Calcul du groupe fondamental de certains groupes topologiques

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Calcul du groupe fondamental de certains groupes
topologiques classiques
Table des matières
1 Le groupe fondamental
1.1 Construction . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1.2 Premières propriétés du groupe fondamental . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
2
2
2
2 Espaces fibrés et revêtements
3
3 Les
3.1
3.2
3.3
3.4
3.5
4
4
4
5
6
6
groupes linéaires
Construction des fibrations . . . . . . . . . . . . .
Calculs directs de certains Π1 . . . . . . . . . . .
Groupes fondamentaux des groupes unitaires . . .
Groupes fondamentaux des groupes orthogonaux .
Décomposition polaire et groupes linéaires . . . .
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4 Annexe 1 : Revêtements
8
5 Annexe 2 : Algèbre de Clifford et groupe
5.1 Construction . . . . . . . . . . . . . . .
5.2 Le groupe des spineurs . . . . . . . . . .
5.3 Le corps des quaternions . . . . . . . . .
5.4 Non simple connexité de SOn (R) . . . .
1
des spineurs
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Les groupes fondamentaux sont des invariants importants en topologie algébrique, nous allons
dans cette étude en donner la définition, puis nous verrons quelques exemples de calcul de ces
groupes pour certains sous groupes du groupe linéaire GLn (K) où K = R ou C. Pour cela nous
ramènerons par des décompositions successives ce calcul à ceux de SOn (R) et SUn (C).
1
1.1
Le groupe fondamental
Construction
Définition 1 Soit X un espace topologique et x0 un point de X, on appelle lacet de X d’origine
x0 toute application continue γ de [0,1] dans X vérifiant γ(0) = γ(1) = x 0
Deux lacets γ1 et γ2 d’origine x0 sont dits homotopes si et seulement si il existe une application
continue Γ de [0,1] × [0,1] dans X telle que
∀t ∈ [0,1],Γ(t,0) = γ1 (t), Γ(t,1) = γ2 (t), ∀x ∈ [0,1],Γ(0,x) = Γ(1,x) = x0
De fa¸con intuitive, on voit que dire que deux chemins sont homotopes si et seulement si
on peut passer de l’un à l’autre par déformation continue, l’origine étant fixée. Il est facile de
vérifier que la relation d’homotopie est une relation d’équivalence sur l’ensemble des lacets de X
d’origine x0 . Nous allons maintenant définir le produit de deux lacets de même origine.
Définition 2 Soient γ1 et γ2 deux lacets de X d’origine x0 , on définit alors l’application α de
γ1 (2x)
si x ∈ [0,1/2]
[0,1] dans X par : α(x) =
. Il est clair que α est un lacet de X
γ2 (2x − 1) si x ∈]1/2,1]
d’origine x0 , on l’appelle produit de γ1 et γ2 et on le note γ2 .γ1 .
Dans la suite on notera ∼ la relation d’homotopie, x0 le lacet constant égal à x0 et γ −1 le
lacet défini par γ −1 (t) = γ(1 − t) si t ∈ [0,1]. On a alors le résultat suivant :
Proposition 1 Soient γ1 , γ2 , γ3 et γ4 quatre lacets de X d’origine x0 , alors :
– si γ1 ∼ γ3 et γ2 ∼ γ4 , alors γ2 .γ1 ∼ γ4 .γ3
– (γ3 .γ2 ).γ1 ∼ γ3 .(γ2 .γ1 )
– γ1 .x0 ∼ x0 .γ1 ∼ γ1
– γ.γ −1 ∼ γ −1 .γ ∼ x0
Soit donc C l’ensemble des lacets de X d’origine x0 , ce qui précède prouve que l’on peut
munir l’ensemble C/ ∼ d’une structure de groupe au moyen de la loi de composition interne :
(C/ ∼)2 −→ C/ ∼
(γ,α) 7−→ γ.α
Définition 3 On appelle ce groupe, groupe fondamental de X en x0 et on le note Π1 (X,x0 ).
Il est clair que Π1 (X,x0 ) est identique au groupe fondamental de la composante connexe par
arcs de x0 dans X en x0 et que si x et y sont dans la même composante connexe par arcs de
X, Π1 (X,x) et Π1 (X,y) sont isomorphes. C’est pourquoi, lorsque X est connexe par arcs, on ne
précise pas toujours l’origine et on parle alors du groupe fondamental de X : Π1 (X).
