Groupe fondamental et revêtement

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Groupe fondamental et revêtement
Prémaster, Ens de Lyon
Cours de Claude Danthony
Printemps 2016
Avant-propos
Ces notes de cours ont été retranscrites par Matthieu Joseph. Les erreurs qui s’y trouvent ne sont en aucun
cas dûes à M. Danthony. Dans ce cours, on introduit la notion de groupe fondamental, construit à partir de
lacets. Ensuite, on définit les revêtements, pour arriver à la construction du revêtement fondamental d’un espace
topologique. Enfin, on énonce le théorème de Van Kampen sans en donner la preuve.
Je remercie Quentin Vila pour le patron du tore à deux trous qu’il m’a fourni, et Christopher-Lloyd Simon
pour sa relecture attentive.
1
Table des matières
I
Homotopie, chemins, groupe fondamental
I-1. Homotopie (générale) . . . . . . . . . . . .
I-2. Type d’homotopie . . . . . . . . . . . . .
I-3. Homotopie relative, rétractés . . . . . . .
I-4. Chemins . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
I-5. Groupe fondamental . . . . . . . . . . . .
I-6. Π1 et applications . . . . . . . . . . . . .
I-7. Invariance par homotopie . . . . . . . . .
I-8. Produits . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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II Calculs de Π1
II-1. Le cercle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
II-2. Tores . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
II-3. Sphères . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
II-4. Applications . . . . . . . . . . . . . . . . . .
II-5. Hors piste : groupe d’homotopie des sphères
II-6. Bouquet de cercles . . . . . . . . . . . . . .
II-7. Espaces projectifs . . . . . . . . . . . . . . .
II-8. Surfaces . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
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III Revêtements
III-1.Définition . . . . . . . . . . . . . . . . . .
III-2.Propriétés . . . . . . . . . . . . . . . . . .
III-3.Morphisme de revêtement . . . . . . . . .
III-4.Action propre et libre . . . . . . . . . . .
III-4. a)Rappels de topologie . . . . . . . .
III-4. b) Rappels sur les actions de groupes
III-4. c)Action de groupe et revêtement . .
III-5.Relèvements . . . . . . . . . . . . . . . . .
III-6.Action de Aut(E) . . . . . . . . . . . . . .
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20
IV Lien entre groupe fondamental et revêtement
IV-1.Quelques propositions . . . . . . . . . . . . . .
IV-2.Groupe fondamental et revêtements . . . . . .
IV-3.Action du groupe fondamental . . . . . . . . .
IV-4.Revêtement universel . . . . . . . . . . . . . . .
IV-5.Correspondance de Galois . . . . . . . . . . . .
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V Théorème de Van Kampen
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V-1. Quelques compléments d’algèbre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
V-2. Théorème de Van Kampen . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
2
I
Homotopie, chemins, groupe fondamental
I-1. Homotopie (générale)
Définition : Soient f0 , f1 continues, de X dans Y espaces topologiques. f0 et f1 sont dites homotopes
lorsqu’il existe H une homotopie de f0 à f1 : une application continue de X × [0, 1] dans Y telle que
∀x ∈ X, H(x, 0) = f0 (x) et H(x, 1) = f1 (x).
Ainsi, une homotopie entre deux applications f0 et f1 représente une déformation continue de f0 à f1 . On
rappelle qu’une application est la donnée d’un espace de départ, d’un espace d’arrivée et du graphe de l’application. Dans la théorie de l’homotopie, l’espace d’arrivée est important.
La propriété “f0 homotope à f1 ” est une relation d’équivalence sur l’ensemble des fonctions continues de X
dans Y . En effet :
· f0 est homotope à f0 via l’homotopie H(x, s) = f0 (x).
· Si f0 est homotope à f1 par l’homotopie G, alors f1 est homotope à f0 via l’homotopie G(x, s) = H(x, 1−s).
· Si f0 est homotope à f1 par F et f1 homotope à f2 par G, alors l’application H définie par
H(x, s)
= F (x, 2s)
si s ∈ [0, 1/2]
= G(x, 2s − 1) si s ∈ [1/2, 1]
est continue sur X × [0, 1] et définit une homotopie de f0 à f2 .
Exemples d’applications homotopes :
· Si Y est une partie convexe non vide d’un espace vectoriel normé, alors f : X → Y est homotope à une
application constante. Il suffit de poser H(x, s) = (1 − s)f (x) + sy0 , où y0 est un élément de Y .
· Soient Sn−1 = {x ∈ Rn |kxk2 = 1}, et f0 , f1 : X → Sn−1 telles que ∀x, f0 (x) 6= −f1 (x). Alors f0 est
homotope à f1 . En effet, il suffit de poser
H(x, s) =
(1 − s)f0 (x) + sf1 (x)
k(1 − s)f0 (x) + sf1 (x)k
qui est bien définie et continue donc une homotopie dans Sn−1 .
Ainsi, dès que deux applications f0 , f1 : X → Sn−1 vérifient
distsup (f0 , f1 ) := sup d(f0 (x), f1 (x)) < 2,
x∈X
alors elles sont homotopes.
Nous allons maintenant donner un exemple de deux applications qui ne sont pas homotopes.
Théorème
: Id : Sn−1 → Sn−1 n’est pas homotope à une constante.
En fait, nous n’allons pas démontrer ce théorème dans ce cours (sauf dans le cas n = 1, 2), car cela utilise
des outils plus complexes que le groupe fondamental. En effet, ce théorème est équivalent au théorème de
Brouwer :
Théorème de Brouwer : Les deux énoncés suivants sont vrais et équivalents :
· Toute application continue de Bn = {x ∈ Rn | kxk2 6 1} dans Bn admet un point fixe.
· Il n’existe pas d’application (rétraction) r : Bn → Sn−1 continue telle que r|Sn−1 = IdSn−1 .
3
Preuve : Nous montrons seulement l’équivalences des deux propositions du théorème de Brouwer, en s’inspirant largement de
la démonstration trouvée dans [SR]
S’il existe une rétraction r, posons f (x) = −r(x). Si x est sur la sphère Sn−1 alors f (x) = −r(x) = −x qui est différent de x. Si x
n’est pas sur la sphère Sn−1 , il est dans l’intérieur de Bn mais alors f (x) = −r(x) ∈ Sn−1 , donc f (x) 6= x. Ainsi f n’a pas de point
fixe.
S’il existe f sans point fixe, alors la demi-droite issue de f (x) et passant par le point x, qui est distinct de f (x) recoupe Sn−1 en
un seul point r(x). Nous allons montrer que r est une rétraction de Bn dans Sn−1 .
Si x ∈ Sn−1 alors r(x) = x. Il reste à montrer que r est continue. Les points de la demi-droite issue de
r(x)
Sn−1
f (x) et passant par x sont les points de la forme f (x) + t(x − f (x)) avec t ∈ R+ . Un tel point est dans
· x
·
Sn−1 si et seulement si
·f (x)
1 = kf (x) − t(x − f (x))k2 = kf (x)k2 + 2thf (x), x − f (x)i + t2 kx − f (x)k2 .
Donc t doit être la racine positive de l’équation de degré 2 ci-dessus, que l’on notera t(x). En exprimant
t(x) on voit que x → t(x) est une fonction continue, donc r : x → f (x) + t(x)(x − f (x)) aussi.
D’où l’équivalence recherchée.
Pour une référence à la démonstration du théorème de Brouwer, voir le journal de maths des élèves
([dMdÉ], volume 4 de l’ancien journal. )
Dans le premier théorème énoncé, regardons le cas n = 1 : S0 = {−1, 1} n’est pas connexe par arcs. Donc
l’identité de S0 ne peut pas être homotope à une constante. Démontrons maintenant que le théorème que l’on
a énoncé est équivalent au théorème de Brouwer.
Preuve de l’équivalence des théorèmes : Supposons qu’il existe
 n−1
× [0, 1]
 S
(x, 0)
H:

(x, 1)
une homotopie H d’une constante x0 à l’identité de Sn−1 .
→
7
→
7
→
Sn−1
x0
x
Considérons la relation d’équivalence (x1 , s1 ) ∼ (x2 , s2 ) ⇔ s1 = s2 = 0 ou x1 = x2 , s1 = s2 . H passe au quotient en une fonction
n−1 × [0, 1]
n−1 × [0, 1]
continue r : S
/∼ → Sn−1 . Or il se trouve que S
/∼ est homéomorphe à Bn . Donc il existe une rétraction de
n
n−1
B dans S
S’il existe r rétraction, alors H(x, s) = r(sx) est une homotopie entre la constante r(0) et IdSn−1 .
Remarque : On peut de nouveau insister sur le fait que l’ensemble d’arrivée d’une application est fondamental
lorsqu’on parle d’homotopie. En effet, Id : Sn−1 → Sn−1 n’est pas homotope à une constante. En revanche,
l’application Id : Sn−1 → Rn l’est.
L’homotopie d’applications se comporte bien par passage à la composition. Si f0 et f1 sont homotopes par
F : X → Y et g0 , g1 homotopes par G : Y → Z, alors g0 ◦ f0 et g1 ◦ f1 sont homotopes. L’homotopie est en effet
donnée par l’application H(x, s) = G(F (x, s), s).
I-2. Type d’homotopie
L’objectif est maintenant de classer les espaces topologiques grâce à l’homotopie.
Définition :
- On dit que X et Y deux espaces topologiques ont mêmes type d’homotopie lorsqu’il existe f : X → Y
continue et g : Y → X continue telle que g ◦ f soit homotope à IdX et f ◦ g soit homotope à IdY .
- On dit que X est contractile s’il a le même type d’homotopie qu’un point.
Exemples d’espaces contractiles et ayant même type d’homotopie :
· Si X et Y sont homéomorphes, alors ils ont même type d’homotopie.
· La sphère Sn n’est pas contractile.
· Une partie A convexe d’un espace vectoriel normé est contractile, en effet si x0 ∈ A, on peut considérer
f : {x0 } ,→ X et g : X {x0 }. Alors g ◦ f : {x0 } → {x0 } est l’identité et f ◦ g : X → X est homotope à
IdX : H(x, s) = sx + (1 − s)x0 .
· En revanche, la sphère Sn privée d’un point est contractile. En effet, Sn \ {p} est difféomorphe (donc
homéomorphe) à Rn via la projection stéréographique. Sn−1 \ {p} a donc même type d’homotopie que Rn ,
qui est contractile par le point précédent, donc Sn−1 l’est aussi.
4
· (Rn )∗ et Sn−1 ont même type d’homotopie. Une des fonctions à considérer est de nouveau f : Sn−1 ,→
x
(Rn )∗ , et g : Rn → Sn−1 la fonction g(x) = kxk
. La fonction g ◦ f est l’identité de Sn−1 , tandis que
x
f ◦ g : x → kxk est homotope à Id(Rn )∗ avec
H(x, s) = s
x
+ (1 − s)x.
kxk
I-3. Homotopie relative, rétractés
Définissons maintenant la notion d’homotopie relative, qui permettra par la suite de parler d’homotopie de
lacets
Définition : Soit f0 , f1 : X → Y deux fonctions continues, égales sur une partie A ⊂ X. Elles sont dites
homotopes relativement à A s’il existe H homotopie telle que ∀x ∈ A, ∀s ∈ [0, 1], H(x, s) = f0 (x) = f1 (x).
De nouveau, être homotope relativement à une partie A de X est une relation d’équivalence sur l’ensemble
des fonctions continues dont la valeur est fixée sur A.
Définition : Si A ⊂ X est une partie de X, on dit que A est un rétracté de X lorsqu’il existe une
application r : X → A continue telle que r restreinte à A soit l’identité de A. r s’appelle une rétraction.
De même on définit un rétracté par déformation, s’il existe une rétraction r homotope à IdX relativement à
A.
Exemples :
· Un point est toujours un rétracté de X, mais pas par déformation (exemple de Sn−1 vu plus haut).
· Par connexité, on peut affirmer que {0, 1} n’est pas un rétracté par déformation de [0, 1].
· Si A est un rétracté par déformation de X, alors A et X ont même type d’homotopie. Si on définit
f : A ,→ X et g : X → A qui est la rétraction, alors f ◦ g : x → g(x) est homotope à IdX par l’homotopie
de la rétraction par déformation et g ◦ f est égale à IdA .
· Une partie convexe d’un espace vectoriel normé se rétracte par déformation sur un point.
· Sn−1 est un rétracté par déformation de (Rn )∗ .
