5 Division euclidienne

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Division euclidienne
Les anneaux considérés dans ce chapitre sont commutatifs et intègres.
On notera respectivement 0A , 1A (ou 0 et 1 quand l'anneau est xé et qu'il n'y a pas
d'ambiguïté) les éléments neutres pour l'addition et la multiplication d'un anneau unitaire
(A, +, ·) , avec 0A ̸= 1A .
Pour un anneau A, on note A∗ = A \ {0A } , et dans le cas où il est unitaire, A× est le groupe
des éléments inversibles de A.
Deux éléments a, b d'un anneau commutatif et unitaire A, sont dit associés s'il existe un
élément inversible u ∈ A× tel que b = ua.
Un élément p d'un anneau commutatif, unitaire et intègre A, est dit irréductible si p ̸= 0A ,
p∈
/ A× et :
(
)
(p = uv) ⇒ u ∈ A× ou v ∈ A×
(les seuls diviseurs de p sont les éléments inversibles ou les éléments de A associés à p).
Un élément p d'un anneau commutatif, unitaire et intègre A, est premier si p ̸= 0A , p n'est
pas inversible et :
(p divise uv) ⇒ (p divise u ou p divise v)
5.1 Anneaux euclidiens
Dénition 5.1 On appelle stathme sur un anneau A (commutatif et intègre) une application
φ : A∗ → N.
Dénition 5.2 On dit qu'un anneau (commutatif et intègre) A est euclidien, s'il existe un
stathme φ tel que pour tout couple (a, b) d'éléments de A avec b ̸= 0A , il existe un couple (q, r)
dans A2 tel que a = bq + r avec r = 0A ou r ̸= 0A et φ (r) < φ (b) .
On dit que q est un quotient et r un reste dans la division euclidienne de a par b.
On notera (A, φ) un tel anneau euclidien ou tout simplement A, quand le stathme est xé.
On rappelle qu'un anneau A est principal s'il est intègre et si tout idéal de A est principal,
c'est-à-dire de la forme I = a0 · A. On notera (a0 ) un tel idéal principal.
Théorème 5.1 Un anneau euclidien
(A, φ) est principal. Précisément, pour tout idéal I de
A non réduit à {0A } , il existe un élément a0 dans I \ {0A } tel que φ (a0 ) = min φ (a) et
a∈I\{0A }
I = a0 A.
107
Division euclidienne
108
Démonstration. Soient (A, φ) un anneau euclidien et I un idéal de A.
Si I = {0} , il est alors principal engendré par 0.
Si I ̸= {0} , on note alors :
n0 = min φ (I \ {0A }) = min φ (a)
a∈I\{0A }
Cette borne inférieure existe et est atteinte puisque φ (I \ {0A }) est une partie non vide de
N, c'est-à-dire qu'il existe a0 dans I \ {0A } tel que n0 = φ (a0 ) = min φ (I \ {0A }) .
La division euclidienne d'un élément a de I par a0 donne a = qa0 + r avec r = 0A puisque
a0 est de stathme minimal dans l'idéal I \ {0A } (si r ̸= 0A , alors r = a − qa0 est dans I \ {0A }
puisque I est un idéal et φ (r) < φ (a0 ) = n0 , ce qui contredit la dénition de n0 ), donc a = qa0
et I ⊂ a0 A. Comme par ailleurs a0 A ⊂ I puisque I est un idéal, on a I = a0 A.
En dénitive, A est principal.
Corollaire 5.1 Un anneau euclidien est nécessairement unitaire.
Démonstration. A étant un idéal, il existe a0 ∈ A tel que A = a0 A.
Pour tout a ∈ A, il existe alors un élément q ∈ A tel que a = qa0 . En particulier il existe
e ∈ A tel que a0 = ea0 et en conséquence, pour tout a = qa0 ∈ A, on a ae = qa0 e = qa0 = a,
ce qui signie que e est l'élément neutre de A pour le produit.
Dans ce qui suit les anneaux considérés sont commutatifs, unitaires et intègres.
Si A est un corps, on a alors a = bq avec q = ab−1 pour tous (a, b) ∈ A × A∗ , donc r = 0A
est un reste et n'importe quelle application φ : A∗ → N est un stathme.
Exercice 5.1 Soit (A, φ) un anneau euclidien. Montrer que si le stathme φ est constant, A est
alors un corps.
Solution 5.1 On rappelle qu'un corps commutatif est un anneau commutatif unitaire et intègre
dans lequel tout élément non nul est inversible.
Si le stathme φ est constant, l'inégalité stricte φ (r) < φ (b) n'est jamais vériée, donc la division
euclidienne de a ∈ A par b ∈ A∗ est de la forme a = bq. En particulier, on aura 1A = bq pour
tout b ∈ A∗ , ce qui revient à dire que A est un corps.
Exercice 5.2 L'anneau Z [X] est-il euclidien ?
Solution 5.2 En montrant que cet anneau n'est pas principal, on déduit qu'il n'est pas eucli-
dien.
Considérons l'idéal I = (2, X) = 2Z + XZ engendré par 2 et X dans Z [X] et supposons qu'il
existe P ∈ Z [X] tel que I = (2, X) = (P ) .
Comme 2 ∈ I, il existe Q ∈ Z [X] tel que 2 = P Q, donc P est constant divisant 2, soit P = ±1
ou P = ±2.
Comme P ∈ I, on a P = 2A + XB avec A, B dans Z [X] , donc P = P (0) = 2A (0) est un
entier pair, soit P = ±2.
Comme X ∈ I, on a X = QP avec Q ∈ Z [X] et l'évaluation en 1 nous donne 1 = P (1) Q (1) =
2a avec a ∈ Z, ce qui est impossible.
Exercice 5.3 Soit A un anneau commutatif, unitaire et intègre qui n'est pas un corps. L'anneau
A [X] est-il euclidien ?
Anneaux euclidiens
109
Solution 5.3 On procède comme pour Z [X] : l'anneau A [X] est non principal, donc non euclidien, si A n'est pas un corps.
Comme A n'est pas un corps, il existe λ ∈ A∗ non inversible et on considère l'idéal I = (λ, X) =
λA + XA engendré par λ et X dans A [X] .
Supposons qu'il existe P ∈ A [X] tel que I = (P ) .
Comme λ ∈ I, il existe Q ∈ A [X] tel que λ = P Q, donc P est constant divisant λ.
Comme P ∈ I, on a P = λA + XB avec A, B dans A [X] , donc P = P (0A ) = λA (0A ) = λa
avec a ∈ A.
Comme X ∈ I, on a X = QP avec Q ∈ A [X] et l'évaluation en 1A nous donne 1A =
P (1A ) Q (1A ) = λb avec b ∈ A, ce qui contredit le fait que λ n'est pas inversible.
Dénition 5.3 Si (A, φ) est un anneau euclidien, on dit alors que le stathme φ est croissant
(pour l'ordre de la division) si :
∀ (a, b) ∈ A∗ × A∗ , φ (ab) ≥ φ (a)
ce qui revient à dire que si a, c dans A∗ sont tels que a divise c, on a alors φ (a) ≤ φ (c) .
Le lemme qui suit nous dit que si (A, φ) est un anneau euclidien, on peut alors toujours se
ramener à un stathme croissant.
Lemme 5.1 Étant donné un anneau euclidien (A, φ) , l'application φ : A∗ → N dénie par :
∀a ∈ A∗ , φ (a) = min∗ φ (ax)
x∈A
est un stathme croissant et (A, φ) est un anneau euclidien.
Démonstration. Pour tout a ∈ A∗ , l'ensemble {φ (ax) | x ∈ A∗ } est une partie non vide de
N, admet un plus petit élément ce qui justie la dénition de φ (a) .
Pour a, b dans A∗ , on a :
φ (ab) = min∗ φ (abx) = φ (abx0 ) ≥ φ (a)
x∈A
donc φ est un stathme croissant.
Soient a, b dans A avec b ̸= 0 et x0 ∈ A∗ tel que φ (b) = min∗ φ (bx) = φ (bx0 ) . On a la
x∈A
division euclidienne dans (A, φ) de a par bx0 , a = bqx0 + r avec r = 0 ou r ̸= 0 et :
φ (r) ≤ φ (r) < φ (bx0 ) = φ (b)
ce qui nous donne une division euclidienne dans (A, φ) .
Le théorème qui suit nous montre l'intérêt des stathmes croissants.
Théorème 5.2 Soit (A, φ) un anneau euclidien tel que le stathme φ soit croissant.
1. Pour tout (a, b) ∈ A∗ × A∗ , on a φ (ab) ≥ φ (a) , l'égalité étant réalisée si, et seulement
si, b est inversible.
En particulier, on a φ (−a) = φ (a) et φ (ab) > φ (a) pour a, b non nuls avec b non
inversible.
2. Pour tout a ∈ A∗ , on a :
φ (a) = min∗ φ (ax)
x∈A
En particulier, on a :
φ (1A ) = min∗ φ (x)
x∈A
Division euclidienne
110
3. On a :
A× = {a ∈ A∗ | φ (a) = φ (1A )}
Démonstration.
1. Soit a ∈ A∗ .
Comme φ est croissant, on a φ (a) ≤ φ (ab) pour tout b ∈ A∗ .
Si b ∈ A× , on a alors :
(
)
φ (ab) ≥ φ (a) et φ (a) = φ (ab) b−1 ≥ φ (ab)
donc φ (ab) = φ (a) .
Si b ∈ A∗ est tel que φ (a) = φ (ab) , la division euclidienne de a par ab, a = q (ab) + r
impose r = 0, car sinon on a r = a (1 − qb) ∈ A∗ avec :
φ (a) ≤ φ (a (1A − qb)) = φ (r) < φ (ab)
ce qui contredit φ (a) = φ (ab) . On a donc r = a (1A − qb) = 0 avec a ∈ A∗ , ce qui impose
qb = 1A et signie que b est inversible.
2. Pour tout x ∈ A∗ , on a φ (a) ≤ φ (ax) et φ (a) = φ (a · 1A ) avec 1A ∈ A∗ , donc φ (a) =
min φ (ax) .
x∈A∗
3. Pour a ∈ A∗ , on a φ (a) = φ (1A · a) = φ (1A ) si, et seulement si, a ∈ A× , donc A× =
{a ∈ A∗ | φ (a) = φ (1A )} .
On peut montrer, mais ce n'est pas élémentaire, qu'un anneau principal est factoriel et en
conséquence il en est de même pour une anneau euclidien.
La démonstration directe du fait qu'un anneau euclidien est factoriel est plus simple, en
utilisant un stathme croissant.
Lemme 5.2 Soit A un anneau principal. Un élément a de A est irréductible si, et seulement
si, il est premier.
Démonstration. Soit a ∈ A irréductible.
Comme l'anneau A est principal, l'idéal I = (a, b) = aA + bA est engendré par un élément
δ (δ est un pgcd de a et b dans A), soit I = δA.
De a ∈ I, on déduit que δ divise a, donc δ est soit inversible, soit associé à a, puisque a est
irréductible.
Dans le cas où δ est inversible, on a δA = A, donc 1A ∈ I, soit 1A = au + bv avec u, v dans
A et a divise c = acu + bcvw.
Dans le cas où δ est associé à a, on a δA = aA, donc b ∈ aA et a divise b.
