Sur cette même période paraîtra le rapport BERLAND [11] , qui face à la baisse de la
démographique médicale, transfert des actes techniques médicaux sous l’appellation de
compétences aux infirmiers. L’identification des infirmières aux médecins n’en sera que
renforcée. Apparaît alors les prémices d’une identité infirmière. En effet, le semblant de toute
puissance de la médecine dans ces années sert non seulement à la guérison des malades mais
confère également une identité aux infirmiers. De plus, les malades meurent à la maison, la
mort est affaire de famille celle –ci s’inscrit dans la culture de l’époque, la femme est encore
en grande partie au foyer et le prendre soin lui appartient [12].
Ces deux paramètres, l’avancé technologique médicale et la mort au domicile font que
l’infirmier s’est construit une identité professionnelle autour du « guérir », la mort pouvait
sembler être exclue de l’hôpital puisque grâce aux techniques médicales nous étions
persuadés de pouvoir y guérir.
Thanatophobie, la mort dans l’institution
L’apparition du S.I.D.A dans le milieu des années 1980, nous a montré à quel point la
médecine peut être impuissante face à la mort. Cette maladie inattendue, à montré à la
corporation médicale que la « toute puissance du guérir » n’est pas. Cette situation amène le
corps infirmier à se questionner sur son rôle. La mort n’est plus à cette époque affaire de
famille, les malades sont conduits vers les hôpitaux pour y mourir. En effet, la femme
travaillant de plus en plus vers l’extérieur, celle-ci ne peut plus autant s’occuper de ses
proches. Tout « naturellement », les familles se déchargent sur les hôpitaux, lieu de soins, où
ils pensent pouvoir compter sur les soignants pour accompagner leurs proches.
La naissance d’une identité
Pour ERICKSON « l’identité commence là où cesse l’utilité de l’identification ». Cette
nouvelle redéfinition des hôpitaux faite par une pratique sociétale serait-elle à l’origine de la
naissance de l’identité infirmière ? Cette nouvelle demande envers l’hôpital amène vers une
nouvelle prise en soins des patients. La façon de penser le patient dans les pratiques
professionnelles s’en trouve modifiée. Ces pratiques antérieures morcelaient facilement le
patient et l’identifiaient à un organe ou une maladie. Qui n’a jamais entendu dans un hôpital «
c’est le pancréas de la chambre … », en examinant sous un autre angle cette pratique, non
seulement elle ne permettait pas au patient d’exister dans le soin mais en plus elle était
empreinte d’un savoir médical. Mais aujourd’hui, avec l’entrée de la mort de façon importante
dans les hôpitaux cette pratique ne peux plus perdurer, les soignants doivent penser en matière
de « prendre soin ».
La notion du prendre soin, Walter HESBEEN [13] l’a développé. Il faut faire la
distinction entre « faire des soins » où le corps donc le patient est objet et le concept du «
prendre soin » de quelqu’un où le corps est sujet, le patient est pris en compte. Cette
différence permet d’être dans « une perspective soignante, porteuse de sens et aidante pour la
personne soignée » selon cet auteur. Faire du soin renvoi à la technicité et peut être dénué de
lien humain entre le soignant et la personne soignée. Prendre soin implique que l’infirmier
considère le patient qu’il se doit de soigner et qu’en même temps il entreprenne une relation
avec celui-ci. Chaque relation est singulière car elle varie en fonction du soignant et de la
personne soignée. Ce qui induit que chaque relation est particulière.
Ce concept du prendre soin est donc cette attention singulière que l’on va porter à une
personne vivant une situation délicate en vue de lui venir en aide, de contribuer à son bien-
être. En conséquence, tout soignant doit réfléchir sur ses propres valeurs soignantes avant
d’entrer en relation de soin. Les valeurs sont les convictions que nous considérons comme