Les troubles du comportement dans les démences sévères

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Synthèse
Les troubles du comportement
dans les démences sévères
CHRISTIAN DEROUESNÉ
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.165.207 le 24/05/2017.
Faculté de médecine
Pitié-Salpêtrière,
Université Paris VI
<[email protected]>
Résumé. Les troubles psychiques et comportementaux (TPC) bien que n’apparaissant ni
dans les critères de diagnostic des démences ni dans les échelles d’évaluation de leur
sévérité, constituent pourtant un élément essentiel de la charge des aidants et la cause
principale d’institutionnalisation. Ils sont à la fois la conséquence des lésions cérébrales,
mais aussi des réactions du patient à ses déficits et à l’attitude de l’entourage. En dépit des
troubles du langage et de la désorganisation de la pensée dans les démences sévères, les
patients gardent une vie psychique et relationnelle dont l’expression passe souvent par des
TPC. Beaucoup d’entre eux sont transitoires et peuvent être améliorés par une bonne
compréhension de leur signification et une approche non médicamenteuse. Néanmoins, un
traitement psychotrope est souvent utile voire nécessaire, mais, du fait de la fragilité des
patients au stade de démence sévère, ses modalités doivent être particulièrement réfléchies.
Mots clés : démence, maladie d’Alzheimer, trouble psychique, comportement
Abstract. Behavioral and psychological symptoms of dementia (BPSD) are not included in
the diagnostic criteria for dementia or in the assessment tools for grading its severity.
However, they constitute a major part of the caregivers’ burden and the main cause for
institutionnalization. They are, for one part, the direct consequence of the brain lesions, but,
for another part, they result from the psychological reactions of the patients to their
cognitive deficits or their relational difficulties with their familiy or carers. Despite speech
disorder and mind disruption, patients with severe dementia still have a psychic and
relational life, which is expressed through BPSD. Many BPSD are of short duration and can
be improved by a better understanding, psychological and behavioral approach. However,
psychotropic drugs are often useful or necessary, but, due to the frailty of the patients with
severe dementia, their use should be very cautious.
Key words: dementia, Alzheimer disease, non cognitive symptom, behavior
Tout comportement est communication
et toute communication
est comportement.
Watzlawick
La logique de la communication
L
e titre de cet article appelle des clarifications. La
définition de la démence, comme un déficit cognitif multiple dont l’intensité entraîne une réduction des activités de la vie quotidienne, suggère que
l’évaluation de sa sévérité reposerait sur les éléments
de la définition. Le DSM-III-R proposait d’évaluer la
sévérité sur le degré de dépendance dans la vie quotidienne : la démence sévère correspondait ainsi à une
altération des activités quotidiennes telle que le sujet
devait être surveillé en permanence (par exemple, le
patient est incapable d’observer une hygiène personnelle minimale, il est incohérent ou mutique). Cette
évaluation de la sévérité sur le degré de dépendance,
a priori satisfaisante, a été abandonnée dans les édi-
tions ultérieures : le DSM-IV-TR ne fournit plus de critères de sévérité, indiquant que le degré de handicap
dépend de la sévérité des déficits cognitifs et du soutien social. Il était donc logique de recourir au seul
critère objectif : la sévérité du déficit cognitif. Dans la
classification de l’OMS, le degré de sévérité est précisé
pour chaque déficit, mais non pour l’ensemble des
déficits. Mais l’évaluation la plus répandue est de recourir au score d’un test universellement utilisé, le
MMSE, un score < 10 définissant les démences sévères. Bien que communément acceptée, cette évaluation
suppose une relation directe entre les déficits cognitifs
évalués par le MMSE et la perte d’autonomie, ce qui
néglige deux facteurs qui interviennent de façon essentielle dans la restriction des activités quotidiennes : le
déficit des fonctions exécutives, non exploré par le
MMSE, et l’influence des manifestations non cognitives. La troisième technique d’évaluation de la sévérité
repose sur des échelles composites comme la GDS [1]
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C. Derouesné
et la CDR [2] qui tiennent compte, à la fois, des déficits
cognitifs et du degré de dégradation des activités de la
vie quotidienne. Au total, aucune de ces évaluations de
la sévérité de la démence ne prend en compte les
troubles du comportement qui représentent pourtant la
première cause d’institutionnalisation. Ainsi, à l’exception des formes très avancées, terminales de la maladie, le terme de démence sévère est loin de regrouper
des patients homogènes et les limites entre démences
modérées et sévères sont loin d’être franches.
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La notion de troubles du comportement mérite, elle
aussi, certaines précisions.
Le terme de comportement renvoie aux conduites
observables de l’extérieur, sans tenir compte du vécu
du malade ni du fait qu’un même trouble du comportement peut correspondre à des mécanismes différents
(par exemple : l’agitation).