Soit a ∈ A premier.
Si a = bc, il divise bc, donc il divise b ou c. Supposons qu'il divise b, soit b = ua, on a alors
a = uac et 1 = uc, ce qui signie que c est inversible. En dénitive, a est irréductible.
Par récurrence, on déduit du théorème précédent, que si a irréductible dans un anneau
r
∏
principal A, divise un produit
bk , il divise alors l'un des bk (théorème d'Euclide).
k=1
Théorème 5.3 Soit
(A, φ) un anneau euclidien. Un élément a ∈ A∗ est soit inversible, soit
un produit ni d'éléments irréductibles. Si a ∈ A∗ \ A× s'écrit de deux manières :
a=
r
∏
s
∏
pk =
qj
k=1
j=1
pgcd dans un anneau euclidien
111
où les pk et qj sont des éléments irréductibles de A, on a alors r = s, chaque pk est associé à
un qj et réciproquement.
Démonstration. Quitte à remplacer le stathme φ par le stathme φ déni avec le lemme
5.1, on peut supposer que φ est croissant.
Pour l'existence d'une décomposition en facteurs irréductibles, on procède par récurrence
sur φ (a) ∈ N, pour a ∈ A∗ .
Si φ (a) = φ (1A ) (la valeur minimale du stathme φ), a est alors inversible.
Si A est un corps c'est alors terminé, sinon on se donne a ∈ A∗ non inversible et on suppose
que le résultat est acquis pour tous les éléments b de A∗ tels que φ (b) < φ (a) .
Si a est irréductible, c'est alors terminé, sinon il s'écrit a = bc où b et c ne sont pas inversibles
et on a φ (b) < φ (bc) = φ (a) , φ (c) < φ (bc) = φ (a) , donc l'hypothèse de récurrence nous dit
que b et c sont des produits nis d'éléments irréductibles. Il en est alors de même de a.
Si a =
r
∏
s
∏
pk =
qj avec 1 ≤ r ≤ s, les pk et qj étant irréductibles dans A, p1 est alors un
k=1
j=1
s
∏
élément irréductible de A qui divise le produit
qj et en conséquence il divise l'un des qi et
j=1
comme p1 et qi sont irréductibles, ils sont nécessairement associés. Dans l'anneau intègre A, on
peut alors simplier par p1 et il nous reste
r
∏
pk = u
k=2
Au bout de r étapes, on aboutit à 1A = v
∏
s
∏
qj , où u est un élément inversible de A.
j=1
j̸=i
qj , où v est un élément inversible de A et J une
j∈J
partie de {1, · · · , s} et comme les qj sont irréductibles, cette partie est nécessairement vide, ce
qui veut dire que r = s et les pk , qj sont deux à deux associés.
Le théorème précédent se traduit en disant qu'un anneau euclidien est factoriel.
5.2
pgcd
dans un anneau euclidien
Ici (A, φ) est un anneau euclidien.
Pour tout r-uplet (a1 , · · · , ar ) d'éléments de A, avec r ∈ N\ {0, 1} , on note :
{
(a1 , · · · , ar ) =
x ∈ A | ∃ (u1 , · · · , ur ) ∈ A ; x =
r
r
∑
}
uk ak
k=1
et on vérie facilement que cet ensemble est un idéal de A. On dit que c'est l'idéal de A engendré
par la famille {a1 , · · · , ar } .
Un anneau euclidien étant principal, on a immédiatement le résultat suivant.
Théorème 5.4 Soient r ∈ N \ {0, 1} et a1 , · · · , ar des éléments de A. Il existe un élément δ
de A tel que :
(a1 , · · · , ar ) = (δ)
Cet élément s'écrit :
δ=
r
∑
uk ak
(5.1)
k=1
et vérie la propriété suivante :
{
∀k ∈ {1, · · · , r} , δ divise ak
tout diviseur commun à a1 , · · · , ar divise δ
(5.2)
Division euclidienne
112
Démonstration. L'existence de δ se déduit du fait que (a1 , · · · , ar ) est un idéal de l'anneau
principal A.
Comme δ ∈ (δ) = (a1 , · · · , ar ) , il existe (u1 , · · · , ur ) ∈ A tel que δ =
r
r
∑
uk ak .
k=1
De (ak ) ⊂ (δ) pour tout k compris entre 1 et r, on déduit que δ divise ak .
Si d ∈ A est un diviseur commun aux ak , il divise aussi δ =
On peut donc donner la dénition suivante.
r
∑
uk ak .
k=1
Dénition 5.4 Soient
r ∈ N\ {0, 1} et a1 , · · · , ar des éléments de A. On appelle plus grand
commun diviseur de a1 , · · · , ar tout élément δ de A qui vérie la condition (5.2) .
On note pgcd (a1 , · · · , ar ) ou a1 ∧ · · · ∧ ar un tel élément.
La relation (5.1) est l'identité de Bézout.
Exercice 5.4 Montrer que pgcd (a1 , · · · , ar ) = 0A si, et seulement si, tous les ak sont nuls.
Solution 5.4 Si ak
= 0A pour tout k compris entre 1 et r, on a alors (a1 , · · · , ar ) = {0A } et
pgcd (a1 , · · · , ar ) = 0A .
Réciproquement si pgcd (a1 , · · · , ar ) = 0A , tous les ak sont divisibles par 0A , ce qui signie qu'ils
sont nuls.
Exercice 5.5 Montrer que deux pgcd d'une famille {a1 , · · · , ar } d'éléments de A non tous
nuls, sont associés et ont même stathme.
Solution 5.5 Si (δ) = (δ′ ) , on a alors δ = q′ δ′ et δ′ = qδ, ce qui entraîne δ = q′ qδ et q′ q = 1A
puisque δ ̸= 0A (les ak ne sont pas tous nuls) et A est intègre. Donc q, q ′ sont inversibles et δ, δ ′
sont associés et en conséquence ont même stathme.
Dans ce qui suit, les pgcd considérés sont, a priori, ceux d'éléments de A tous non nuls.
Le pgcd d'éléments ak tous non nuls étant unique à association près, on abusera du langage
pour dire le pgcd de a1 , · · · , ar .
Dans un anneau euclidien, on dispose de l'algorithme d'Euclide pour obtenir le pgcd de deux
éléments non nuls, cet algorithme permet également de déterminer des éléments u et v de A
tels que au + bv = a ∧ b.
Tout est basé sur le résultat suivant.
Lemme 5.3 Soient
alors :
a, b dans A∗ et r un reste dans la division euclidienne de a par b. On a
{
b si r = 0A
a∧b=
b ∧ r si r ̸= 0A
(à un multiplicateur inversible près).
Démonstration. On a a = bq + r avec r = 0A ou r ̸= 0A et φ (r) < φ (b) .
Si r = 0A , alors b divise a, donc (a, b) = (b) et a ∧ b = b.
Si r ̸= 0A , δ = a ∧ b qui est un diviseur commun à a et b va diviser r = a − bq, c'est donc un
diviseur commun à b et r et δ divise δ ′ = b ∧ r.
Comme δ ′ = b ∧ r est un diviseur commun à b et r, il divise aussi a = bq + r, c'est donc un
diviseur commun à a et b et δ ′ divise δ. On a donc δ = uδ ′ avec δ ′ ̸= 0A et u ∈ A× .
pgcd dans un anneau euclidien
113
Le principe de l'algorithme d'Euclide est le suivant pour a, b dans A∗ tels que φ (a) ≥ φ (b)
(a et b jouent des rôles symétriques).
On note r0 = b et on désigne par r1 un reste dans la division euclidienne de a par b.
Si r1 = 0A , c'est alors terminé : a ∧ b = r0 = b.
Sinon, on a φ (r1 ) < φ (r0 ) et d'après le lemme précédent :
a ∧ b = r0 ∧ r1
On désigne alors par r2 un reste dans la division euclidienne de r0 par r1 .
Si r2 = 0A , c'est alors terminé : a ∧ b = r0 ∧ r1 = r1 .
Sinon, on continu avec r0 ∧ r1 = r1 ∧ r2 .
On dénit donc ainsi une suite (rn )n≥0 d'éléments de A par :
r0 = b ;
r1 est un reste dans la division euclidienne de a par b ; on a donc r1 = 0A ou 0 ≤ φ (r1 ) <
φ (r0 ) ;
pour n ≥ 2, si rn−1 = 0A alors rn = 0A , sinon rn est un reste dans la division euclidienne
de rn−2 par rn−1 et on a rn = 0A ou 0 ≤ φ (rn ) < φ (rn−1 ) .
Il existe alors un entier p ≥ 1 tel que rp = 0A , 0 ≤ φ (rp−1 ) < · · · < φ (r1 ) < φ (r0 ) et :
a ∧ b = r0 ∧ r1 = · · · = rp−1 ∧ rp = rp−1 .
C'est à dire que a∧b est le dernier reste non nul dans cette suite nie de divisions euclidiennes.
On a en fait construit avec l'algorithme d'Euclide, dans le cas où b ne divise pas a, deux
suites (rn )0≤n≤p et (qn )1≤n≤p d'éléments de A de la manière suivante :


a = q1 r0 + r1 (r1 ̸= 0A et φ (r1 ) < φ (r0 ))




 r0 = q2 r1 + r2 (r2 ̸= 0A et φ (r2 ) < φ (r1 ))
.
..



rp−3 = qp−1 rp−2 + rp−1 (rp−1 ̸= 0A et φ (rp−1 ) < φ (rp−2 ))


 r
p−2 = qp rp−1 + rp (rp = 0A )
On vérie alors, par récurrence nie sur k ∈ {0, 1, · · · , p − 1} , qu'il existe uk et vk dans A
tels que rk = auk + bvk .
Pour k = 0 et k = 1 on a :
r0 = b = a · 0A + b · 1A ,
r1 = a · 1A + b (−q1 ) .
En supposant le résultat acquis jusqu'à l'ordre k − 1 pour 0 ≤ k − 1 ≤ p − 2 on a :
rk = −qk rk−1 + rk−2
= −qk (auk−1 + bvk−1 ) + auk−2 + bvk−2
= a (uk−2 − qk uk−1 ) + b (vk−2 − qk vk−1 ) = auk + bvk .
En particulier pour k = p − 1 on a a ∧ b = rp−1 = aup−1 + bvp−1 = au + bv.
Un tel couple (u, v) n'est pas unique puisque si (u, v) est une solution, pour tout λ ∈ A, le
couple (u′ , v ′ ) = (u + λb, v − λa) est aussi solution. On a en eet :
a (u + λb) + b (v − λa) = au + bv = a ∧ b.
Division euclidienne
114
5.3 Éléments premiers entre eux dans un anneau euclidien
Ici A est encore un anneau euclidien.
Dénition 5.5 Soient r ∈ N\ {0, 1} et a1 , · · · , ar des éléments de A tous non nuls. On dit que
a1 , · · · , ar sont premiers entre eux dans leur ensemble (ou étrangers) si leur pgcd est dans A× .
Pour r = 2, on dira simplement que a1 et a2 sont premiers entre eux.