I-4. Chemins
L’homotopie relative est utile lorsqu’on souhaite parler d’homotopie entre chemins. Un chemin à valeurs
dans un espace topologique X est une application continue γ : [0, 1] → X. On appelle γ(0) l’origine du chemin
et γ(1) son extrémité. On notera par la suite cx le chemin constant égal à x. Définissons maintenant l’homotopie
de chemins.
Définition : γ0 et γ1 sont homotopes en tant que chemins, s’ils ont mêmes origines et mêmes extrémités,
et si de plus ils sont homotopes relativement à {0, 1} ⊂ [0, 1]. H doit donc vérifier
H(0, s) = γ0 (0) = γ1 (0) et H(1, s) = γ0 (1) = γ1 (1)
C’est une relation d’équivalence sur l’ensemble des chemins d’origine x et d’extrémité y. On notera alors [γ]yx
ou encore [γ] la classe d’équivalence de γ dans les chemins d’origine x et d’extrémité y. On souhaite désormais
munir l’ensemble des chemins d’une certaine structure, qu’on appelle groupoı̈de. La première chose à faire est
d’introduire une loi de composition interne des chemins. Si γ est un chemin de x à y et δ un chemin de y à z,
alors on définit le chemin γδ de x à z par
γ(2t)
t ∈ [0, 1/2]
γδ =
δ(2t − 1) t ∈ [1/2, 1]
Remarquons que l’enchaı̂nement des chemins se lit de manière inverse à la composition. Le sens de lecture
de l’enchaı̂nement de chemin correspond au sens de parcours du chemin enchaı̂né.
5
Si maintenant γ0 , γ1 sont homotopes en tant que chemin par F et si δ0 , δ1 sont homotopes en tant que chemin
par G, alors γ0 δ0 et γ1 δ1 sont homotopes en tant que chemins. Il suffit de considérer l’homotopie de chemins
F (2t, s)
t ∈ [0, 1/2]
H(t, s) =
G(2t − 1, s) t ∈ [1/2, 1]
On peut alors affirmer que [γδ]zx ne dépend que de [γ]yx et de [δ]zy .
La loi de composition de chemins vérifie une forme d’associativité modulo homotopie : si γ est un chemin
de x à y, δ un chemin de y à z et ε un chemin de z à u, alors (γδ)ε et γ(δε) sont homotopes. Ce ne sont pas les
mêmes chemins, car le paramétrage fait qu’ils ne sont pas parcourus à la même vitesse. Pour démontrer ceci,
on peut faire le schéma suivant pour trouver l’homotopie :
γ
δ
ε
•
•
1
y
s valeur : x
0
γ
•
z
δ
u
•
ε
t
0

4
γ( s+1
t)
 t ∈ [0, (s + 1)/4]
t ∈ [(s + 1)/4, (s + 2)/4] δ(4(t − s+1
H(t, s) =
.
4 ))

4
t ∈ [(s + 2)/4, 1]
ε( 2−s
(t − s+2
)))
4
1
Il s’agit maintenant de trouver une sorte de neutre pour la loi de composition. En fait, si γ est un chemin
de x à y, alors γcy est homotope à γ et cx γ est homotope à γ. La démonstration peut se résumer avec ce dessin
γ
•
y
H(t, s) = x
y
Avec ce dessin, on peut facilement exprimer l’homotopie de chemins entre γcy et γ. Un même dessin pour cx γ permet de conclure.
H=y
•
γ
cy
Il reste enfin à définir l’inverse d’un chemin : si c est un chemin de x à y, alors on définit c(t) = c(1 − t),
qui est un chemin de y à x. Le chemin cc est homotope à cx et le chemin cc est homotope à cy . À nouveau, le
dessin suivant permet d’exprimer l’homotopie :
cx
cx
•
H=x
H=x
y
H(t, s) = x
•
c
x
•
c̄

 x dans les zones sombres
t ∈ [s/2, 1/2]
H(t, s) =

t ∈ [1/2, 1 − s/2]
•
I-5. Groupe fondamental
On suppose désormais que l’espace X est un espace topologique connexe par arcs.
6
c(2(t − 2s )) .
symétrie
Définition : On dit que γ est un lacet de base x si c’est un chemin d’origine et d’extrémité x. On note
Π1 (X, x) l’ensemble des classes d’homotopie de chemins de lacets de base x.
Remarquons qu’à nouveau on regarde des homotopies de chemins, c’est à dire que pour des lacets, en tout
point de la déformation continue H, le point x est laissé fixe. Grâce au paragraphe I-4., on peut affirmer le
théorème suivant.
Théorème
: Π1 (X, x) est un groupe. C’est le groupe fondamental de X.
À priori parler “du” groupe fondamental est quelque peu abusif. En effet, dans la définition que l’on vient
de donner, Π1 dépend de x, c’est à dire du point considéré, mais si x et y sont deux points de X et si c est un
chemin de y a x, considérons l’application
ϕc ([γ]xx ) = [cγc]yy .
ϕc est bien définie et est un isomorphisme de groupe entre Π1 (X, x) et Π1 (X, y), ce qui permet de parler “du”
groupe fondamental. ϕc n’est pas un isomorphisme canonique : il ne dépend que de la classe d’homotopie
de c.
Preuve de l’isomorphisme : Si γ1 et γ2 sont homotopes, alors cγ1 c et cγ2 c sont homotopes, ce qui justifie le fait que ϕc est bien
définie.
Il reste à voir que ϕc est un isomorphisme de groupe.
ϕc ([γ0 γ1 ])
=
ϕc ([γ0 ][γ1 ])
=
[cγ0 c][cγ1 c] = ϕc ([γ0 ])ϕc ([γ1 ]).
k
[cγ0 ccγ1 c]
L’inverse de ϕc est ϕc :
ϕc (ϕc ([γ])) = ϕc ([cγc]) = [ccγcc] = [cc][γ][cc] = [cx ][γ][cx ] = [γ].
De même, ϕc (ϕc ([γ])) = [γ].
Puis si c et c0 sont homotopes, montrons que ϕc = ϕc0 :
ϕc ([γ]) = [cγc] = [c0 c0 cγcc0 c0 ] = [c0 ][c0 c][γ][cc0 ][c0 ] = [c0 ][cc][γ][cc][c0 ] = ϕc0 ([γ]).
À l’aide du groupe fondamental, on peut définir la notion de simple connexité :
Définition : Un espace topologique X connexe par arcs est dit simplement connexe (ou 1-connexe) si
Π1 (X, x) est trivial, c’est à dire si tout lacet de base x est homotope à cx , où x ∈ X. Cela revient à dire que
si γ0 , γ1 sont deux chemins dans X d’origine x et d’extrémité y, alors ils sont homotopes.
I-6. Π1 et applications
On peut naturellement définir des morphismes de groupes entre les groupes fondamentaux de deux espaces
topologiques. Soient f : X → Y une fonction continue, x ∈ X et y = f (x).
L’application f∗ : [γ] → [f ◦ γ] de Π1 (X, x) dans Π1 (Y, y) est bien définie et est un morphisme de groupes.
En effet si γ0 et γ1 sont homotopes, f ◦ γ0 et f ◦ γ1 sont homotopes donc f∗ est bien définie. Maintenant,
f∗ est un morphisme de groupes car
f∗ ([γ][δ]) = f∗ ([γδ]) = [f ◦ (γδ)] = [(f ◦ γ)(f ◦ δ)] = [f ◦ γ][f ◦ δ] = f∗ ([γ])f∗ ([δ]).
L’étoile d’une application vérifie quelques propriétés simples :
· (IdX )∗ = IdΠ1 (X,x)
· (g ◦ f )∗ = g∗ ◦ f∗ . En effet
(g ◦ f )∗ ([γ]) = [g ◦ f ◦ γ] = g∗ ([f ◦ γ]) = g∗ ◦ f∗ ([γ]).
· Si h est un homéomorphisme de X dans Y , alors h∗ est un isomorphisme de groupes.
7
I-7. Invariance par homotopie
Soient f et g deux applications continues X → Y , homotopes relativement à un point x ⊂ X. Ces application
définissent deux applications entre les Π1
f∗ , g∗ : Π1 (X, x) → Π1 (Y, f (x) = g(x))
En fait, puisque f et g sont homotopes relativement au point base x, les applications induites sur les Π1 sont
égales :
f∗ = g∗
En effet, si [γ] ∈ Π1 (X, x), l’application (t, s) → H(γ(t), s), où H est l’homotopie entre f et g, est une homotopie
entre f ◦ γ et g ◦ γ. Donc [f ◦ γ] = [g ◦ γ]. Que se passe-t il maintenant si l’homotopie n’est plus basée, mais
libre ? Les applications induites sur les Π1 ne seront plus égales, mais on peut dire que si c : s → H(x, 1 − s),
alors
g∗ = ϕc ◦ f∗
Montrons en effet que ϕc (f ◦ γ) est homotope à g ◦ γ :
g◦γ
•
•






H(t, s) = g(x)
g(x)





H(γ(t);s)
c|[0,1−s]
c(2t)
H(γ( 4t+2s−2
3s+1 ), s)
c(4t − 3)
06t6
1−s
2
1−s
2
6t6
3+s
4
3+s
4
.
6t61
c̄|[s,1]
•
•
Théorème : Deux espaces connexes par arcs qui ont même type d’homotopie ont mêmes Π1 , ou plutôt,
ont leurs groupes fondamentaux isomorphes.
Preuve du théorème : Si f : X → Y et g : Y → X sont tels que f ◦ g homotope à IdY et g ◦ f homotope à IdX , alors il existe
un lacet c tel que ϕc ◦ (f ◦ g)∗ = (IdY )∗ = IdΠ1 (Y ) . Donc g∗ ◦ f∗ = (ϕc )−1 est un isomorphisme. Ainsi, f∗ est injective et g∗
surjective. En utilisant g ◦ f , on arrive à f∗ surjective et g∗ injective. Donc f∗ et g∗ sont des isomorphismes de groupes.
Ce théorème possède plusieurs conséquences :
· si A est un rétracté par déformation de X espace connexe par arcs, alors Π1 (X, a) est isomorphe à Π1 (A, a)
où a est un point de A.
· si A est rétracté de X, si i : A ,→ X est l’inclusion, alors i∗ : Π1 (A, a) → Π1 (X, a) est injective .
I-8. Produits
Soient (X1 , x1 ) et (X2 , x2 ) deux espaces basés. On s’intéresse au produit basé ((X1 × X2 ), (x1 , x2 )).
Si γ = (γ1 , γ2 ) est un lacet de base (x1 , x2 ), et si δ = (δ1 , δ2 ) est un lacet de même base, alors on a l’équivalence
γ1 homotope à δ1 par H1
⇔ γ et δ homotopes par H = (H1 , H2 ).
γ2 homotope à δ2 par H2
Ainsi,
Π1 (X1 × X2 , (x1 , x2 )) = Π1 (X1 , x1 ) × Π1 (X2 , x2 )
8
II
Calculs de Π1
II-1. Le cercle
Nous allons calculer explicitement le groupe fondamental du cercle S1 = {z ∈ C, |z| = 1}. S1 est un espace
topologique muni de la distance induite par la distance |.| sur C. Notons p ce que l’on appelera dans le chapitre
suivant un revêtement de S1 :

x
 R
↓
↓
p:
.
 1
S e2iπx
Soient z0 ∈ S1 et x0 ∈ R tel que p(x0 ) = z0 . Notons θx0 ,z0 un relèvement local de p :
√
θx0 ,z0 : B(z0 , 2) −→ ]x0 − 14 , x0 + 14 [
.
z
7−→ x0 + Arcsin(Im(zz0−1 ))
θx0 ,z0 est continue, bijective, et p◦θx0 ,z0 = IdB(z0 ,√2) . Grâce à ce relèvement local, on peut trouver un relèvement
global :
Théorème du relèvement : Soit γ un lacet dans S1 de base 1. Alors il existe une unique application
γ̃ : [0, 1] → R continue telle que γ̃(0) = 0 et qui relève γ :
=R
γ̃
[0, 1]
p
γ
/ S1
√
Preuve du théorème : γ est continue de [0, 1] dans S1 donc uniformément continue. Pour ε = 2, il existe α > 0 tel que
√
|t1 − t2 | < α ⇒ |γ(t1 ) − γ(t2 )| < 2.
Si 0 < η < α :
√
γ([0, η]) ⊂ B(1, 2). On définit γ̃ sur [0, η] par : γ̃ = θ0,1 ◦ γ, continue. On a bien p ◦ γ̃ = γ.
√
γ([η, 2η]) ⊂ B(γ(η), 2). On définit γ̃ sur [η, 2η] par : γ̃ = θγ̃(η),γ(η) ◦ γ, continue. On a bien p ◦ γ̃ = γ.