Cette perspective comportementaliste d’approche
du psychisme, dérivée de la psychologie expérimentale, est favorisée par l’idéologie de la psychiatrie biologique qui considère que les maladies mentales ou les
troubles comportementaux sont liés à des anomalies
du fonctionnement cérébral responsables du trouble
mental, anomalies qu’elle a pour objectif de mettre en
évidence (recherche) et de corriger par des médicaments restaurant le fonctionnement cérébral. Ainsi,
abord comportementaliste et psychiatrie biologique se
rejoignent pour ne pas prendre en compte la vie psychique et relationnelle du sujet dément. Ce rejet est
encore aggravé par la définition actuelle de la démence
comme un déficit cognitif multiple retentissant sur la
vie quotidienne. Or, le patient dément, en dépit de troubles cognitifs qui peuvent être sévères et perturber
l’expression de sa vie affective, garde une vie psychique et relationnelle. Bien que les troubles cognitifs
constituent son noyau spécifique, la démence entraîne
un bouleversement de l’ensemble de la vie psychique
et relationnelle. Il nous semble donc préférable de parler de troubles psychiques et comportementaux ou,
plus simplement, de troubles psychocomportementaux (TPC) pour souligner la prise en compte de l’aspect subjectif de la psychopathologie des sujets déments.
Longtemps négligées, les manifestations non cognitives des démences, en particulier dans la maladie
d’Alzheimer et les démences frontotemporales, ont fait
l’objet de nombreuses publications au cours de ces
dernières années [3]. Leur retentissement sur la vie
quotidienne [4] et sur les décisions d’institutionnalisation [5] est aujourd’hui largement reconnu. Leur évaluation a bénéficié de la mise au point d’une échelle
S6
largement répandue, le neuropsychiatric inventory
(NPI) [6], dont la traduction en français a été validée [7].
À quoi sont dus les troubles
psychocomportementaux ?
Les troubles psychocomportementaux que présentent les sujets déments relèvent de deux principales
causes.
Certains sont directement liés aux conséquences
directes des lésions cérébrales soit parce qu’elles siègent dans les régions dont l’activité sous-tend notre vie
affective (noyaux amygdaliens situés dans la région
hippocampique, cortex frontal) soit par les perturbations biochimiques qu’elles entraînent sur les systèmes
de neurotransmission (déficit cholinergique mais aussi
déficits associés en dopamine, en sérotonine ou en
noradrénaline). Ces TPC, d’origine biologique (que l’on
peut appeler « symptômes primaires ») dépendent
donc de la localisation et de l’étendue des lésions qui
provoquent une désorganisation progressive du psychisme, indépendante du patient et de l’entourage, et
relèvent d’un traitement médicamenteux.
D’autres manifestations sont, à l’inverse, d’origine
psychologique. Elles témoignent de la réaction du patient confronté aux déficits cognitifs et aux symptômes
précédents, mais également à l’attitude de l’entourage
face à ces troubles. Elles sont liées en grande partie à
des tentatives de surmonter la baisse de l’estime de soi
qu’entraînent la maladie et ses conséquences sur le
fonctionnement cérébral et de faire face à l’attitude de
l’entourage qui ne comprend pas ou n’accepte pas les
symptômes de la maladie. Elles dépendent de la personnalité antérieure du patient (une personnalité narcissique supporte mal les atteintes à son image), de
l’importance symbolique qu’il accordait aux fonctions
déficitaires (le déficit de mémoire, du langage n’est pas
affectivement vécu de la même façon par un professeur
de lettre et par un travailleur manuel). Au stade de
démence sévère, en dépit des troubles du langage et
de la désorganisation de la pensée, le patient garde
une vie psychique et relationnelle qui s’exprime à travers les TPC ou les moments de plus grande lucidité.
Du plus ou moins bon fonctionnement antérieur du
couple, de la personnalité de l’aidant vont dépendre la
qualité de l’adaptation aux perturbations psychiques
du patient. L’importance de ces facteurs psychologiques et relationnels est bien illustrée par l’effet placebo
lors des essais thérapeutiques. Les symptômes secondaires qui en résultent aggravent les déficits cognitifs,
la perte d’autonomie. Leur prise en charge nécessite
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Troubles du comportement
ainsi une information pour comprendre leur signification et un soutien psychologique orienté vers le patient
comme vers son entourage, attitude dont l’efficacité a
été démontrée par les études d’intervention qui ont
établi qu’en améliorant la compréhension des aidants
institutionnels [8] ou familiaux, on diminuait l’intensité
des TPC.
Enfin, un certain nombre de troubles sont liés aux
difficultés de communication qui s’accentuent aux stades avancés de la maladie. Le patient, surtout lorsqu’il
présente des troubles du langage importants ou lorsque sa vie psychique est sévèrement désorganisée, ne
peut communiquer ce qu’il ressent et s’exprime par
son comportement. Par exemple, une douleur, un malaise, une contrariété peuvent se traduire par une agitation, un comportement agressif, un comportement
d’angoisse. À l’inverse, il est difficile d’accéder à leur
pensée, de comprendre leur fonctionnement psychique. Il faut toutefois noter qu’il existe souvent des périodes d’amélioration transitoires pendant lesquelles la
communication peut être partiellement rétablie.