Remarque 5.1 Comme tout élément associé à un
pgcd de a1 , · · · , ar est aussi un pgcd de
a1 , · · · , ar et considérant que 1A est associé à tout élément inversible de A, on peut écrire que
a1 , · · · , ar sont premiers entre eux dans leur ensemble si, et seulement si, pgcd (a1 , · · · , ar ) = 1A .
Théorème 5.5 (Bézout) Soient
r ∈ N\ {0, 1} et a1 , · · · , ar des éléments de A tous non
nuls. Ces éléments sont premiers entre eux dans leur ensemble si, et seulement si, il existe
(u1 , · · · , ur ) ∈ Ar tel que
r
∑
uk ak = 1A .
k=1
Démonstration. On sait déjà, par dénition du pgcd, que la condition est nécessaire.
Réciproquement s'il existe u1 , · · · , up dans A tels que
δ = a1 ∧· · ·∧ar , qui divise tous les ak , va diviser 1A =
r
∑
r
∑
uk ak = 1A , on en déduit alors que
k=1
uk ak , ce qui signie qu'il est inversible,
k=1
c'est-à-dire que a1 , · · · , ar sont premiers entre eux dans leur ensemble.
Corollaire 5.2 Soient a, b, c non nuls dans A. Si c est premier avec a alors a ∧ b = a ∧ (bc)
(le pgcd de deux éléments est inchangé si on multiplie l'un d'eux par un élément premier avec
l'autre).
Démonstration. Soient δ
= a ∧ b et δ ′ = a ∧ (bc) . Comme δ divise a et b, il divise a et
bc ainsi que leur pgcd δ ′ . De au + cv = 1A , on déduit que abu + bcv = b et δ ′ qui divise a et
bc va diviser a et b ainsi que leur pgcd δ. En dénitive δ et δ ′ sont associés, ce qui signie que
a ∧ b = a ∧ (bc) .
Corollaire 5.3 Soient
a1 , · · · , ar (avec r ≥ 2) et c non nuls dans A. Si c est premier avec
r
∏
chacun des ak , pour tout k compris entre 1 et r, il est alors premier avec leur produit
ak .
k=1
Démonstration. En utilisant le corollaire précédent, on a :
c∧
r
∏
(
ak = c ∧
k=1
a1
r
∏
)
ak
k=2
=c∧
r
∏
ak
k=2
puisque a1 est premier avec c et par récurrence nie, on déduit que :
c∧
r
∏
k=1
ak = c ∧
r
∏
k=2
ak = c ∧
r
∏
ak = · · · = c ∧ ar = 1A
k=3
puisque chaque ak , pour k compris entre 1 et r, est premier avec c.
Exemples d'anneaux euclidiens
115
Corollaire 5.4 (Gauss) Soient a, b, c non nuls A. Si a divise bc et a est premier avec b alors
a divise c.
Démonstration. Comme
a et b sont premiers entre eux, il existe u, v dans A tels que
au + bv = 1A et pour tout c ∈ A, on a acu + bcv = c, de sorte que si a divise bc, il va diviser
c = acu + bcv.
Théorème 5.6 Soient
r ∈ N\ {0, 1} , a1 , · · · , ar des éléments de A tous non nuls et δ =
a1 ∧ · · · ∧ ar . Il existe des éléments de A, a′1 , · · · , a′r premiers entre eux dans leur ensemble, tels
que ak = δa′k pour tout k compris entre 1 et r.
Démonstration. Comme, pour tout k compris entre 1 et r, δ divise ak , il existe a′k
tel que ak = δa′k et on a :
δ=
r
∑
uk ak = δ
k=1
avec δ ̸= 0A , ce qui entraîne
r
∑
r
∑
∈ A∗
uk a′k
k=1
uk a′k = 1A .
k=1
5.4 Exemples d'anneaux euclidiens
5.4.1 L'anneau Z des entiers relatifs
Lemme 5.4 Soit α un réel. Pour tout couple d'entiers (a, b) , avec b ̸= 0, il existe un unique
couple d'entiers (q, r) tel que a = bq + r et α ≤ r < α + |b| .
Démonstration. Soient a, b dans Z, avec b ̸= 0.
On suppose d'abord que b ≥ 1 et on note :
E = {k ∈ Z | a − bk ≥ α}
Cet ensemble est non vide. En eet, comme lim (a − bk) = +∞, il existe k ≤ 0 tel que
k→−∞
−bk ≥ α.
a−α
Cet ensemble est majoré. En eet, la condition a − bk ≥ α équivaut à k ≤
.
b
Cet ensemble E admet donc un plus grand élément q et on a q ∈ E, q + 1 ∈
/ E, soit :
qb ≤ a − α < (q + 1) b
Donc en posant r = a − bq, on a a = bq + r avec α ≤ r = a − bq < α + b = α + |b| .
Pour b ≤ −1, on a l'existence de (q ′ , r′ ) ∈ Z2 tel que :
{
a = (−b) q ′ + r′
α ≤ r′ < α + |b|
et il sut de poser q = −q ′ , r = r′ .
Supposons qu'il existe deux couples d'entiers (q, r) et (q ′ , r′ ) tels que a = bq + r = bq ′ + r′ et
α ≤ r, r′ < α + |b| .
Si q ̸= q ′ , on a alors :
|r − r′ | = |b (q − q ′ )| ≥ |b|
Division euclidienne
116
avec r et r′ dans l'intervalle [α, α + |b|[ , ce qui est impossible (faire un dessin). On a donc q = q ′
et r = r′ , soit l'unicité du quotient et du reste.
Pour α = 0, on retrouve le théorème
[ classique
[ de division euclidienne avec un reste positif.
Pour α = −
|b|
|b| |b|
, le reste est dans − ,
et c'est le reste de plus petite valeur absolue.
2
2 2
Théorème 5.7 L'anneau Z des entiers relatifs est euclidien pour le stathme φ : n ∈ Z∗ 7→ |n| .
Démonstration. Prenant
α = 0 dans le lemme précédent, on a une division euclidienne
dans (Z, |·|) .
Remarque 5.2 La condition
|r| < |b| n'assure pas l'unicité du quotient et du reste. Par
exemple, on a deux divisions de 12 par 5 dans (Z, |·|) :
12 = 3 × 5 − 3 = 2 × 5 + 2
Exercice 5.6 Soient a ∈ Z∗ et b ∈ N∗ ne divisant pas a.
1. Montrer que si a = bq + r est une division euclidienne de a par b dans (Z, |·|) , il en existe
une autre, et une seule, a = bq ′ + r′ avec r ̸= r′ et q ̸= q ′ .
2. Montrer qu'il y a exactement deux divisions euclidiennes de a par b dans (Z, |·|) .
Solution 5.6 Si b divise a, le seul reste possible dans la division de a par b est 0 (dans ce cas
b divise r = a − bq avec 0 ≤ |r| < |b| , donc r = 0). Réciproquement un reste nul nous dit que b
divise a.
Soient a ̸= 0 et b ≥ 1 ne divisant pas a. Les restes dans la division euclidienne de a par b, sont
donc nécessairement non nuls.
1. Supposons qu'il existe deux division euclidienne de a par b dans (Z, |·|) , soit a = bq + r =
bq ′ + r′ avec 0 < |r| , |r′ | < |b| = b. Comme b ne divise pas a, les entiers r, r′ sont dans
]−b, b[ \ {0} . Si r ̸= r′ , on a alors q ′ ̸= q et :
b ≤ b |q − q ′ | = |r′ − r| < 2b
donc 1 ≤ |q − q ′ | < 2 et q = q ′ + 1 ou q = q ′ − 1, soit r′ = r + b ou r′ = r − b.
Pour r > 0, on a r + b > b et r′ = r − b ∈ ]−b, b[ , pour r < 0, on a r − b < −b et
r′ = r + b ∈ ]−b, b[ . On a donc r′ = r − sgn (r) b et q ′ = q + sgn (r) , où sgn (r) est le signe
de r.
Réciproquement on vérie que si a = bq + r est une division euclidienne dans (Z, |·|) , on
en a une deuxième a = bq ′ + r′ en posant r′ = r − sgn (r) b et q ′ = q + sgn (r) . En eet,
on a :
bq ′ + r′ = b (q + sgn (r)) + (r − sgn (r) b)
= bq + r = a
et r′ = r − sgn (r) b ∈ ]−b, b[ (pour r > 0, on a 0 < r < b, donc −b < r − b < 0 et pour
r < 0, on a −b < r < 0, donc 0 < r + b < b), avec r′ ̸= r.
2. On a déjà la division euclidienne classique a = bq + r avec 0 < r < b et on vient de voir
qu'en posant r′ = r − sgn (r) b = r − b, q ′ = q + sgn (r) = q + 1, on en a une deuxième et
c'est la seule possible.
Au paragraphe 6.4, on étudie plus en détails la division euclidienne dans Z.
Exemples d'anneaux euclidiens
117
5.4.2 L'anneau D des nombres décimaux
a
On rappelle qu'un nombre décimal est un nombre rationnel de la forme m où a est un
10
entier relatif et m un entier naturel.
Un tel nombre décimal non nul peut aussi s'écrire sous la forme d = n2p 5q , où n, p, q sont des
entiers relatifs avec n ̸= 0 premier avec 10 (il sut de décomposer a en facteurs premiers) et
′
′
une telle décomposition est unique. En eet, si n′ 2p 5q = n2p 5q où n, n′ sont non nuls premiers
′
′
avec 10, on a n′ 2α+p 5β+q = n2α+p 5β+q en notant α = |p| + |p′ | et β = |q| + |q ′ | , de sorte
que les exposants de 2 et 5 qui apparaissent dans cette égalité sont positifs. L'unicité de la
décomposition en facteurs premiers dans Z impose alors que α + p′ = α + p et β + q ′ = β + q,
soit p = p′ et q = q ′ , puis n = n′ .
Une telle écriture d'un nombre décimale est appelée écriture canonique.
Il est facile de vérier que l'ensemble D des nombres décimaux est un sous-anneau de Q. Il
est donc commutatif et intègre.
On pourra voir le paragraphe 28.1 pour une étude plus détaillée des nombres décimaux.
Théorème 5.8 L'anneau D des nombres décimaux est euclidien pour le stathme φ déni, en
utilisant l'écriture canonique d'un nombre décimal, par :
∀a = n2p 5q ∈ D∗ , φ (a) = |n|
Démonstration. On a φ (a) ∈ N pour tout a ∈ D∗ .
′
′
Soient a = n2p 5q et b = n′ 2p 5q dans D∗ . La division euclidienne dans Z, n = q1 n′ + r1 avec
0 ≤ r1 < |n′ | , nous donne :
′
p q
(
p−p′ q−q ′
a = (q1 n + r1 ) 2 5 = q1 2
′
5
)
b + r1 2p 5q = q2 b + r1 2p 5q
′
avec q2 = q1 2p−p 5q−q ∈ D.
Si r1 = 0, on a alors a = q2 b + r2 avec r2 = 0 et q2 ∈ D.
Si r1 ̸= 0, de la décomposition en facteurs premiers de r1 , on déduit que r1 = s2α 5β , l'entier s
étant non nul premier avec 10, ce qui nous donne a = q2 b+r2 avec q2 ∈ D et r2 = s2p+α 5q+β ∈ D∗
tel que φ (r2 ) = |s| ≤ r1 < |n′ | = φ (b) .
