Les troubles cliniques de la motivation

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Les troubles cliniques de la
motivation
Virginie Czernecki
Inserm U610 ‘Neuro-anatomie fonctionnelle du comportement et de ses
troubles’
Centre d’Investigation Clinique, Centre de Neuropsychologie
GH Pitié-Salpêtrière, Paris
[email protected]
Master 2 Neurosciences Paris 6 – 7 décembre 2007
La motivation est un concept
Ernest Dichter et Louis Cheskin (1930)
« La science de la motivation et ses méthodes
tendent à mettre à jour les causes réelles du
comportement »
« Ensemble des facteurs irrationnels et
inconscients des conduites humaines »
Point de vue neuroscientifique moderne
‘L’incentive motivation’
= ce qui donne l’envie d’agir
Processus qui permet d’ ’énergiser’ le comportement
en vue d’atteindre le but escompté (Berridge, 2004)
Liking (‘je l’aime bien’)
= plaisir lié à l’obtention de la récompense
vs
Wanting (‘je le veux’)
= envie d’obtenir cette récompense
Quand des lésions cérébrales
altèrent la motivation
• Le Syndrome de Perte d’Auto-Activation Psychique
(Laplane & Dubois, 1982)
OU Syndrome athymhormique (Poncet & Habib,
1988); akinésie psychique pure (Laplane, 1984);
reversible inertia (Luaute & Saladini, 2001)
• L’apathie (Marin, 1991, 1996; Levy & Dubois, 2005)
L’aboulie (Fisher, 1983)
= Trouble de la volonté
- Diminution de la spontanéité de l’action et du
langage
- Ralentissement moteur
- Bradyphrénie
- Déficit d’attention et distractibilité accrue
- Apathie
- Capacités intellectuelles préservées
Fisher, C.M. Clinical Neurosurgery, 1983; 31:9-31
Mutisme akinétique (Cairns, 1941; Mega, 1997)
-
Apathie
Akinésie
Incontinence
Aucune initiative (manger et boire)
Absence de langage spontané, discours laconique
Indifférence affective
Conscience préservée (suivent des yeux objets en
mouvement)
 lésions uni- ou bilatérales du CCA ou de l’AMS
Cairns et al, Brain, 1941; 64:273-290
Mega & Cohenour, Neuropsychiatry, Neuropsychology, and Behavioral Neurology, 1997;
10(4):254-259
Damasio & Van Hoesen, Neuropsychology of Human Emotions, The Guildford Press, 1983
Syndrome athymhormique (Poncet et Habib, 1988):
• ‘Thymie’ humeur et ‘hormie’ élan vital
(Dide & Giraud)
• Inertie comportementale réversible
• Trouble de nature affective
• Défaut de conversion d’une expérience émotionnelle au
déclenchement et au maintien de l’action
 Lésions bilatérales de la tête des noyaux caudés
 Lésions au niveau des circuits striato-thalamocorticaux (impliquant plus spécifiquement le système
limbique)
Habib & Poncet, Rev Neurol, 1988; 144:571-577
La Perte d’Auto-Activation Psychique (PAAP)
Laplane, Baulac & Pillon, Revue Neurologique, 1982
Laplane et al, J Neurol Neurosurgery Psychiatry,
1984;47:377-385
Laplane et al, Brain, 1989; 112:699-725
Ali-Cherif et al, Rev Neurol, 1984; 140:401-405
Trillet et al, Rev Neurol, 1990; 146:338-344
Danel et al, Rev Neurol, 1991; 147:60-62
Bhatia KP, Marsden CD, Brain, 1994; 117:859-876
Laplane & Dubois, Movement Disorders, 2001;
16(5):810-814
Cas P.A. (Ali Cherif)
• JF née en 1962
• Intoxication accidentelle au CO à 19 ans
• Pas de séquelles motrices mais troubles
comportementaux considérables:
– Inactivité totale
– Perte totale d’initiatives
– Pas de désirs ni de manifestations émotionnelles
– Activité préservée sur incitations extérieures
– Absence totale d’activité mentale
– Comportement pseudo-obsessionnel
Cas P.A. (suite)
