Prise en charge des principaux effets secondaires de la

Prise en charge des principaux
effets secondaires
de la chimiothérapie
cytotoxique
Treatment of chemotherapy side effects
Driffa Moussata
HGE Lyon Sud, France
Résumé
Les progrès thérapeutiques en cancérologie digestive sont indiscutables en
termes de survie globale. Cette efficacité saccompagneàcourtouàlong
terme deffets secondaires nécessitant une prise en charge spécifique. Pour
ne pas être contraint de diminuer les doses ou despacer les cures, ce qui a
pour conséquence une diminution de lefficacité des traitements, il est pri-
mordial de savoir reconnaître et prendre en charge ces effets secondaires
précocement que ce soit en prévention primaire ou secondaire. On distin-
gue ainsi les effets secondaires dordre général et ceux plus spécifiques à
chaque drogue.
nMots clés : effet secondaire, chimiothérapie, cancer digestif
Abstract
The therapeutic progress in intestinal cancer care is real with a longer sur-
vival rate. This efficiency is associated with side effects which sometimes
require a decreased dosage or a longer rest period between treatments
(leading to less efficiency). Thatswhyits very important to detect and
treat them as soon as possible. We reviewed the general and specific side
effects of each drug.
nKey words: chemotherapy, intestinal cancer, side effects
La chimiothérapie a prouvé son
efficacité dans les cancers diges-
tifs et notamment dans les cancers
colorectaux avec une médiane de
survie atteignant 30 mois dans les
essais thérapeutiques. Quelle soit
réalisée en adjuvantou néoadjuvant,
son bénéfice saccompagne deffets
secondaires quil est essentiel de
savoir gérer pour garder la même effi-
cacité et poursuivre les traitements
aux mêmes doses et au même rythme.
On distingue les effets secondaires
communs à toutes les drogues et les
effets secondaires spécifiques à cha-
cune delles. Les produits utilisés,
depuis les années 1990, sont le 5FU,
lirinotécan, loxaliplatine, la gemcita-
bine, les taxanes, et dernièrement les
thérapies ciblées qui ne seront pas trai-
tées dans cette revue.
Les effets secondaires communs à
toutes les drogues à des degrés varia-
bles sont les troubles hématologiques
à type danémie, de leucopénie ou de
pancytopénie et les troubles digestifs
à type de nausées, vomissements,
mucites ou diarrhées. En ce qui
concerne les effets secondaires spéci-
fiques, on discutera de la neurotoxi-
cité de loxaliplatine et du syndrome
mains-pieds du 5FU.
HEPATO
n
GASTRO
et Oncologie digestive
5
HEPATO-GASTRO et Oncologie digestive
Mini-revue
doi: 10.1684/hpg.2009.0378
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Tous ces effets secondaires sont classés en fonction de leur
gravité en quatre grades OMS (tableau 1).
Anémie
Lanémie est la manifestation la plus fréquente des cancers
digestifs et de leurs traitements par chimiothérapie. Son ori-
gine est multifactorielle avec en plus de leffet myélosup-
presseur, un effet direct sur la production tubulaire rénale
de lérythropoïétine (EPO) [1, 2]. Lincidence dépend du
type de cancer, du stade et de son ancienneté. Ainsi dans
le cancer colorectal, la prévalence de lanémie sévère
(hémoglobine (Hb) < 8 g/dL) est relativement faible (10 à
20 %) comparativement aux myélomes ou lymphomes
non hodgkiniens [3]. Le traitement est basé sur la transfu-
sion sanguine, la supplémentation en fer et les facteurs de
croissance érythropoïétiques. Une méta-analyse a montré
que le traitement par EPO permet de réduire les transfu-
sions sanguines chez les patients sous chimiothérapie [4].
La réponse au traitement par EPO dépend du type de
cancer avec par exemple une meilleure réponse dans les
cancers de lœsophage, 75 % des patients répondant au
traitement (gain de 1 point dhémoglobine par dL de sang
en 1 mois) contre 50 % en cas de cancers colorectaux [5].
La décision thérapeutique est fonction du taux dHb et des
symptômes. En règle générale, lanémie symptomatique
(asthénie) a un effet sur la qualité de vie des patients et
plusieurs études ont montré quil existait un lien direct
entre laugmentation de lHb et lamélioration de la qualité
de vie des patients traités par EPO [6, 7] avec un objectif de
11-12 g/dL dHb [8]. De plus, une étude a mis en évidence
un effet délétère de lanémie sur lespérance de vie [9].