On a donc bien une division euclidienne dans D pour le stathme φ.
On déduit de ce résultat que D est principal, ce qui peut aussi se montrer directement
(théorème 28.1).
Remarque 5.3 En restriction à
Z, on retrouve la division euclidienne dans (Z, |·|) , il n'y a
donc pas unicité du quotient et du reste pour la division euclidienne dans (D, φ) .
On vérie facilement que le stathme φ déni sur D est croissant. En eet, pour a = n2p 5q ∈
′
′
D et b = n′ 2p 5q ∈ D∗ , on a :
∗
(
)
′
′
φ (ab) = φ nn′ 2p+p 5q+q = |nn′ | ≥ |n| = φ (a)
Exercice 5.7 Montrer que l'ensemble des nombres décimaux inversibles est :
{
}
D× = r = ±2α 5β | (α, β) ∈ Z2 .
Solution 5.7 Comme le stathme est croissant, le théorème 5.2 nous dit que :
{
}
D× = {r = n2p 5q | |n| = 1} = r = ±2p 5q | (p, q) ∈ Z2
(on utilise l'écriture canonique d'un nombre décimal).
Division euclidienne
118
5.4.3 L'anneau Z [i] des entiers de Gauss
On note :
{
}
Z [i] = a + ib | (a, b) ∈ Z2
l'ensemble des entiers de Gauss.
Théorème 5.9
Z [i] est un sous anneau de C stable par l'opération de conjugaison complexe
et il est euclidien pour le stathme :
φ : u = a + ib ∈ Z [i]∗ 7→ |u|2 = a2 + b2
Démonstration. Pour tout u = a + ib ∈ Z [i] , on a u = a − ib ∈ Z [i] , donc Z [i] stable par
conjugaison.
On a 1 = 1 + i · 0 ∈ Z [i] . Pour u = a + ib et v = c + id, où a, b, c, d sont des entiers relatifs,
on a :
{
u − v = (a − c) + (b − d) i ∈ Z [i]
uv = (ac − bd) + (ad + bc) i ∈ Z [i]
Donc Z [i] est bien un sous-anneau de C et il est commutatif, intègre comme C.
On a φ (u) = |u|2 = a2 + b2 ∈ N pour tout u ∈ Z [i]∗ , donc φ est un stathme sur Z [i] .
u
Soient u, v dans Z [i] avec v ̸= 0 et z = = x + iy avec (x, y) ∈ Q2 . En utilisant la partition
R=
∪[
k∈Z
v
[
1
1
, on peut trouver un unique couple (a, b) d'entiers relatifs tel que :
k − ,k +
2
2
[
[ [
[
1
1
1
1
(x, y) ∈ a − , a +
× b − ,b +
2
2
2
2
[
]
[
]
1
1
(a = x +
et b = y + ) et en notant q = a + ib, on a q ∈ Z [i] et :
2
2
u
2
2
− q = |(x − a) + i (y − b)|
v
1 1
= (x − a)2 + (y − b)2 ≤ + < 1
4 4
ou encore |u − qv|2 < |v|2 . En posant r = u − qv, on a u = vq + r avec r ∈ Z [i] et r = 0 ou
|r|2 < |v|2 .
Exercice 5.8 Eectuer la division euclidienne de u = 11 + 7i par v = 18 − i dans Z [i] .
Solution 5.8 On a :
u
(11 + 7i) (18 + i)
191 137
=
=
+
i = x + iy
v
325
325 325
avec
(
(x, y) =
191 137
,
325 325
)
[
[ [
[
1 3
1 1
= (0.58 · · · , 0.42 · · · ) ∈ ,
× − ,
2 2
2 2
En prenant q = 1 et r = u − qv = −7 + 8i, on a :
11 + 7i = (18 − i) + (−7 + 8i)
avec φ (−7 + 8i) = 113 < φ (18 − i) = 325.
Exemples d'anneaux euclidiens
119
Exercice 5.9 Calculer le pgcd de u = a + ib et v = b − ia dans Z [i] .
Solution 5.9 On a :
a + ib = i (b − ia)
donc u ∧ v = v.
Exercice 5.10 Montrer que l'ensemble des éléments inversibles de Z [i] est :
Z [i]× = {−1, 1, −i, i}
Solution 5.10 Comme le stathme est croissant, le théorème 5.2 nous dit que :
{
}
Z [i]× = u = a + ib | (a, b) ∈ Z2 et |u|2 = a2 + b2 = 1
= {−1, 1, −i, i}
L'anneau des entiers de Gauss peut être utilisé pour caractériser les entiers naturels qui sont
sommes de deux carrés d'entiers.
On note Σ2 l'ensemble des entiers naturels qui s'écrivent comme somme de deux carrés, soit :
{
}
Σ2 = n ∈ N | ∃ (a, b) ∈ Z2 ; n = a2 + b2
On peut remarquer que Σ2 est non vide, puisqu'il contient 0, 1, 2 = 12 + 12 et plus généralement tous les carrés d'entiers n = a2 + 0.
Lemme 5.5 Si n ∈ Σ2 , il est alors congru à 0, 1 ou 2 modulo 4. Dans le cas particulier où n
est impair, il est congru à 1 modulo 4.
Démonstration. Pour tout a ∈ Z, l'entier a2 est congru à 0 ou 1 modulo 4 (pour a = 2k,
on a a2 = 4k 2 ≡ 0 mod (4) et pour a = 2k + 1, on a a2 = 4 (k 2 + k) + 1 ≡ 1 mod (4)), donc
tout n = a2 + b2 ∈ Σ2 est congru à 0, 1 ou 2 modulo 4.
Un entier impair étant congru à 1 ou 3 modulo 4, sera congru à 1 modulo 4 s'il est dans Σ2 .
Lemme 5.6 Le groupe des éléments inversibles de Z [i] est :
Z [i]× = {−1, 1, −i, i}
Démonstration. Un élément non nul u = a + ib est inversible dans Z [i] si, et seulement si,
il existe v ∈ Z [i] tel que uv = 1, ce qui entraîne |u|2 |v|2 = 1 avec |u|2 = a2 + b2 ∈ N et |v|2 ∈ N,
ce qui impose |u|2 = |v|2 = 1, soit a2 + b2 = 1 et (a, b) ∈ {(1, 0) , (−1, 0) , (0, 1) , (0, −1)} .
Réciproquement il est clair que ±1 et ±i sont inversibles dans Z [i] .
On a donc :
Z [i]× = {−1, 1, −i, i} .
Remarque 5.4
Z [i]× est le groupe cyclique d'ordre 4 formé des racines 4-ème de l'unité et
Z
qu'il est isomorphe à .
4Z
Remarque 5.5 Un entier n ∈ Σ2 \ {0, 1} est nécessairement réductible dans Z [i] . En eet un
tel entier s'écrit n = a2 + b2 = u · u avec u = a + ib et u = a − ib non inversibles dans Z [i]
puisque |u|2 = n ≥ 2.
Division euclidienne
120
Lemme 5.7 L'ensemble Σ2 est stable pour le produit, c'est-à-dire que le produit de deux entiers
naturels qui sont somme de deux carrés est encore somme de deux carrés.
Démonstration. Soient n = a2 + b2 et m = c2 + d2 dans Σ2 , où a, b, c, d sont des entiers
relatifs. En écrivant que n = |u|2 et m = |v|2 avec u = a + ib et v = c + id dans Z [i] , on a :
nm = |u|2 |v|2 = |uv|2 = |(ac − bd) + (ad + bc) i|2
= (ac − bd)2 + (ad + bc)2
c'est-à-dire que nm est somme de deux carrés d'entiers.
On peut aussi écrire :
nm = |u|2 |v|2 = |uv|2 = |(ac + bd) + (ad − bc) i|2
= (ac + bd)2 + (ad − bc)2
(identité de Fibonacci).
En utilisant la décomposition en facteurs premiers dans l'anneau Z, il nous sut de caractériser les nombres premiers qui sont sommes de deux carrés pour décrire Σ2 .
On sait déjà que 2 = 12 + 12 est dans Σ2 .
Une remarque qui nous sera utile est qu'un nombre premier impair est congru à 1 ou 3
modulo 4.
On rappelle que Zp est un corps si, et seulement si, p est premier.
Théorème 5.10 Soit p un nombre premier impair.
L'ensemble des carrés de Z∗p est l'ensemble des racines du polynôme X
− 1, il y a exactement
p−1
carrés dans Z∗p et −1 est un carré dans Zp si, et seulement si, p est congru à 1 modulo 4.
2
Démonstration. Notons :
(
Z∗p
)2
p−1
2
{
}
= x2 | x ∈ Z×
p
l'ensemble des carrés de Z∗p .
( )2
p−1
Si y ∈ Z∗p , il existe alors x ∈ Z∗p tel que y = x2 et y 2 = xp−1 = 1 (l'ordre de x
( )2
divise celui du groupe Z∗p ). Donc Z∗p est contenu dans l'ensemble des racines du polynôme
( )2
p−1
− 1 et Z∗p a au plus
éléments.
2
( ∗ )2
En remarquant que Zp est l'image du morphisme de groupes :
P (X) = X
p−1
2
φ Z∗p → Z∗p
x 7→ x2
et que le noyau de ce morphisme est :
{
(
)(
)
} {
}
ker (φ) = x ∈ Z∗p | x − 1 x + 1 = 0 = −1, 1
avec −1 ̸= 1 dans le corps Zp pour p ≥ 3 premier, on déduit que :
card
((
)2 )
= card (Im (φ)) = card
Z∗p
(
{
Z∗p
−1, 1
)
}
=
p−1
2
Exemples d'anneaux euclidiens
121
ce qui signie qu'il y a exactement
polynôme X 2 − 1.
On en déduit alors que :
p−1
(
−1 ∈
(
)2
Z∗p
)
( )2
p−1
carrés dans Z∗p et Z∗p est l'ensemble des racines du
2
(
)
)
p−1
≡ 0 (mod 2)
⇔ (−1)
1=1 ⇔
2
⇔ (p ≡ 1 (mod 4))
(
p−1
2
Exercice 5.11 Soit p un nombre premier impair.
Montrer que −1 est un carré dans Zp si, et seulement si, p est congru à 1 modulo 4 en utilisant
les théorèmes de Wilson et de Fermat.
Solution 5.11 Si p ≥ 3 est un nombre premier congru à 1 modulo 4, il s'écrit p = 4q + 1 avec
p−1
est un entier pair non nul.
2
p−1
p+1
Tout entier k compris entre m + 1 =
et p − 1 s'écrit k = p − j avec 1 ≤ j ≤ m =
,
2
2
donc k ≡ −j mod p et :
q ≥ 1 et m =
(p − 1)! = 1 · 2 · · · · · m · (m + 1) · · · · (p − 1)
≡ (−1)m (m!)2 ≡ (m!)2 mod p
puisque m est pair.
D'autre part, comme p est premier, le théorème de Wilson nous dit que (p − 1)! ≡ −1 mod p,
donc (m!)2 ≡ −1 mod p et −1 est un carré dans Z∗p .