Ainsi deux écueils sont à éviter dans la prise en
charge de ces troubles :
– d’un côté, méconnaître l’importance des facteurs psychologiques et de l’influence de l’entourage, ce qui est
souvent le fait des médecins ;
– de l’autre, la tentation d’expliquer tous les troubles
par des facteurs psychologiques en ne prenant pas en
compte le caractère inévitable, indépendant du patient,
de certaines manifestations, ce qui est une tentation
fréquente chez les aidants [9].
Fréquence
des troubles du comportement
La fréquence des divers TPC est difficile à établir car
elle varie grandement selon les études, en fonction des
regroupements sémiologiques, des modalités de recueil comme des populations étudiées selon le lieu de
l’étude (consultations Mémoire, services de psychiatrie, de neurologie, institutions gériatriques), et de leur
plus ou moins grande spécificité (études portant sur la
démence en général ou les TPC au cours d’une affection spécifique, démences frontotemporales (DFT), maladie d’Alzheimer (MA), démence vasculaire...). Dans
les DFT, les TPC représentent les symptômes inauguraux et dominants de la maladie. Dans la MA, ils sont
constants tout au long de l’évolution, bien que beaucoup moins sévères que dans les DFT. Certains symptômes sont très précoces comme la démotivation, l’anxiété, d’autres habituellement d’apparition plus tardive,
comme les troubles psychotiques ou l’agitation [10].
Beaucoup d’études soulignent l’augmentation de fréquence et de la sévérité des TPC avec la progression de
la maladie, mais il existe des données contradictoires.
En effet, la sévérité des TPC semble plus liée à l’intensité des perturbations de la vie quotidienne et des fonctions exécutives qu’au score au MMSE, ce qui suggère
leur relation avec une atteinte frontale [11]. Nous avons
repris, pour cet article, les données d’une étude antérieure des TPC dans la MA faite à partir d’un questionnaire rempli par l’aidant principal, le conjoint dans la
quasi-totalité des cas [12]. Ces données (tableau 1)
montrent que le score total des TPC n’augmentait sensiblement qu’entre les catégories MA débutante et démence légère. Les différences entre les autres groupes
étaient négligeables : les TPC sont donc, dans une certaine mesure, indépendants des manifestations cognitives et doivent être considérés comme une manifestation de la maladie au même titre que les déficits
cognitifs. Dans cette étude, la fréquence des TPC était
très variable selon les sujets, ce que traduit l’importance des déviations standards du score total dans
l’étude citée. Les troubles rapportés par l’aidant comme
les plus fréquents et les plus sévères, à tous les stades,
étaient l’apathie, les comportements violents et les
troubles sexuels. L’anxiété, l’humeur dépressive et la
méconnaissance des troubles étaient très fréquents
mais peu sévères. Seuls les troubles du comportement
alimentaire et l’agitation avaient tendance à augmenter
dans les démences sévères. Ces données sont néanmoins à interpréter avec prudence du fait du faible
nombre de démences sévères et de leur provenance
d’une consultation spécialisée située dans un milieu
neurologique. Des chiffres très différents pourraient
être observés chez des patients institutionnalisés ou en
provenance d’un milieu psychiatrique. Enfin, il est possible qu’il y ait un biais d’observation de la part des
aidants qui accorderaient, à un stade avancé de la maladie, moins d’importance aux troubles du vécu psychique des patients qu’aux manifestations comportementales. Leur évaluation peut également refléter le
caractère plus ou moins gênant qu’ils accordent aux
symptômes, ce qui n’était pas pris en compte spécifiquement dans l’échelle utilisée.
Principaux troubles
psychocomportementaux
L’apathie
Elle se définit aujourd’hui comme une diminution
de la motivation [13]. Elle se traduit par une diminution
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C. Derouesné
d’activité (le patient refuse de sortir et peut rester assis
sur une chaise pendant des heures), un désintérêt pour
les activités qui l’intéressaient auparavant, un repli sur
soi grandissant associé à une diminution des réactions
émotionnelles, une difficulté à maintenir son attention.
La signification de l’apathie est variable. Sa fréquence
et sa précocité dans la maladie d’Alzheimer, comme
dans les dégénérescences frontotemporales, et sa
moindre fréquence dans les affections sous-corticales,
son aggravation au cours de la progression de la maladie sont des éléments en faveur d’une origine biologique, liée aux lésions ou aux perturbations des noyaux
amygdaliens et du cortex frontal. Un autre argument
vient de leur amélioration par les traitements spécifiques de la MA. Mais, bien souvent, le patient préfère se
replier sur lui-même plutôt que de s’exposer à des
échecs répétés ou à dévoiler ses troubles à son entourage, ce qui provoque une réaction de repli. L’apathie
ne doit pas être confondue avec la dépression. Elle est
fort mal vécue par l’aidant car l’émoussement affectif
perturbe les relations familiales et elle accentue l’isolement social. Son amélioration constitue une des réponses les plus claires aux anticholinestérasiques. L’emploi de certains médicaments à action psychotonique
peut se discuter, mais il convient de rester prudent à ce
stade car une augmentation de l’activité peut générer
une augmentation des comportements non appropriés.
