de cellules souches hématopoïétiques. Il s’agit alors égale-
ment de formes EBV+ dans la majorité des cas [24, 25].
Différents travaux ont établi l’existence d’une association
entre infection à EBV et maladie de Hodgkin. Une étude
de cohortes a pu montrer une augmentation du risque rela-
tif de survenue de maladie de Hodgkin EBV+ d’un facteur
4 après mononucléose infectieuse, dans un délai médian
de 4 ans. En revanche, il n’était pas retrouvé d’augmenta-
tion du risque de lymphome de Hodgkin EBV- [26]. Des
données sérologiques anciennes avaient montré qu’il exis-
tait, dans les années précédant le diagnostic, des titres
d’anticorps anti-EBV plus élevés chez les patients atteints
de maladie de Hodgkin que chez des témoins sains. Cette
étude n’avait cependant pas distingué les formes EBV+
des formes EBV- [27]. Enfin, dans les années précédant la
maladie, la charge virale EBV serait plus importante dans
les formes EBV+ que dans les formes EBV- ou chez les
sujets sains [28]. Ces derniers résultats n’établissent pas
de relation causale entre EBV et maladie de Hodgkin, ne
traduisant peut-être que les perturbations du système im-
munitaire associées à la maladie.
Valeur pronostique de l’association avec l’EBV
et intérêt de la mesure de la charge virale
Pour l’instant, l’association entre maladie de Hodgkin et
EBV n’a pas de signification clinique ou pronostique clai-
rement établie. Il existe en effet des résultats contradictoi-
res. Plusieurs études n’ont pas retrouvé d’impact pronosti-
que du statut EBV de la maladie [29, 30]. D’autres auteurs
ont en revanche mis en évidence une meilleure survie sans
maladie des formes EBV+ chez les sujets jeunes (mais
sans différence significative de survie globale) [31, 32].
Deux études récentes ont montré que les formes EBV+
étaient associées à une survie significativement moins
bonne chez les sujets âgés [33, 34]. Enfin, une étude a
montré que les formes EBV+ étaient davantage retrouvées
chez les sujets âgés et associées à l’existence de symptô-
mes B (amaigrissement, fièvre et sueurs nocturnes) et à
une maladie de stade plus avancé. La différence de survie
n’était toutefois pas statistiquement significative [35]. Le
statut EBV+ de la maladie représenterait donc un facteur
de mauvais pronostic chez les sujets âgés, tandis qu’il
serait soit dépourvu de valeur pronostique soit associé à
un meilleur pronostic chez les adultes jeunes (tableau II).
Des travaux utilisant des techniques de PCR qualitative et
quantitative ont montré que l’ADN viral pouvait être dé-
tecté dans le sérum de patients atteints de lymphome de
Hodgkin EBV+ avant traitement (dans 90 % des cas avec
la PCR qualitative et dans 75 % des cas avec la PCR
quantitative) [36]. La PCR quantitative a l’avantage d’être
plus spécifique en détectant moins de faux positifs dans
les formes EBV-. Deux études, réalisées à la fois chez
l’adulte et l’enfant, ont montré que la réponse au traite-
ment était corrélée à la réduction de la charge virale plas-
matique : les patients en rémission présentaient en effet
une diminution significative de la charge virale, retrouvée
faible ou indétectable, alors que la progression tumorale
s’associait à une augmentation de cette dernière [37, 38].
Ces résultats n’étaient pas retrouvés si l’ADN était extrait
des cellules mononucléées sanguines [38]. L’ADN viral
retrouvé dans le sérum des patients serait en effet la consé-
quence de la libération d’ADN par les cellules de Reed-
Sternberg et ne proviendrait pas de la réplication du virus
dans d’autres sites.
Hypothèses pathogéniques
Les techniques de microdissection unicellulaire, combi-
nées à l’analyse moléculaire du réarrangement des gènes
des immunoglobulines, ont montré que les cellules de
Reed-Sternberg étaient en réalité des cellules B clonales
[39-41]. En effet, l’expression d’antigènes spécifiques des
lymphocytes B (CD20, CD79a) par les cellules de Reed-
Sternberg a été rapportée dans 30 à 60 % des maladies de
Hodgkin classiques [42]. De plus, la présence de réarran-
gements clonaux des gènes d’immunoglobulines a été dé-
tectée dans la plupart des études génotypiques réalisées
après microdissection. Ces études montrent en outre la
présence d’un taux élevé de mutations somatiques des
régions variables des gènes d’immunoglobulines. Toute-
fois, ces réarrangements n’aboutissent pas à une synthèse
des chaînes légères et des chaînes lourdes d’immunoglo-
bulines. Dans la majorité des cas, cette absence de syn-
thèse résulte d’un défaut de la machinerie transcription-
nelle (absence d’expression du facteur de transcription
Oct-2 et du cofacteur Bob-1/Obf-1 dans les cellules de
Reed-Sternberg) [43]. Cependant, dans 25 % des cas envi-
ron, l’absence d’expression des gènes d’immunoglobuli-
nes est due à l’existence de mutations somatiques non
fonctionnelles dans les chaînes lourdes (crippling muta-
tions) [40]. Ces observations indiquent que la cellule de
Reed-Sternberg dériverait d’un lymphocyte B du centre
germinatif anormalement rescapé de l’apoptose. L’infec-
tion par l’EBV pourrait intervenir dans la survie anormale
de ces cellules en l’absence des signaux fournis par la
reconnaissance de l’antigène. Une intégration clonale du
virus dans les cellules tumorales a ainsi été démontrée
dans les formes associées à l’EBV [44]. Les protéines de
latence de type II fourniraient différents signaux oncogé-
niques et antiapoptotiques. LMP1 est un oncogène majeur
de l’EBV. Il s’agit d’une molécule membranaire active de
manière constitutive, capable d’induire les voies d’activa-
tion cellulaire NFjB, MAP-kinases (JNK et p38) et
JAK/STAT[45]. L’activation de NFjB est retrouvée de
manière constante dans les cellules de Reed-Sternberg.
Elle interviendrait dans la prolifération cellulaire et l’inhi-
bition de l’apoptose. LMP1 activerait également différents
Maladie de Hodgkin et virus d’Epstein-Barr
Ann Biol Clin, vol. 62, n° 6, novembre-décembre 2004 643
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