Dire que p premier est congru à 3 modulo 4 revient à dire qu'il existe un entier q ≥ 0 tel
p−1
= 2q + 1 et si x ∈ Z∗p est tel que x2 = −1, on a
que p = 4q + 3. On a alors m =
2
( )2q+1
xp−1 = x2m = −1
= −1, ce qui contredit le théorème de Fermat qui nous dit que xp−1 = 1
pour tout x ∈ Z×
p (on a −1 ̸= 1 puisque p ≥ 2).
Lemme 5.8 Soit p ≥ 2 un nombre premier. S'il existe un entier naturel q premier avec p tel
que pq ∈ Σ2 , alors p est dans Σ2 .
Démonstration. On a pq = a2 + b2 avec (a, b) ∈ Z2 , soit pq = u · u dans Z [i] , où on a noté
u = a + ib.
Si p est irréductible dans Z [i] , comme il divise u · u, il va diviser u ou u (théorème ??).
Supposons que p divise u, on a alors u = pq1 avec q1 = α + iβ ∈ Z [i] , ce qui nous donne a = pα
et b = pβ, de sorte que p divise aussi u = a − ib, donc p2 divise u · u = a2 + b2 = pq et p divise
q, ce qui contredit l'hypothèse p ∧ q = 1.
L'entier p est donc réductible dans Z [i] et il s'écrit p = u1 u2 avec |u1 |2 ≥ 2 et |u2 |2 ≥ 2 (u1
et u2 sont non inversibles). En notant uk = ak + ibk pour k = 1, 2, on a :
p = (a1 + ib1 ) (a2 + ib2 ) = p = (a1 − ib1 ) (a2 − ib2 )
et :
)
)(
(
p2 = a21 + b21 a22 + b22
donc a21 + b21 divise p2 avec a21 + b21 = |u1 |2 ≥ 2, donc a21 + b21 = p et a22 + b22 = p ou a21 + b21 = p2
et a22 + b22 = 1, ce dernier cas n'étant pas possible puisque |u2 |2 ≥ 2.
On a donc p = a21 + b21 ∈ Σ2 .
Division euclidienne
122
Théorème 5.11 (Fermat) Un nombre premier p est somme de deux carrés si, et seulement
si, il est égal à 2 ou congru à 1 modulo 4.
Démonstration. On sait déjà que 2 ∈ Σ2 .
Supposons que p soit un nombre premier impair dans Σ2 . On a alors p = a2 +b2 et 0 < a2 ≤ p
√
(a = 0 donne p = b2 , ce qui est impossible avec p premier), donc 0 < |a| ≤ p < p et p ne
divise pas a, c'est-à-dire que a ̸= 0 dans Zp et en conséquence a est inversible dans Zp . De
2
p = a2 + b2 , on déduit alors que b = −a2 et −1 = x2 dans Zp avec x = ba−1 , c'est-à-dire que
−1 est un carré dans Zp , ce qui revient à dire que p est congru à 1 modulo 4.
Réciproquement, supposons que p soit un nombre premier impair congru à 1 modulo 4.
Il existe alors x ∈ Z∗p tel que x2 = −1, ce qui revient à dire qu'il existe un entier k ∈
{1, · · · , p − 1} tel que k 2 ≡ −1 modulo p.
p+1
p−1
≤ k ≤ p − 1, en prenant j = p − k, on a 1 ≤ j ≤
et j 2 ≡ k 2 ≡ −1 modulo p.
2
2
}
{
p−1
tel que k 2 ≡ −1 modulo p, ce qui signie
On dispose donc d'un entier k ∈ 1, · · · ,
2
p−1
que k 2 + 1 = pq où q est un entier premier avec p. En eet de 1 ≤ k ≤
, on déduit que
2
p2
pq = 1 + k 2 < 1 +
< p2 , donc q < p et p ∧ q = 1. Le lemme précédent nous dit alors que
4
p ∈ Σ2 .
Si
Lemme 5.9 Si n ∈ Σ2 \ {0} admet un diviseur premier p congru à 3 modulo 4, alors p2 divise
n et
n
∈ Σ2 .
p2
Démonstration. Soit n = a2 + b2 ∈ Σ2 \ {0} .
2
Si p est un diviseur premier impair de n, on a alors dans Zp , a2 = −b . Si a ̸= 0 [resp. b ̸= 0],
b
a
il est inversible dans le corps Zp et x = [resp. x = ] est solution de x2 = −1, ce qui équivaut
a
b
à dire que p est congru à 1 modulo 4.
Donc pour p congru à 3 modulo 4, on a a = b = 0, ce qui signie que p divise a et b, soit
a = pα, b = pβ et n = a2 + b2 = p2 (α2 + β 2 ) .
Théorème 5.12 (Fermat) Un entier naturel non nul n est somme de deux carrés si, et seule-
ment si, les éventuels diviseurs premiers de n congrus à 3 modulo 4 qui apparaissent dans sa
décomposition en facteurs premiers y gurent avec un exposant pair.
Démonstration. Pour la condition est nécessaire, on procède par récurrence sur n ≥ 1.
n = 1 n'a pas de diviseur premier.
Supposons le résultat acquis pour les entiers de Σ2 \ {0} strictement inférieurs à n, où
n ∈ Σ2 \ {0} .
Si n admet un diviseur premier p congru à 3 modulo 4, lemme précédent nous dit alors que
n
2
p divise n et 2 < n est dans Σ2 \ {0} , donc ses éventuels diviseurs premiers congrus à 3
p
modulo 4 apparaissent avec une puissance paire et il en est de même pour n.
Réciproquement supposons que la décomposition en facteurs premiers de n ∈ N \ {0} soit de
2rs
mr 2r1
2
la forme n = 2m1 pm
2 · · · pr q1 · · · qs , où m1 ≥ 0, les pj sont des nombres premiers congrus à
1 modulo 4 (s'il en existe) et les qj des nombres premiers congrus à 3 modulo 4 (s'il en existe).
Comme 1, 2, les pj et les qj2 sont dans Σ2 qui est stable par multiplication, on en déduit que
n ∈ Σ2 .
Exemples d'anneaux euclidiens
123
√
n]
5.4.4 Les anneaux Z [i
On se donne un entier naturel n ≥ 1 et on note :
[√ ]
{
}
√
√
Z i n = Z + i nZ = a + ib n | (a, b) ∈ Z2
Pour n = 1, on retrouve l'ensemble Z [i] des entiers de Gauss étudié au paragraphe précédent.
Théorème 5.13
plexe et :
√
Z [i n] est un sous anneau de C stable par l'opération de conjugaison com[ √ ]×
Z i n =
{
Démonstration.
Pour tout u = a + ib
√
{−1, 1, −i, i} si n = 1
{−1, 1} si n ≥ 2
√
√
√
√
n ∈ Z [i n] , on a u = a − ib n ∈ Z [i n] , donc
Z [i n] stable par conjugaison.
√
√
√
√
On a 1 = 1 + i · 0 · n ∈ Z [i n] . Pour u = a + ib n et v = c + id n, où a, b, c, d sont des
entiers relatifs, on a :
{
√
√
u − v = (a − c) + (b − d) i n√∈ Z [i n]√
uv = (ac − bdn) + (ad + bc) i n ∈ Z [i n]
√
Donc Z [i n] est bien un sous-anneau de C et il est commutatif, intègre comme C.
×
Pour n = 1, on
√ a déjà vu que Z [i] = {−1,
√ 1, −i, i} .
√
Si u = a + ib n est inversible dans Z [i n] , il existe alors v ∈ Z [i n] tel que uv = 1, donc
|u|2 |v|2 = 1 avec |u|2 = a2 + nb2 ∈ N et |v|2 ∈ N, ce qui impose |u|2 = |v|2 = 1, soit a2 + nb2 = 1
avec (a2 , b2 ) ∈ N2 , ce qui équivaut, pour n ≥ 2, à b = 0 et a = ±1. On a donc :
[ √ ]×
Z i n ⊂ {−1, 1}
pour n ≥ 2, l'inclusion réciproque étant vériée pour tout anneau unitaire.
Théorème 5.14
√
Z [i n] est euclidien pour n = 1 ou n = 2 avec le stathme :
√
φ : u = a + ib n ∈ Z [i]∗ 7→ |u|2 = a2 + nb2 .
Démonstration. On sait déjà que Z [i] est euclidien et il facile de vérier que φ est un
stathme pour tout n ≥ 1.
On reprend la démonstration faite pour n = 1.
√
√
u
Pour u, v non nuls dans Z [i n] et z = = x + iy n avec (x, y) ∈ R2 , il existe (a, b) ∈ Z2
v
tel que :
[
[ [
[
1
1
1
1
(x, y) ∈ a − , a +
× b − ,b +
2
2
2
2
√
√
et en notant q = a + ib n, on a q ∈ Z [i n] et :
u
2 √ 2
− q = (x − a) + i (y − b) n
v
n+1
<1
= (x − a)2 + n (y − b)2 ≤
4
√
pour n = 1, 2, ou encore |u − qv| < |v| . En posant r = u − qv, on a bien r ∈ Z [i n] et
φ (r) = |r|2 < |v|2 = φ (v) .
Division euclidienne
124
Lemme 5.10 Pour n ≥ 3, i
√
√
n et 2 sont irréductibles dans Z [i n] .
√
√
i n = uv avec u, v non inversibles dans Z [i n] , en écrivant que
√ 2
divisible par a2 + nb2 = |u|2 ≥ 2 (u n'est pas
u = a + ib n, on déduit que n = |i n| est √
inversible). Si b = 0, en écrivant que v = c + id n, on a alors :
√
√
i n = ac + iad n
Démonstration.
Si
√
et ad = 1, soit |a| = 1 qui contredit a2 = a2 +√nb2 ≥ 2. Si b ̸= 0, on a alors nb2 ≤ a2 + nb2 ≤ n
ce qui entraîne |b| = 1√et a = 0, soit u = ±i n et√v = ±1, ce qui est en contradiction avec v
non inversible. Donc i n est irréductible dans Z [i n] .
√
Supposons que 2 = uv avec u, v non inversibles dans Z [i n] . On a alors 4 = |u|2 |v|2 avec
|u|2 ≥ 2 et |v|2 ≥ 2 dans N, ce qui implique |u|2 = |v|2 = 2 (|u|2 = 1 est exclu puisque u n'est
√
pas inversible et |u|2 = 4 donne |v|2 = 1 qui est également exclu). En écrivant u = a + ib n,
on a alors a2 + nb2 = 2 avec n ≥ 3, ce qui impose b = 0 et a2 = 2 avec a entier, ce qui est
impossible.
√
n] n'est pas euclidien.
Théorème 5.15 Pour n ≥ 3, Z [i
Démonstration. Supposons d'abord que n ≥ 4 est pair, soit n = 2m avec m ≥ 2.
Avec :
(
√ )
√
√ (
√ )
2 m + i n = n + 2i n = i n 2 − i n
√
√
on déduit√que l'irréductible i n divise 2 (m + i n) .
√
Si Z [i n] est euclidien, il est alors principal, donc i n qui est premier
(c'est équivalent
√
à irréductible
dans
un
anneau
principal)
divisant
le
produit
2
(m
+
i
n)
,
doit
diviser 2 ou
√
√
√
m + i n. Mais les multiples de i n dans Z [i n] sont de la forme :
√ (
√ )
√
√
i n a + ib n = −nb + ia n = −2mb + ia n
√
√
√
et les égalités −2mb+ia n = 2 ou −2mb+ia n = m+i n, donnent −2mb = 2 ou −2mb = m
avec m ≥ 2 et b ∈ Z∗ , ce qui est impossible.