• Bilan neuropsychologique:
– WAIS: QI=87; QI verb & perf homogènes
– Copie de figure de Rey correcte
– Fluence verbale normale
– Capacités mnésiques préservées
• Imagerie cérébrale:
– Scanner: 2 lésions punctiformes symétriques
des noyaux pallidaux
– IRM (7 ans + tard): persistance de ces lésions
uniques
• Réévaluation à 8 ans: Aucune évolution des
troubles psycho-comportementaux
Inertie
– Forme la plus proéminente du syndrome
– Aucune initiative : les patients restent à la
même place toute la journée, assis sur une
chaise ou allongés sur un lit
– Absence de langage spontané
Hétéro-stimulation
Le mécanisme d’activation est rétabli sous l’effet
d’une stimulation extérieure
 Toutes les actions, même les plus
complexes, peuvent être correctement effectuées
 Les performances en situation de tests
cognitifs peuvent être améliorées
Vide mental
‘Mon esprit est vide, un blanc total’
– phénomène très surprenant
– aucune activité mentale
– aucune projection dans le futur quand leur esprit
n’est pas stimulé
– la pensée est fonctionnelle quand interaction
avec l’entourage
– esprit comme en ‘stand-by’ quand non stimulé
Activités stéréotypées
– Comportements compulsifs moteurs: claquer ou
sucer les doigts, mouvements répétés des
doigts, cris, applaudissements ...
– Comportements compulsifs mentaux:
arithmomanie, comptage, répétitions de phrases
 Dg différentiel TOCs:
- mêmes formes de compulsions
- sans la composante anxiogène et idéique
(obsessions)
Émoussement affectif
– Indifférence affective
– Peu d’expression émotionnelle
– Manque d’intérêt pour l’entourage
– Pas de désirs, pas de tristesse, pas de projection
– Capables de juger de manière critique leur état
– Peuvent parfois présenter réactions émotionnelles
appropriées, de courte durée
« Je ne broie pas du noir, mais du vide »
Dg différentiel dépression:
• Pas de sentiment de tristesse
• Pas de sentiments d’autodépréciation ou de
culpabilité, ni de pessimisme
• Pas (ou peu) d’anxiété
Capacités cognitives préservées
L’efficience intellectuelle globale généralement
normale (WAIS, PM38)
Mais diminution de la fluence lexicale, des
performances mnésiques (RL) épisodiques,
augmentation des erreurs non pers au WCST
Ces déficits expliqués par difficulté à activer les
stratégies cognitive et à maintenir un set mental
Dg différentiel patients frontaux: déficits non
réversibles par incitations de l’examinateur
Mécanismes cérébraux
___________________________________________________________________________________________________
lésions bilatérales des boucles striato-pallido-thalamo-préfrontales
Cortex
Striatum
D2
D1
GPe
NST
SNc
Schéma d’organisation des GB
D’après DeLong, 1990
Thalamus
GPi/SNr
Glutamate (excitation)
GABA (inhibition)
Moelle
Tronc Cérébral
Conclusion PAAP
Tableau clinique
• déficit d’activation spontanée des
processus mentaux s’exprimant
dans les 3 différents domaines :
–
–
–
comportement;
cognition;
affectivité
• réversible par stimulation
• vide mental
• activités stéréotypées pseudocompulsives
Hypothèse de Laplane
Altération d’un système d’auto-activation
de la vie psychique intellectuelle et affective;
les GB joueraient un rôle clé dans les
processus d’activation, moteur et psychique
la mise au repos de ce système d’autoactivation psychique pourrait donner lieu à
une activité mentale de type compulsif.
Quand le cerveau s’obstine:
apathie et comportements répétitifs
Mme H.