1.2
Premières propriétés du groupe fondamental
Soient X et Y des espaces topologiques et x0 ∈ X, f une application continue de X dans Y .
Il est clair que la relation d’homotopie est compatible avec l’application f , c’est à dire que si γ 1
et γ2 sont deux lacets de X d’origine x0 , f ◦ γ1 et f ◦ γ2 sont deux lacets de Y d’origine f (x0 )
2
et que γ1 ∼ γ2 ⇒ f ◦ γ1 ∼ f ◦ γ2 . On peut ainsi construire une application Π(f ) de Π(X,x0 )
dans Π(Y,f (x0 )) définie par Π(f )(γ) = f ◦ γ et on vérifie facilement que cette application est un
morphisme de groupes.
Enfin si Z est un espace topologique et g une application continue de Y dans Z, il est facile de
vérifier que Π(g ◦ f ) = Π(g) ◦ Π(f ).
Ces quelques propriétés nous montrent que l’on peut parfois transformer un problème topologique en un problème algébrique portant sur des groupes fondamentaux. Par exemple on a le
résultat d’invariance toplogique du groupe fondamental :
Théorème 1 Soient X et Y deux espaces toplogiques homéomorphes et f un homéomorphisme
de X dans Y , alors si x0 ∈ X, les groupes Π1 (X,x0 ) et Π1 (Y,f (x0 )) sont isomorphes.
Concluons enfin cette première partie en illustrant ces définitions par une détermination
particulièment simple de groupe fondamental :
Proposition 2 Le groupe fondamental d’une partie étoilée d’un espace vectoriel normé est
réduit à un singleton.
Dans un tel cas, quand le groupe fondamental est trivial, on dit que l’espace est simplement
connexe.
2
Espaces fibrés et revêtements
La théorie des espaces fibrés et des revêtements joue un rôle important dans le calcul des
groupes fondamentaux, c’est pourquoi nous allons en donner ici un bref aperçu nous permettant
de déterminer certains de ces groupes.
Dans la suite, si A et B sont deux ensembles on note
p1 :
A × B −→ A
(a,b) 7−→ a
p2 :
A × B −→ B
(a,b) 7−→ b
Définition 4 Soit B un espace topologique et (E,p) un couple formé d’un espace toplogique E
et d’une application continue p de E dans B. On dit que (E,p) est une fibration de base B si et
seulement si pour tout b ∈ B il existe un voisinage ouvert U de b dans B, un espace topologique
F et un homéomorphisme Φ de p−1 (U ) dans U × F tels que p |p−1 (U ) = p1 ◦ Φ. F ne dépend pas
de l’ouvert U (à homéomorphisme près) et s’appelle la fibre au dessus de b, dans la suite on la
notera Fb . On dit que l’ouvert U trivialise (E,p), une fibration est triviale si elle est trivialisée
par B.
Ainsi si b ∈ B, Fb est homéomorphe à p−1 (b) et il existe un voisinage ouvert de b dans B
tel que les fibres au dessus de tous les éléments de U soient homéomorphes entre elles, ainsi les
classes d’équivalence pour la relation d’équivalence définie sur B par “Fx est homéomorphe à
Fy ” sont ouvertes. Et donc, si B est connexe, il n’y a qu’une seule classe d’équivalence, c’est à
dire que toutes les fibres sont homéomorphes. On parle dans ce cas de la fibre F de la fibration.
En particulier on en déduit que p est surjective.
Si la fibre est discrète, on ne parle plus d’espace fibré mais de revêtement, sinon le même
vocabulaire reste employé. Dans l’annexe 1 sur les relèvements nous démontrons le résultat
suivant :
Théorème 2 Si (E,p) est un revêtement connexe par arcs de B, si b ∈ B et x ∈ F b , alors
Π1 (B,b) agit transitivement sur Fb et le stabilisateur de x est isomorphe à Π1 (E,x). Fb est donc
en bijection avec Π1 (B,b)/Π1 (E,x).