Supposons que n ≥√
3 est impair.
Supposons
que
Z
[i
n] soit euclidien. Prenons u = 2 qui est
√
√
√ premier . Il divise
√ 1+n =
(1 + i n) (1 √
− i n) qui est √
un entier pair, donc il divise 1 + i n ou w = 1 − i n, mais une
égalité
√ 1 ± i n = 2 (a + ib n) donne 1 = 2a dans Z, ce qui est impossible. En dénitive,
Z [i n] n'est pas principal, donc non euclidien.
Exercice 5.12 Soient ω = x + iy un nombre complexe non réel (i. e. avec x ∈ R et y ∈ R∗ )
et :
{
}
Z [ω] = Z + Zω = a + bω | (a, b) ∈ Z2
1. Montrer que Z [ω] est un anneau si, et seulement si, ω est un entier quadratique, c'est-àdire racine d'un polynôme de degré 2, P (X) = X 2 − αX − β à coecients entiers.
Dans ce cas, montrer que Z [ω] est stable par l'opération de conjugaison complexe z 7→ z,
que l'application φ : u 7→ |u|2 dénit un stathme sur Z [ω] , que Z [ω] = Z [ω] , que pour
tout entier relatif n, on a Z [ω] = Z [n + ω] et qu'il existe un nombre complexe ω ′ = x′ +iy ′
tel que x′ ∈ [0, 1[ , y ′ > 0 et Z [ω] = Z [ω ′ ] .
Pour la suite de cet exercice, on suppose que ω = x + iy est un entier quadratique avec
x ∈ [0, 1[ , y > 0.
√
√
1
4n − 1
où n ∈ N∗ .
2. Montrer que l'on soit ω = i n, soit ω = + i
2
2
Exemples d'anneaux euclidiens
125
3. Soient u, v dans Z [ω] avec v ̸= 0.
u
= r + sω.
v
1 + y2 2
2
(b) Montrer qu'il existe q ∈ Z [ω] tel que |u − qv| ≤
|v| .
4
] √ [
4. Montrer que, pour x ∈ [0, 1[ et y ∈ 0, 3 , l'anneau Z [ω] est euclidien pour le stathme :
(a) Montrer qu'il existe (r, s) ∈ Q2 tel que
φ : u = a + bω ∈ Z [ω] 7→ |u|2
√
√
1
4n − 1
Préciser les valeurs possibles de ω, sont ω = i n, ou n = + i
avec n ∈ N∗ .
2
2
Solution 5.12 L'ensemble Z [ω] est clairement non vide (il contient Z).
Pour u = a + bω et v = c + dω, où a, b, c, d sont des entiers relatifs, on a :
u − v = (a − c) + (b − d) ω ∈ Z [ω]
Donc Z [ω] est un sous-groupe de C.
1. Si Z [ω] est un anneau, on a alors ω 2 ∈ Z [ω] et il existe (α, β) ∈ Z2 tel que ω 2 = αω + β,
ce qui signie que P (ω) = 0, où P (X) = X 2 − αX − β ∈ Z [X] .
Réciproquement, si ω est un entier quadratique, il existe alors il existe (α, β) ∈ Z2 tel que
ω 2 = αω + β ∈ Z [ω] et pour u = a + bω, v = c + dω dans Z [ω] , on a :
u · v = ac + (ad + bc) ω + bdω 2 ∈ Z [ω]
donc Z [ω] est un sous-anneau de C (on a bien 1 ∈ Z [ω]).
Si Z [ω] est un anneau, on a alors P (ω) = ω 2 − αω − β = 0 avec (α, β) ∈ Z2 et ω, qui
est diérent de ω puisque ω ∈ C \ R, est aussi racine de P, puisque les coecients de
ce polynôme sont réels, donc ω + ω = α ∈ Z et |ω|2 = ωω = −β ∈ R+ ∩ Z = N. Il en
résulte que ω = α − ω ∈ Z [ω] et pour tout u = a + bω ∈ Z [ω] , on a u = a + bω ∈ Z [ω] ,
c'est-à-dire que Z [ω] est stable par conjugaison complexe.
Pour tout u = a + bω ∈ Z [ω] , on a :
φ (u) = |u|2 = uu ∈ R+ ∩ Z [ω] = N
(on a |u|2 ≥ 0, uu ∈ Z [ω] puisque Z [ω] est un anneau stable par conjugaison et (1, ω)
est libre dans le R-espace vectoriel C, puisque ω ∈ C \ R, donc w = a + bω ∈ R+ ∩ Z [ω]
impose b = 0 et w = a ∈ N, soit R+ ∩ Z [ω] = N), donc φ est un stathme sur Z [ω] .
Comme ω ∈ Z [ω] et ω = ω ∈ Z [ω] , on a Z [ω] ⊂ Z [ω] et Z [ω] ⊂ Z [ω] , soit Z [ω] = Z [ω] .
Pour tout n ∈ Z, on a n+ω ∈ Z [ω] et ω = (n + ω)−n ∈ Z [n + ω] , doncZ [n + ω] ⊂ Z [ω]
et Z [ω] ⊂ Z [n + ω] , soit Z [ω] = Z [n + ω] .
En notant n = [x] la partie entière de x = ℜ (ω) , on a 0 ≤ x′ = x − n < 1 et Z [ω] =
y
est le signe de y
Z [x′ + iy] = Z [x′ − iy] , donc en notant y = sgn (y) y, où sgn (y) =
|y|
(on a y ̸= 0 puisque ω ∈ C \ R), on a Z [ω] = Z [x′ + iy ′ ] avec x′ ∈ [0, 1[ , y ′ > 0.
2. Les nombres complexes ω et ω sont les deux racines du polynôme P (X) = X 2 − αX − β ∈
Z [X] et on a :
α
ω+ω
= ∈ [0, 1[ , n = |ω|2 = −β ∈ N
2
2
donc α = 0 ou α = 1 et β =
−n avec n ∈ N∗ , c'est à dire que P (X) = X 2 + n
(
)2
√
1
4n − 1
ou P (X) = X 2 − X + n = X −
+
avec n ∈ N∗ , donc ω = i n, ou
2
4
√
1
4n − 1
ω = +i
avec n ∈ N∗ .
2
2
x=
Division euclidienne
126
3.
(a) Pour u, v dans Z [ω] avec v ̸= 0, on a :
uv
u
= 2
v
|v|
avec |v|2 ∈ N et uv ∈ Z [ω] puisque Z [ω] est un anneau stable par conjugaison
u
complexe, donc = r + sω avec (r, s) ∈ Q2 .
v
(b) Pour (a, b) ∈ Z2 et q = a + bω ∈ Z [ω] . On a :
u
2
2
− q = |r − a + (s − b) ω|
v
= |r − a + (s − b) x + i (s − b) y|2
= |r − a + (s − b) x|2 + |(s − b) y|2
[
[
1
1
En prenant b ∈ Z tel que s ∈ b − , b +
puis a ∈ Z tel que r + (s − b) x ∈
2
2
[
[
1
1
a − ,a +
, on a :
2
2
2 1 + y 2
u
− q ≤
v
4
2
1+y
ou encore |u − qv|2 <
|v|2 .
4
4. Pour u, v dans Z [ω] avec v ̸= 0, en posant r = u − qv ∈ Z [ω] , on a u = qv + r avec :
φ (r) = |r|2 = |u − qv|2 <
1 + y2 2
|v| < |v|2 = φ (v)
4
Donc (Z [ω] , φ) est euclidien.
√
√
1
4n − 1
Les valeurs possibles de ω sont ω = i n avec 1 ≤ n ≤ 2, (déjà vu) ou ω = + i
2
2
13
∗
avec n ∈ N tel que 4n − 1 < 12, soit 1 ≤ n < , ou encore 1 ≤ n ≤ 3.
4
Comme Z = Z [0] est euclidien, on a montré que Z [ω] est euclidien pour :
{
√
√
√ }
√ 1
3 1
7 1
11
, +i
, +i
ω ∈ 0, i, 2i, + i
2
2 2
2 2
2
√
qu'il n'est pas principal, donc non euclidien pour ω = i n avec n ≥ 3.
√
1
4n − 1
avec
Remarque 5.6 On peut montrer que Z [ω] n'est pas euclidien pour ω = + i
2
2
n ≥ 3 (mais pour certaines√valeurs de n, il peut être principal non euclidien, c'est le cas pour
1
19
n = 5, soit pour ω = + i
, voir le paragraphe 5.5).
2
2
5.4.5 L'anneau des polynômes à coecients dans un corps commutatif
Voir le théorème 10.10.
Exemples d'anneaux euclidiens
127
5.4.6 L'anneau des séries formelles à coecients dans un corps commutatif
On désigne par K un corps commutatif et K [[X]] est l'ensemble des séries formelles à une
indéterminée et à coecients dans K.
On rappelle qu'une série formelle à une indéterminée à coecients dans K est une suite
(an )n∈N d'éléments
de K.
∑
On note
an X n une telle série formelle.
n∈N
On dénit une addition et une multiplication sur K [[X]] par :
∑
an X n +
(
bn X n =
∑
)(
an X n
n∈N
∑
(an + bn ) X n
n∈N
n∈N
n∈N
et :
∑
∑
)
bn X n
=
n∈N
où :
∀n ∈ N, cn =
∑
cn X n
n∈N
n
∑
ak bn−k
k=0
On vérie facilement que K [[X]] est un anneau commutatif
qui contient K [X] .
∑
an X n par :
On dénit la valuation d'une série formelle S =
n∈N
{
val (S) =
+∞ si S = 0K
min {n ∈ N | an ̸= 0K } si S ̸= 0K
On vérie facilement que pour toutes séries formelles S, T, on a :
val (S + T ) ≥ min (val (S) , val (T )) et val (ST ) = val (S) + val (T )
et on en déduit que K [[X]] est intègre.
Lemme 5.11 Soient
S =
∑
an X n et T =
n∈N
∑
bn X n deux séries formelles avec val (T ) = 0
n∈N
(soit b0 ̸= 0K ). Pour tout entier naturel n, il existe un unique couple (Qn , Rn ) ∈ Kn [X]×K [[X]]
tel que S = T Qn + X n+1 Rn .
Démonstration. Pour montrer l'existence du couple (Qn , Rn ) , on raisonne par récurrence
sur n ≥ 0. Pour n = 0, il sut d'écrire :
S = a0 + X
+∞
∑
an X
n=1
n−1
)
+∞ (
∑
a0
a0 ∑
n
bn X + X
an − bn X n−1
=
b0 n∈N
b0
n=1
= T Q0 + XR0
(
)
∑
a0
a0
an+1 − bn+1 X n .
en notant Q0 =
et R0 =
b0
b0
n∈N
Supposant le résultat acquis pour n ≥ 0, on a S = T Qn + X n+1 Rn et Rn = αn T + XSn avec
αn ∈ K et Sn ∈ K [[X]] , ce qui nous donne :
(
)
S = T Qn + X n+1 (αn T + XSn ) = T Qn + αn X n+1 + X n+2 Sn
= T Qn+1 + X n+2 Rn+1
Division euclidienne
128
avec Qn+1 = Qn + αn X n+1 ∈ Kn+1 [X] et Rn+1 = Sn ∈ K [[X]] .