• F, 42 ans, mariée sans enfant
• Originaire du Maroc, en France depuis 2001
• BTS de secrétariat, travaille actuellement dans un CAT
• Pas d’antécédents médicaux personnels ou familiaux
• Problématique clinique
Suivie depuis 2000 pour
TOC à type de comptage (arithmomanie)
Résistant au traitement par ISRS, tricycliques et TCC
Contexte initial: - malaise (probable intox CO)
- avec amnésie lacunaire
- suivi d’une « dépression sévère »
- avec inertie comportementale
Evolution des troubles
• Rupture brutale dans le fonctionnement socio-affectif
• Inertie comportementale qui tend à s’amenuiser
• Absence d’éléments dépressifs
• Installation du « TOC »
« TOC »
« apathie »
Synthèse
Stéréotypies ?
TOC ?
Tics moteurs
et mentaux ?
Evaluation cognitive
Fonctions instrumentales préservées :
• absence de difficultés visuo-spatiales perceptives
• examen des praxies parfaitement normal
• langage préservé au niveau sémantico-lexico-syntaxique, mais trouble
de l’accès
Syndrome dysexécutif discret:
• Défaut de programmation visuo-constructive (figure de Rey)
• Wisconsin normal
• mais mise en évidence d’un défaut de conceptualisation sur l’épreuve
de classement de cartes DELIS
Fonctions mnésiques :
• de type « frontales » perturbées (encodage, récupération)
• de type « hippocampique » préservées (stockage, consolidation)
 Trouble de l’activation à minima
• Défaut de maintien de l’engagement dans une tâche (en particulier si
répétitif…)
• Contrastant avec des capacités préservées dans tous les types
d’épreuves
Imagerie cérébrale
T1 axial
T1 coro
Lésions nécrotiques bilatérales des pallidum
Probable intoxication au monoxyde de carbone
• Limites de l’imagerie morphologique
Subdivision pallidum interne / pallidum externe
Recalage de l’IRM de Mme H.
sur l’atlas des GB:
•Lésion pallidale isolée
•Touchant le GPe et le GPi
J. Yelnik et E. Bardinet
Yelnik et al. Neuroimage 2007
Une épreuve expérimentale pour
évaluer la motivation: the Pinch Grip
Application en IRMf en perception non
consciente
Pessiglione et al, Science, 2007
Le pallidum ventral est critique pour la
traduction d’un stimulus « motivant » en
réponse comportementale
Pessiglione et al., Science 2007
Mme H.
L’apathie
L’apathie : concepts et définitions
• L’étymologie : apatheia (grec) : impassibilité voulue
• Définie conventionnellement comme un désintérêt, une baisse
d’énergie, un émoussement affectif, un manque d’implication
• Fréquente dans les affections neuropsychiatriques
• Place nosographique mal définie:
- non considérée comme une entité syndromique: DSM-IV
- entité syndromique à part ou symptôme associé ?
• Marin (1991, 1996):
‘le syndrome apathique’ = trouble de la motivation
au niveau comportemental, cognitif, émotionnel
Non imputable ni à un état confusionnel ou délirant, ni à une
démence, ni à un épisode dépressif majeur
Les comportements dirigés vers un but
Brown & Pluck, 2000:
 diminution des comportements dirigés vers un but
EVALUATION
Comparateur
Déterminants
exterieurs
INTENTION
But escompté
Déterminants
internes
Sélection
du but
ACTION
Initiation
Execution
Maintien
Planification
Apathie : pathologie de l’action
Apathie ‘d’autoactivation’
Lévy & Dubois, 2005:
Une apathie peut provenir d’une perturbation
à différentes étapes
de l’action
Auto-activation
des comportements
et des stratégies
Apathie ‘émotionnelle’
perte de la sensibilité au renforcement