Les recommandations actuelles [10] sont de traiter les
patients sous radiothérapie et/ou chimiothérapie ayant un
taux dHb compris entre 9 et 11 g/dL. Pour une Hb entre
8 et 9 g/dL, le choix entre la transfusion sanguine ou lEPO
est laissé au clinicien qui se basera sur la tolérance des
symptômes.
Parmi les différents traitements par EPO, on distingue
3 agents qui se différencient par leur structure biochimique,
laffinité au récepteur à lEPO et leur demi-vie nécessitant
un rythme dadministration de 3 fois par semaine (époiétine
alpha, Eprex®), hebdomadaire (époiétine bêta, Neorecor-
mon®) ou toutes les 3 semaines (darbépoiétine alpha, Ara-
nesp®) [11, 12]. Des études ayant un niveau de preuve
faible (grade C) [13, 14] ont montré quune bonne réponse
au traitement peut être prédite avec 95 % dexactitude si
lHb augmente de 0,5 g/dL avec un taux dEPO inférieur à
100 mU/mL dans les 2 premières semaines de traitement
[2]. En pratique, un simple contrôle de lHb est fait pour
évaluer lefficacité du traitement en sachant quun mini-
mum de 4 semaines de traitement est requis. Si après 4 à
8 semaines de traitement, le taux dHb naugmente pas,
une escalade des doses est recommandée. Bien entendu,
avant traitement, un bilan ferrique doit être réalisé et un
déficit devra être compensé par voie intraveineuse. La sup-
plémentation en fer combinée à lEPO est plus efficace que
la supplémentation seule. Celle-ci est plus efficace par voie
intraveineuse que par voie orale [15]. Leffet secondaire
principal de ces traitements est le risque thromboembo-
lique qui est multiplié par 1,6 chez les patients traités.
Ceci explique pourquoi le taux dHb ne doit pas excéder
13 g/dL [13].
Tableau 1. Effets secondaires classés selon leur gravité.
Grade 1 Grade 2 Grade 3 Grade 4
Hb g/dL 9,5-10,9 8-9,4 6-7,9 < 6,5
Leucocytes G/L 3-3,9 2-2,9 1-1,9 < 1
PNN G/L 1,5-1,9 1-1,4 0,5-0,9 < 0,5
Plaquettes G/L 75-99 50-74 25-49 < 25
Mucites Douleur Érythème Ulcération, alimentation liquide Alimentation impossible
Nausées/Vomissements Nausées Vomissements
transitoires Vomissements anti-émétiques Vomissements incoercibles
Diarrhée Transitoire < 2 jours Tolérable > 2 jours Nécessité dun traitement Déshydratation,
hémorragique
Neurotoxicité Paresthésies et/ou
diminution des réflexes
tendineux
Paresthésies sévères
et/ou faiblesse
modérée
Paresthésies intolérables et/ou
diminution importante de la force
motrice
Paralysie
Syndrome mains-pieds
(WHO score) Dysesthésie Érythème Érythème, douleur, érythème
périunguéal Desquamation, ulcération
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Aplasie
En plus de lanémie, les chimiothérapies cytotoxiques par
leur effet myélosuppresseur induisent des neutropénies pou-
vant se compliquer dinfections correspondant ainsi aux neu-
tropénies sévères de stade 4. Lincidence de la neutropénie
fébrile (NF) après chimiothérapie est voisine de 6 à 8 % [16].
La sévérité de la neutropénie est directement liée au risque
infectieux [17, 18] et le taux de mortalité en cas de neutro-
pénie fébrile est denviron 10 % [19]. Les principaux sites
dinfection sont le tractus digestif, les poumons et la peau
[20]. La fièvre est le principal signe nécessitant une hospita-
lisation rapide pour mise en route dun traitement par anti-
biothérapie avec ou sans facteurs de croissance. Les facteurs
de croissance sont recommandés en prévention primaire ou
en prévention secondaire pour potentialiser les chimiothéra-
pies en évitant une diminution de doses ou un espacement
des cures. En effet, il a été montré un lien significatif entre
aplasie fébrile, diminution du nombre de cycles de chimio-
thérapie et de la survie globale à 5 ans [21].
Le G-CSF (granulocyte colony-stimulating factor) ou facteur
de croissance granulocytaire stimule la différenciation, la
prolifération et la maturation de la lignée granulocytaire.