3
Le théorème qui suit nous permet de faire le lien entre fibration et groupe fondamental. Soit
B un espace topologique et (E,p) une fibration de base B, x0 un point de B, et F la fibre au
dessus de x0 . F étant homéomorphe à p−1 (x0 ), on peut les identifier et donc parler de l’injection
canonique i de F dans E qui est donc continue. Cette application induit un morphisme Π(i)
de Π1 (F,y0 ) dans Π1 (E,y0 ) où y0 est un point de F . De même p induit un morphisme Π(p) de
Π1 (E,y0 ) dans Π1 (B,x0 ).
Théorème 3 La suite (Π(i),Π(p)) est exacte, c’est à dire que ImΠ(i) = KerΠ(p).
3
3.1
Les groupes linéaires
Construction des fibrations
Nous allons faire opérer les groupes SOn (R) et SUn (C) sur les sphères pour construire une
fibration qui nous permettra de raisonner par récurrence au moyen du théorème de suite exacte.
Dans la suite on notera S n−1 la sphère unité de l’espace Rn , la sphère unité de l’espace Cn est
alors homéomorphe à S 2n−1 . On note e1 le vecteur de coordonnées (1,0,...,0).
Tout d’abord remarquons que les groupes SOn (R) et SUn (C) agissent sur S n−1 et S 2n−1 par les
actions :
SOn (R) × S n−1 −→ S n−1 SUn (C) × S 2n−1 −→ S 2n−1
(f,x)
7−→ f (x)
(f,x)
7−→ f (x)
En fait nous allons montrer que les applications de SOn (R) dans S n−1 et de SUn (C) dans S 2n−1
p : f 7−→ f (e1 ) sont des fibrations de fibres respectives SOn−1 (R) et SUn−1 (C).
Lemme 1 Soit y ∈ S n−1 , il existe un voisinage V de y dans S n−1 et une application continue s
de V dans SOn (R) telle que p ◦ s = Id.
Preuve : Il s’agit en fait d’associer à un élément x de V une base orthormée directe de R n dont
le premier vecteur soit x. Soit (y,y2 ,...,yn ) une base orthonormée de Rn , l’application det étant
continue il existe un voisinage V de y tel que si x ∈ V , la base (x,y2 ,...,yn ) soit directe. On peut
ensuite transformer cette base en une base orthonormée directe s(x) au moyen de l’algorithme
d’orthogonalisation de Schmidt. Or les formules intervenant dans ce procédé sont visiblement
continues, et donc l’application s est continue et vérifie trivialement p ◦ s = Id.
On en déduit le théorème qui va nous permettre de dégager une relation de récurrence entre
les groupes fondamentaux de ces espaces.
Théorème 4 Les applications p : SOn (R) −→ S n−1 et SUn (C) −→ S 2n−1 sont des fibrations de
fibres respectives SOn−1 (R) et SUn−1 (C), c’est à dire les sous groupes de SOn (R) et de SUn (C)
laissant e1 invariant.
Preuve : On l’écrit pour SOn (R), la démonstration est la même pour le groupe unitaire. Soit V
un voisinage de y comme dans le lemme et φ l’application de V × SO(n − 1) dans p−1 (V ) définie
par φ(x,g) = s(x) ◦ g. Posons, si f ∈ p−1 (V ), ψ(f ) = (p(f ),((s ◦ p)(f ))−1 ◦ f ). Il est clair que
ψ ◦ φ = IdV ×SO(n−1) et φ ◦ ψ = Idp−1 . De plus, la continuité de p, s et la structure de groupe
topologique de SOn (R) nous assurent que φ et ψ sont continues, ψ est donc un homéomorphisme
de p−1 (V ) sur V × SO(n − 1) commutant avec p, ce qu’il fallait démontrer.
3.2
Calculs directs de certains Π1
Il paraı̂t clair que nous allons avoir besoin de connaı̂tre les groupes fondamentaux des sphères
avant de continuer. Nous admettrons pour cela le résultat suivant :
Proposition 3 Soient X1 et X2 deux espaces connexes par arcs, p1 et p2 les projections respec4
tives dans X1 ∪ X2 . Si X1 ∩ X2 est non vide et connexe par arcs alors le groupe fondamental de
X1 ∪ X2 est engendré par les groupes Π(p1 )(Π1 (X1 )) et Π(p2 )(Π1 (X2 )).
