LEÇON N˚ 65 : Inégalité des accroissements finis

LEÇON N˚ 65 :
Inégalité des accroissements finis.
Exemples d’applications à l’étude de suites
ou de fonctions. L’exposé pourra être
illustré par un ou des exemples faisant
appel à l’utilisation d’une calculatrice.
Pré-requis :
Notions de continuité, dérivabilité;
Théorème des valeurs intermédiaires;
Intégration.
Le plan affine euclidien Pest rapporté au repère orthonormé (O,~ı, ~ ).
65.1 Théorème des accroissements finis
Théorème 1 : Soit f: [a, b]R, continue
sur [a, b], dérivable sur ]a, b[. Alors il existe
un réel c]a, b[tel que f(c)(ba) =
f(b)f(a).
Interprétation géométrique
Il existe au moins un point de ]a, b[où la
tangente à la courbe Cfest parallèle à la droite
(AB), avec A=a, f(a)et B=b, f(b).
Voir figure ci-contre :
Oab
Cf
f(a)A
f(b)B
2Inégalité des accroissements finis
démonstration :Soit gla fonction définie sur [a, b]par
g(x) = f(b)f(x)(bx)f(b)f(a)
ba.
gest continue sur [a, b], dérivable sur ]a, b[et vérifie g(b) = g(a) = 0. Par le théorème des valeurs
intermédiaires, il existe un réel c]a, b[tel que g(c) = 0. Or, pour tout xde l’intervalle ]a, b[,
g(x) = f(x) + f(b)f(a)
ba,
et l’égalité g(c) = 0 donne alors :
f(c) + f(b)f(a)
ba= 0 f(c)(ba) = f(b)f(a).
Le théorème est ainsi démontré.
65.2 Inégalité des accroissements finis
Théorème 2 : Soit f: [a, b]Rcontinue sur [a, b]et dérivable sur ]a, b[. S’il existe deux réels
m, M tels que m6f(x)6Mpour tout x]a, b[, alors on a :
m6f(b)f(a)
ba6M.
Interprétation géométrique
Notons Cfla courbe représentative de fsur [a, b]. Soit x
[a, b].
x>am(xa) + f(a)6f(x)6M(xa) + f(a),
x6bM(xb) + f(b)6f(x)6m(xb) + f(b).
On note D:y=m(xa)+f(a),D:y=m(xb)+f(b),
∆ : y=M(xa) + f(a)et :y=M(xb) + f(b).
Dans ce cas, Cfest comprise dans le parallélogramme
délimité par ces quatre droites.
Voir figure ci-contre :
Oab
Cf
f(a)
f(b)
(m)
(M)
D
D
démonstration :On a :
m6f(x)6MmZb
a
1 dx6Zb
a
f(x) dx6MZb
a
1 dx
m(ba)6f(b)f(a)6M(ba)
m6f(b)f(a)
ba6M,
et le résultat est démontré.
Inégalité des accroissements finis 3
Corollaire 1 : Soit f: [a, b]Rune fonction continue sur [a, b]et dérivable sur ]a, b[. S’il existe
un réel M > 0tel que |f|6Msur ]a, b[, alors
|fb)f(a)|6M|ba|.
démonstration :Reprendre la démonstration du théorème précédent avec m=M.
Définition 1 : Une telle fonction est alors appelée M-lipschitzienne.
65.3 Applications
65.3.1 Sens de variations
Théorème 3 : Soit f: [a, b]Rune fonction continue sur [a, b]et dérivable sur ]a, b[. On
suppose que f(x)>0sur ]a, b[. Alors, pour tout x[a, b], on a : f(x)>f(a).
démonstration :Soient ε > 0et Uε={x[a, b]|f(a)< f(x) + ε}. Montrons que Uε= [a, b].
Montrons que Uε6=:Trivial, car aUε. Soit alors c= sup(Uε)6b.
Montrons que c > a :fétant continue en a, il existe η > 0tel que a6x6a+ηf(x)>
f(a)ε, d’où a+ηUε. On en déduit que c>a+η > a.
Montrons que cUε:Par définition de la borne supérieure, c= lim(xn)xnUε, soit f(a)<
f(xn) + εpour tout entier n.fétant continue en c, on a f(xn)f(c), d’où f(a)< f(c) + ε,
c’est-à-dire cUε.
Montrons (par l’absurde) que c=b:Supposons donc que c < b, d’où c]a, b[. Par hypothèse,
f(c)>0. Or
f(c) = lim
xc
f(x)f(c)
xc>0.
Par continuité de fen c, il existe η>0tel que c6x6c+η, impliquant alors que f(x)>f(c).
Puisque cUε, on a finalement f(a)< f(c) + ε6f(x) + ε. Pour x=c+η, on trouve
f(a)< f(c+η)+ε, ce qui implique que c+ηUε. Ceci contredit l’égalité c= sup(Uε), donc
c>b. Or cvérifie aussi c6b(premier point de cette démonstration), donc finalement, c=b.
D’où Uε= [a, b], et pour tout xUε= [a, b], on conclut que f(a)< f(x) + εdonne l’inégalité
recherchée : f(a)6f(x).
Corollaire 2 : Soit f: [a, b]Rune fonction continue sur [a, b]et dérivable sur ]a, b[. Si f>0
sur ]a, b[si et seulement si fest croissante sur [a, b].
démonstration :
"" : Soient x, y [a, b]tels que x>y. Alors on a
f(x)>f(y)f(x)f(y)>0f(x)f(y)
xy>0yx
f(x)>0.