EVALUATION
émoussement affectif (perte de buts)
Comparateur
Déterminants
exterieurs
INTENTION
But escompté
Déterminants
internes
Sélection
Apathie ‘cognitive’ du but
Syndrome dysexécutif
ACTION
InitiationMaintien
Planification
L’apathie : une pathologie de l’axe striato-frontal
Lévy & Dubois, 2005
DORSOLATERAL
(AB 9/46, lat 10)
VENTROLATERAL (CPFVL)
(AB 44/45, 47)
APATHIE
COGNITIVE
VENTRAL/DORSAL-MEDIAL
(CPFDM, CPFVM & CCA)
(AB 24, 25, 32, med 9/10)
APATHIE
AUTOACTIVATION
ORBITOVENTRAL
(AB 13, 14, vent 10)
APATHIE EMOTIONELLE
L’apathie dans les affections neurodégénératives
Paralysie supranucléaire : 90% (Aarsland et al, 2001)
Démence fronto-temporale: > 80% (Liu et al, 2004)
Maladie d’Alzheimer: entre 36 et 80% (Tatsch et al, 2006)
Autres: affections psychiatriques, AVC, TC…
Dans la maladie de Parkinson
Aarsland et al, 1999; 2001
16,5%
Inventaire Neuropsychiatrique
Levy et al, 1998
32,5%
Inventaire Neuropsychiatrique
Starkstein et al, 1992
42%
Échelle d’apathie
Isella et al, 2002
43%
Échelle d’apathie
Pluck & Brown, 2002
38%
Échelle d’apathie
Kirsch-Darrow et al, 2006
51%
Échelle d’apathie
Sockeel et al, 2006
29%
Echelle d’apathie de Lille (LARS)
Apathie: les outils d’évaluation clinique
• Apathy Evaluation Scale (Marin, 1991)
• Apathy Scale (Starkstein, 1992)
• NPI (Cummings, 1994)
• ETMA (Habib, 1995)
• Echelle d’apathie de Lille (LARS; Sockeel,
Dujardin, 2006)
L’apathie : sémiologie
La maladie de Parkinson: aspects physiopathologiques
Caractérisée par une dégénérescence des neurones dopaminergiques du
mésencéphale (substance noire compacte A9)
D’après Cools, 2006
AMS
Organisation en territoires fonctionnels
MP
CP
---- Boucle motrice
CA
---- Boucle associative
OF
---- Boucle limbique
HI
MP
OM
SP
PM
PP
PF
T
D’après J. Yelnik
La maladie de Parkinson: sémiologie
• Triade
de symptômes moteurs:
 l’akinésie
 la rigidité
 le tremblement de repos
• les troubles cognitifs: syndrome sous-corticofrontal
• les troubles neuropsychiatriques : Dépression
(50%); Anxiété (30%); syndrome dérèglement
dopaminergique
La maladie de Parkinson: les traitements symptomatiques
Les effets de la dégénérescence nigro-striatale sont partiellement rétablis
• par la compensation pharmacologique de la déplétion
dopaminergique
- Soit par la restauration des concentrations en dopamine
(L- DOPA)
- Soit par la stimulation directe de ses récepteurs
(agonistes dopaminergiques)
- Soit par la potentialisation des effets (inhibiteurs enzymatiques)
• par les techniques chirurgicales lésionnelles ou par stimulation à
haute fréquence (>100 Hz)
- Stimulation du noyau subthalamique (NST)
Dyskinésies
Akinésie
UP
Euphorie
Excitation
Impulsivité
Normal
Bien-être
DOWN
Fatigue
Dépression
MOTEUR
PSYCHISME
Fluctuations On/Off Dopa
Étude 1 : Le rôle de la déplétion dopaminergique sur l’apathie
Objectif: Préciser la contribution de la déplétion dopaminergique dans l’apathie
Population
Protocole expérimental
Eval 1
Off
Groupe MP ‘Off1’ (N=13)
Groupe MP ‘On1’ (N=10)
Eval 1
Eval 1
Off
Test L-DOPA
Eval 2
Test L-DOPA
Eval 2
On
On
Eval 2
Contrôles
Jour 1
Jour 2
Jour 3
Étude 1 : Le rôle de la déplétion dopaminergique sur l’apathie
Méthodes
Apathie
Echelle de motivation (Starkstein et al, 1992)
Echelle d’apathie (Starkstein
et al, 1992)
14 items
Score [0 – 42] ; cut-off ≥ 14
Version sujet
Dans l’état dans lequel vous vous sentez actuellement, est-ce que :