Ceci nous permet de connaı̂tre à isomorphisme près les groupes fondamentaux des sphères
de dimension supérieure ou égale à 2. Prenons en effet pour X1 la sphère S n privée d’un point,
et pour X2 la même sphère privée d’un autre point. Par projection stéréographique, on sait que
ces deux espaces sont homéomorphes à Rn , donc simplement connexes. De plus leur intersection
est alors homéomorphe à Rn privée d’un point qui est connexe par arcs (car on pris 2 ≤ n).
Ainsi Π1 (S n ) est engendré par le neutre, c’est donc un singleton et S n est simplement connexe.
Cependant ceci ne nous donne pas le groupe fondamental du cercle S 1 .
Théorème 5 Le groupe fondamental du cercle S 1 est isomorphe à Z.
Preuve : On note e l’application de R dans S 1 définie par e(x) = e2iπx . Soit U = (]1− 12 ,1+ 12 [×]−
1,1[) ∩ S 1 un voisinage de 1 (on plonge S 1 dans le plan complexe). Il est clair que U = e(] − 16 , 16 [).
La restriction s de e à ] − 61 , 16 [ est alors un homéomorphisme de cet intervalle sur U . Comme
P
Z×] − 61 , 61 [ −→ e−1 (U )
e−1 (U ) = n∈Z ]n − 16 ,n + 61 [, l’application
est un homéomorphisme,
(n,x)
7−→ n + x
ce qui prouve que l’on a un revêtement du cercle de fibre Z.
Soient γ1 et γ2 deux éléments de Π1 (S 1 ,1) représentés par γ1 et γ2 . Soit Γ1 un relèvement de γ1
tel que Γ1 (0) = 0 et Γ2 un relèvement de γ2 tel que Γ2 (0) = Γ1 (1) = γ1 .0. Alors Γ2 .Γ1 est un
[0,1] −→
R
relèvement de γ2 .γ1 s’annulant en 0, donc Γ2 (1) = γ2 .γ1 .0. Or l’application
t
7−→ Γ2 (t) − γ1 .0
est un relèvement de γ2 s’annulant en 0, donc γ2 .0 = Γ2 (1) − Γ1 (1), d’où (γ2 .γ1 ).0 = γ1 .0 + γ2 .0.
Π1 (S 1 ,1) −→ Z
L’application d :
est un morphisme de groupes. Il est injectif car si
γ
7−→ γ.0
d(γ) = 0, alors Γ est un lacet de R. Or R est simplement connexe, donc Γ est homotope au lacet
constant, et donc γ aussi. d est donc injectif. De plus, il est clair, si n ∈ Z, que d(t 7−→ e2iπnt ) = n,
donc d est surjective et c’est un isomorphisme.
Pour amorcer la récurrence qui suivra nous aurons besoin du groupe fondamental de SO3 (R)
que nous obtiendrons en amettant l’existence d’un revêtement simplement connexe connu de
SO3 (R).
Théorème 6 La sphère S 3 est un revêtement à deux feuillets du groupe SO3 (R).
La sphère S 3 étant simplement connexe, on en conclut que le groupe fondamental de SO3 (R)
est de cardinal 2, c’est donc Z/2Z.
On peut montrer de la même façon que pour n ≥ 2, il existe un groupe topologique Spinn
constituant un revêtement à deux feuillets de SOn (R), on s’en servira par la suite.
3.3
Groupes fondamentaux des groupes unitaires
SU1 (C) étant réduit à l’identité, il est simplement connexe. Supposons avoir démontré pour
n (n ≥ 1) que SUn (C) est simplement connexe. Etant donné que SUn+1 (C) est un revêtement
de S 2n+1 de fibre SU (n), on a une suite exacte : Π1 (SUn (C)) −→ Π1 (SUn+1 (C)) −→ Π1 (S 2n+1 ),
c’est à dire, vu ce que l’on conaı̂t : {0} −→ SUn+1 (C) −→ {0}. SUn+1 (C) est donc forcément un
singleton, et SUn+1 (C) est simplement connexe.
