14e Rencontre sur les urgences et complications sévères chez le

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ORMATION
CONTINUE
La 14ème Rencontre sur les Urgences et
Complications sévères chez le Patient cancéreux s’est
tenue le samedi 19 octobre 2013 à l’Institut Bordet à
Bruxelles. Comme chaque année, la formule consistait
en une séance thématique le matin et une table ronde
sur un sujet " éthique ou économie " l’après-midi.
La séance thématique a été consacrée au
" syndrome de détresse respiratoire aiguë " et était
présidée par les Prs Jean-Paul Sculier (Institut
Jules Bordet, Bruxelles) et Jean-Jacques Lafitte
(Hôpital Calmette, Lille).
Le premier exposé a été donné par
Dominique Benoît (Universitair Ziekenhuis, Gent) sur la
nouvelle définition du SDRA (syndrome de détresse
respiratoire aiguë). Le SDRA a été défini dans les
années soixante comme une forme grave d’œdème
pulmonaire lésionnel. Il correspond à un dommage
alvéolaire diffus avec 3 phases : aiguë avec des
membranes hyalines les 7 premiers jours, subaiguë
avec des lésions d’organisation pendant la deuxième
semaine et chronique conduisant à la fibrose après la
deuxième semaine. Différentes définitions ont été
données depuis la description initiale.
Plusieurs éléments ont amené à proposer une
nouvelle définition. D’abord, il n’y a pas de standard
clinique pour définir un SDRA. En effet, quand on
confronte les données d’autopsie aux données
cliniques, beaucoup de SDRA sont mal diagnostiqués.
Les causes conduisant au SDRA sont très hétérogènes,
les études épidémiologiques sont imprécises, beaucoup
d’études cliniques testant de nouvelles approches
thérapeutiques se sont avérées négatives. Un des gros
problèmes est lié à l’hétérogénéité des tableaux
cliniques repris sous la définition du syndrome. Il a dès
lors été proposé de redéfinir le syndrome sur base
d’une banque de données venues d’essais cliniques
de plus de 4.000 patients. Cette nouvelle définition vise
avant tout à avoir des populations de patients plus
homogènes pour les études. Elle se base sur le temps
d’installation (moins d’une semaine), les images
radiologiques (opacités bilatérales), l’origine de
l’œdème pulmonaire (ne doit pas être cardiaque ou de
simple surcharge) et l’oxygénation. On distingue
trois stades : léger, moyen et sévère en prenant en
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Rencontre sur les urgences et complications
sévères chez le patient cancéreux
J.-P. Sculier
Service des Soins Intensifs et Urgences Oncologiques & Oncologie Thoracique, Institut
Jules Bordet
compte le niveau de pression expiratoire positive (PEP)
et la fraction d’oxygène inspiré. La notion d’ALI (acute
lung injury), forme mineure de SDRA, est abandonnée.
En principe, les trois groupes définis doivent avoir un
pronostic différent, ce qui ne semble pas être le cas
comme le suggèrent les premières études de validation
externe.
Le deuxième exposé sur le diagnostic étiologique
a été réalisé par Thierry Berghmans et Ingrid CsToth
(Institut Jules Bordet, Bruxelles). Différentes causes
sont possibles : pulmonaires (pneumonies infectieuses,
inhalation, agents toxiques, etc.) et extra-pulmonaires
(sepsis, trauma, pancréatite aiguë, etc.). Il faut exclure
un œdème pulmonaire hémodynamique (par la clinique,
l’échographie cardiaque, voire un cathétérisme
cardiaque droit), une pneumopathie interstitielle diffuse
sous-jacente, une hémorragie alvéolaire. Le LBA est
fort important pour mettre en évidence des étiologies
curables. Les biomarqueurs sont actuellement de peu
d’utilité.