1. Apprendre des choses nouvelles vous intéresse ?
Pas du tout Un peu
Oui
Beaucoup
2. Certaines choses vous intéressent-elle encore ?
Pas du tout Un peu
Oui
Beaucoup
3. Vous vous sentez concerné/e par votre état de santé ?
Pas du tout Un peu
Oui
Beaucoup
4. Vous faites beaucoup d’efforts pour obtenir quelque chose ?
Pas du tout Un peu
Oui
Beaucoup
Sensibilité au renforcement
Epreuve d’apprentissage déterministe
apprentissage
renversement
GO
extinction
NO GO
NO GO
IOWA Gambling Task
GO
(adaptée de Rolls et al, 1994)
NO GO
NO GO
(Bechara et al, 1994)
Étude 1 : Le rôle de la déplétion dopaminergique sur l’apathie
Résultats
Échelle d’apathie (Starkstein)
22
20
18
16
14
12
10
8
6
4
2
0
Contrôles
MP 'état on'
Contrôles
MP ‘état On’
MP ‘état Off’
7,9 ± 0,6
10,8 ± 2,0
13,8 ± 2,1
F(1,21) = 11,7
P=0.002
MP 'état off'
Globalement, le sentiment subjectif d’apathie est amélioré avec le
traitement.
3 patients franchissent le seuil pathologique lorsqu’ils sont en condition de
sevrage.
34% des patients sont apathiques (à l’état ‘on’).
Étude 1 : Le rôle de la déplétion dopaminergique sur l’apathie
Résultats
45
45
40
40
35
35
30
30
Nb d'essais
Nb d'essais
Épreuves de sensibilité au renforcement
25
20
15
MP 'On1'
20
MP 'Off1'
15
10
10
5
5
0
Contrôle
25
0
Apprentissage
Renversement
Extinction
Apprentissage
Renversement
18
16
14
12
10
8
6
4
2
0
-2
-4
-6
Iowa Gambling Task
Avant-Désavant
Avant - Désavant
Iowa Gambling Task
1-20
21-40
41-60
nombre de cartes
Extinction
61-80
81-100
18
16
14
12
10
8
6
4
2
0
-2
-4
-6
Contrôle
MP 'On1'
MP 'Off1'
1-20
21-40
41-60
61-80
81-100
nombre de cartes
Les patients sont moins performants que les contrôles sur l’ensemble des épreuves
de SR
Les performances ne sont pas corrélées aux scores d’apathie
Conclusion 1
L’apathie est améliorée par le traitement dopaminergique (L-Dopa et
agonistes DA)
L’apathie est indépendante des processus de sensibilité au renforcement
Cette amélioration n’est la conséquence ni de l’amélioration motrice, ni
d’une modification de la cognition
L’apathie est, au moins partiellement, un symptôme dopamine-dépendant
Étude 2 : Le modèle de la stimulation à haute fréquence du NST
Une apathie post-opératoire est fréquemment rapportée (Houeto et al, 2002,
Dujardin et al, 2001, Volkmann et al, 2001, Krack et al, 2003, Funkiewiez et al, 2006…)
Plusieurs explications à cette apathie peuvent être évoquées :
1) La stimulation n’a aucun effet sur l’apathie et l’apathie post-opératoire
est la conséquence de la réduction du traitement dopaminergique
2) La stimulation exerce un effet délétère induisant une apathie
3) La stimulation exerce un effet bénéfique mais non suffisant pour
compenser la perte d’action dopaminergique
La stimulation à haute fréquence du noyau subthalamique
• Technique chirurgicale
stéréotaxique
• Descente des microélectrodes
(d’exploration) grâce au cadre
stéréotaxique dans la cible (IRM)
• Application de la stimulation
(≈130 Hz; 3V; 60µs)
• Mise en place des électrodes de
stimulation quadripolaires
définitives
• Implantation du stimulateur
programmable par télémétrie
Efficacité motrice excellente :
sensorimoteur
Limousin et al, 1998; Krack et al, 2003
Amélioration des scores moteurs
(35 à 70%)
Diminution de la médication
antiparkinsonienne (40 à 80%)
associatif
limbique
Atlas numérique 3D Yelnik, Bardinet et al, 2007
Amélioration de la qualité de vie Deuschl et al, 2006
Peu d’effet sur la cognition Pillon et al, 2000; Funkiewiez et al, 2006