5
On a donc montré que si n ∈ N∗ , SUn (C) est simplement connexe. Comme Un (C) est
homéomorphe à SUn (C) × S 1 , on a le théorème suivant :
Théorème 7 Si n ∈ N∗ , alors SUn+1 (C) est simplement connexe, et Π1 (Un (C)) est isomorphe
à Z.
3.4
Groupes fondamentaux des groupes orthogonaux
On sait que SO2 (R) est homéomorphe à S 1 donc son groupe fondamental est isomorphe à
Z. On a vu aussi que Π1 (SO3 (R)) est isomorphe à Z/2Z. Supposons avoir démontré que pour n
(n ≥ 3), le groupe fondamental de SOn (R) est isomorphe à Z/2Z. On a vu que SOn+1 (R) est une
fibration au dessus de S n de fibre SOn (R), on a donc la suite exacte suivante : Π1 (SOn (R)) −→
Π1 (SOn+1 (R)) −→ Π1 (S n ), c’est à dire Z/2Z −→ Π1 (SOn+1 (R)) −→ {0}. Ainsi Π1 (SOn+1 (R))
est soit isomorphe à Z/2Z, soit à {0}. Or on sait qu’il existe un groupe topologique connexe
Spinn+1 (R), formant un revêtement à deux feuillets de SOn+1 (R), qui n’est donc pas simplement
connexe. Π1 (SOn+1 (R)) est donc isomorphe à Z/2Z. Par récurrence, si n ≥ 3, Π1 (SOn (R)) ∼
=
Z/2Z.
Comme On (R) a deux composantes connexes homéomorphes à SOn (R), pour n ∈ N∗ , on a le
théorème suivant :
Théorème 8 Si n ∈ N∗ , Π1 (SOn (R),Id) et Π1 (On (R),Id) sont isomorphes. Plus précisément,
ils sont isomorphes à {0} si n = 1, Z si n = 2 et Z/2Z pour n ≥ 3.
3.5
Décomposition polaire et groupes linéaires
Nous admettons le résultat classique suivant :
Lemme 2 Soit n ∈ N∗ , alors
– GLn (R) est homéomrphe à On (R) × SDPn (R) où SDPn (R) est l’ensemble des matrices
symétriques définies positives.
– GLn (C) est homéomorphe à Un (C) × HDPn (C) où HDPn (C) est l’ensemble des matrices
hermitiennes définies positives.
HDPn (R) et SDPn (C) étant convexes, ils sont simplement connexes, et on peut donc en déduire
le théorème :
Théorème 9 Si n ∈ N∗ , alors
– le groupe fondamental de GLn (C) est isomorphe à Z.
– GLn (R) a deux composantes connexes homéomorphes dont le groupe fondamental est isomorphe à {0} pour n = 1, Z pour n = 2 et Z/2Z pour n ≥ 3.
CONCLUSION
Les invariants topologiques que sont les groupes fondamentaux permettent de voir, au delà
de la connexité, les différences profondes entre espaces topologiques. Ils permettent par exemple
de différencier topologiquement une droite d’un cercle, un plan épointé d’un plan... La méthode
que l’on a employée pour déterminer les groupes fondamentaux de SOn (R), SUn (C) est de
décomposer localement ces espaces en produit d’espaces dont on connaı̂t les groupes fondamentaux, ici les sphères et les groupes “d’ordre” inférieur. Ensuite la décomposition polaire, qui est
cette fois-ci globale, nous donne les groupes fondamentaux de GLn (R), GLn (C).
6
Références
[1]
[2]
[3]
[4]
[5]
[6]
C. Godbillon : Eléments de topologie algébrique
R. Mneimné F. Testard : Introduction à la théorie des groupes de Lie classiques
A. Gramain : Topologie des surfaces
C. Chevalley : The algebraic theory of spinors and Clifford algebras
S. Lang : Algebra
R. et A. Douady : Algèbre et théories galoisiennes
7
4
Annexe 1 : Revêtements
Le théorème fondamental, également valable dans le cadre des fibrations, est celui-ci :
Théorème 10 Soient B un espace topologique et (E,p) une fibration de base B, alors toute
application continue de [0,1] dans B est relevable avec condition initiale en 0 et toute application
continue de [0,1] × [0,1] dans B est relevable avec condition initiale continue sur trois côtés du
carré.