Il favorise la transformation des CFU-G (colony forming
unit granulocyte) en polynucléaires neutrophiles. Il est dis-
ponible sous la forme de 2 protéines chimiquement très
proches, se différenciant par la nature dun acide aminé et
par lexistence ou non dune glycosylation, ayant apparem-
ment les mêmes effets, le filgrastime (Neupogen®) et son
équivalent pégylé, le pegfilgrastime (Neulasta®) et leno-
grastime (Granocyte®) [22-25]. Du fait de sa configuration
et de son poids moléculaire, le pegfilgrastime (Neulasta®) a
une demi-vie longue permettant des injections plus espa-
cées avec une efficacité semble-t-il identique en termes de
durée daplasie fébrile [23, 25]. Une méta-analyse a indiqué
que les 2 G-CSF non pégylés (Neupogen® et Granocyte®)
sont équivalents en termes defficacité [26]. Les recomman-
dations actuelles reconnaissent aux 3 G-CSF une efficacité
similaire et ne favorisent pas une molécule par rapport à
une autre [27].
Des essais contrôlés randomisés [23, 25, 28, 29] et 2 méta-
analyses [26, 30] ont bien établi que lutilisation prophylac-
tique des facteurs de croissance réduisait lincidence, la
durée et la sévérité des neutropénies fébriles secondaires
à la chimiothérapie, avec dans certains essais une réduction
des neutropénies fébriles de 50 à 90 % [26, 29]. Alors que
lassociation de facteurs de croissance à lantibiothérapie a
un effet minime mais statistiquement significatif sur la
durée de laplasie fébrile par rapport à lantibiothérapie
seule [31], lutilisation prophylactique des facteurs de crois-
sance na aucun effet sur la mortalité post-infectieuse [26,
28, 32, 33]. Ceci pourrait cependant sexpliquer par un
manque de puissance dû au faible nombre de patients
décédés. Ainsi, les recommandations actuelles sont de ne
pas utiliser systématiquement les facteurs de croissance
mais de les prescrire au cas par cas selon les co-morbidités
du patient. Dans la littérature, certains facteurs prédictifs
indépendants de neutropénies fébriles ont été recensés.
Parmi eux, on relève un âge supérieur à 65 ans, un stade
tumoral avancé, un antécédent de neutropénie fébrile et
labsence de facteurs de croissance. Selon les drogues utili-
sées, le risque est variable nécessitant pour certaines une
prescription systématique de facteurs de croissance
(lorsque les risques sont supérieurs à 20 %). Il sagit princi-
palement des taxanes [27]. En dessous de 20 %, les carac-
téristiques du patient interviennent dans la décision de
prescription (tableau 2).
Mucites
Le traitement par radio-chimiothérapie se complique fré-
quemment de mucites (de 10 à 40 % selon lindication de
la chimiothérapie) [35]. Les facteurs de risque incluent ceux
liés au patient (tabac, mauvaise hygiène buccale, âge
avancé, sexe féminin, antécédents de traitement anticancé-
reux) [36] et ceux liés au traitement (5-FU, méthotrexate,
anthracyclines) [37]. De nombreux traitements des mucites
tels que la cryothérapie [38], lallopurinol [39], la propan-
théline [40], la pilocarpine [41], les cytokines [42, 43] ont
été évalués dans plusieurs essais aux faibles effectifs ou
non randomisés ne permettant pas de conclure clairement
sur leur efficacité. Un essai de phase 3 randomisé en double
aveugle ayant inclus 66 patients traités par fluorouracile
(5FU), na pas montré deffet significatif de la glutamine
[44]. Un essai de phase 2 incluant 64 patients porteurs de
cancers colorectaux recevant un facteur de croissance des
kératinocytes (3 jours avant la chimiothérapie) a montré
une incidence de mucites de grade 2 à 4 plus faible dans
le groupe traité par rapport au groupe placebo (32 vs 78 %,
p= 0,001) [45]. Dautres traitements tels que le molgra-
mostim [46], impliqué dans la prolifération des kératinocy-
tes et des fibroblastes permettant une cicatrisation de la
muqueuse ou de facteur de croissance β3 [47, 48] ont été
évalués mais sur de faibles effectifs. Le plus souvent, le trai-
tement des mucites reste symptomatique et basé sur des
anesthésiques locaux (lidocaïne, capsaïcine) ou des bains
de bouche à base de sucralfate, dantiseptiques avec
comme recommandation une prévention par une hygiène
bucco-dentaire stricte.