Effets neuropsychiatriques : Amélioration de l’humeur, des obsessions/compulsions,
des comportements pathologiques induits par la dopathérapie; perturbations
émotionnelles, apathie
Étude 2.1 : L’effet de l’arrêt de la stimulation
Objectif : étudier la contribution isolée de la stimulation sur l’apathie
Paradigme expérimental :
Tous les patients sont vus en état de sevrage dopaminergique,
dans 2 conditions: stimulation en marche; stimulation éteinte
Schéma expérimental identique à l’étude précédente
Population
Étude 2.1 : L’effet de l’arrêt de la stimulation
Résultats
Échelle d’apathie (Starkstein)
16
14
12
Contrôles
MP ‘Stim On’
MP ‘Stim Off’
7,9 ± 0,6
11,2 ± 0,9
13,4 ± 1,2
F(1,16) = 8,5
P=0.01
10
8
6
4
2
0
Contrôles
MP 'Stim On'
MP 'Stim Off'
Globalement, l’apathie est aggravée par l’arrêt de la stimulation
L’effet isolé de la stimulation améliore l’apathie chez 9 patients, n’exerce
aucun effet chez 8 patients et provoque un effet délétère chez 1 patient
Étude 2.1 : L’effet de l’arrêt de la stimulation
Résultats
Pas d’effet de la condition de la stimulation, pas d’effet de la condition traitement
Conclusion 2.1
La stimulation subthalamique n’exerce pas d’effet délétère aggravant l’apathie
Au contraire, elle semble plutôt avoir un effet bénéfique
L’effet de la stimulation serait-il insuffisant pour éviter la survenue d’une
apathie après la réduction du traitement dopaminergique ?
L’effet de la stimulation est-il différent (antinomique) selon la localisation
précise du plot thérapeutique?
Étude 2.2 : L’effet de l’adjonction d’un agoniste dopaminergique
Objectif : Vérifier que la réplétion des systèmes dopaminergiques
non moteurs permet d’améliorer l’apathie parkinsonienne
Modèle expérimental :
• Patient parkinsonien stimulé
• parfaitement équilibré sur le plan moteur
• sevrage total de la médication dopaminergique
• ayant développé une apathie
• administration d’un agoniste dopaminergique D2/D3: ropinirole
Étude 2.2 : L’effet de l’adjonction d’un agoniste dopaminergique
Protocole expérimental :
• 7 patients
• Age: 46 à 67 ans
• Durée d’évolution : 8 à 20 ans
• Doses LED avant la chirurgie: 600 à 1500 mg/jr
• Score UPDRS 3 (stim on): 4 à 7
2 évaluations identiques: avant et 6 semaines après le traitement ropinirole
• apathie (Starkstein/Robert)
• humeur (MADRS)
• fonctions exécutives
Étude 2.2 : L’effet de l’adjonction d’un agoniste dopaminergique
Résultats:
Avant
Après
Echelle d'apathie (Starkstein) (/42)
30
25
24
23
23
24
23
24 24
20
14
15
10
10
10
7
9
5
5
5
0
Patient 1
Patient 2
Patient 3
Patient 4
Patient 5
Patient 6
Patient 7
Inventaire d'apathie (Robert)
Score total /36
Amélioration majeure de
l’apathie par l’agoniste DA
chez 6/7 patients :
Regain d’intérêt, davantage de
prise d’initiatives, affects plus
saillants
Apathie résistante chez le
patient 7
35
30
25
20
Perte d'intérêt
Perte d'initiative
Emoussement affectif
15
10
5
0
P1
P1
P2 P2
P3
P3 P4
P4 P5
P5
P6 P6
P7
P7
avant après avant après avant après avant après avant après avant après avant après
Étude 2.2 : L’effet de l’adjonction d’un agoniste dopaminergique
Résultats:
Amélioration de l’humeur, indépendamment de l’apathie
exceptée pour le patient 7
Pas de modifications notables des performances exécutives
Étude 2.2 : L’effet de l’adjonction d’un agoniste dopaminergique
Explications de l’apathie résistante du patient (P7) :
1) l’apathie est-elle une manifestation précédant une détérioration cognitive ?