La dépression
Sa fréquence varie grandement selon les études du
fait, notamment, de la confusion entre apathie et dépression. Les symptômes dépressifs sont fréquents :
tristesse, pleurs, sentiment d’incurabilité, mais les épisodes dépressifs majeurs sont rares, de même que les
idées d’autoaccusation ou de suicide [14]. Des éléments sémiologiques distinguent la dépression de
l’apathie. Le patient déprimé souffre moralement, présente des plaintes multiples, exprime son inquiétude
pour sa santé, pour l’avenir, il ne réagit pas aux émotions positives et a perdu le goût du plaisir (anhédonie),
mais vit douloureusement les situations négatives. Le
patient apathique est émoussé : ses réactions sont diminuées aussi bien face aux événements malheureux
qu’heureux, il n’exprime pas d’inquiétude ni pour la
situation présente ni pour l’avenir.
L’origine des symptômes dépressifs provient largement d’une situation de mise en échec répétée (situation d’impuissance acquise qui constitue le modèle expérimental de la dépression chez l’animal) et d’une
baisse de l’estime de soi. Néanmoins, un facteur biologique semble également intervenir car plusieurs études ont montré une relation entre dépression et déficits
S8
en noradrénaline ou en sérotonine ou encore avec la
présence de lésions sous-corticales, notamment vasculaires.
Lorsqu’un traitement s’avère nécessaire en cas de
dépression caractérisée ou utile du fait de la sévérité ou
de la permanence des symptômes dépressifs, un
consensus a été établi pour prescrire, en première intention, les inhibiteurs spécifiques de la sérotonine
(ISRS). Il est important de noter néanmoins que l’effet
des antidépresseurs est limité par deux facteurs : l’existence de perturbations irréversibles des systèmes de
neurotransmission du fait des lésions cérébrales et la
persistance des situations de mise en échecs répétés
du fait des troubles cognitifs. Le traitement médicamenteux doit alors s’accompagner d’une prise en
charge de type psychothérapique. Dans les formes très
avancées, certains comportements peuvent être interprétés comme le témoignage d’une dépression : refus
d’alimentation, refus de soin, syndrome de glissement.
L’anxiété
Elle est très fréquente, dès le début de la maladie.
Le patient exprime des craintes concernant sa situation, le retentissement sur la famille, craint de ne plus
pouvoir être utile, d’être considéré comme fou, écarté
des décisions... Plus tardivement, lorsque la communication orale est perturbée ou le déficit cognitif sévère,
l’anxiété s’exprime par un certain nombre de comportements : conduites répétitives, agitation, agressivité,
refus de rester seul, d’aller se coucher ou de s’endormir, manifestations somatiques, en particulier respiratoires (crises de dyspnée). Il est difficile de rattacher
l’angoisse à des lésions cérébrales précises. En revanche, elle est très souvent la traduction d’une souffrance
psychique liée à la perte de l’estime de soi, à la recherche d’un étayage au fur et à mesure que le patient
devient dépendant des autres. Il est fréquent de noter, à
la fois, un émoussement affectif et une composante
anxieuse qui se traduit par une incontinence émotionnelle. La juxtaposition de ces deux types de perturbations montre qu’elles relèvent vraisemblablement de
mécanismes différents. La prise en charge de l’angoisse est largement non médicamenteuse. Elle passe
par tout ce qui peut renforcer l’estime de soi du patient
et la réassurance des côtés positifs qui persistent, en
particulier au niveau des liens affectifs, mais aussi par
des contacts physiques rassurants. L’anxiété survient
habituellement par crises résolutives et ne nécessite
pas de traitement permanent. Souvent, elle est plus
importante le soir. Le recours, en cas de crise, à une
benzodiazépine d’action rapide et de demi-vie courte
peut aider. En cas de troubles plus sévères ou perma-
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Troubles du comportement
Tableau 1. Évaluation par l’aidant des troubles psychocomportementaux dans la maladie d’Alzheimer en fonction du score au
MMSE. Fréquence (%) et sévérité lorsque le trouble est présent (de 1 = rarement à 6 = la plupart du temps) d’après [12].
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Table 1. Caregiver assessment of behavioral and psychological symptoms in Alzheimer’s disease according to the score on the
mini-mental state examination. Frequency (%) and severity when the disorder is present (from 1 = occurs rarely to 6 = most of the
time) [12].