La preuve de ce théorème nécessite les deux lemmes qui vont suivre.
Lemme 3 Soit X un espace métrique compact et (Oi )i∈I un recouvrement de X par des ouverts,
il existe > 0 tel que pour toute partie F de X de diamètre inférieur à , il existe i ∈ I tel que
F ⊂ Oi .
Définition 5 Soit X un espace topologique, une partie A de X est un rétracte de X si et
seulement si il existe une application continue r de X dans A telle que r ◦ i = Id A où i est
l’injection canonique de A dans X.
Lemme 4 Soient X et B deux espaces topologiques avec B connexe, f une application continue
de X dans B, (E,p) une fibration triviale de base B et R un relèvement de f | A où A est un
rétracte de X, il existe alors un relèvement R̃ de f tel que R̃ |A = R.
Preuve : Soit F la fibre de cette fibration, on identifie E à B × F . Posons si x ∈ A, R(x) =
(f (x),g(x)), g est alors une application continue de X dans F . On définit alors si x ∈ X,
R̃(x) = (f (x),g ◦ r(x)) il est clair que R̃ est continue et vérifie bien les conditions attendues.
Preuve du théorème : Si b ∈ B il existe un voisinage ouvert Ub trivialisant la fibration, ainsi
f étant continue, (f −1 (Ub ))b∈B est un recouvrement ouvert de [0,1], [0,1] étant métrique com]) pour tout 0 ≤ k ≤ n − 1.
pact il existe un entier n tel que la fibration soit triviale sur f ([ nk , k+1
n
Le lemme nous permet de construire un relèvement de f sur [0,1/n] prenant n’importe qu’elle
valeur dans p−1 (f (0)) en 0 et de le prolonger par récurrence sur [0,1], étant donné que tout point
d’un espace topologique est rétracte de celui-ci.
Si f est une application de [0,1] × [0,1] dans B, on choisit de la même façon un entier n tel que
] × [ nl , l+1
])
pour tous 0 ≤ k ≤ n − 1 et 0 ≤ l ≤ n − 1, la fibration soit triviale sur f ([ nk , k+1
n
n
et en parcourant [0,1] × [0,1] de la façon suivante, on contruit par récurrence un relèvement de
f prenant des valeurs fixées à l’avance sur trois côtés du carré. Il est à noter que les prolongements sont effectivement possibles, puisqu’en parcourant le carré de cette manière, à chaque
prolongement seules des valeurs sur trois côtés sont imposées et trois côtés d’un carré constituent
évidemment un rétracte de ce dernier.
Il est impossible, par cette méthode, de relever une application avec conditions initiales sur
les quatre côtés du carré car les quatre côtés ne sont pas un rétracte (en effet on comprend
intuitivement qu’on ne peut ramener l’intérieur d’un carré sur son bord sans déchirer l’espace).
Dans le cas des revêtements, ce théorème nous permet de mettre en évidence un action du
groupe fondamental sur la fibre.
Soit (E,p) un revêtement de base B, b0 ∈ B, F la fibre au dessus de b0 . Soit e0 un élément
de F et γ un lacet de B, il existe alors un relèvement Γ de γ dans E tel que Γ(0) = e0 , Γ(1) est
alors un élément de F . Si γ 0 est un lacet de B de base b0 homotope à γ, soit h une homotopie de
γ à γ 0 et H un relèvement de h induisant Γ sur [0,1] × {0}, Γ0 sur [0,1] × {1} et constant égal à
8
e0 sur {0} × [0,1]. La restriction de H à {1} × [0,1] est alors un chemin dans F de Γ(1) à Γ 0 (1),
or [0,1] étant connexe et F discret, il s’agit d’un chemin constant et donc Γ(1) = Γ0 (1). Donc à
un élément e0 de F et un élément γ de Π1 (B,b0 ) on peut associer un élément de F que l’on note
γ̄.e0 . Vérifions que l’on a ainsi défini une action de Π1 (B,b0 ) sur F :
– si e0 ∈ F et γ1 et γ2 sont deux lacets de B d’origine b0 , soit Γ1 un relèvement de γ1
d’origine e0 et Γ2 un relèvement de γ2 d’origine γ¯1 .e0 , alors Γ2 ◦ Γ1 est un relèvement de
γ2 ◦ γ1 d’origine e0 . Ceci prouve γ¯2 .(γ¯1 .e0 ) = (γ¯2 ◦ γ¯1 ).e0 .