Nausées/vomissements
Les nausées et les vomissements sont des symptômes très
fréquents lors des traitements par chimiothérapie ; ils
altèrent la qualité de vie des patients entraînant un
amaigrissement et une réduction du « performance
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status ». Leur mécanisme physiopathologique fait intervenir
de nombreux neuro-transmetteurs tels que la sérotonine,
la dopamine, la protachykinine et lacide gamma-
aminobutyrique (GABA). Leur survenue dépend du type de
chimiothérapie et de facteurs individuels. Le risque émétique
propre à chaque drogue est évalué en 3 stades : fort, modé
et faible [49]. Classiquement, lagent le plus émétisant est le
cisplatine qui induit, à une dose de 50 mg/m
2
, des nausées/
vomissements dans plus de 90 % des cas. Lirinotécan est
également un agent très émétisant. Dautres agents tels
que le méthotrexate, la doxorubicine, le cyclophosphamide,
le 5-FU, la gemcitabine et la carboplatine sont des drogues
modérément émétisantes [50]. On distingue chronologique-
ment les nausées/vomissements avant tout traitement (dit
anticipés), les vomissements aigus survenant dans les 12 à
24 heures suivant le traitement et les vomissements tardifs,
au delà de 24 heures et pouvant persister une semaine.
La prévention des nausées/vomissements aigus diminue le
risque de nausées/vomissements tardifs [51]. Pour lutter
contre les nausées/vomissements chimio-induits, on utilise
les antagonistes aux récepteurs de la sérotonine ou sétrons
(ondansétron, granisétron, tropisétron et dolasétron) ; ils
sont defficacité comparable avec un taux de réponse de
40 à 60 % pour les chimiothérapies hautement émétisantes
et de 60 à 80 % pour les chimiothérapies moyennement
émétisantes. Les autres molécules sont les antagonistes
des récepteurs à la neurokinine-1 (aprepitant), les corticoïdes
à forte dose (1 à 2 mg/kg) (dexaméthasone), des anta-
gonistes au récepteur à la dopamine (métoclopropramide,
prochlorpérazine, prométhazine et halopéridol) et les benzo-
diazépines. Les recommandations actuelles sont basées sur
lassociation des différentes classes moléculaires en fonction
du degré émétisant des chimiothérapies (tableau 3).
Tableau 3. Traitement préventif
des effets émétisants de la chimiothérapie [53].
Effet
émétisant Traitement Durée
Fort Aprépitant 125 mg J1, 80 mg J2+J3
Dexaméthasone 12 mg J1, 8 mg
J2-4 Antagonistes des récepteurs
à la sérotonine Autres drogues
Minimum
de 4 jours
Modéré Dexaméthasone 12 mg J1, 8 mg
J2-3 Antagonistes des récepteurs
à la sérotonine
3 jours
Faible Dexaméthasone J1
ou métoclopropamide/
prochlorpérazine ou lorazépam
Ala
demande
Tableau 2. Algorithme de la prescription des facteurs de croissance en cas de neutropénies fébriles (NF) [34].
Étape 1 : Évaluer le risque de NF en fonction du traitement
Risque 20 %
Risque 20 %
Risque 10–20 % Risque < 10 %
Étape 2 : Évaluer les facteurs de risque liés au patient
> 65 ans, stade avancé, antécédents de NF,
mauvais état général, co-morbidités
Risque < 20 %
G-CSF recommandés G-CSF non indiqués
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Recommandations pour la prévention
des nausées et vomissements
chimio-induits
Leffet anti-émétique des antagonistes des récepteurs à la
sérotonine (5-HT3) est potentialisé par leur association à la
dexaméthasone avec une efficacité dans 65 à 80 % des
cas [52, 53]. Lassociation à la benzodiazépine peut être
utile en cas déchec de la précédente association [54].
Une deuxième génération dantagonistes a été testée.
Il sagit du palonosétron qui a une plus grande affinité au
récepteur 5HT3 (30 fois plus) et une demi-vie 4 fois plus
longue que les antagonistes de première génération
(37 vs 3-9 heures). Dans 2 études, plus de 500 patients
ont été randomisés dans un groupe palonosétron vs
ondansétron ou dolasétron. Il y a eu un meilleur contrôle
des nausées/vomissements aigus et retardés dans le
groupe palonosétron que ce soit par rapport à londansé-
tron (81 % vs 68 %, p= 0,009, pour les symptômes
précoces et 74 vs 55 % pour les retardés, p= 0,001) ou
par rapport à londansétron 100 mg (63 % vs 53 %,
p = 0,049) [55, 56]. Une autre molécule antagoniste des
récepteurs à la protachykinine-1 a été évaluée dans plu-
sieurs essais regroupés dans une méta-analyse incluant
1 568 patients sous cisplatine : elle concluait à son effica-
cité mais qui nest pas supérieure à celle du traitement
standard [57]. Dautres molécules telles que lolanzapine
(antipsychotique atypique ayant une affinité pour plusieurs
récepteurs aux neuro-transmetteurs tels que dopamine,
sérotonine, histamine, adrénergique) ou encore un analo-
gue GABA sont en cours dévaluation.