Score total
(maximum = 264)
Apathie
Dysphorie
Anxiété
Méconnaissance
Violence
Troubles psychotiques
Agitation
Fatigue
Refus de coopérer
Refus de voir des gens
Refus de rester seul
Troubles du sommeil
Troubles alimentaires
Troubles sexuels
MMSE < 10
(démence sévère)
N = 18
81,2 ± 33,2
10 ≤ MMSE < 20
(démence modérée)
N = 76
79,5 ± 39,7
20 ≥ MMSE < 25
(démence légère)
N = 38
82,4 ± 42,6
MMSE ≥ 25
(MA débutante)
N = 18
67,0 ± 40,0
83 (3,5)
78 (1,5)
89 (2,1)
78 (1,8)
89 (4,4)
39 (2,1)
56 (2,0)
67 (2,9)
67 (3,3)
22 (2,8)
61 (3,8)
44 (2,2)
61 (1,6)
89 (3,8)
78 (3,0)
84 (2,3)
93 (2,7)
95 (2,2)
91 (3,8)
43 (2,2)
39 (1,9)
79 (3,6)
50 (3,1)
39 (2,4)
61 (3,0)
50 (2,4)
50 (2,1)
76 (3,2)
76 (3,0)
86 (2,4)
87 (3,0)
92 (2,5)
84 (4,7)
39 (1,8)
39 (2,0)
82 (3,7)
50 (2,7)
53 (3,2)
50 (3,1)
37 (2,0)
50 (2,2)
71 (3,3)
61 (2,7)
83 (2,4)
89 (2,5)
83 (2,0)
78 (4,1)
39 (2,1)
39 (1,4)
78 (4,1)
39 (3,1)
44 (2,9)
56 (2,9)
39 (1,6)
39 (1,7)
72 (3,4)
nents, il semble plus judicieux de prescrire un ISRS que
des benzodiazépines au long cours du fait de leur action sédative et myorelaxante (elles peuvent favoriser
les chutes).
Les troubles psychotiques
Ils réunissent différentes manifestations. Les idées
délirantes sont habituellement transitoires et ne constituent pas un délire systématisé. Les plus fréquentes
semblent sous-tendues par des mécanismes de défense psychologique. Les idées de vol contribuent à
masquer les troubles de mémoire en accusant les
autres de la disparition des objets dont la place a été
oubliée. Les idées de jalousie, d’abandon sont soustendues par une baisse de l’estime de soi qui expliquerait que le conjoint s’intéresse à une autre personne ou
veuille abandonner le patient, le placer en institution.
Des thèmes hypocondriaques (douleurs, sensations
anormales au niveau de l’appareil digestif ou génital)
sont également possibles et peuvent égarer vers une
pathologie d’organe. Dans ces cas, il est prudent d’éliminer une cause locale avant d’attribuer les troubles à
la MA, mais il faut garder à l’esprit qu’une origine
psychique est possible et ne pas s’acharner à mettre en
évidence une pathologie locale inexistante.
Les hallucinations sont le plus souvent visuelles,
parfois très élaborées, d’autres fois plus élémentaires
(vague sensation d’une présence qui passe). Elles peuvent être également auditives (voix d’un parent disparu). Leur apparition peut également témoigner de
l’installation d’un état confusionnel.
Les troubles psychotiques se révèlent plus ou moins
perturbants pour le patient, chez lequel ils peuvent
générer des réactions anxieuses, et gênants pour l’entourage (comme les idées de vol ou de jalousie). Parfois, ils ont, à l’inverse, une action apaisante : hallucinations agréables, présence imaginaire de parents
décédés (retour à des figures familières rassurantes).
C’est donc leur retentissement sur le patient qui justifie
ou non un traitement par les antipsychotiques, habituellement efficaces. Il est souvent nécessaire de rassurer l’aidant sur le caractère sans gravité de certaines
hallucinations car elles sont perçues comme un témoignage direct de folie. On évite ainsi de prescrire des
antipsychotiques au patient pour calmer l’anxiété de
l’aidant.
D’autres troubles ont une base neuropsychologique, mais ils se rapprochent des troubles psychotiques
par la conviction délirante qui les accompagne, le patient refusant toute mise à l’épreuve de la réalité : non
reconnaissance du conjoint et du domicile à l’origine
de fugues. Ces troubles sont intermittents : il suffit habituellement que le conjoint sorte quelques minutes de
la pièce pour que tout rentre dans l’ordre.