Par récurrence, on construit une application γ̃ continue sur [0, 1] telle que p ◦ γ̃ = γ.
On remarque que si γ est un lacet basé en 1, alors γ(1) = 1 = e2iπγ̃(1) ce qui implique que γ̃(1) ∈ Z.
Définition : L’entier γ̃(1) s’appelle le degré de γ.
Vont suivre plusieurs lemmes qui permettrons de calculer le Π1 du cercle.
Lemme
: Pour tout k ∈ Z, il existe un lacet de degré k. Il est donné par le lacet : γ(t) = exp(2iπkt).
Lemme : Si γ1 et γ1 sont deux lacets à valeurs dans S1 tels que pour tout t, γ1 (t) 6= −γ2 (t), alors γ1 et γ2
sont homotopes et ont mêmes degrés.
Preuve : La condition γ1 (t) 6= −γ2 (t) implique que γ1 et γ2 sont homotopes (cf. section I-1.). Notons γ˜1 et γ˜2 les relèvements
de γ1 et γ2 . Puisque pour tout t, γ1 (t) 6= −γ2 (t), on peut dire que γ˜1 (t) − γ˜2 (t) ∈
/ 21 + Z. Mais la fonction γ˜1 − γ˜2 est continue
sur le segment [0, 1] et vaut 0 en 0. Le théorème des valeurs intermédiaires implique que γ˜1 − γ˜2 est à valeurs dans ] − 21 , 12 [. Donc
γ˜1 (1) − γ˜2 (1) ∈ Z∩] − 12 , 12 [. D’où γ˜1 (1) = γ˜1 (1).
Lemme
: Si γ0 et γ1 sont homotopes, alors ils ont mêmes degrés.
Preuve : Soit H(t, s) l’homotopie de γ0 à γ1 . Posons pour tout s ∈ [0, 1], γs (t) = H(t, s). On peut trouver une subdivision
s0 = 0 < s1 < · · · < sn = 1 telle que kγi+1 − γi k < 2. On peut alors appliquer le deuxième lemme.
9
Si l’on considère l’application suivante
ψ:
Π1 (S1 , 1) −→
[γ]
7−→
Z
deg γ
Alors ψ est bien définie et surjective par ce que l’on vient de voir. Montrons qu’elle est injective.
Lemme
: Si γ0 et γ1 sont deux lacets tels que deg γ0 = deg γ1 , alors γ0 et γ1 sont homotopes.
Preuve : γ˜0 (0) = γ˜1 (0) = 0 et γ˜0 (1) = γ˜1 (1) = deg γ0 = deg γ1 . Posons H̃(t, s) = (1 − s)γ˜0 (t) + sγ˜1 (t) ∈ R. C’est une homotopie
de γ˜0 à γ˜1 relativement à {0, 1}. Posons H(t, s) = p ◦ H̃(t, s). H est une homotopie de lacets de γ0 à γ1 .
La fonction ψ est alors une bijection du groupe fondamental de S1 dans Z. En fait, c’est même un isomorphisme
de groupes.
Lemme (morphisme) : ψ est un morphisme de groupe.
Preuve
: Si γ et δ sont deux lacets de base 1, et γ̃, δ̃ leurs relevés. Définissons le relevé de γδ :
γ̃(2t)
0 6 t 6 21
˜ =
γδ
γ̃(1) + δ̃(2t − 1) 12 6 t 6 1
˜ = γδ. C’est donc le relevé de γδ. Or γδ(1)
˜
On a p ◦ γδ
= γ̃(1) + δ̃(1), on en déduit que deg(γδ) = deg(γ) + deg(δ).
Théorème
: Le groupe Π1 (S1 , 1) est isomorphe à Z.
II-2. Tores
n
Notons Tn := R /Zn le tore de dimension n. On le munit de la topologie quotient. Le tore Tn est
1 n
homéomorphe à (S ) . Donc avec ce qui précède, on en déduit que Π1 (Tn ) = Zn .
II-3. Sphères
On a déjà vu que Π1 (S1 , 1) = Z. On va voir que le groupe fondamental des sphères de dimension supérieure
est trivial.
Théorème
: Soit n > 2. La sphère Sn est simplement connexe, c’est à dire que Π1 (Sn , x) = {1}.
Le théorème précédent repose principalement sur un lemme
Lemme
: Pour n > 2, un lacet tracé sur la sphère Sn est homotope à un lacet qui évite un point.
Preuve : Considérons N = (0, . . . , 0, 1) ainsi que S = (0, . . . , 0, −1) les pôles Nord et Sud. On considère γ = (γ1 , . . . , γn+1 )
un lacet sur Sn de base le pôle Sud S et passant par le pôle Nord N . Si t0 ∈ [0, 1] est tel que γ(t0 ) = N , on considère α =
max {t 6 t0 , γn+1 (t) 6 0} et β = min {t > t0 , γn+1 (t) 6 0}. Par le théorème des valeurs intermédiaires pour γn+1 , les deux ensemble
considérés sont non vides. Ils sont fermés dans [0, 1] compact, d’où l’existence de α et β.
Par continuité de γ, γn+1 (α) et γn+1 (β) sont > 0. Or ils sont aussi 6 0 par définition. γ(α) et γ(β) appartiennent à l’équateur
E = Sn ∩ {xn+1 = 0} qui est une sphère de dimension n − 1.
√
Par uniforme continuité de γ (théorème de Heine), il existe η > 0 tel que si |t − s| < η, alors
√ kγ(t) − γ(s)k < 2. Si√t0 vérifie
γ(t0 ) = N et ]α, β[ contenant t0 est l’intervalle décrit plus haut, alors kγ(β) − γ(t0 )k = 2 et kγ(α) − γ(t0 )k = 2. Ainsi
β − α > 2η > 0.
−1
Il n’y a donc parmi les composantes connexes de γn+1
(]0, +∞[) qu’un nombre fini d’intervalles dont l’image par γ contient N .
Numérotons les par ordre croissant, ]α1 , β1 [, . . . , ]αk , βk [. On a 0 < α1 < β1 6 α2 < β2 6 · · · 6 αk < βk < 1.
On définit alors δ par :
S
· si t ∈
/ ki=1 ]αi , βi [, δ(t) = γ(t).
· si t ∈ [αi , βi ], on définit δ(t) comme un chemin continue dans E ≈ Sn−1 tel que δ(αi ) = γ(αi ) et δ(βi ) = γ(βi ). Un tel
chemin existe par connexité par arcs de E = Sn ∩ {xn+1 = 0} ≈ Sn−1 .
δ est continue, car bien définie, et continue en restriction à un nombre fini de fermés :
· si t 6∈ ∪ki=1 ]αi , βi [, δ(t) = γ(t).
· si t ∈]αi , βi [, γ(t) est dans “l’hémisphère nord strict”, i.e. γn+1 (t) > 0, et δ(t) est dans l’équateur E où γn+1 (t) = 0. Donc
γ(t) et δ(t) ne peuvent pas être des points opposés de la sphère.
10
Du coup, γ et δ sont homotopes par
tγ(s) + (1 − t)δ(s)
ktγ(s) + (1 − t)δ(s)k
Pour tous les t0 tels que γ(t0 ) = N , on a désormais δ(t0 ) ∈ E, donc différent de N : δ ne passe pas par N .
H(t, s) =
Remarque : On aurait aussi bien pu construire un lacet qui évite un ensemble de la forme {xn+1 > λ} ∪ Sn .
Preuve du théorème : Soit γ un lacet sur Sn de base le pôle Sud S. On a vu qu’il est homotope à un lacet δ qui évite le pôle
Nord N . Alors cS et δ sont homotopes, car pour tout t, δ(t) 6= −cS (t) = −S = N .
II-4. Applications
L’homotopie et le groupe fondamental permettent notamment de montrer que certains espaces ne sont pas
homéomorphes.
Théorème
: R2 n’est pas homéomorphe à Rn , n > 2.
Preuve : Supposons qu’il existe un homéomorphisme h : R2 → Rn . Il induit un homéomorphisme de (R2 )∗ sur (Rn )\ {p} où p
est un point de Rn . Or (R2 )∗ a même type d’homotopie que S1 . Donc Π1 ((R2 )∗ ) = Z. Et (Rn )\ {p} a même type d’homotopie que
Sn−1 donc Π1 ((Rn )\ {p}) = {0}. Absurde.
Nous sommes maintenant prêt pour démontrer le théorème de Brouwer dans le cas n = 2 :
Preuve du théorème de Brouwer (n = 2) : Si l’on a une rétraction r : B2 → S1 , alors i∗ est injectif de Π1 (S1 ) = Z dans
Π1 (B2 ) = 0. Une telle injection ne peut exister.
II-5. Hors piste : groupe d’homotopie des sphères
Définition : On note Πp (Sn ) l’ensemble des classes d’homotopies des applications continues de Sp dans Sn
qui envoient un point fixé de la sphère Sp sur un point fixé de la sphère Sn . Un tel ensemble peut être muni
d’une structure de groupe abélien.
On a vu que le théorème de Brouwer est équivalent à ce que IdSn n’est pas homotope à une constante. On
en déduit que Card(Πn (Sn )) > 2.
Pour p < n, on va montrer que l’ensemble Πp (Sn ) est de cardinal 1 : toute application continue Sp → Sn est
homotope à une constante.
Théorème
: Soit f : Sp → Sn continue, avec p < n. Alors f est homotope à une constante.
Preuve : Si f n’était pas surjective, on pourrait se servir du fait que Sn privé d’un point x0 est contractile, pour homotoper
f à une constante. En effet, posons X = Sn \ {x0 }. Puisque X est contractile, il existe r : X → {y0 } et s : {y0 } → X tels que
r ◦ s = id{y0 } et s ◦ r soit homotope à idX . Mais alors f est homotope à idX ◦ f , qui est homotope à s ◦ r ◦ f , qui est constante.
Le problème de cette démonstration est qu’il existe des fonctions f : Sp → Sn continue surjective. L’objectif est alors de trouver
une application g continue non surjective et homotope à f . Nous donnerons ici seulement l’idée de la fin de la preuve. Par un
théorème d’approximation (par exemple en convolant f avec une approximation de l’unité), pour tout réel ε > 0, on peut trouver
une application g : Sp → Rn+1 de classe C ∞ , telle que
kf − gk∞ 6 ε.
Quitte à normaliser g on peut supposer que g : Sp → Sn sans perdre l’hypothèse d’approximation de f par g. Par le lemme de Sard,
g ne peut pas être surjective car p < n. De plus, pour ε < 2, f et g sont homotopes.
II-6. Bouquet de cercles
Considérons l’ensemble Bp constitué de p cercles de rayon 1 dans R3 qui se coupent deux à deux en 0
seulement. On choisit un sens de parcours sur chaque cercle, et on note aj le lacet de base 0 qui fait le tour du
j-ème cercle en temps 1 et à vitesse constante.
11
Soit γ un lacet de base 0 dans Bp , c’est-à-dire une application continue γ : [0, 1] → Bp telle que γ(0) = γ(1) = 0.
Soit V = γ −1 (Bp − {0}). C’est un ouvert de ]0, 1[, donc une réunion dénombrable d’intervalles ouverts. Si ]α, β[
est l’un de ces ouverts, alors γ(α) = γ(β) = 0. Par uniforme continuité,
∀ε > 0, ∃η > 0, |t1 − t2 | < η ⇒ kγ1 (t1 ) − γ2 (t2 )k < ε
Donc
β−α6η
⇒
∀t ∈]α, β[, kγ(t) − γ(α)k 6 ε
⇒
kγ|[α,β] k∞ 6 ε
Pour ε donnée, on a donc kγ|[α,β] k∞ > ε implique donc β − α > η. Il n’y a donc qu’un nombre fini de tels
intervalles ouverts ]α, β[, puisqu’ils sont deux à deux disjoints dans ]0, 1[.
Par connexité, γ(]α, β[) est entièrement contenu dans un des cercles Cj . À reparamétrage sur [0, 1] près,
γ|[α,β] est donc un lacet de Cj , de base 0. Il est donc homotope à akj .
Si kγ|[α,β] k∞ 6 1, ce lacet ne peut pas passer par le point de Cj opposé à 0. Il est donc homotope à c0 ,
c’est-à-dire à 0.
On considère donc les intervalles ]α, β[ sur lesquels kγ|[α,β] k∞ > 1, qui sont en nombre fini q, qu’on numérote
à la suite
α1 < β1 6 α2 < β2 6 · · · 6 αq < βq .