– le lacet constant égal à e0 est clairement un relèvement du lacet constant égal à b0 , donc
x¯0 .e0 = e0 .
On dispose donc bien d’une action de groupes.
Proposition 4 Dans cette action, si e0 ∈ F , le stablisateur de e0 est Π(p)(Π1 (E,e0 ), et si E est
connexe par arcs, cette action est transitive.
Preuve : En effet γ̄.e0 = e0 ⇔ Γ est un lacet de E d’origine e0 , et comme γ = p(Γ), on en
conclut que γ̄.e0 = e0 si et seulement si γ̄ ∈ Im(Π(p)). Supposons maintenant E connexe par
arcs, alors si e0 et e1 sont deux éléments de F , il existe un chemin Γ allant de e0 à e1 , p ◦ Γ est
alors un lacet de B d’origine b0 et e1 = p ◦ Γ.e0 , donc l’action est transitive.
Remarque : Ainsi si E est connexe par arcs, F est isomorphe à Π1 (B,b0 )/Π1 (E,e0 ). Si F est
finie de cardinal n, on dit qu’on a un revêtement à n feuillets.
5
5.1
Annexe 2 : Algèbre de Clifford et groupe des spineurs
Construction
Soit E un espace euclidien orienté de dimension n. On admet qu’il existe une R-algèbre C
de dimension 2n munie d’une base (ei )i∈P([1,n]) , où e∅ = 1 et (ei )1≤i≤n est une base orthonormale
directe de E.
On a de plus pour tout (x,y) ∈ E × E, 12 (xy + yx) =< x,y >. On en déduit les règles de calcul
suivantes :
– si 0 ≤ α1 ≤ ... ≤ αr ≤ n, e{α1 ,...αr } = eα1 ...eαr
– si x ∈ E, x2 = ||x||2
– si x et y sont orthogonaux, xy = −yx
5.2
Le groupe des spineurs
Soit a ∈ E, si f désigne la réflexion par rapport à {a}⊥ , alors si x ∈ E, f (x) = x − 2<a,x>
a,
||a||2
axa
ax+xa
−1
donc f (x) = x − ||a||2 a = x − ( ||a||2 + x) = −axa . Tout élément de SOn (R) étant un produit
pair de telles réflexions, si f est un élément de SOn (R), on peut toujours trouver un élément q
de C, produit d’un nombre pair de vecteurs unitaires de E tel que ∀x ∈ E, f (x) = qxq −1 .
Définition 6 On appelle groupe des spineurs d’ordre n et on note Spin n , l’ensemble des produits
pairs de vecteurs unitaires de E, il est facile de voir que cet ensemble est muni d’une structure
de groupe.
Il est clair que la multiplication étant continue dans C (car bilinéaire et C est de dimension
a
finie), et vu que si a ∈ E, a−1 = ||a||
2 , Spinn est un groupe topologique.
Si q ∈ Spinn , l’application x 7−→ qxq −1 laisse E invariant, et si x ∈ E, ||qxq −1 ||2 =
(qxq −1 )(qxq −1 ) = qx2 q −1 = ||x||2 . Elle induit donc une isométrie φq sur E. De plus φ :
9
Spinn −→ On (R)
est un morphisme continu de groupes. Comme une isométrie de Rn est un
x
7−→
φx
produit d’au plus n réflexions, Spinn est compact.
5.3
Le corps des quaternions
Définition 7 Soit C l’algèbre de Clifford de R3 muni de sa structure euclidienne canonique,
posons H = vect(1,e1 e2 ,e2 e3 ,e1 e3 ). Les éléments de H sont appelés les quaternions.
Posons i = e1 e2 , j = e2 e3 et k = e1 e3 .