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L’agitation
Elle pose un problème par rapport aux troubles
précédents du fait de la variabilité de sa définition et de
l’incertitude de sa situation nosologique [15]. En effet, il
s’agit moins d’un syndrome particulier que d’un trouble non spécifique associé à d’autres manifestations
psychopathologiques. Sa définition et son évaluation
varient : par exemple, le NPI sépare les conduites motrices aberrantes de l’agitation alors qu’elles sont inclues par d’autres. Selon Cohen-Mansfield et al. [16],
l’agitation se définit comme toute conduite motrice
n’étant pas dirigée vers un but ou liée à une confusion
mentale. On distingue alors :
1) des comportements non agressifs comme : a) les
conduites répétitives, depuis la répétition dix fois de
suite de la même question jusqu’à certaines actions
comme aller aux toilettes ou ranger-déranger les tiroirs
sans arrêt, ou encore la déambulation. Si ces comportements sont fréquents, l’action des ISRS peut être
utile. La déambulation n’est dangereuse ni pour le patient ni pour l’entourage. Elle doit être tolérée, tout en
prévenant les risques de chute (tapis, meubles sur le
trajet) ; b) les comportements de dépendance à l’environnement (comportements d’utilisation, d’imitation,
de dépendance sociale). Dans l’ensemble, ces comportements témoignent de lésions frontales ; c) les comportements visant à rappeler la présence du patient qui
se sent abandonné ou exclu par son entourage : interruption de la conversation, interjections, chantonnements, cris ; d) les comportements d’accumulation ou
d’émiettement, de froissage des draps doivent faire
craindre une confusion mentale surajoutée ;
2) des comportements agressifs, verbaux ou physiques. Dans la MA, l’agressivité est fréquente, mais elle
se limite le plus souvent à une irritabilité, à des accès
de colère, à une agressivité verbale. Toutefois, une
agressivité physique peut être observée dans les situations de confrontation lorsqu’on empêche le patient de
faire quelque chose ou, au contraire, lorsqu’on veut
l’obliger à faire quelque chose qu’il ne veut pas faire. Il
est important d’essayer d’analyser la situation avec le
conjoint pour comprendre la signification de cette
agressivité et y remédier (par exemple, en empêchant
le conjoint de prendre cette agressivité à la lettre, en lui
apprenant à éviter les situations de conflit). La méconnaissance des troubles est une cause fréquente de comportements agressifs puisque le patient ne se rend pas
compte de ses difficultés et s’énerve devant toute remontrance ;
3) la résistance aux soins, le refus de coopération sont
inclus dans l’agitation selon le NPI.
S10
Une étude récente a montré que la sévérité de l’agitation était indépendante de l’étiologie de la démence,
mais qu’elle était associée à des perturbations frontales [11]. Il est essentiel, devant une agitation, de rechercher une cause physique, psychologique ou environnementale [16] et d’essayer d’y remédier car les
traitements médicamenteux par neuroleptiques, antipsychotiques ou anxiolytiques sont très modestement
efficaces (environ 25 % d’amélioration avec les antipsychotiques) et une source fréquente d’effets latéraux
(aggravation des déficits cognitifs, syndrome extrapyramidal, chutes...) [17]. Le traitement de l’agitation doit,
en fait, être dirigé vers la psychopathologie qui lui est
associée : antipsychotiques en cas d’hallucinations ou
d’idées délirantes, ISRS en cas de dépression ou d’anxiété. Dans certains cas, des thymorégulateurs ont été
proposés, comme le valproate de sodium ou la carbamazépine, mais la tolérance de ces médicaments est
loin d’être excellente chez ces sujets et leur effet sédatif
risque d’accroître les troubles cognitifs [18].
Les troubles du comportement alimentaire
Ils sont variés : le plus souvent il s’agit d’une gloutonnerie, mais une anorexie peut s’associer aux difficultés de préparer les repas ou, tardivement, à une
dysphagie. Elle peut témoigner d’une dépression, mais
aussi d’un effet secondaire des anticholinestérasiques.
La dénutrition qu’elle entraîne doit être combattue
éventuellement par des compléments alimentaires. En
effet, un amaigrissement sévère est considéré comme
un signe de mauvais pronostic [19]. Dans les DFT, l’hyperoralité peut conduire le patient à manger ce qui lui
tombe sous la main, comestible ou non [20].
Points clés
• Les manifestations psychiques et comportementales sont partie intégrante de la démence au même
titre que les déficits cognitifs.
• Elles jouent un rôle très important dans la perte
d’autonomie et représentent la principale cause
d’institutionnalisation.
• Elles sont dues aux conséquences directes des
lésions cérébrales, mais aussi aux mécanismes de
défense des sujets face à la perte de l’estime de soi,
aux perturbations de la vie relationnelle et aux difficultés de communication au stade de démence sévère.
• Elles sont souvent transitoires et sensibles à une
prise en charge adaptée qui doit être envisagée
avant de recourir aux psychotropes.
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Troubles du comportement
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Les troubles du sommeil
Ils sont de deux types : somnolence diurne et insomnie nocturne [21]. La somnolence diurne est accrue
par l’isolement, le repli sur soi, le défaut d’activité. Elle
entraîne en retour une insomnie. L’insomnie d’endormissement est habituellement un témoignage d’anxiété, celle de la deuxième moitié de la nuit doit faire
évoquer une dépression. Les réveils nocturnes sont
fréquents chez les sujets âgés. Chez les patients ayant
perdu leurs repères spatiotemporels, ils peuvent entraîner des activités nocturnes intempestives, le patient
prenant la nuit pour le jour et empêchant son conjoint
de récupérer. Des cauchemars peuvent survenir avec la
prise vespérale d’anticholinestérasiques et disparaissent lorsque la prise est effectuée le matin. Des perturbations du sommeil paradoxal sont fréquentes dans la
démence avec corps de Lewy (DCL) mais non dans la
MA ou les DFT. Elles se traduisent par des rêves ou des
cauchemars violents provoquant des troubles du comportement pendant le sommeil : cris, agitation, violence, sortie du lit, pouvant entraîner des blessures du
patient ou de son conjoint [22]. Des apnées du sommeil, des mouvements périodiques pendant le sommeil peuvent également être observés dans la DCL.