L’idée est ensuite simple : sur chaque [αi , βi ] × [0, 1], on met l’homotopie de γ|[αi ,βi ] à akjii . Sur les autres
[α, β] × [0, 1], on met l’homotopie à c0 . Écrivons ceci.
On se souvient qu’un cercle privé d’un point N se rétracte par déformation sur le point opposé S, à l’aide
de l’homotopie :
(1 − s)x + sS
,
L(x, s) =
k(1 − s)x + sSk
application bien définie et continue sur S − {N } × [0, 1].
Si l’on fait cela sur chaque cercle Cj pour S = 0, et N le point opposé sur Cj , cela donne une application L̃
continue de (Bp − {pts opposés à 0}) × [0, 1] sur Bp , avec de plus L̃(x, 1) = 0.
On considère alors l’homotopie K donnée par :
· K(t, s) = Hi (t, s) pour t ∈ [αi , βi ], avec Hi l’homotopie de γ|[α1 ,βi ] à akjii (reparamétrée sur [αi , βi ]).
S
· K(t, s) = L̃(γ(t), s) pour t ∈
/ ]αi , βi [, qui est bien définie, car γ(t) ne peut pas être opposé à 0.
Comme c’est une fonction continue sur un nombre fini de morceaux fermés, qui coı̈ncident sur les intersections,
k
k
cette fonction est bien une homotopie de γ à c0 akj11 c0 akj22 . . . c0 ajqq , donc à akj11 . . . ajqq ou à c0 .
k +kr+1
Si jr+1 = jr , on regroupe en ajrr
, et on élimine si kr + kr+1 = 0. Au final,
k
γ est homotope à c0 (neutre) ou à akj11 . . . ajqq avec jr 6= jr+1 .
On a là-dessus une loi de groupe (concaténation puis réduction si besoin, puis reconcaténation, etc..), où l’inverse
−kq
k
1
de akj11 . . . ajqq est a−k
j1 . . . ajq .
Ce groupe est le groupe libre à p généateur Fp . Avec des revêtements, on pourra montrer que deux chemins
homotopes donnent le même mot, d’où le théorème suivant.
Théorème
: Le groupe fondamental du bouquet de p cercles est Π1 (Bp , 0) ≈ Fp = F(a1 , . . . , ap ).
II-7. Espaces projectifs
Définition : L’espace projectif de Rn+1 , noté Pn (R) correspond à l’ensemble des droites vectorielles de
Rn+1 . Formellement,
n+1 ∗
) /R∗
Pn (R) = (R
où la relation d’équivalence n’est rien d’autre que la relation de proportionnalité : x ∼ y si et seulement s’il
existe λ ∈ R∗ tel que x = λy
12
Remarque : On peut aussi dire que Pn (R) est le quotient de Sn par la relation d’antipodie : x ∼ −x. Par
exemple, {S, N } est un point de Pn (R) (cela correspond bien en effet à une droite vectorielle de Rn+1 ).
Considérons γ un lacet de Pn (R) de base {S, N }. On montrera par la suite qu’il existe une application
γ̃ : [0, 1] → Sn continue telle que γ̃(0) = S, p ◦ γ̃ = γ, avec p : Sn → Pn (R) la projection canonique, et
γ̃(1) = S ou N (c’est ce qu’on appelle un relèvement du lacet). De plus, on montrera que deux lacets γ0 et γ1
sont homotopes si et seulement si γ˜0 (1) = γ˜1 (1) (cf. III-5.).
Remarque : Π1 (P1 (R)) = Z. De plus, si p : S1 → P1 (R) est la projection canonique, alors p∗ : Π1 (S1 , S) →
Π1 (P1 (R), {S, N }) est l’application k 7→ 2k.
Pour n > 2, on peut montrer que l’on a Π1 (Pn (R)) = Z /2Z . Mentionnons enfin le ”théorème de l’assiette de
soupe” : celui-ci affirme que Π1 (SO3 (R)) = Z /2Z . (En fait, SO3 (R) est homéomorphe à P3 (R), donc ils ont
même Π1 ).
II-8. Surfaces
Donnons les groupes fondamentaux de certaines surfaces.
· Le tore T2 .
b−1
a−1
a
b
b
a
T2
Le lacet aba−1 b−1 est trivial dans le tore. Tout lacet est homotope à un mot en a, b, a−1 , b−1 . Donc
Π1 (T2 ) = F(a, b) /< aba−1 b−1 >
où F(a, b) est le groupe libre à deux éléments. En fait, on peut montrer que le Π1 du tore n’est rien d’autre
que Z2 (en effet, on quotiente F(a, b) par le groupe des commutateurs, et donc le groupe fondamental du
tore est l’abélianisé de F(a, b), qui est donc commutatif).
· Le tore à deux trous.
a−1
1
b−1
1
b1
a2
•
a1
b−1
2
b2
T2 #T2
a−1
2
−1
−1 −1
−1
Le lacet a1 b1 a−1
1 b1 a2 b2 a2 b2 est trivial dans le tore. Tout lacet est homotope à un mot en a1 ,b1 , a1 ,
−1
−1
−1
b1 , a2 , b2 , a2 , b2 . Donc le groupe fondamental de T2 #T2 le tore à deux trous est
.
−1
−1 −1
Π1 (T2 #T2 ) = F(a1 , b1 , a2 , b2 ) < a1 b1 a−1
1 b1 a2 b2 a2 b2 >
où F(a1 , b1 , a2 , b2 ) est le groupe libre à quatre éléments.
13
III
Revêtements
Dans tout ce chapitre, E et B sont des espaces topologiques.
III-1. Définition
Définition (revêtement) : Soit p : E → B une application continue. On dit que p est un revêtement
lorsque pour tout b ∈ B, il existe un ouvert V de B contenant b, un espace F (non vide) discret et un
homéomorphisme ϕ : p−1 (V ) → V × F tel que le diagramme suivant commute :
/ V ×F
ϕ : p−1 (V )
p
& V
proj ◦ ϕ = p, ou encore proj = p ◦ ϕ−1 .
proj sur V
B s’appelle la base du revêtement, E s’appelle l’espace total du revêtement, F s’appelle la fibre du revêtement
en b, (V, ϕ) s’appelle une trivialisation locale, et V l’ouvert trivialisant. Pour tout élément f ∈ F , l’ensemble
ϕ−1 (V × {f }) s’appelle un feuillet du revêtement.
Remarques :
· Assez généralement, on note les revêtements avec la base en dessous de l’espace total, c’est à dire
E
p: ↓ .
B
· F espace discret signifie que F est muni de la topologie discrète, c’est à dire l’ensemble des parties de F .
Définition (revêtement trivial) :
Un revêtement p : E → B est dit trivial si l’on peut prendre
V = B dans la définition précédente, autrement dit, s’il existe un homéomorphisme ϕ : E → B × F tel que
p(ϕ−1 (b, f )) = b pour tout (b, f ) ∈ B × F .
Exemples :
· Si F est un espace discret, et E = B × F , alors p : E → B est le revêtement trivial.
√
· p : R → S1 définie par p(x) = e2iπx est un revêtement de fibre Z. Si b ∈ S1 , si BS1 (b, 2) = V alors
[
p−1 (V ) =
]x + k − 41 , x + k + 14 [
k∈Z
avec x ∈ R tel que p(x) = b. L’homéomorphisme est donnée par :
ϕ : p−1 (V ) −→
y
7−→
V ×Z
(p(y), ky )
avec ky l’unique entier tel que y ∈]x + k − 14 , x + k + 14 [. L’inverse de ϕ est donné par (z, k) → θx+k,b (z)
avec les notations du II-1.
· Considérons exp : C → C∗ . C’est un revêtement. En effet, si z0 ∈ C∗ , posons V = z ∈ C, Re(zz0−1 ) > 0 ,
un demi plan ouvert. Si ζ0 est un nombre complexe tel que exp(ζ0 ) = z0 , alors
[
exp−1 (V ) =
2ikπ + ζ ∈ C, Im ζ0 − π2 < Im ζ < Im ζ0 + π2 .
k∈Z
L’homéomorphisme local est donné par
ϕ:
exp−1 (V ) −→
ζ
7−→
14
V ×Z
(exp ζ, kζ )
avec kζ l’unique entier tel que ζ appartienne à la bande 2ikπ + z ∈ C, Im ζ0 −
L’inverse de ϕ est donné par
zz −1
ψ : z → ζ0 + ln(|zz0−1 |) + i arcsin Im 0−1 .
zz0
π
2
< Im z < Im ζ0 +
π
2
.
Définition (section) : Si p : E → B une application continue, on dit qu’un application continue s est
une section sur V , un ouvert de B si c’est un inverse de p à droite, c’est-à-dire si p ◦ s|V = IdV .
Remarque : Si p : E → B est un revêtement, et si (V, ϕ) est une trivialisation locale de fibre F , notons pour tout
f ∈ F, sf : x → ϕ−1 (x, f ). Alors sf est un homéomorphisme de V sur le feuillet associé à f . En particulier, sf
est un section sur V .
Donnons maintenant une condition suffisante pour qu’une application soit un revêtement.
Proposition : Soit p : E → B une application continue. Si pour tout b ∈ B, il existe un ouvert V de B
contenant b, un ensemble F discret et une section sf pour tout f ∈ F , tels que
[
p−1 (V ) =
sf (V )
f ∈F
avec les sf (V ) ouverts deux à deux disjoints, alors p est un revêtement.
Preuve : Soit b un élément de B. Soit V l’ouvert de B contenant b correspondant. Pour tout x ∈ p−1 (V ), il existe un unique
élément fx ∈ F tel que x ∈ sf (V ). Définissons alors
ϕ:
p−1 (V )
x
−→
7−→
V ×F
.
(p(x), fx )
Cette application est continue : en effet, x → fx est localement constante et p est continue. De plus, on a proj ◦ ϕ = p par définition
de ϕ. Enfin, ϕ est inversible, son inverse est ϕ−1 (y, f ) = sf (y), qui est bien continue car l’image réciproque de chacun des ouverts
V × {f } de V × F n’est rien d’autre que p−1 (V ) qui est ouvert.
Donnons d’autres exemples de revêtements
Exemples :
· z → z k défini de S1 dans S1 est un revêtement de fibre Z /kZ .
· z → z k défini de C∗ dans C∗ est un revêtement de fibre Z /kZ .
n
· La projection canonique p : Rn → R /Zn est un revêtement de fibre Zn .
· La projection canonique p : Sn → Pn (R) est un revêtement de fibre Z /2Z .
III-2. Propriétés
Voici une liste de propriétés des revêtements. Les démonstrations ne seront pas faites, car celles-ci sont assez
proches de la définition d’un revêtement.
Si p : E → B est un revêtement,
· L’application p est surjective.
· Les propriétés de connexité, connexité par arcs, compacité sont transmises de l’espace total E à la base
B.
· Pour tout élément b ∈ B, p−1 ({x}) est un ensemble discret de E.
· Si A est un ouvert de B, alors l’application
p|p−1 (A) : p−1 (A) → A
est un revêtement.
15
· Si B est connexe et la fibre F est en tout point un ensemble fini, alors Card(F ) est constant. En effet,
l’application b → Card(p−1 ({b})) est localement constante sur B connexe.
· Si B est compact, alors E l’est aussi si et seulement si les fibres sont finies.
· Si x est un élément de E, alors p est un homéomorphisme local du feuillet (contenant x) d’une trivialisation
autour de p(x), sur l’ouvert de trivialisation.
III-3. Morphisme de revêtement
Définition (morphisme de revêtement) : Soit p : E → B et p0 : E 0 → B 0 deux revêtements. Un morphisme de revêtements est un couple (g, G) d’applications continues g : B → B 0 et G : E → E 0 qui font commuter le diagramme :
/ E0
G
E
p0
p
g
/ B0
B
On parle d’isomorphisme de revêtements lorsque g et G sont des homéomorphismes.
p0 ◦ G = g ◦ p.
Définition (automorphisme de revêtement) : Si p : E → B est un revêtement, on dit que G est un
automorphisme de revêtement si G est un homéomorphisme tel que p ◦ G = p. Autrement dit, G fait
commuter le diagramme :
G
/E
E
p
p
B

On note Autp (E), ou Aut(E) l’ensemble des automorphismes du revêtement p : E → B.
Donnons maintenant une propriété du groupe des automorphismes de revêtement.
Si p : E → B est un revêtement, alors Aut(E) est un groupe discret qui agit continûment sur E.
Preuve
: Aut(E) est un sous groupe du groupe des homéomorphismes de E dans E. Si l’on définit l’application A comme
A:
Aut(E) × E
(G, x)
−→
7−→
E
G(x)
Alors A est continue, si l’on munit Aut(E) de la topologie discrète qui en fait un groupe discret. Donc l’action est continue.