Pour l'unicité, il sut de montrer que si T Qn + X n+1 Rn = 0K avec (Qn , Rn ) ∈ Kn [X] ×
K [[X]] , on a alors Qn = 0K et Rn = 0K .
Supposons que T Qn + X n+1 Rn = 0K . Si Qn ̸= 0K , on a alors Rn ̸= 0K (K [[X]] est intègre),
val (T Qn ) = val (T ) + val (Qn ) = val (Qn ) ≤ n et val (−X n+1 Rn ) = n + 1 + val (Rn ) ≥ n + 1, ce
qui est en contradiction avec T Qn = −X n+1 Rn . On a donc Qn = 0K et Rn = 0K .
Dans le cas où S et T sont des polynômes, avec T (0) ̸= 0K , on retrouve le théorème de
division suivant les puissances croissantes dans K [X] .
Théorème 5.16 Une série formelle non nulle est inversible si, et seulement si, val (S) = 0.
Démonstration. Si S
=
∑
an X n ∈ K [[X]] est inversible, il existe alors T =
n∈N
∑
bn X n ∈
n∈N
K [[X]] telle que ST = 1K et on a en particulier a0 b0 = 1K , ce qui impose a0 ̸= 0K et signie
que val (S) = 0.
Réciproquement, si val (S) = 0, pour tout entier naturel n, on peut trouver un unique couple
(Qn , Rn ) ∈ Kn [X] × K [[X]] tel que 1K = SQn + X n+1 Rn .
n
∑
En écrivant Qn (X) =
bn,k X k , on a pour m > n ≥ 0 :
k=0
(
1K = SQm + X m+1 Rm = S
n
∑
)
bm,k X k
(
+ X n+1 S
= SQn + X
)
bm,k X k−n−1 + X m−n Rm
k=n+1
k=0
n+1
m
∑
Rn
et avec l'unicité d'une telle décomposition, on déduit que Qn =
n
∑
bm,k X k , soit bm,k = bn,k pour
k=0
tout k compris entre 0 et n.
En notant bk = bk,k pour tout k ≥ 0, on a bn,k = bk,k = bk pour tout k compris entre 0 et n
et Qn (X) =
n
∑
k=0
bk X k , la suite (bk )k∈N étant uniquement déterminée.
Les relations 1K = SQn + X n+1 Rn pour n ≥ 0 nous donne a0 b0 = 1K et pour n ≥ 1, le
coecient de X n est :
n
∑
donc en notant T =
∑
ak bn−k = 0K
k=0
bn X n , on a ST = 1K et T est l'inverse de S dans K [[X]] .
n∈N
Exercice 5.13 Déterminer l'inverse de 1 − X dans K [[X]] .
Solution 5.13 Avec :
1K = (1 − X) (1 + X + · · · + X n ) + X n+1 1K
∑ n
pour tout n ≥ 0, on déduit que l'inverse de 1 − X dans K [[X]] est
X .
n∈N
Théorème 5.17 L'anneau K [[X]] est principal. Plus précisément, les idéaux non réduit à {0}
de K [[X]] sont de la forme (X n ) = X n · K [[X]] .
Un exemple d'anneau principal non euclidien
129
Démonstration. Soit I ̸= {0} un idéal de K [[X]] . L'ensemble {val (S) | S ∈ I \ {0}} étant
une partie non vide de N, elle admet un plus petit élément, c'est-à-dire qu'il existe S0 ∈ I \ {0}
tel que :
n = val (S0 ) = min val (S)
∑
Cette série S0 est de la forme S0 =
∑
S∈I\{0}
ak X k = X n
k≥n
∑
an+k X k avec an ̸= 0, donc S =
k≥0
n
an+k X k est de valuation nulle, c'est-à-dire inversible et X = S0 S −1 ∈ I. On a donc (X n ) ⊂
k≥0
I.
Si S ∈ I \{0} , on a val (S) ≥ n, donc S = X n
et I = (X n ) .
L'anneau K [[X]] est donc principal.
∑
bn+k X k ∈ (X n ) . Il en résulte que I ⊂ (X n )
k≥0
Théorème 5.18 L'anneau K [[X]] est euclidien pour le stathme :
φ : S ∈ K [[X]] \ {0K } 7→ φ (S) = val (S)
Démonstration. L'application φ est bien un stathme. En eet, pour S, T dans K [[X]] \
{0K } , on a val (S) ∈ N et val (ST ) = val (S) + val (T ) ≥ val (S) .
Il reste à montrer qu'on a une division euclidienne.
Soient S, T dans K [X] \ {0K } de valuations respectives n, m. On a alors S = X n S1 et
T = X m T1 avec S1 , T1 de valuation nulle, donc inversibles dans K [[X]] .
Pour m ≤ n, on écrit que :
(
)
S = X n S1 = (X m T1 ) X n−m T1−1 S1 = T Q + 0K
et pour m > n, on écrit que :
S = T · 0K + S
avec φ (S) = val (S) = n < m = val (T ) = φ (T ) .
Avec ce dernier théorème, on retrouve le fait que K [[X]] est principal.
5.5 Un exemple d'anneau principal non euclidien
On sait qu'un anneau euclidien est nécessairement principal, mais la réciproque est fausse.
On se propose ici de décrire un anneau qui est principal, mais non euclidien.
On désigne par ω le nombre complexe :
√
1 + i 19
ω=
2
et Z [ω] est l'anneau :
}
{
Z [ω] = a + bω | (a, b) ∈ Z2
Z [ω] est un sous anneau de C stable par l'opération de conjugaison complexe puisque ω
est annulé par le polynôme Pω (X) = X 2 − X + 5 (cas n = 5 de l'exercice 5.12) et pour tout
u = a + bω ∈ Z [ω] , on a :
)2
(
19
b
+ b2 = a2 + ab + 5b2 ∈ N
|u| = a +
2
4
2
Division euclidienne
130
Théorème 5.19 On a :
(Z [ω])× = {−1, 1}
Démonstration. Si u = a + bω ∈ Z [ω] \ {0} est inversible, il existe alors v ∈ Z [ω] tel que
uv = 1 et avec |u|2 |v|2 = 1 dans N, on déduit que :
|u|2 = a2 + ab + 5b2 = 1
avec (a, b) ∈ Z2 . En utilisant :
a2 + ab + b2 ≥ a2 − |a| |b| + b2 ≥ (|a| − |b|)2 ≥ 0
on déduit que 1 ≥ 4b2 et nécessairement b = 0, donc a2 = 1 et a = ±1. Réciproquement ces
deux éléments sont bien inversibles dans Z [ω] .
Théorème 5.20 L'anneau Z [ω] n'est pas euclidien.
Démonstration. Supposons qu'il existe un stathme
φ : A∗ → N qui fasse de Z [ω] un
anneau euclidien. On désigne par u un élément de Z [ω] \ {0} tel que :
φ (u) = min {φ (v) | v ∈ Z [ω] \ {−1, 0, 1}}
(un tel élément existe puisque {φ (v) | v ∈ Z [ω] \ {−1, 0, 1}} est une partie non vide minorée
de N).
Pour tout v ∈ Z [ω] \ {0} , on a une division euclidienne v = qu + r avec r = 0 ou r ̸= 0 et
φ (r) < φ (u) . Si r = 0, u divise alors v, sinon on a nécessairement r ∈ {−1, 1} et u divise v − 1
ou v + 1 dans Z [ω] . Donc, dans tous les cas, |u|2 divise |v|2 , |v − 1|2 ou |v + 1|2 dans N.
Prenant v = 2, on a |v|2 = 4, |v − 1|2 = 1 et |v + 1|2 = 9, donc |u|2 divise 1, 4 ou 9 et prenant
v = ω, on a |v|2 = 5, |v − 1|2 = 5 et |v + 1|2 = 7, donc |u|2 divise 5 ou 7. La seule possibilité est
alors |u|2 = uu = 1, ce qui signie que u est inversible (u est dans Z [ω]), soit que u ∈ {−1, 1} ,
ce qui est exclu.
L'anneau Z [ω] ne peut donc être euclidien.
Lemme 5.12 Pour tout z ∈ C, il existe u ∈ Z [ω] ou v ∈ Z [ω] tel que :
|z − u| < 1 ou |2z − v| < 1
Démonstration. Tout nombre complexe s'écrit de manière unique z = x + yω avec (x, y) ∈
R2 et il existe un unique couple (a, b) d'entiers
[
1
(x, y) ∈ a − , a +
2
relatifs tel que :
[ [
[
1
1
1
× b − ,b +
2
2
2
donc, en notant u = a + bω dans Z [ω] , on a :
|z − u|2 = (x − a)2 + (x − a) (y − b) + 5 (y − b)2
≤ (x − a)2 + |x − a| |y − b| + 5 (y − b)2
1 1
≤ + |y − b| + 5 (y − b)2
4 2
1
3
Si |y − b| ≤ , il vient :
|z − u|2 ≤
1 1 5
35
+ + =
<1
4 6 9
36
Anneaux euclidiens pour lesquels il y a unicité de la division
Si
131
1
1
< |y − b| ≤ , on a alors :
3
2
1
1
1
1
< y − b ≤ ou − < y − b ≤ −
3
2
2
3
soit :
2
2
< 2y ≤ 2b + 1 ou 2b − 1 < 2y ≤ 2b −
3
3
Dans le premier cas, on pose d = 2b + 1 et dans le [second d = 2b
[ − 1, ce qui nous donne
1
1
1
|2y − d| ≤ et en désignant par c l'entier tel que 2x ∈ c − , c +
, en prenant v = c + dω ∈
3
2
2
Z [ω] , on a |2z − v| < 1.
2b +
Théorème 5.21 L'anneau Z [ω] est principal.
Démonstration. Soient I un idéal de Z [ω] non réduit à {0} et u0 = a + bω ∈ Z [ω] tel que :
{
}
|u0 |2 = min |u|2 | u ∈ I \ {0}
{
}
Ce minimum existe car |u|2 | u ∈ I \ {0} est une partie non vide de N∗ .
Comme I est un idéal, on a déjà (u0 ) = Z [ω] u0 ⊂ I.
v
Soient v ∈ I et z = . Supposons que v ∈
/ (u0 ) .
u0
Si u ∈ Z [ω] est tel que |z − u| < 1, on a alors 0 < |v − u0 u| < |u0 | et v ∈
/ I (sinon v −u0 u ∈ I
puisque I est un idéal et v − u0 u = 0 par dénition de u0 ), ce qui n'est pas.
Si u ∈ Z [ω] est tel que |2z − u| < 1, on a alors 0 < |2v − u0 u| < |u0 | et 2v ∈
/ I, ce qui
implique encore que v ∈
/ I (v ∈ I entraîne 2v = v + v ∈ I puisque I est un groupe additif), ce
qui n'est pas.
L'hypothèse v ∈
/ (u0 ) est donc impossible et I ⊂ Z [ω] u0 .
On a donc I = Z [ω] u0 et I est principal.
5.6 Anneaux euclidiens pour lesquels il y a unicité de la
division
Pour ce paragraphe, (A, φ) est un anneau euclidien.