Jean-Michel Constantin (C.H.U. de Clermont-Ferrand,
France) a abordé la prise en charge thérapeutique. Il a
insisté sur le fait que l’objectif thérapeutique devait être
avant tout de ne pas nuire, c’est-à-dire d’éviter l’iatrogénie,
par exemple en évitant le remplissage vasculaire inutile ou
l’aspiration systématique, source de dérecrutement. En
termes de ventilation mécanique, le mode peut être basé
sur le volume ou la pression ; il n’y a pas de différence
évidente entre les deux approches.
Il est important de ne
pas administrer de trop gros volumes courants.
Actuellement, il est recommandé de ne pas dépasser
10 ml/kg : on prescrit souvent entre 6 à 8 mml/kg en se
référant au poids idéal du patient. On évitera de
dépasser une pression de plateau de 30 cm d’eau. En
ce qui concerne le niveau de pression télé-expiratoire
positive (PEP), elle est utile mais il n’y a pas de règle
qui permet de la définir de façon sûre. Le décubitus
ventral est une manœuvre thérapeutique controversée.
Il pourrait y avoir intérêt à curariser le patient pendant
les 48 premières heures. Le recours à des paramètres
physiologiques, comme la mesure de la pression
œsophagienne, pourrait aider, par exemple en
permettant de régler la PEP. Dans les formes diffuses
de SDRA, au contraire des formes focalisées, le
recrutement alvéolaire doit être maintenu et c’est là
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que la PEP joue tout son rôle. Certaines mesures
préventives méritent de retenir l’intérêt des
réanimateurs comme la prise en charge précoce en
réanimation et l’administration d’une ventilation non
invasive qu’il ne faudra pas s’acharner à vouloir
poursuive si la situation se détériore.
Les complications de la ventilation mécanique ont
été revues par Pierre Damas (C.H.U. de Liège). Le
conférencier a défini deux périodes à risque. Il y a
d’abord l’intubation avec des risques de traumatisme
laryngé, de sténose trachéale et surtout d’inhalation
souvent négligés mais fort importants. Ensuite après
l’intubation, on peut avoir des complications liées à la
ventilation. Les deux principales sont les traumatismes
(barotraumatisme, volotraumatisme ou biotraumatisme)
et la pneumonie associée à la ventilation. Les
barotraumatismes peuvent être minimisés par la
ventilation protectrice, leur incidence est d’environ 5 à
10 %. Les infections survenant en ventilation sont
essentiellement liées à l’existence du tube
endotrachéal. Il convient de prendre des mesures
souvent simples mais régulièrement oubliées comme
de bien positionner le patient, d’éviter une sédation
trop importante et trop prolongée, de faire des soins
oropharyngés adéquats y compris le brossage des
dents, de contrôler la pression du tube et d’envisager
une aspiration sous-glottique efficace. Cette dernière
technique, malheureusement très coûteuse, permet une
réduction significative du nombre d’infections.
Achille Kouatchet (C.H.U. d’Angers, France) a
revu le pronostic du SDRA chez le patient oncologique.
Il a d’abord fait remarquer que la survie des patients
cancéreux admis en réanimation s’est fort améliorée
ces dernières années, probablement en rapport avec
une meilleure sélection et une admission plus précoce.
En ce qui concerne les populations générales de
patients, on note une survie à long terme en cas de
SDRA ventilé entre 50 et 73 % sans nécessité d’un
support ventilatoire pour la plupart des patients après
leur retour à domicile. En ce qui concerne le SDRA
spécifiquement lié au cancer, on a très peu de données
spécifiques. Une étude rétrospective portant sur 70 cas
s’intéresse au SDRA chez le neutropénique, montrant
que le SDRA peut survenir chez le patient atteint de
neutropénie contrairement aux idées reçues. Deux
séries françaises, non encore publiées, ont défini le
SDRA en fonction des critères de Berlin avec des
mortalités allant de 50 à 70 %. La mortalité globale est
aux alentours de 60 %, ce qui suggère que le SDRA
chez le cancéreux n’est pas de très bon pronostic.
Cependant, il faut noter que la définition de Berlin est
basée sur une banque de données qui a exclu les
patients d’oncohématologie et il faudrait dès lors
déterminer si cette définition leur est applicable.