III-4. Action propre et libre
Quelques rappels de topologie et d’algèbre sont nécessaires pour comprendre ce qui suit.
III-4. a) Rappels de topologie
Définition (Localement compact) : Soit X un espace topologique séparé. On dit que X est localement
compact si tout point admet une base de voisinages compacts, c’est-à-dire pour tout point x de X, tout
voisinage de x contient un voisinage compact de x.
De manière générale en topologie, si un espace est localement ∗, cela signifie que tout point admet une base
de voisinages qui sont ∗. Ou encore, pour tout x ∈ X, et pour tout U voisinage de x, il existe un voisinage V
de x qui vérifie la propriété ∗ et tel que V ⊂ U .
Dans le cas de localement compact, il existe une caractérisation qui est en pratique plus intéressante :
Caractérisation : Un espace topologique séparé est localement compact si et seulement si tout point
admet un voisinage compact.
16
Preuve : Soit X un espace topologique séparé.
Si X localement compact, alors pour tout point de X, tout voisinage de ce point admet une base de voisinage compact, donc en
particulier il existe un voisinage compact de x.
Réciproquement, supposons que tout point de X admette un voisinage compact. Soit x un point de X, K un voisinage compact de
x et U un voisinage quelconque de x. La frontière ∂(K ∩ U ) est fermée dans K compact, donc est compacte. De plus, puisque X est
séparé, pour tout y appartenant à ∂(K ∩ U ) il existe deux ouverts disjoints Vy et Wy contenant respectivement y et x. La famille
(Vy ) forme un recouvrement de ∂(K ∩ U ), qui est compact, il existe donc un sous recouvrement fini (Vy1 , . . . , Vyn ) L’intersection
de Wy1 , . . . , Wyn forme un ensemble W ne rencontre aucun Vyi . L’adhérence de W est donc contenue dans K ∩ U . Ainsi W est un
voisinage compact de x, contenu dans U .
III-4. b) Rappels sur les actions de groupes
Définition Groupe topologique : Un groupe topologique est un groupe muni d’une topologie, pour
laquelle la multiplication et l’inverse sont des fonctions continues.
Remarques :
· Si G est un groupe topologique, pour parler de continuité de la multiplication, définie sur G × G, il faut
munir le produit cartésien d’une topologie. On le munit de la topologie produit.
· Si G est un groupe fini, c’est un groupe topologique si on le muni de la topologie discrète.
Définition : Soit G un groupe topologique localement compact qui agit sur un espace topologique séparé E.
· Action continue : on dit que G agit continûment sur E si l’action
·: G×E
(g, x)
−→
7−→
E
g·x
est continue.
· Action propre : on dit que G agit proprement sur E si pour tout compact K de E, l’ensemble {g ∈ G, gK ∩ K 6= ∅}
est relativement compact, c’est à dire que son adhérence est compacte.
· Action libre : on dit que G agit librement sur E si le stabilisateur de chaque point est réduit au neutre.
Remarque : Si G est un groupe discret, alors l’action est propre si et seulement si pour tout compact K de E,
l’ensemble {g ∈ G, gK ∩ K 6= ∅} est fini.
III-4. c) Action de groupe et revêtement
À partir d’une action de groupe donnée, on va pouvoir trouver un revêtement et calculer explicitement son
groupe des automorphismes. Plus particulièrement,
Théorème : Soit E un espace topologique séparé, localement compact et connexe. Soit G un groupe discret
qui agit continûment, proprement et librement sur E. Alors la projection canonique p : E → E /G est un
revêtement, de groupe des automorphismes G.
La preuve de ce théorème utilise la proposition de III−1, et se découpe en trois parties. Tout d’abord, on montre
l’existence pour tout point de E d’un voisinage ouvert de ce point qui ne rencontre aucune de ses images par
l’action du groupe. Ensuite, on montre grâce à la proposition III−1 que p est bien un revêtement. Enfin, on
calcule le groupe des automorphismes de ce revêtement.
Preuve
:
· Soit x ∈ E et K un voisinage compact de x. L’ensemble I = {g ∈ G − {Id} , gK ∩ K 6= ∅} est fini. Notons I cet ensemble.
Soit g un élément de I. Puisque l’action est libre, alors pour tout élément x de E, on a g · x 6= x. De plus, g agit comme un
homéomorphisme sur E : l’application x → g · x est continue car l’action l’est, et cette application a pour inverse x → g −1 · x
qui est aussi continue. Puisque E estT
séparé et localement compact, il existe un voisinage compact Fg de x tel que x ∈
/ gFg .
Considérons alors l’ensemble K 0 = g∈I Fg . K 0 est un voisinage compact de x, et pour tout g ∈ I, l’ensemble gK 0 ne
contient pas x . Posons


[
0
W = K ∩ K̊ 0 −
gK 
g∈I
17
W est un ouvert inclus dans K qui contient x, et pour tout élément g de I, on a gW ∩ W = ∅. De plus, par définition de I,
si g est un élément n’appartenant pas à I et différent de l’identité, puisque W est inclus dans K, alors gW ∩ W = ∅. Ainsi,
pour tout élément g différent de l’identité, gW ∩ W = ∅.
· Soit p l’application
p : E → E /G
Si y est un point de E /G , il existe x ∈ E tel que p(x) = y. Par ce qui précède, il existe W ouvert contenant x qui ne
rencontre aucune de ses images par l’action de G. Notons V = p(W ). Alors
[
p−1 (V ) =
gW
g∈G
et les (gW )g∈G sont des ouverts deux à deux disjoints. De plus, V est ouvert. En effet, par définition de la topologie quotient,
qui rappelons le est définie par
O ⊂ E /G , p−1 (O) ouvert de E
−1
et puisque p (V ) est ouvert comme réunion d’ouvert, on en déduit que V est ouvert.
Pour appliquer la proposition III−1, il reste à construire, pour tout élément g du groupe G, une section sg telle que
sg (V ) = gW . Soit g0 un élément de G. Considérons l’application s̃g0 définie par
S
−→ g0 W
s̃g0 :
g∈G gW
g·x
7−→ g0 · x
s̃g0 est continue : si g ∈ G est fixé, en restriction à gW , c’est l’action de g0 g −1 , qui est continue car l’action est continue.
Ceci est vrai pour tout élément g de G, d’où la continuité. Enfin, s̃g0 passe au quotient en une application sg0 : V → g0 W
qui est bien une section.
Par la propriété III−1, on conclut que p est un revêtement.
· Montrons que le groupe des automorphismes de p s’identifie à G. On a déjà vu que les éléments de G agissaient sur E
comme des homéomorphismes. Soit H ∈ Aut(E). On souhaite montrer que H est une application x → g · x avec g ∈ G.
Par définition, pour tout élément x de E on a p(H(x)) = p(x). Puisque les images H(x) et x sont égales par p, alors H(x)
et x sont dans la même classe d’équivalence, c’est à dire dans la même orbite de l’action de G. Donc il existe gx ∈ G tel
que H(x) = gx · x. Montrons que l’application x → gx est localement constante. Soit x ∈ E, et soit W l’ouvert contenant x
construit dans la première partie. Si y est dans W , on sait que H(y) = gy · y et H(x) = gx · x, avec gx etgy deux éléments de
G. Si x et y sont proches dans W , puisque H est un homéomorphisme, H(x) et H(y) le sont aussi. Mais comme les (gW )g∈G
sont deux à deux disjoints, on en déduit que gx = gy et que x → gx est localement constante. Comme E est connexe, alors
cette application est constante, et donc il existe un élément g tel que H : x → g · x. Reste à montrer que l’application qui à
un élément de Aut(E) associe l’élément g du groupe G est injective. Soient H1 et H2 deux automorphismes du revêtement,
et soient g1 et g2 tels que
H1 : x → g1 · x
H2 : x → g2 · x
Si H1 et H2 ont mêmes images en un point, alors g1 · x = g2 · x et donc (g1 g2−1 ) · x = x. Par liberté de l’action, g1 = g2 .
Ainsi, le groupe des automorphismes du revêtement p s’identifie exactement avec G.
III-5. Relèvements
La question est la suivante : si p : E → B est un revêtement, et si h : X → B est une application continue,
peut-on “relever” h, c’est à dire existe-t-il h̃ continue tel que le diagramme suivant commute :
>E
h̃
X
p
h
/B
Définition : Une telle application h̃ est appelée relèvement de h.
Lemme utile : Soit p : E → B un revêtement, avec E séparé. Soit X un espace topologique connexe, et
h : X → B. Si h possède deux relèvements qui coı̈ncident en un point, alors ils sont égaux.
Preuve : Notons H1 et H2 les deux relèvements de h qui coı̈ncident au point x0 . Posons A = {x ∈ X, H1 (x) = H2 (x)}. A est
non vide. Montrons que A est ouvert et fermé.
· A est fermé : E est séparé, donc sa diagonale ∆ est fermée. Or A = F −1 (∆), avec F : x → (H1 (x), H2 (x)). F est continue,
donc A est fermé.
· A est ouvert : si x ∈ A, prenons une trivialisation (V, ϕ) au point h(x) ∈ B, dont la fibre est F . h est continue, donc il existe
un voisinage U de x tel que pour tout élément y de U , h(y) appartienne à V . Puisque H1 et H2 , on a
∀y ∈ U,
H1 (y) ∈ p−1 (V )
.
H2 (y) ∈ p−1 (V )
Regardons les applications, définies sur U
y → proj(ϕ(H1 (y)))
.
y → proj(ϕ(H2 (y)))
Ces application, correspondent aux numéros des feuillets. Ces deux applications sont continues sur F discret et coı̈ncident
en x. Donc ces deux applications sont constantes et égales sur un voisinage de x. Donc A est ouvert.
18
Puisque X est connexe, A = X et les deux relèvements sont égaux.
Théorème de relèvement : Soit p : E → B un revêtement, X = [0, 1]n et h : [0, 1]n → B une application
continue. Si y0 est un élément de p−1 (h({0})), alors il existe un unique relèvement h̃ : [0, 1]n → E tel que
h̃(0) = y0 .
(E, y0 )
9
∃!h̃
[0, 1]n
p
/ (B, h(0))
h
Preuve : L’unicité est donnée par le lemme utile.
Existence : Considérons l’ensemble {(V, ϕ) trivialisation du revêtement} Pour tout V ouvert de trivialisation du revêtement, h−1 (V )
est un ouvert, et la famille (h−1 (V )) recouvre [0, 1]n qui est un compact métrique. Par compacité, il existe ε > 0 tel que pour tout
élément t de [0, 1]n , la boule (pour la norme infinie) de centre t et de rayon ε soit entièrement incluse dans l’un de ces ouverts
h−1 (V ). Si k est un entier strictement positif tel que k1 < ε, découpons [0, 1]n en cubes fermés de côtés k1 . Il y en a exactement kn .
Numérotons les C1 , . . . , Ckn de sorte que pour tout entier 1 6 l 6 kn , les ensembles
l
[
Ci
i=1
et
l
[
Ci ∩ Cl+1
i=1
soit connexe (non vide). Pour tout entier 1 6 i 6 kn , notons (Vi , ϕi ) la trivialisation du revêtement telle que h(Ci ) soit inclus dans
Vi . Construisons alors le relèvement de h par morceaux sur les Ci .
· Sur C1 : h̃1 : t → ϕ−1
1 (h(t), f0 ) avec f0 l’élément de la fibre qui correspond à y0 .
· Sur
[
Ci . Supposons que h̃l−1 soit construit.
l
[
Ci ∩ Cl+1 est connexe, donc contient un point tl . Posons yl = h̃l−1 (tl ),
i=1
16i6l
et
h̃l : t →
 −1

 ϕl (h(t), fl )

 h̃l−1 (t)
avec fl la fibre qui correspond à yl . h̃l est un relèvement de h sur
sur Cl
l−1
[
Ci
sur
i=1
[
Ci , coı̈ncide avec h̃l−1 en tl , et l’intersection des
16i6l
domaines est connexe, donc ces deux relèvements coı̈ncident sur l’intersection de leur domaine de définition.
La construction finale donne un relèvement h̃ de h qui prend la valeur y0 en 0.
Nous allons maintenant voir plusieurs corollaires de ce théorème de relèvement. La première remarque
évidente que l’on peut faire est que l’on peut relever des lacets (ou chemins) en des lacets. En revanche, les
relevés de lacets ne sont généralement pas des lacets : ils ne se referment pas forcément.