 non: l’évaluation à 24 mois montre un syndrome sous-cortico-frontal isolé et
modéré
2) L’apathie est-elle un signe d’une dépression majeure?
 possible
3) Effet direct de la stimulation ?
 localisation dans la zona incerta
Localisation des plots thérapeutiques des patients
Patient 7
Conclusion 2.2
 Rôle des systèmes dopaminergiques non moteurs
 Possibilité d’une induction par la stimulation à haute fréquence
selon la localisation
 Autres causes?
Étude 3 : A la recherche des mécanismes fonctionnels
Objectifs: Déterminer les mécanismes fonctionnels contributifs de l’apathie
parkinsonienne selon le modèle de Lévy & Dubois (2005)
Les comparer à ceux d’autres affections dégénératives :
la maladie d’Alzheimer et la démence fronto-temporale
Population:
Age
NC
Sexe
MADRS
Mattis DRS
MMS
MP dopa
(N=10)
MP stim
(N=11)
MA
(N=14)
DFT
(N=14)
CONT
(N=16)
66, 3 ± 5,8
15,1 ± 4,4
8H / 2F
12,1 ± 4,0
139, 6 ± 4,2
28,7 ± 1,5
59,2 ± 9
10,9 ± 3,2
5H / 6F
10,0 ± 4,8
139,9 ± 3,1
28,5 ±1,0
72,7 ± 5,7
13,0 ± 3,8
6H / 8F
8,7 ± 4,0
126,0 ± 7,7
24,3 ± 2,8
70,4 ± 8,1
13,4 ± 5,0
9H / 5F
4,9 ± 4,2
125,6 ±12,5
25,2 ± 2,9
66,6 ± 7,0
13,8 ± 3,1
7H / 9F
2,6 ± 2,8
142,9 ± 1,5
28,9 ± 1,5
Tous les patients présentent une sévérité de l’apathie comparable
Étude 3 : A la recherche des mécanismes fonctionnels
Batterie neuropsychologique :
Étude 3 : A la recherche des mécanismes fonctionnels
Reconnaissance d’expressions faciales (adapté d’Ekman & Friesen, 1976)
Stroop émotionnel
Étude 3 : A la recherche des mécanismes fonctionnels
Résultats :
Patients parkinsoniens:
Les patients traités par dopathérapie et ceux traités par
stimulation se comportent de façon comparable sur l’ensemble
de la batterie (excepté IAinit et SE+)
Facteurs contribuant à l’apathie :
Dans la MP: l’anhédonie
Dans la MA: mesures mnésiques
mesures émotionnelles
Dans la DFT: mesures exécutives
mesures de sensibilité au renforcement
anhédonie
Conclusion 3
L’apathie dans la maladie de Parkinson n’est expliquée
- ni par un syndrome dysexécutif
- ni par la perte de sensibilité au renforcement
- ni par un trouble de la perception émotionnelle
- mais par l’anhédonie, fonction dépendante de la dopamine,
améliorée par le traitement dopaminergique et non par la stimulation (Witt
et al, 2005)
Conclusion générale
L’apathie dans la maladie de Parkinson :
 une apathie d’auto-activation hédonique
Biais de sélection de notre population: dénervation dopaminergique
relativement pure
Interventions d’autres facteurs (apathie cognitive, dépression)
et d’autres systèmes de neurotransmission
Modulation de la motivation par la DA
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