La séance thématique s’est terminée par la
présentation de deux cas cliniques, l’un par Jacques
Devriendt (C.H.U. Brugmann, Bruxelles) sur un cas de
grippe ayant nécessité une ventilation et l’application
d’une ECMO dans un contexte de syndrome
myélodysplasique découvert en réanimation et l’autre
par Nicolas Maziers (Hôpital Saint-Louis, Paris) sur une
pneumonie à Pneumocystis survenue chez une patiente
atteinte d’un cancer mammaire métastatique multi-
traité.
L’après-midi a été consacré à une table ronde
intitulée " les soins intensifs oncologiques concentrent-
ils les maladies rares ? ". Elle était présidée par
Anne-Pascale Meert (Institut Jules Bordet, Bruxelles)
et Dominique Benoit (Universitair Ziekenhuis, Gent).
Jean-Paul Sculier a défini une maladie rare. La séance
thématique du matin consacrée au SDRA en
oncohématologie en est la parfaite illustration. Les
maladies rares ont pris un essor fort important en
Europe grâce à la publication au Journal officiel de
l’Union d’un programme destiné à encourager la prise
en charge et la recherche dans les maladies rares qui
ont été définies par le Conseil européen. Les maladies
rares sont des maladies peu fréquentes, on estime qu’il
y en a entre 5.000 et 8.000 mais beaucoup de patients
peuvent présenter une maladie rare. On évalue qu’en
Europe, 6 à 8 % de la population est atteinte d’une
maladie rare. Dans le cadre du nouveau programme
Horizon 2020, l’Union Européenne devrait
considérablement accroître son soutien à la recherche
dans ce domaine, notamment en favorisant les
collaborations à travers les pays de l’Union. C’est dans
cette optique que la collaboration Orphanet, née
initialement en France, a connu un développement fort
important. Cette collaboration a été présentée par Odile
Kremp (directrice du service de l’Inserm en charge
d’Orphanet, Paris), avec son le site (www.orphanet.fr).
Orphanet a été créé en 2007 et couvre actuellement le
monde avec 28 sites nationaux en langue locale. Le
site officiel Orphanet est actuellement en 7 langues. Il
comporte toute une série d’informations accessibles à
tous : classification des maladies, encyclopédie qui est
le produit-phare avec de très nombreux résumés
directement accessibles en ligne, des centres de
référence pour la prise en charge, les associations de
patients, les réseaux, les informations sur les
médicaments orphelins. Il existe également une série
de cahiers Orphanet et une base de données
OrphaData.
Deux exemples de maladies ont ensuite été
présentés. Julie Gorham (ULB, Bruxelles) a décrit un
cas fort rare, une tumeur myofibroblastique
inflammatoire responsable de nombreux syndromes
paranéoplasiques ayant amené le patient en
réanimation : coagulation intravasculaire disséminée,
hypercalcémie, hypoglycémie. Ce type de cas justifie
pleinement une collaboration européenne pour les
recenser et tenter de mettre au point des attitudes
thérapeutiques plus uniformes. Michaël Duruisseaux
(C.H.U. de Grenoble) a présenté un projet de recherche
potentiel à savoir l’admission en réanimation de patients
porteurs d’une tumeur pulmonaire non à petites cellules
avec une mutation EGFR. Il n’y a actuellement aucun
cas rapporté à ce sujet dans la littérature. Trois cas
sont cependant disponibles pour le gène de fusion ALK.
Ce sont des cas où le diagnostic de l’anomalie
génétique a été posé en réanimation et a permis le
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sevrage du ventilateur par un traitement efficace.
De la discussion globale, il ressort qu’il convient
d’introduire dans les maladies rares les complications
sévères du patient cancéreux justifiant une prise en
charge en milieu de soins intensifs. Ce type de
collaboration pourrait s’instaurer au niveau des groupes
de travail d’oncohématologie franco-belges existants ou
au niveau de sociétés scientifiques comme l’European
Respiratory Society qui a des assemblées
spécifiquement dédiées à la réanimation et à
l’oncologie.
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