Corollaire : Si γ0 et γ1 sont des chemins dans B homotopes relativements à {0, 1}, alors γ̃0 et γ̃1 les relevés
au même point sont homotopes. Dans ce cas, γ̃0 (1) = γ̃1 (1)
Preuve : Si H est l’homotopie de γ0 à γ1 , notons H̃ son relevé, et y0 = H̃((0, 0)). Les applications s → H̃(s, 0) et s → H̃(s, 1)
sont continues, à valeurs respectivement dans p−1 (γ(0)) et p−1 (γ(1)), qui sont deux espaces discrets.
Corollaire : Si p : E → [0, 1]n est un revêtement, il est trivial.
Preuve : Soit x ∈ E. Posons F = p−1 (0). Considérons un chemin γ de p(x) à 0. On peut le relever à partir de x en γ̃ x . On a
alors γ̃(1) ∈ F . Considérons l’application
ϕ : E −→ [0, 1]n × F
x 7−→ (p(x), γ̃ x (1))
Montrons que ϕ est un homéomorphisme. Soit V un ouvert de trivialisation locale en x. Puisque [0, 1]n est localement connexe par
arcs, on peut supposer V connexe par arcs. Soit x0 proche de x, x0 ∈ V . x0 et x sont dans le même feuillet f ∈ F . Si x et x0 sont
proches, ils sont dans le même feuillet f ∈ F . Soit δ est un chemin de p(x) à p(x0 ). Si sf est la section correspondant au feuillet
0
f , alors δ̃ x = sf ◦ δ est un chemin de x à x0 contenu dans le feuillet f et donc le chemin δγ de x à 0 se relève au point x0 en
0
0
0
δ̃ x γ̃ x = γ̃ x et donc γ̃ x (1) = γ̃ x (1). La deuxième composante de ϕ est localement constante, donc ϕ est continue.
0
Montrons que ϕ est injective : Si (p(x), γ̃ x (1)) = (p(x0 ), γ̃ x (1), alors le chemin γ̃ x γ̃ x0 est un chemin de x à x0 , donc x et x0
sont dans la même composante connexe.
Le reste de la proposition est laissé au lecteur.
Corollaire : Si p : E → B est un revêtement, avec B connexe par arcs, et si b1 et b2 sont deux éléments de
B, alors p−1 (b1 ) et p−1 (b2 ) sont en bijection.
19
Preuve
: Si γ est un chemin de b1 à b2 alors une bijection est donnée par
x ∈ p−1 (b1 ) → γ̃ x1 (1) ∈ p−1 (b2 ).
III-6. Action de Aut(E)
· Si E est connexe, Aut(E) agit librement. En effet, un élément H de Aut(E) est un relèvement de p : E → B.
Par le lemme utile, s’il fixe un point, il les fixe tous.
· Aut(E) agit continument sur E : on met en effet la topologie discrète sur Aut(E).
· Aut(E) agit proprement sur E : en effet, pour tout élément x de E, si V est l’ouvert de trivialisation
en p(x), et W le feuillet de la trivialisation qui contient x, alors pour tout g 6= id automorphisme du
revêtement, g envoie un feuillet sur un autre feuillet. Donc les (gW )g∈Aut(E) sont deux à deux disjoints,
d’union p−1 (V ).
On peut alors appliquer le théorème III−4.c)
Théorème. : Soit p : E → B un revêtement, avec E connexe, séparé et localement compact. Alors
q : E → E Autp (E) est un revêtement dont le groupe des automorphismes est Autp (E).
La question que l’on peut alors se poser est la suivante : est-ce que p = q ? Pour cela, il faudrait que la classe
d’équivalence d’un point x sous l’action de Aut(E) soit p−1 (x). Ou encore, si x et y sont deux points de E tels
que p(x) = p(y), alors il existe un unique automorphisme H tel que H(x) = y. L’action est alors transitive, ce
qui nous amène à la définition suivante.
Définition : p : E → B est galoisien si E est connexe par arcs et Aut(E) agit transitivement sur toutes
les fibres.
.
Dans le cas d’un revêtement galoisien p : E → B, alors B = E Aut(E) .
20
IV
Lien entre groupe fondamental et revêtement
IV-1. Quelques propositions
Si p : E → B est un revêtement, on peut lui associer une application p∗ définie dans la partie I−6. Rappelons
que p∗ est une application du groupe fondamental de E dans celui de B.
Proposition : Si p : (E, x) → (B, b) est un revêtement, alors p∗ est injective.
Preuve
: Soit γ un lacet de base x dans E tel que [p ◦ γ] = [cb ] la classe du lacet constant égal à b. p ◦ γ est homotope à cb par
une application H que l’on relève en une homotopie H̃ avec H̃(0, 0) = x. H̃(·, 0) relève p ◦ γ à partir de x, donc H̃(t, 0) = γ̃ et
H̃(t, 1) = cx . Donc γ est homotope à cx . D’où l’injectivité.
Proposition : Soit p : E → B un revêtement avec E connexe par arcs. Sont équivalents :
· E est simplement connexe.
· Deux lacets de base b sont homotopes dans B si et seulement leurs relevés d’origine x ont mêmes extrémités.
Preuve :
⇒ : l’implication de gauche à droite est un corollaire que l’on a déjà vu. Dans l’autre sens, si γ̃0x (1) = γ̃1x (1), alors γ̃0x et γ̃1x sont
homotopes dans E simplement connexe (ils ont en effet même origine et même extrémité). Si H̃ est l’homotopie, alors H = p ◦ H̃
est une homotopie de γ0 à γ1 .
⇐ : Soit γ un lacet de base x dans E. p ◦ γ est un lacet de base b, qui se relève en γ qui a pour extrémité x. cb est un lacet de base
b qui se relève en cx . Donc p ◦ γ est homotope à cb . Si l’on relève l’homotopie, on trouve exactement que γ est homotope à cx dans
E.
IV-2. Groupe fondamental et revêtements
Soit p : (E, y0 ) → (B, b0 ) un revêtement. Soit X un espace connexe et localement (et donc globalement)
connexe par arcs. Soit h : (X, x0 ) → (B, b0 ) une application continue. On cherche à quelle condition il existe un
relèvement de h, c’est à dire une fonction h̃ qui fasse commuter le diagramme suivant
(E, y0 )
:
h̃
(X, x0 )
h
p
/ (B, b0 )
Le résultat est donné par le théorème suivant.
Théorème
: Sont équivalents :
· Il existe h̃ relèvement de h avec h̃(x0 ) = y0 .
· h∗ (Π1 (X, x0 )) ⊂ p∗ (Π1 (E, y0 )).
Autrement dit, il existe un relèvement h̃ de h si et seulement si l’image par h d’un lacet dans X se relève
en un lacet dans E.
Preuve
: Tout d’abord, le lemme utile assure l’unicité du relèvement h̃ si celui-ci existe.
⇒ : Soit γ un lacet dans X de base x0 . Pour tout t, on a
h ◦ γ(t) = p ◦ h̃(γ(t)) = p(h̃ ◦ γ(t))
Or h̃ ◦ γ est un lacet dans E. Donc [h ◦ γ] ∈ p∗ (Π1 (E, y0 )).
⇐ : On veut construire une relèvement h̃ avec h̃(x0 ) = y0 .
21
Lemme : Dans un revêtement p : E → B, si β est un chemin de b1 à b2 , on le relève à partir de x1 ∈ p−1 (b1 ) en ε qui va donc
de x1 à x2 ∈ p−1 (b2 ). Alors le relevé de β à partir de x2 est ε.
Preuve du lemme : ε : [0, 1] → E vérifie ε(t) = ε(1 − t). Dont p ◦ ε(t) = p ◦ ε(1 − t) = β(1 − t) = β(t). C’est donc un relevé de β,
et par unicité, le seul relevé à partir de ε(0) = ε(1) = x2 .
On peut désormais définir le relevé h̃. Soit x quelconque dans X, et soit γ : [0, 1] → X un chemin d’origine x0 et d’extrémité x.
Alors β = h ◦ γ est un chemin de b0 à h(x). Soit ε le relevé de ce chemin à partir de y0 . On veut poser h̃(x) = ε(1), qui vérifie bien
p ◦ ε(1) = β(1) = h(x). Vérifions que de cette manière, h̃(x) est bien définie et ne dépend pas du chemin γ choisi.
Soient donc deux chemins γ1 et γ2 de x0 au même point x. Soient β1 = h ◦ γ1 et β2 = h ◦ γ2 , chemins de b0 à h(x). L’enchaı̂né
γ1 γ2 est un lacet, donc h ◦ (γ1 γ2 ) = β1 β2 est un lacet de base b0 dans B, dont la classe est dans h∗ (Π1 (X, x0 )) donc dans
p∗ (Π1 (E, y0 )). Donc β1 β2 se relève à partir de y0 en un lacet. Mais un (et donc le) relevé de β1 β2 est ε1 ε02 , où :
· ε1 est le relevé de β1 à partir de x0
· ε02 est le relevé de β2 à partir de ε1 (1).
On a que ε02 (1) = y0 . Donc ε02 = ε2 . Donc ε02 = ε2 , où ε2 est le relevé de β2 = β2 à partir de y0 . Finalement,
ε2 (1) = ε02 (0) = ε1 (1)
et donc h̃ est bien définie.
Reste la continuité de h̃.
Soit x ∈ X, W un voisinage tel que h(W ) soit inclus dans V , ouvert de trivialisation du revêtement. Si x0 ∈ W , on considère le
chemin γδ où γ est un chemin de x0 à x et δ un chemin dans W de x à x0 . Alors h ◦ δ est un chemin dans V , qui par unicité se
relève en sf ◦ h ◦ δ, pour une certaine section sf au dessus de V . Donc h̃(x0 ) = sf (h(x0 )), d’où la continuité.
Corollaire : Tout revêtement d’un espace B localement connexe par arcs et simplement connexe est trivial.
Preuve
: Soit b0 ∈ B, F = p−1 ({b0 }) et f ∈ F . Le résultat du théorème précédent appliqué à :
(E, f )
(B, b0 )
Id
/ (B, b0 )
donne une section sf : B → E avec sf (b0 ) = f . Soit ϕ : B × F → E définie par ϕ(b, f ) = sf (b). C’est une application continue (on
munit F de la topologie discrète).
Soit x ∈ E. Notons b = p(x). Soit β un chemin dans B de b à b0 , et ε son relevé à partir de x. Alors ε(1) ∈ p−1 (b0 ) = F .
Comme B est simplement connexe, cela ne dépend pas de β et définit donc une application E → B × F . C’est l’inverse de ϕ. Il
reste à montrer que cette application est continue, c’est-à-dire que x → f est localement constante. Soit x ∈ E, V un ouvert de
trivialisation autour de p(x), connexe par arcs. Soit W le feuillet de la trivialisation contenant x, homéomorphe à V . Soit δ un arc
de x0 à x dans W . Si β est un chemin de p(x) à b0 , δε relève un chemin de p(x0 ) à b0 , et son extrémité est ε(1) = δ(1). Donc la
fonction est localement constante.
Donnons enfin un exemple d’application de ce théorème, qui a son importance en analyse complexe.
Exemple : Soit U un ouvert de C∗ . On cherche à quelle condition sur U on peut trouver une détermination
continue du logarithme, définie sur l’ouvert U , c’est à dire une application log telle que
>C
log
U
exp

i
/ C∗
Avec le théorème, il existe une détermination continue du log sur U si et seulement si
i∗ (Π1 (U ), x0 ) ⊂ exp∗ (Π1 (C)) = {Id} .
Autrement dit, l’existence du log équivaut au fait que tout lacet dans U doit être homotope à une constante
dans C∗ .
IV-3. Action du groupe fondamental
Dans la suite, on suppose B connexe par arcs, et localement connexe par arcs. Soit p : E → B un revêtement.
Si b ∈ B, on cherche à construire une action du Π1 (B, b) sur p−1 (b).
Soit β un lacet de base b. Si x est un point de p−1 (b), notons β̃ le relevé de β à partir de x. Alors le point
β̃(1) appartient à p−1 (b). Cela nous fournit une action à droite :
Π1 (B, b) × p−1 (b) −→
([β] , x)
7−→
22
p−1 (b)
β̃(1)
On vérifie que l’on a bien x · [β1 β2 ] = (x · [β1 ]) · [β2 ].
Donnons quelques informations sur cette action grâce au lemme suivant.
Lemme :
· Le stabilisateur de x est l’ensemble des classes d’équivalences des lacets de base b qui se relèvent en lacet, c’est
à dire
Stab(x) = p∗ (Π1 (E, x)).
· L’action est transitive si et seulement si E est connexe par arcs.
Preuve : Démontrons seulement le second point.