Le meilleur traitement de l’insomnie est d’obtenir
une activité suffisante le jour qui prévient la somnolence et fatigue le patient. Les hypnotiques peuvent
néanmoins être nécessaires. Il est préférable de recourir à des médicaments à demi-vie courte pour ne pas
obtenir de sédation diurne ainsi qu’à une administration de courte durée, discontinue, pour prévenir l’accoutumance. L’utilisation d’hypnotiques peut favoriser
la confusion au moment des réveils nocturnes ainsi
que les chutes. Le traitement des anomalies du sommeil paradoxal fait appel à de petites doses de clonazépam. En cas d’intolérance, la mélatonine ou une oxygénothérapie nasale peuvent être essayés.
Les troubles sexuels
Ils sont fréquents. Habituellement ils sont limités,
dans la MA, à un désintérêt pour les activités sexuelles
lié à l’émoussement affectif [23]. Un manque de pudeur, des comportements gênants (avances à des
étrangers, masturbation en public) sont plus rarement
observés à un stade tardif de la MA, mais sont fréquents dans les DFT [20].
La confusion mentale
Elle n’est pas, à proprement parler, un TPC lié à la
démence. Mais elle est particulièrement fréquente chez
les sujets présentant un déficit cognitif qui représente,
avec l’âge, les deux principaux facteurs de risque [24].
Elle survient à l’occasion d’une affection intercurrente,
médicale (infection bronchopulmonaire, grippe) ou chirurgicale (fracture du col, affection abdominale) ou
d’une erreur thérapeutique. Il s’agit d’une complication
grave car elle met en jeu le pronostic vital, compromet
la prise en charge et les défenses de l’organisme. À
terme, elle peut être responsable d’une aggravation
permanente du déficit cognitif. Son diagnostic est difficile : elle doit être évoquée devant toute aggravation
brutale des déficits cognitifs, la survenue d’une agitation ou, au contraire, d’une somnolence inhabituelle,
d’hallucinations visuelles intensément vécues par le
sujet (onirisme). Le diagnostic repose sur l’existence
d’une obnubilation de la conscience (défaut d’accessibilité, troubles attentionnels majeurs, réactivité émoussée ou au contraire exagérée).
Conduite pratique
Devant un trouble du comportement chez un patient présentant une démence sévère, il est nécessaire
de procéder par étapes : analyser le trouble, rechercher
une cause déclenchante, évaluer les répercussions sur
le patient et sur son entourage. Cette analyse permet
d’évaluer la place respective d’une prescription médicamenteuse et d’une approche non médicamenteuse.
Bien souvent, l’approche non médicamenteuse suffit.
En cas d’échec, la prescription doit être orientée en
fonction de la psychopathologie.
Il est très important d’aider l’entourage. Son attitude peut être déterminante dans l’apparition ou le
maintien de certains comportements. De plus, les TPC
viennent s’ajouter au fardeau psychologique et physique des aidants. Il est essentiel de faire comprendre à
la famille, d’une part, que son attitude est déterminante
pour le patient, en évitant toutefois de créer ou de
favoriser un sentiment de culpabilité, mais aussi,
d’autre part, que les troubles ne sont pas volontaires de
la part du patient, qu’il ne cherche pas à les blesser. Il
faut donc exhorter les aidants à rester calmes, à abandonner la logique, à éviter les confrontations et à ne
pas en vouloir au patient, et lorsqu’une conduite sociale dérangeante survient, à ne pas avoir honte et
craindre d’expliquer que le sujet est malade. Tout le
monde aujourd’hui connaît la MA. Il faut également
engager la famille à parler de ses difficultés et à ne pas
hésiter à demander de l’aide médicale ou auprès des
associations de familles [25].
Le meilleur traitement des TPC dans la MA est l’établissement d’un diagnostic précoce qui permet la mise
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C. Derouesné
en place d’une prise en charge adaptée. En effet, la
fréquence et la sévérité des TPC sont diminuées par les
traitements spécifiques actuels, mais aussi par un suivi
régulier des patients et de leurs familles dans le cadre
de l’établissement d’une relation thérapeutique unissant médecin-malade-famille.
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Troubles du comportement
Encadré 1
L’inventaire neuropsychiatrique (NPI) [6, 7] est l’échelle la plus utilisée pour évaluer les TPC. Elle a été conçue par
Cummings et al. [6] et traduite en français par Robert et al. [7]. Cette échelle évalue 12 domaines. Chaque domaine
comprend plusieurs questions permettant la détection des symptômes (réponses en Oui (symptôme présent) / Non
(symptôme absent)). La cotation est basée sur les réponses données par un aidant, de préférence vivant avec le patient.