"" : Pour tout y]a, b[,fest continue sur [y, b]et dérivable sur ]y, b[. L’hypothèse f>0sur
]y, b[]a, b[assure par le théorème précédent que pour tout x]y, b[(donc en fait x>y),
f(x)>f(y).
4Inégalité des accroissements finis
65.3.2 Encadrements
Soit f:RRdéfinie par f(x) = cos(x), continue et dérivable sur R. Pour tout réel x,f(x) =
sin(x)⇒ |f(x)|61. Donc, par le corollaire 1, on a que pour tous réels xet y,
cos(x)cos(y)6|xy|
(l’appliquer sur [x, y]R). De même, pour tous x, y R,
sin(x)sin(y)6|xy|.
Exercice : Montrer que pour tous x, y R\(π
2+Zπ),
tan(x)tan(y)>|xy|.
Solution : On a :
x2>00<1
x2+ 1 61.
Or arctan(x) = 1/(x2+ 1), donc pour tous X, Y R, on a |arctan Xarctan Y|6|XY|. En prenant xet yde sorte que
X= tan(x)et Y= tan(y), on arrive au résultat demandé : |xy|6|tan xtan y|.
On cherche à encadrer 105. On considère f(x) = xsur [100,105]. Alors
f(x) = 1
2x1
22 61
2105 6f(x)61
2100 =1
20.
D’après le théorème 2, on obtient donc
1
22(105 100) 6105 100 61
20(105 100) 5
22 + 10 6105 65
20 + 10,
soit finalement 10,227 6105 610,25.
65.3.3 Nature de certaines suites
Soient un=Pn
k=1
1
ket vn= ln(n)pour tout nN. Posons f(x) = ln(x), de sorte que f(x) = 1
x. Alors,
si x[k, k + 1],
k6x6k+ 1 1
k+ 1 61
x61
k
thm 2
1
k+ 1 6ln(k+ 1) ln(k)61
k.
En sommant, on trouve alors
n
X
k=1
1
k+ 1 6ln(n+ 1) 6
n
X
k=1
1
kun1 + 1
n+ 1 6ln(n+ 1) 6un
ln(n+ 1) 6un6ln(n+ 1) + 1 1
n+ 1.
On en déduit alors que lim
n→∞ = +et lim
n→∞
un
vn
= 1 (on dit alors que (un)et (vn)sont équivalentes en +).
Inégalité des accroissements finis 5
Remarque 1 :Si f: [a, b]Rn(Rnmuni d’une norme euclidienne) continue sur [a, b]et dérivable sur ]a, b[,
et pour tout t]a, b[,kf(t)k6k. Alors pour tous x, y [a, b],kf(x)f(y)k6k|xy|.
démonstration :On pose
ϕ(t) = f(x)f(y)
xy, f(t).
Il suffit alors de calculer ϕ(t), d’appliquer le théorème de Cauchy-Schwarz afin de majorer |ϕ(t)|, et
enfin d’appliquer le corollaire 1 à cette fonction ϕ: [a, b]R.
65.3.4 Point fixe
Théorème 4 : Soient f: [a, b]Rcontinue sur [a, b]et dérivable sur ]a, b[, et k]0,1[. On
suppose que f[a, b]) [a, b]. Si l’on a |f(x)|6kpour tout x]a, b[, alors l’équation f(x) = x
admet une unique solution xdans [a, b].
démonstration :Par hypothèse, f[a, b]) [a, b], donc f(a)>aet f(b)6b. Posons alors g(x) =
f(x)x, de sorte que g(a) = f(a)a>0et g(b)60. Grâce au théorème des valeurs intermédiaires,
il existe x]a, b[tel que g(x) = 0, soit f(x) = x.
Supposons alors que exsoit une autre solution de l’équation f(x) = x. Alors (par le corollaire 1),
|f(x)f(ex)|6k|xex| ⇔ (1 k)|xex|60. Ok k6= 1, donc on a |xex|60xex|=
0x=ex.
Corollaire 3 : Si fest une fonction vérifiant les hypothèses du théorème 4, alors la suite définie par
u0[a, b]et pour tout nN,un+1 =f(un)converge vers xet l’on a la majoration de l’erreur
pour tout n:
|unx|6kn|ba|.
démonstration :fétant continue sur [a, b], on passe à la limite dans la relation la définissant, de sorte
que
lim
n→∞ un= lim
n→∞ un+1 = lim
n→∞ f(un) = flim
n→∞ un,
donc lim unest point fixe de f, c’est-à-dire lim un=x.
De plus, |unx|=|f(un1)f(x)|6k|un1x|par le corollaire 1. Une récurrence immédiate
montre qu’alors, pour tout entier naturel n,|unx|6kn|u0x|. Or a6u06bet b6
x6a, donc ab6unx6ba⇔ |u0x|6|ba|, et il vient que pour tout entier n,
|unx|6kn|ba|.
Exercice : Déterminer une valeur approchée au millième, puis à 104près, de la solution de l’équation
x3+ 4x1 = 0.
Solution : Pour tout entier naturel n, on définit la suite (un)de la manière suivante :
u0= 0
un+1 =1
4(1 un
3)nN.
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