⇒: Soient u, v dans E. Soit β1 un chemin de p(u) à b et β2 un chemin de p(v) à b. Notons β˜1 (resp. β˜2 ) le revelé de β1 (resp. β2 ) à
partir de u (resp. v). β˜1 est un chemin de u à un certain x ∈ p−1 (b). β˜2 est un chemin de v à un certain y ∈ p−1 (b). Mais l’action
est transitive, donc il existe un chemin β telle que x · [β] = y. Relevons β à partir de x en β̃. β̃ est alors un chemin de x à y. Il ne
reste plus qu’à enchaı̂ner les chemins pour relier u et v.
⇐: Soient x, y dans p−1 (b). Soit ε un chemin de x à y. β := p ◦ ε est un chemin de b à b dans B. Son relevé β̃ à partir de x est ε.
Donc β̃(1) = y. Ainsi l’action est transitive.
Théorème : Soit p : E → B un revêtement avec E connexe par arcs et localement connexe par arcs (cela
provient des même propriétés supposées pour B qui sont transmises par le revêtement p). On a l’équivalence
suivante
· p est un revêtement galoisien
· ∀b ∈ B, ∀x ∈ p−1 (b), p∗ (Π1 (E, x)) est distingué dans Π1 (B, b).
Dans ce cas, on a
.
Aut(E) = Π1 (B, b) p∗ (Π1 (E, x))
Avant de donner la démonstration, donnons un corollaire immédiat de ce théorème.
Corollaire : Soit p : E → B un revêtement. Si E est simplement connexe, alors p est galoisien, et
Aut(E) = Π1 (B, b).
Preuve du corollaire : p∗ (Π1 (E, x)) = {1}, qui est distingué dans Π1 (B, b) donc avec le théorème, on a le résultat.
Démontrons désormais le théorème.
Preuve du théorème :
⇒ Soit ε un lacet de base x. p ◦ ε est un lacet de base b dans B. Soit β un lacet de base b dans B. Montrons que [β][p ◦ ε][β] ∈
p∗ (Π1 (E, x)).
β se relève à partir de x en un lacet β̃ qui va de x à un certain y. On relève ensuite β(p ◦ ε)β à partir de y, ce qui donne le
lacet β̃εβ̃, lacet dans E de y à y. Puisque le revêtement est galoisien, que x et y sont dans la même fibre, à savoir p−1 (b), il existe
un H ∈ Aut(E) tel que H(y) = x. Alors H ◦ (β̃εβ̃) est un lacet de base x qui relève βεβ. Autrement dit
p(H ◦ (β̃εβ̃)) = p(β̃εβ̃) = β(p ◦ ε)β.
Donc [β][p ◦ ε][β] ∈ p∗ (Π1 (E, x)) et le groupe est distingué.
⇐ Soit b ∈ B. Soient x, y deux éléments de p−1 (b). On cherche donc élément H de Aut(E) qui envoie x sur y. Regardons le
diagramme suivant :
(E, y)
;
H
(E, x)
p
p
/ (B, b)
On souhaite relever p en un certain H qui envoie x sur y. Pour cela, on doit montrer que p∗ (Π1 (E, x)) ⊂ p∗ (Π1 (E, y)). Soit γ un
lacet dans E de base x. Posons β = p ◦ γ lacet dans B de base b. Soit ε un chemin dans E de x à y. On a l’égalité
p ◦ γ = (p ◦ ε)(p ◦ (εγε))(p ◦ ε).
Donc
[p ◦ γ] = [p ◦ ε]−1 [p ◦ (εγε)][p ◦ ε].
23
Or le terme de droite est dans p∗ (Π1 (E, y)) puisque ce groupe est distingué, et car εγε est un lacet de y à y. Donc p∗ (Π1 (E, x)) ⊂
p∗ (Π1 (E, y)). D’où l’existence de H. Par symétrie, on a p∗ (Π1 (E, x)) = p∗ (Π1 (E, y)). On construit alors H dans l’autre sens. Enfin,
H ◦ H est un morphisme de revêtement qui fixe x, c’est donc l’identité. Idem pour H ◦ H. Donc p est un revêtement galoisien.
Dans ce cas, Aut(E) agit transitivement et librement sur p−1 (b). Π1 (B, b) agit transitivement sur p−1 (b). De plus, grâce au
lemme précédent, Stab(x) = p∗ (Π1 (B, b)),.et ceci est indépendant de x si le revêtement est galoisien. On a donc une bijection (un
morphisme de groupe même) de Π1 (B, b) p∗ (Π1 (X, x)) sur Aut(E).
IV-4. Revêtement universel
On suppose toujours que B est connexe par arcs et localement connexe par arcs. Soit p : E → B un
revêtement galoisien.
Définition (Revêtement universel) : p est un revêtement universel si pour tout revêtement q : D → B
il existe un morphisme de revêtement H : E → D.
Exercice : Si H existe, c’est un revêtement. De plus, il est unique à isomorphisme près.
Il est évident de voir que si E est simplement connexe, alors p : E → B est un revêtement universel. En
effet, si l’on a le diagramme suivant,
>D
H?
E
q
p
/B
comme p∗ (Π1 (E, x)) = {1} ⊂ q∗ (Π1 (D, d)), il existe H un morphisme de revêtement.
Maintenant, s’il existe un revêtement simplement connexe, soit b quelconque dans B, V ouvert de trivialisation local en b. Puisque B est localement connexe par arcs, on peut supposer V connexe par arcs. Soit β1 , β2
deux chemins de b à c, qui restent dans V . On les relève à partir d’un point x en β˜1 et β˜2 . Ces deux chemins ont
pour origine x et pour extrémité un même point. Puisque E est simplement connexe, il existe une homotopie H
de β˜1 à β˜2 . L’application p ◦ H est alors une homotopie dans B de β1 à β2 . Cela nous amène à poser la définition
suivante.
Définition : B est semi localement simplement connexe si pour tout élément b dans B, il existe un ouvert
V contenant b tel que tout lacet dans V de base b est homotope dans B à cb .
Théorème
: Sont équivalents :
· B a un revêtement simplement connexe E.
· B est semi localement simplement connexe.
Preuve : L’implication ⇒ vient d’être faite.
⇐ : On va construire le revêtement simplement connexe E. Posons
E = {classe d’homotopie de chemins d’origine fixée a dans B}
Posons ensuite p : E → B qui à [γ] associe γ(1).
Définissons une topologie sur E. Soit [α] ∈ E. Posons b = α(1). Si U est un ouvert connexe par arcs, semi localement simplement
connexe, définissons
O[α],U = [αα0 ], où α0 est n’importe quel chemin à partir de b, et qui reste dans U . .
La topologie sur E est alors l’ensemble des unions quelconques de tels parties O[α],U . Le lemme suivant permet de montrer qu’une
intersection finie de telles parties est bien dans la topologie.
Lemme
:
O[α],U ∩ O[β],V =
[
O[γ],W
où la réunion est prise sur tous les ouverts W connexe par arcs et semi localement simplement connexe inclus dans U ∩ V , et γ
n’importe quel chemin d’origine a et d’extrémité dans U ∩ V .
Preuve : Commençons par l’inclusion de droite à gauche. Soit [γγ 0 ] dans un certain O[γ],W . γ 0 est un chemin d’origine γ(1) et
qui reste dans W ⊂ U ∩ V . On a
[γγ 0 ] = [αα0 γ 0 ] = [ββ 0 γ 0 ]
où α0 (resp. β 0 ) est un chemin dans U (resp. dans V ) de α(1) à γ(1) (resp. de β(1) à γ(1))
24
L’autre inclusion n’est pas difficile. Si γ ∈ O[α],U ∩ O[β],V , alors [γ] = [αα0 ] = [ββ 0 ]. On peut alors trouver W ⊂ U ∩ V , connexe
par arcs et semi localement simplement connexe tel que γ(1) ∈ W . Donc [γ] ∈ O[γ],W . D’où l’égalité recherchée.
Soit O[α],U un élément de la topologie. Montrons que p|O[α],U : O[α],U → U est une bijection. Si [αα0 ] et [αα00 ] ont même
image par p, alors α0 et α00 ont même origine et même extrémité dans U semi localement simplement connexe, donc sont homotopes
dans B, donc [αα0 ] = [αα00 ]. Il reste la surjectivité : soit b un élément de U , soit α0 un chemin de α(1) à b qui reste dans U (U est
connexe par arcs). Comme [αα0 ] est un élément de O[α],U , on en déduit que b = α0 (1) est dans l’image de p|O[α],U .
Si U est connexe par arcs, semi localement simplement connexe, et si b est un élément de U , on a
[
O[α],U
p−1 (U ) =
[α]:a→b
et les ouverts O[α],U de la réunion précédente sont deux à deux disjoints. En effet, supposons
que O[α],U ∩ O[β],U 6= ∅. Soit [γ] un élément de cette intersection. On peut écrire [γ] =
[αα0 ] = [ββ 0 ]. Mais α0 et β 0 sont homotopes dans B (car U est semi localement simplement
connexe). Donc αα0 et βα0 sont homotopes, donc α et β le sont aussi. Donc O[α],U = O[β],U .
a•
β
α
α0
• 0
b β
U
Cela nous permet de dire que p est continue. En effet, l’image réciproque de tout ouvert connexe par arcs et semi localement
simplement connexe est un ouvert. Mais l’ensemble des ouvert connexe par arcs et semi localement simplement connexe forme une
base de voisinages, donc l’image réciproque de tout ouvert par p est un ouvert. Donc p est continue. Montrons enfin que p|O[α],U
est ouverte. Si O[α],V est inclus dans O[α],U , alors
p|O[α],U (O[α],V ) = V
d’où le résultat.
Donc p|O[α],U est un homéomorphisme. Ainsi, on en déduit que p est un revêtement.
Il reste deux choses à montrer : E est connexe par arcs et E est simplement connexe.
Commençons par le premier point. Montrons qu’il existe un arc entre [ca ] et [α]. Posons αs (t) = α(ts) pour s ∈ [0, 1]. Posons
enfin ϕ : s → [αs ]. Si l’on montre que ϕ est continue, ce sera un arc de [ca ] à [γ]. Soit s0 ∈ [0, 1]. Soit O[αs ],U un ouvert de E
0
qui contient [αs0 ]. On veut montrer que pour s proche de s0 , ϕ(s) est dans O[αs ],U . Par continuité de α, il existe δ > 0 tel que
0
|s − s0 | 6 δ implique α(s) ∈ U . Mais αs = αs0 α|[s0 ,s] . Or α|[s0 ,s] est inclus dans U , donc ϕ(s) = [αs ] ∈ O[αs ],U . Donc E est
0
connexe par arcs.
Enfin montrons que E est simplement connexe. Par la caractérisation des revêtements simplement connexes démontrée dans
IV-1. et la définition de p, il vient que E est simplement connexe.
IV-5. Correspondance de Galois
Soit B connexe, localement connexe par arcs (donc connexe par arcs) et semi localement connexe. Fixons
un point base b de B. Nous allors établir une bijection entre les revêtements de (B, b) à isomorphisme près
et les sous-groupes de Π1 (B, b). De plus, nous allons voir que les revêtements galoisiens s’enverront sur les
sous-groupes distingués. C’est ce que l’on appelle la correspondance de Galois.
Soit p : (E, x) → (B, b) un revêtement. Remarquons que p∗ (Π1 (E, x)) est un sous groupe de Π1 (B, b). Si
l’on note G l’ensemble des sous-groupes de Π1 (B, b) et R l’ensemble des revêtements de (B, b) à isomorphisme
près, on peut donc définir une application
ϕ:
R
(E, x)
↓
p:
(B, b)
−→
G
7−→
p∗ (Π1 (E, x))
.
Dans toute la suite de cette partie, si p1 : (E1 , x1 ) → (B, b) et p2 : (E2 , x2 ) → (B, b) sont deux revêtements,
on note p1 ∼ p2 pour dire qu’il existe un automorphisme de revêtement H tel que H(x1 ) = x2 .
Théorème (correspondance de Galois) :
· L’application ϕ induit une bijection de R /∼ l’ensemble des revêtements de (B, b) à isomorphisme
près sur G l’ensemble des sous-groupes de Π1 (B, b).
· De plus, p : (E, x) → (B, b) est galoisien si et seulement si son image par ϕ est un sous-groupe
distingué de Π1 (B, b).
La deuxième partie du théorème a déjà été démontrée dans le théorème de la section IV−3).. La démonstration
du premier point va résulter de plusieurs lemmes, qui montreront respectivement l’injectivité et la surjectivité
de la correspondance.
