AM et al. (2012) Angew Chem Int Ed 51, 7445-8 (8) Pujol AM et al. (2011) J Am Chem Soc 133, 286-96 (9) Vidaud C et al. (2007) Biochemistry 46, 2215-226 (10) Pible O et al. (2010) Protein Science 19, 2219-30 (11) Qi et al. (2014) Metallomics 6, 166-76 (12) Le Clainche L, Vita C (2006) Environ Chem Let 4, 45-9 (13) Pardoux R et al. (2012) PLoS ONE 7(8), e41922 (14) Boturyn D et al. (2008) J Peptide Sci 14, 224-40 (15) Bonnet CS et al. (2009) Chem Eur J 15, 7083-93 42 > BIOFUTUR 353 • AVRIL 2014 La calmoduline est une protéine qui lie quatre cations Ca2+ dans quatre sites structurés par un motif hélice-boucle-hélice (HBH), très répandu dans les protéines. La boucle de 12 acides aminés contient l’ensemble des ligands oxygénés du calcium, inséré dans une structure bipyramidale à base pentagonale. L’affinité des sites HBH pour le calcium est assez faible (K ~ ~ 106) mais suffisante pour permettre de chélater le calcium lorsque sa concentration intracellulaire atteint une valeur micromolaire. L’interaction calmoduline-calcium engendre un changement de conformation de la protéine qui déclenche son interaction avec un grand nombre de protéines cibles. La calmoduline intervient ainsi dans la régulation de nombreuses activités physiologiques en réponse à la concentration intracellulaire en Ca2+. Une première approche pour mettre au point un site de fixation de l’uranyle consiste à synthétiser des peptides dérivés du motif HBH de la calmoduline en modifiant la séquence de sa boucle. Elle a permis d’obtenir des peptides présentant une affinité équivalente pour l’uranyle (K ~ ~ 106), tout en diminuant celle observée pour le calcium (12). Le Laboratoire des interactions protéine métal du CEA, à Cadarache, poursuit cette démarche en utilisant l’ensemble du domaine N-terminal de la calmoduline, qui contient deux sites de fixation du calcium – et 77 acides aminés –, comme base structurée pour optimiser la fixation d’actinides, notamment de l’uranyle, en combinant la substitution des acides aminés et la phosphorylation. L’objectif est de bénéficier de l’apport des inter- actions à plus longue distance et des aspects de dynamique des hélices du motif pour accroître l’affinité et la spécificité des sites de fixation pour l’uranyle. Ces variantes du domaine N-terminal de la calmoduline, dessinées par biologie moléculaire, sont produites en grande quantité « à la demande » par la bactérie Escherichia coli, puis purifiées. L’interaction avec les ions Ca2+ ou l’uranyle peut être suivie grâce à l’introduction d’un acide aminé aromatique luminescent dans la boucle du motif HBH. Ce dispositif a permis d’obtenir des peptides qui fixent l’uranyle avec de meilleures affinités (K~ ~109). En phosphorylant une thréonine de la boucle, donc en introduisant un ligand phosphoryle, on obtient des peptides qui fixent l’uranyle avec des constantes d’affinité de l’ordre de 1010 (13). Approches expérimentales et modélisation sont actuellement combinées pour accroître l’affinité et la sélectivité des architectures protéiques chélatantes, et piéger de façon sélective les actinides. … ET DES PEPTIDES SYNTHÉTIQUES Une seconde approche, développée au SCIB, utilise des peptides synthétiques de faible taille – 10 acides aminés – obtenus par synthèse chimique sur support solide. Ces séquences ne sont pas directement inspirées de sites métalliques existant dans des protéines mais sont mises au point afin d’imposer une structure tridimensionnelle optimale pour piéger les métaux, en prédisposant les chaînes latérales d’acides aminés appropriés dans l’espace. Des cyclodécapeptides comportant deux enchaînements Proline-Glycine, qui favorisent la formation de coudes, induisent ainsi des structures planes dîtes en feuillet β (14). Ces plateformes peptidiques préorientent avantageusement quatre chaînes latérales d’acides aminés dans la même direction de l’espace pour chélater un ion métallique (15). Cette structure est particulièrement adaptée à la chélation de l’uranyle, qui est préférentiellement lié par quatre à six ligands oxygénés dans son plan équatorial. L’aspartate et le glutamate, durs et chargés négativement, présentent les affinités les plus élevées pour les ions actinides et ont donc été placés dans la séquence, dans des positions qui permettent d’optimiser les interactions entre les donneurs oxygénés et le cation uranyle en faisant converger les quatre groupes carboxylate d es chaînes latérales de ces acides aminés vers le plan équatorial de l’uranyle. Un résidu tryptophane luminescent est également inséré dans la séquence afin de rendre visible l’interaction avec l’ion métallique. La parfaite adaptation de ces motifs peptidiques à la chélation de l’uranyle a été démontrée par des études spectroscopiques. Un unique complexe se forme, dans lequel l’ion uranyle est coordonné par les quatre fonctions carboxylates du glutamate ou de l’aspartate. Structuré en feuillet β, il démontre une stabilité similaire aux sites préstructurés pour le calcium de la calmoduline (K ~ ~109). À l’inverse, des séquences peptidiques similaires mais linéaires piègent l’uranyle avec des affinités moindres. Comme pour les composés issus de la calmoduline, l’introduction d’acides aminés phosphorés comme la phosphosérine exacerbe les affinités pour l’uranyle et permet d’atteindre des affinités supérieures à 1010. VERS DES PEPTIDES POUR DÉTOXIFIER LES ACTINIDES L’optimisation de peptides pour la fixation de l’uranyle, soit en s’inspirant des sites à calcium de la calmoduline, soit en construisant de novo des séquences permettant de préorganiser le site de liaison, ont permis d’atteindre des affinités significatives vis-à-vis de l’uranyle. L’insertion d’acides aminés phosphorés s’avère très prometteuse pour obtenir des ligands peptidiques d’affinités encore plus élevées pour l’uranyle mais aussi pour d’autres actinides, comme le plutonium et l’américium. Même si des optimisations sont encore nécessaires, ces peptides sont très prometteurs pour la détoxification des actinides, en cas de contaminations internes accidentelles chez des travailleurs du secteur nucléaire ou suite à une dispersion dans l’environnement liée à une catastrophe nucléaire. I