Dans les exemples d'anneaux euclidiens que nous avons considérés, seuls les anneaux de polynômes à coecients dans un corps commutatif, avec le degré pour stathme, assurent l'unicité
du reste et du quotient dans la division euclidienne. En fait, ce sont les seuls cas possibles.
Nous allons montrer plus précisément que si (A, φ) est un anneau euclidien dans lequel il y a
unicité du quotient et du reste pour la division euclidienne, alors cet anneau est isomorphe à
un anneau de polynômes à coecients dans un corps commutatif.
Le lemme qui suit nous dit que cette unicité est réalisée si, et seulement si, le stathme φ
vérie deux propriétés vériées par le degré des polynômes.
Lemme 5.13 Le quotient et le reste sont uniquement déterminés pour la division euclidienne
dans (A, φ) si, et seulement si, le stathme φ est tel que :
et :
∀ (a, b) ∈ A∗ × A∗ , φ (ab) ≥ φ (a)
(5.3)
∀ (a, b) ∈ A∗ × A∗ , a ̸= b ⇒ φ (a − b) ≤ max (φ (a) , φ (b))
(5.4)
Division euclidienne
132
Démonstration. Supposons que le quotient et le reste sont uniquement déterminés pour la
division euclidienne dans (A, φ) et soient a, b dans A∗ .
Si φ (ab) < φ (a) , on a alors deux divisions euclidiennes de ab par a : ab = ab + 0 et
ab = a0 + ab (on a ab ̸= 0 puisque a, b sont non nuls et A est intègre), ce qui est contraire à
notre hypothèse.
En supposant que a ̸= b et en écrivant que :
2a − b = 1 · (a − b) + a = 2 (a − b) + b
les inégalités φ (a) < φ (a − b) et φ (b) < φ (a − b) nous donneraient deux divisions euclidiennes
de 2a − b par a − b, ce qui n'est pas, on a donc φ (a − b) ≤ φ (a) ≤ max (φ (a) , φ (b)) ou
φ (a − b) ≤ φ (b) ≤ max (φ (a) , φ (b)) .
Réciproquement supposons que (??) et (??) soient vériées et que l'on ait deux divisions
euclidiennes, a = bq + r = bq ′ + r′ . Si q ̸= q ′ , on a alors r − r′ = b (q ′ − q) ̸= 0 (A est intègre).
Si r′ = 0, on a alors r ̸= 0 et φ (r) = φ (b (q ′ − q)) ≥ φ (b) , ce qui contredit φ (r) < φ (b) .
On a donc r′ ̸= 0 et en permutant les rôles de r et r′ , on voit qu'on a également r ̸= 0. Mais
on aboutit alors à :
φ (b) ≤ φ (b (q ′ − q)) = φ (r − r′ ) ≤ max (φ (r) , φ (r′ )) < φ (b)
ce qui n'est pas possible.
On a donc q = q ′ et r = r′ .
La propriété (5.3) de croissance du stathme est vériée pour les exemples classiques d'anneaux euclidiens : K [X] , Z, D et Z [i] .
En fait, on a vu qu'on peut toujours se ramener à un stathme croissant (lemme 5.1), ce qui
est intéressant pour caractériser les éléments inversibles de A (théorème 5.2).
On suppose, pour la suite de cet paragraphe que le quotient et le reste sont uniquement
déterminés pour la division euclidienne dans (A, φ) , c'est-à-dire que :
∀ (a, b) ∈ A × A∗ , ∃! (q, r) ∈ A2 | a = bq + r avec r = 0 ou r ̸= 0 et φ (r) < φ (b)
ce qui équivaut à dire que les propriétés (5.3) et (5.4) sont vériées.
Un candidat raisonnable pour la structure de corps sur lequel seront utilisés les polynômes
est K = A× ∪ {0} .
Lemme 5.14
K = A× ∪ {0} est un corps. Donc A est un K-espace vectoriel.
Démonstration. On a 1 ∈ K et pour a, b dans K, ab est dans K puisque A× est un groupe
multiplicatif.
Il reste à montrer que pour a, b dans K, a − b est aussi dans K. Si a = b, on a alors
a − b = 0 ∈ K ; si a = 0 [resp. b = 0], on a alors a − b = −b ∈ K [resp. a − b = a ∈ K]. Enn si
a, b sont dans A∗ avec a ̸= b, on a alors :
φ (1) = min∗ φ (x) ≤ φ (a − b) ≤ max (φ (a) , φ (b)) = φ (1)
x∈A
donc φ (a − b) = φ (1) et a − b ∈ K.
K est un sous-anneau de A et tous les éléments de K∗ = A× sont inversible, c'est donc un
corps.
Lemme 5.15 Soient a ̸= b dans A∗ . Si φ (a) < φ (b) , on a alors φ (b − a) = φ (b) .
Anneaux euclidiens pour lesquels il y a unicité de la division
133
Démonstration. On a déjà φ (b − a) ≤ max (φ (a) , φ (b)) = φ (b) .
Si φ (b − a) < φ (b) , on a alors :
2b − a = 1 · b + (b − a) = 2b + (−a)
avec φ (b − a) < φ (b) et φ (−a) = φ (a) < φ (b) , donc b − a = −a par unicité du reste et b = 0,
ce qui n'est pas.
On a donc φ (b − a) = φ (b) .
On suppose maintenant que A n'est pas un corps. On a donc K $ A et il existe x ∈ A \ K
tel que :
φ (x) = min φ (y)
y∈A\K
Lemme 5.16 On a φ (x) > φ (1) , la suite (φ (xn ))n∈N est strictement croissante dans N et la
famille Bx = (xn )n∈N est libre dans le K-espace vectoriel A.
/ A× .
Démonstration. On a déjà φ (1) = y∈A
min φ (y) ≤ φ (x) et φ (x) ̸= φ (1) puisque x ∈
∗
Comme x ̸= 0 et x ∈
/ A , on a φ (x ) = φ (xn x) > φ (xn ) .
On en déduit que φ (xn ) ≥ n pour tout n ∈ N et lim φ (xn ) = +∞.
×
n+1
( )
n→+∞
Dire que la famille Bx est libre, revient à dire que, pour tout entier n ∈ N, la famille xk
est libre.
n
Soient a0 , · · · , an dans K = A× ∪ {0} tels que
∑
0≤k≤n
ak xk = 0. Si a0 ̸= 0, on a alors a0 ∈ A× et
k=0
n
∑
( −1 ) k
x
−a0 ak x = 1, donc x ∈ A× , ce qui n'est pas. On a donc a0 = 0.
k=1
Supposant que a0 = · · · = ak = 0 pour 0 ≤ k ≤ n − 1, on a x
k+1
n
∑
n
∑
aj xj−k−1 = 0, donc
j=k+1
aj xj−k−1 = 0 puisque A est intègre et ak+1 = 0.
j=k+1
( )
Les ak sont donc tous nuls et xk
0≤k≤n
est libre.
Lemme 5.17 Pour tout a ∈ A∗ , il existe un unique entier naturel n tel que φ (a) = φ (xn ) .
Démonstration. La suite (φ (xn ))n∈N est une suite strictement croissante d'entiers naturel,
il existe donc, pour a ∈ A∗ , un unique entier naturel n tel que :
(
)
φ (xn ) ≤ φ (a) < φ xn+1
{
( )
}
(comme φ (a) ≥ φ (1) = φ (x0 ) , l'ensemble k ∈ N | φ xk ≤ φ (a) est non vide dans N, il
admet donc un plus petit élément qui vérie φ (xn ) ≤ φ (a) < φ (xn+1 )).
Si n = 0, on a alors φ (a) < φ (x) , donc a ∈ A× (sinon a ∈
/ K puisque a ̸= 0 et φ (x) ≤ φ (a))
et φ (a) = φ (1) .
Si n ≥ 1, on a la division euclidienne de a par xn :
a = qxn + r avec r = 0 ou r ̸= 0 et φ (r) < φ (xn )
Si q = 0, on a alors φ (a) = φ (r) < φ (xn ) , ce qui n'est pas, donc q ̸= 0.
Si r = 0, on a alors φ (a) = φ (qxn ) .
Division euclidienne
134
Si r ̸= 0, on a alors φ (−r) = φ (r) < φ (xn ) ≤ φ (qxn ) et φ (a) = φ (qxn − (−r)) = φ (qxn ) .
Dans tous les cas, on a φ (a) = φ (qxn ) .
On a la division euclidienne q = αx + β avec β = 0 ou β ̸= 0 et φ (β) < φ (x) , donc β ∈ K
dans les deux cas.
Si α ̸= 0, on a alors qxn = αxn+1 + βxn .
Si β = 0, on a alors φ (a) = φ (qxn ) = φ (αxn+1 ) ≥ φ (xn+1 ) , ce qui n'est pas.
On a donc β ̸= 0, soit β ∈ A× et :
(
)
(
)
φ (βxn ) = φ (xn ) < φ xn+1 ≤ φ αxn+1
donc φ (a) = φ (qxn ) = φ (αxn+1 ) ≥ φ (xn+1 ) , ce qui n'est pas.
On a donc α = 0 et q = β ∈ A× (q est non nul), ce qui nous donne φ (a) = φ (xn ) .
Comme la suite (φ (xn ))n∈N est strictement croissante, cet entier n est uniquement déterminé
par a.
Théorème 5.22 La famille Bx = (xn )n∈N est une base de A, c'est-à-dire que pour tout a ∈ A,
il existe un unique entier naturel n et une unique suite (ak )0≤k≤n d'éléments de K telle que
a=
n
∑
ak xk , les ak étant dans K avec an ∈ A× . Ce que l'on peut noter A = K [x] .
k=0
Il en résulte que l'anneau A est isomorphe à l'anneau K [X] des polynômes à une indéterminée
et à coecients dans le corps commutatif K.
Démonstration. Comme Bx = (xn )n∈N est libre dans le K-espace vectoriel A, il nous sut
de montrer que cette famille Bx est génératrice.
Pour ce faire, on montre par récurrence sur n ≥ 0 que tout a ∈ A∗ tel que φ (a) = φ (xn )
s'écrit a =
n
∑
ak xk , les ak étant dans K avec an ∈ A× .
k=0
Pour n = 0, φ (a) = φ (1) signie que a = a0 ∈ A× .
Supposons le résultat acquis jusqu'au rang n−1 ≥ 0 et soit a ∈ A∗ tel que φ (a) = φ (xn ) . On
a vu à la question précédente que a = qxn + r avec q ∈ A× et r = 0 ou r ̸= 0 et φ (r) < φ (xn ) ,
donc φ (r) ≤ φ (xn−1 ) . Pour r = 0, on a a = an xn avec an = q ∈ A× et pour r ̸= 0, on a par
hypothèse de récurrence, r =
p
∑
ak xk avec 0 ≤ p ≤ n − 1, ak ∈ K pour tout k compris entre 0
k=0
et p et ap ∈ A× . Notant an = q, an−1 = · · · = ap+1 = 0 (éventuellement), on a bien a =
n
∑
ak xk ,
k=0
les ak étant dans K avec an ∈ A× .
Il est clair que l'application :
ϕ : K [X] →
A
P
7→ P (x)
est un morphisme d'anneaux et on vient de voir qu'elle est bijective, c'est donc un isomorphisme
de K [X] sur A.
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