Lemme (injectivité de la correspondance) : Soit p1 : (E1 , x1 ) → (B, b) et p2 : (E2 , x2 ) → (B, b) deux
revêtements. Sont équivalents :
25
· Il existe un isomorphisme de revêtement H tel que H(x1 ) = x2 .
· (p1 )∗ (Π1 (E1 , x1 ) = (p2 )∗ (Π1 (E2 , x2 )
Autrement dit, ϕ induit une injection de R /∼ sur G.
Preuve
: ⇒ : Soit H un isomorphisme, c’est-à-dire une application qui fasse commuter le diagramme suivant :
/ (E2 , x2 )
H
(E1 , x1 )
p1
$
z
p2
(B, b)
On a p2 ◦ H = p1 , donc (p2 )∗ ◦ H∗ = (p1 )∗ . Ainsi, on a l’inclusion (p1 )∗ (Π1 (E1 , x1 ) ⊂ (p2 )∗ (Π1 (E2 , x2 ). L’autre inclusion s’obtient
en considérant H −1 .
⇐ : Considérons le diagramme suivant :
(E2 , x2 )
(E1 , x1 )
p2
/ (B, b)
p1
Puisque (p1 )∗ (Π1 (E1 , x1 )) ⊂ (p2 )∗ (Π1 (E2 , x2 )), on peut relever p1 en une application H : (E1 , x1 ) → (E2 , x2 ). Puis on échange
les rôles de (E1 , x1 ) et (E2 , x2 ), on relève en H. Enfin, HH est un morphisme de revêtement qui fixe x2 , donc c’est l’identité. Idem
pour HH. Donc H est un isomorphisme de revêtements.
Lemme (surjectivité de la correspondance) : Si G est un sous-groupe de Π1 (B, b), alors il existe un
revêtement pG : (EG , xG ) → (B, b) tel que (pG )∗ (Π1 (EG , xG )) = G.
Preuve : Soit p : (E, x) → (B, b) un revêtement simplement connexe, dont le groupe des automorphismes est Π1 (B, b), qui agit sur
E librement et proprement discontinûment, c’est-à-dire que pour tout x ∈ E, il existe W un ouvert tel que les gW soient deux à deux
disjoints. G est un sous-groupe des automorphismes, qui agit librement et proprement discontinûment. Soit h : (E, x) → (E /G , xG )
la surjection canonique. Il existe alors pG tel que le diagramme suivant commute :
h
(E, x)
p
(B, b)
/ (E /G , xG )
pG
y
Mais on sait seulement que q est continue.
Lemme
: Soit h : (E, x) → D et p : (E, x) → B deux revêtements. Soit q continue faisant commuter le diagramme
(E, x)
/D
h
p
q
}
(B, b)
Alors q est un revêtement.
Preuve du lemme : Soient b ∈ B et V un ouvert de trivialisation locale connexe par arcs en b pour le revêtement p. Il existe une
famille d’ouverts (Ui ) deux à deux disjoints telle que
[
p−1 (V ) =
Ui
et telle que p|Ui : Ui → V soit un homéomorphisme. Puisque q est continue, q −1 (V ) est un ouvert de D, localement connexe par
arcs. Appelons Wj les composantes connexe par arcs de q −1 (V ), qui forment une partition. Les Wj sont des ouverts de D, car D
est localement connexe par arcs. On cherche à montrer que q|Wj est un homéomorphisme. Ainsi, q sera un homéomorphisme local
et donc un revêtement.
−1
Pour cela, montrons que pour tout Wj , il existe un i tel que q|Wj = p|Ui ◦ h|Ui
: Wj → V , et que h|Ui est un
homéomorphisme.
Montrons que h|Ui est un homéomorphisme. h est un revêtement, donc c’est un homéomorphisme local. En particulier, c’est
une application ouverte. De plus, p|Ui = h|Ui ◦ q. Or p|Ui est injective car c’est un homéomorphisme, donc h|Ui est injective. Une
application continue, ouverte et injective est un homéomorphisme sur son image. Donc h|Ui : Ui → h(Ui ) est un homéomorphisme.
Montrons que pour tout Wj , il existe un entier i tel que h(Ui ) = Wj . Soit y ∈ q −1 (V ). h−1 (y) est non vide et inclus dans
p−1 (V ), donc tout point de h−1 (y) est dans l’un des Ui . Ainsi, si y ∈ q −1 (V ) = ∪j Wj , réunion disjointe, alors y ∈ h(Ui ) pour un
certain Ui . Soit donc y ∈ Wj , et soit i tel que y ∈ h(Ui ). Soit y 0 ∈ Wj On aimerait montrer que y 0 ∈ h(Ui ). Puisque Wj est connexe
par arcs, considérons un chemin δ contenu dans Wj de y à y 0 . Fixons un élément xi ∈ E tel que p(xi ) = b. Grâce au relèvement
h, on relève δ en δ̃ d’origine xi . Mais β = p ◦ δ̃ est un chemin qui va de b à q(y 0 ). Montrons que ce chemin est inclus dans V : le
chemin δ est inclus dans Wj ⊂ q −1 (V ). Le chemin δ̃ est quant à lui inclus dans h−1 (Wj ). Donc h(δ̃([0, 1])) ⊂ Wj ⊂ q −1 (V ). Donc
q ◦h(δ̃([0, 1])) est inclus dans V . Or ceci n’est rien d’autre que le chemin β. Si l’on note σi l’inverse de p|Ui alors le relevé de β à partir
26
de xi est σi ◦ β, d’image dans Ui . Par unicité du relevé, on a δ̃ = σi ◦ β. Mais δ̃(1) = σi ◦ β(1) ∈ Ui . Donc h(δ̃(1)) = δ(1) = y 0 ∈ Ui .
Ainsi, h(Wj ) ⊂ Ui .
Enfin, terminons la preuve par l’égalité q|Wj = p|Ui ◦ (h|Ui )−1 : Wj → V qui est bien défini et est un homéomorphisme.
Finalement, q est un revêtement.
On sait désormais que pG est un revêtement. Pour finir, la preuve de (pG )∗ (Π1 (EG , xG )) = G est laissée en exercice.
27
V
Théorème de Van Kampen
Soit B un espace topologique connexe, localement connexe par arcs, et semi-localement simplement connexe
(donc qui admet un revêtement universel).
Supposons que B = U1 ∪ U2 avec U1 , U2 deux ouverts connexes par arcs dont l’intersection l’est aussi.
Choisissons un point base b ∈ U1 ∩ U2 . On peut tracer le diagramme commutatif suivant :
j1
U1 ∩ U2
j2
/ U1
i1
U2
i2
/B
où i1 , i2 , j1 et j2 sont les injections canoniques. Le diagramme précédent donne le diagramme suivant entre les
différents groupes fondamentaux :
Π1 (U1 ∩ U2 , b)
(j1 )∗
/ Π1 (U1 , b)
(j2 )∗
Π1 (U2 , b)
(i1 )∗
(i2 )∗
/ Π(B, b)
Comment relier les groupes fondamentaux de ces différents espaces ? Nous avons tout d’abord le résultat
suivant, forme faible du théorème de Van Kampen.
Lemme
: (i1 )∗ (Π1 (U1 )) ∪ (i2 )∗ (Π1 (U2 )) engendre Π1 (B).
Preuve : Soit β : [0, 1] → B un lacet de base b. β −1 (U1 ) et β −1 (U2 ) sont deux ouverts recouvrant [0, 1]. On peut écrire chacun de
ces deux ouverts comme une réunion dénombrable d’intervalles ouverts. Par compacité, il existe ε > 0 tel que pour tout t ∈ [0, 1],
l’intervalle ]t − ε, t + ε[ est entièrement inclus dans l’un de ces intervalles ouverts. Soit k un entier tel que 1/k < ε. Notons βi le
chemin β|[ i−1 , i ] reparamétré sur [0, 1]. Pour tout i, βi ([0, 1]) ⊂ U1 ou U2 . Puisque β = β1 . . . βk , en regroupant βi et βi+1 s’ils
k
k
sont contenus dans le même Ui , on peut écrire
β = γ1 . . . γl ,
où γi est un chemin inclus dans l’un des Ui , et γi , γi+1 ne sont pas dans le même Ui . Pour tout i, l’extrémité de γi est égale à
l’origine de γi+1 ; et est dans U1 ∩ U2 , qui est connexe par arcs. Soit donc ci un chemin d’origine ce point, et d’extrémité b. β est
alors homotope à
γ1 c1 c1 γ2 c2 . . . cl−1 γl ,
qui est bien un produit d’éléments de Π1 (U1 , b) ou de Π1 (U2 , b).
V-1. Quelques compléments d’algèbre
Définissons le produit libre de deux groupes, et la somme amalgamée de deux groupes au dessus d’un
troisième, par leur propriété universelle.
Définition (produit libre) : Soit G1 et G2 deux groupes. Il existe un unique groupe H (à isomorphisme
près), dans lequel G1 et G2 s’injectent, et tel que pour tout groupe G et pour tout morphisme de groupes
fj : Gj → G (j = 1, 2), il existe un unique morphisme de groupe f : H → G tel que fj = f ◦ ij (où i1 (resp.
i2 ) est l’injection de G1 (resp. G2 ) dans H).
G1
i1
G2
i2
/H
f1
f
f2
H est alors le produit libre de G1 par G2 et est noté G1 ? G2 .
28
,G
En pratique, G1 ? G2 est l’ensemble des mots constitués de lettres alternativement dans G1 et G2 , sans
accepter les neutres. On rajoute le mot vide. La loi de groupe est la concaténation suivi de la réduction.
Définition (Somme amalgamée) : Soient G1 , G2 et K trois groupes, et j1 : K → G1 , j2 : K → G2 deux
morphismes de groupes. Il existe un unique groupe H (à isomorphisme près) tel que
· G1 s’injecte dans H, G2 s’injecte dans H (notons respectivement i1 et i2 les injections).
· i2 ◦ j2 = i1 ◦ j1 .
· Pour tout groupe G et pour tout morphisme f1 : G1 → G et f2 : G2 → G, tels que f2 ◦ j2 = f1 ◦ j1 , il
existe un unique morphisme f : H → G tel que f ◦ i1 = f1 et f ◦ i2 = f2 .
K
j2
G2
/ G1
j1
i1
/H
i2
f1
f
,G
f2
H est alors la somme amalgamée de G1 et G2 au dessus de K, et est noté G1 ?K G2 .
V-2. Théorème de Van Kampen
Théorème de Van Kampen : Soit B est un espace topologique connexe, localement connexe par arcs,
et semi-localement simplement connexe. Si B = U1 ∪ U2 avec U1 , U2 deux ouverts connexes par arcs dont
l’intersection l’est aussi, et si b ∈ U1 ∩ U2 , alors
Π1 (B, b) = Π1 (U1 , b) ?Π1 (U1 ∩U2 ,b) Π1 (U2 , b)
Autrement dit, Π1 (B, b) est solution du problème universel
Π1 (U1 ∩ U2 , b)
(j1 )∗
/ Π1 (U1 , b)
(j2 )∗
Π1 (U2 , b)
(i1 )∗
/ Π1 (B, b)
(i2 )∗
f1
f
f2
$- G
Nous ne démontrerons pas le théorème de Van Kampen, mais donnerons seulement quelques exemples.
Exemples :
· Si U1 ∩ U2 est simplement connexe, alors Π1 (B, b) = Π1 (U1 , b) ? Π1 (U2 , b). On retrouve par exemple que
le groupe fondamental du bouquet de p cercles est le produit libre de p copie de Z. C’est le groupe libre
à p éléments.
· Si U1 et U2 sont simplement connexes, B l’est aussi. On en déduit la simple connexité des sphères Sn pour
n > 2.
· Si U1 est simplement connexe, on peut montrer que Π1 (B, b) est le quotient du groupe fondamental
Π1 (U2 , b) par le sous-groupe distingué engendré par l’image de Π1 (U1 ∩ U2 , b) dans Π1 (U2 , b). Cela permet
de retrouver le groupe fondamental du tore T, qui est F(a, b) /< aba−1 b−1 > .
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Bibliographie
[Aud]
Michèle Audin. Topologie : revêtements et groupe fondamental, http ://www-irma.u-strasbg.fr/ maudin/courstopalg.pdf.
[dMdÉ] Journal de Maths des Élèves. http ://mathematiques.ens-lyon.fr/, section ”vie du département” puis
”journal de maths des élèves”.
[DR]
Douady A. Douady R. Algèbre et théories galoisiennes.
[SR]
Jean Saint-Raymond. Topologie, calcul différentiel et variable complexe. Calvage et mounet edition.
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