Les 12 domaines de la NPI permettent d’évaluer les troubles psychocomportementaux les plus couramment retrouvés dans
les démences :
1) les idées délirantes sont recherchées par la question : « Le patient croit-il des choses dont vous savez qu’elles ne sont pas
vraies ? » avec des questions plus ciblées permettant de préciser s’il s’agit d’idées de persécution, de vol, de jalousie, de
fausses reconnaissances, d’abandon... Tous ces thèmes à tonalité négative ou triste sont très fréquents dans la dépression ;
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2) les hallucinations auditives, visuelles, olfactives tactiles ou cénesthésiques... qui accompagnent souvent les idées
délirantes ;
3) l’agitation/l’agressivité recherchées par les questions : « Y--a-t-il des périodes pendant lesquelles le patient refuse de
coopérer ou ne laisse pas les gens l’aider ? Est-il difficile de l’amener à faire ce qu’on lui demande ? » en précisant les
comportements d’opposition, de cris, de colère, de bris d’objets, d’agressivité physique envers les autres. L’agressivité est
un symptôme qui met particulièrement les aidants et/ou les soignants en grande difficulté, surtout par leur caractère
imprévisible. En fait, l’agressivité est souvent sous-tendue par des idées délirantes accompagnées ou non par des
hallucinations. La compréhension de ce mécanisme à l’origine des comportements d’agressivité rend toujours les choses
plus tolérables ;
4) la dépression/la dysphorie recherchées par les questions : « Le patient semble-t-il triste ou déprimé ? Dit-il qu’il se sent
triste ou déprimé ? » avec d’autres questions plus ciblées permettant la recherche des autres symptômes éventuels du
tableau dépressif : présence de pleurs, l’autodévalorisation, la culpabilité, l’incapacité à se projeter dans l’avenir, les idées
suicidaires ;
5) l’anxiété recherchée par les questions : « Le patient est-il très nerveux, inquiet ou effrayé sans raison apparente ?
Semble-t-il tendu ou a-t-il du mal à rester en place ? A-t-il peur de rester seul ? » en précisant les symptômes somatiques
éventuellement associés, les conduites d’évitement en cas de troubles plutôt phobiques ;
6) l’exaltation de l’humeur/l’euphorie recherchées par les questions : « Le patient semble-t-il trop joyeux ou heureux sans
aucune raison ? Présente-t-il une bonne humeur anormale et constante ? Trouve-t-il drôle ce qui ne fait pas rire les autres ? »
7) l’apathie/l’indifférence recherchées par les questions : « Le patient a-t-il perdu tout intérêt pour le monde qui l’entoure ?
N’a-t-il plus envie de faire des choses ou manque-t-il de motivation pour entreprendre de nouvelles activités ? Est-il difficile
d’engager une conversation avec lui ou de le faire participer aux tâches ménagères ? Est-il apathique ou indifférent ? » Ce
symptôme est typiquement un symptôme très douloureux pour les proches et au contraire parfois très bien toléré par les
institutions ;
8) la désinhibition recherchée par les questions : « Le patient semble-t-il agir de manière impulsive, sans réfléchir ? Dit-il ou
fait-il des choses qui, en général, ne se font pas en public ? Fait-il des choses embarrassantes pour vous ou pour les
autres ? » en précisant s’il parle à des personnes étrangères, s’il dit des choses déplacées ou blessantes, s’il fait des
remarques d’ordre sexuel, s’il parle ouvertement de questions très personnelles, ou touche ou prend dans ses bras les gens
de façon inhabituelle ;
9) l’irritabilité/l’instabilité de l’humeur recherchées par les questions : « Le patient est-il irritable ? Faut-il peu de choses pour
le perturber ? Est-il d’humeur changeante ? Se montre-t-il anormalement impatient ? Présente-t-il de brusques changements d’humeur, de brusques accès de colère ? Est-il difficile à vivre ? »
Symptôme fréquent dans la dépression, il ne signe pas celle-ci car peut se voir de façon isolée dans un cadre démentiel ;
10) les comportements moteurs aberrants recherchés par la question : « Le patient fait-il les cent pas, refait-il sans cesse les
mêmes choses comme ouvrir les placards ou les tiroirs, ou tripoter sans arrêt les objets ou enrouler de la ficelle ou du fil ? »
avec des questions qui permettent de préciser quel type de comportement est répétitif ;
11) les troubles du sommeil avec recherche d’insomnie, d’hypersomnie, d’inversion de rythme nycthéméral, d’activité
inappropriée la nuit ;
12) les troubles de l’appétit avec anorexie ou hyperphagie et conduites alimentaires anormales.
Au-delà de la description précise des symptômes, le NPI permet de préciser la fréquence d’apparition de chaque trouble
(quelquefois, assez souvent, fréquemment, très fréquemment), leur gravité : « À quel point ces comportements sont-ils
perturbants ou invalidants pour le patient ? », et leur retentissement : « À quel point ce comportement est-il perturbant pour
vous au plan émotionnel ? »
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