Diarrhées
Les principaux agents anticancéreux responsables de diar-
rhées sont le 5-FU, la capécitabine, lirinotécan et de façon
plus modérée les taxanes [58]. La sévérité de la diarrhée est
un effet secondaire dose-dépendant. Le 5-FU exerce un
effet cytotoxique sur les entérocytes perturbant la sécrétion
et labsorption intestinale de leau et des électrolytes.
La diarrhée est plus fréquente quand le 5-FU est administré
avec la leucovorine en bolus [59] et bien entendu avec liri-
notécan qui a sa propre toxicité digestive. En effet, des
essais cliniques récents ont montré que lirinotécan était
responsable de diarrhées de grade 3-4 dans 40 % des cas
[60]. La diarrhée peut apparaître précocement dans les
24 heures suivant la perfusion ou plus tardivement dans
les 5 à 11 jours. Dans le premier cas, la diarrhée est liée à
leffet anti-cholinergique de la molécule et est traitée par
atropine [61]. Dans le second cas, il sagit dune diarrhée
hydrique secondaire aux lésions muqueuses intestinales.
La prévalence de la diarrhée sous capécitabine est de lordre
de 30 à 40 % avec une forme sévère (grade III ou IV) dans la
moitié des cas [62, 63]. La prévalence de la diarrhée, en
général plus modérée, est de lordre de 25 % pour les taxa-
nes [64]. Quelle que soit la drogue responsable, le traite-
ment est basé sur la réhydratation orale ou intraveineuse
en fonction de limportance de la déshydratation et des
troubles ioniques associés. Les traitements médicaux sont
essentiellement basés sur le lopéramide, spasmogène
de type morphine freinant la motricité intestinale en
entraînant une contracture des fibres lisses circulaires et
un relâchement des fibres longitudinales. Son action est
locale avec peu deffets systémiques [65]. La posologie est
de 4 mg systématiquement le matin et 2 mg après chaque
selle liquide [66]. Le racécadotril (Tiorfan®) est un antisécré-
toire intestinal qui agit en inhibant une enzyme présente
dans lépithélium intestinal qui est lenképhalinase. Le
Tiorfan® diminue ainsi lhypersécrétion hydrique et délec-
trolytes [67]. En cas de diarrhées sévères ou dinefficacité
après 48 heures du lopéramide ou du racécadotril, les
analogues de la somatostatine peuvent être utilisés le plus
souvent avec succès [68, 69]. Une antibiothérapie doit être
utilisé en cas de colite à Clostridium difficile quil faut savoir
rechercher, souvent favorisée par les lésions de colite
[70, 71].
Toxicités spécifiques
à chaque drogue (tableau 4)
Neuro-toxicité
La neuro-toxicité périphérique chimio-induite est commune
aux sels de platine (oxaliplatine, carboplatine, cisplatine),
aux taxanes ou alcaloïdes [72, 73]. Son incidence est
variable touchant 30 à 40 % des patients traités, avec
pour loxaliplatine des taux allant jusquà 82 % [74, 75].
Les facteurs influencant la neuro-toxicité sont lâge du
patient, la dose cumulée, la durée de la chimiothérapie, la
co-administration dagents neuro-toxiques, la présence
dun diabète ou dun alcoolisme. Le froid aggrave les symp-
tômes et il faut conseiller au patient dutiliser des protec-
tions et notamment des gants. Au cours de la perfusion
doxaliplatine, un spasme ou des paresthésies laryngées
peuvent apparaître. Ce phénomène peut être limité par
lallongement de la perfusion (sur 6 heures). La neuropathie
est en générale régressive à larrêt du traitement (moins de
1 % de grade III ou IV à 1 an) [72, 76].
Un essai en double aveugle a comparé lintérêt de perfusion
d1g de gluconate de calcium et d1g de sulfate de magné-
sium avant et après la perfusion doxaliplatine ; il y avait
significativement moins de neuro-toxicité dans le groupe
traité [77]. Ces résultats ont été confirmés par un autre
essai français [78]. Des études avec des effectifs faibles
[79, 80] ont testé des molécules bloquant les canaux sodi-
ques telles que la carbamazépine ou loxcarbazépine.
Les résultats obtenus ont mis en évidence une moindre inci-
dence de neuro-toxicité dans le bras traité (31 vs 75 % des
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