Dans ce cas de petite dimension, la situation est particulièrement simple, puisque les quater3
nions sont exactement les produits de deux éléments de
 R . En effet (x1 e1 + y1 e2 + z1 e3 )(x2 e1 +
x1 x2 + y 1 y 2 + z 1 z 2 = a



x1 y 2 − x 2 y 1 = b
y2 e2 + z2 e3 ) = (a + bi + cj + dk) est équivalent à
, c’est à dire à
y1 z2 − y 2 z1 = c



x z − x 2 z1 = d
1 2
 

 


 
b
z2
z1
z2
z1
 x1  .  x2  = a et  x1  ∧  x2  =  c . Or on peut toujours trouver de tels
−d
y
y1
y2
y1

2
b

c  6= 0, c’est à dire si a + bi + cj + dk 6= 0. Ainsi tout
x1 , x2 , y1 , y2 , z1 , z2 si a 6= 0 ou
−d
quaternion non nul est le produit de deux vecteurs non nuls de R3 . Or si a est un vecteurs non nul
de R3 est inversible dans C, puisque a2 = ||a||2 6= 0, donc tout quaternion non nul est inversible.
On a donc montré que H est un corps non commutatif.
On en déduit également que Spin3 est alors exactement le groupe des unités de H et homéomorphe
à S 3 vu que H est de dimension 4. On en conclut donc que Spin3 est simplement connexe et
donc que Π1 (SO3 (R) est de cardinal 2. D’où Π1 (SO3 (R)) ∼
= Z/2Z.
5.4
Non simple connexité de SOn (R)
Nous aurons besoin par la suite de la connaissance du centre de C.
Lemme 5 Le centre de C est l’espace R + Re[1,n] si n est impair, R si n est pair.
P
Preuve : Soit x un élément du centre de C, posons x = i∈P([a1,n]) λi ei . Si j ∈ P([1,n]), les familles
(ej ei )i∈P([1,n]) et (ei ej )i∈P([1,n]) sont des bases de C dont les éléments diffèrent uniquement par
leur signe. Soit alors 1 ≤ r ≤ n et {α1 ,...,αr } ∈ P([1,n]). Si r est pair, alors eαr eα1 ...eαr =
(−1)r−1 eα1 ...e2αr = −eα1 ...eαr eαr , d’où λ{α1 ,...,αr } = −λ{α1 ,...,αr } , donc λ{α1 ,...,αr } = 0. Si r est
impair et r 6= n, soit 1 ≤ j ≤ n tel que j ∈
/ {α1 ,...,αr }, alors ej eα1 ...eαr = −eα1 ...eαr ej , donc
ej x = xej nous donne λ{α1 ,...,αr } = 0. Ainsi, si n est pair, x ∈ R. Sinon x ∈ R + Re[1,n] . Et il est
facile de voir que dans ce cas e[1,n] commute avec tous les ei , donc avec C.
Proposition 5 Si n ≥ 2, le groupe Spinn est connexe par arcs.
Preuve : En effet le groupe SOn (R) étant inclus dans l’image de φ, il est clair que φ induit une
action naturelle de Spinn sur la sphère S n−1 où le stabilisateur d’un élément est isomorphe à
Spinn−1 . Spinn étant compact, on en conclut que Spinn /Spinn−1 est homéomorphe à S n−1 . Par
récurrence on en déduit, Spin3 étant connexe par arcs, que Spinn l’est également.
Théorème 11 Le morphisme φ arrive dans SOn (R), est surjectif de noyau {−1,1} et (Spinn ,φ)
est un revêtement à deux feuillets de SOn (R).
10
Preuve : Par connexité de Spinn et continuité de φ, on voit d’abord que l’image de φ est incluse
dans la composante connexe de Id, c’est à dire dans SOn (R). La surjectivité de φ est alors
démontrée par ce qui précède en début de section.
Cherchons le noyau de φ. Si q ∈ Kerφ, alors pour tout x de E, qx = xq, C étant engendrée par
E et 1, q est dans le centre de C, donc q ∈ R si n est pair et q ∈ R + Re[1,n] si n est impair. Or q
est un produit pair d’éléments de E, donc dans tous les cas, q ∈ R. On a donc Kerφ = {−1,1}.
Il reste à montrer que l’on obtient un revêtement de SOn (R). Soit y0 ∈ SOn (R) et x0 ∈ Spinn
tel que φ(x0 ) = y0 . Spinn étant un groupe topologique métrique compact, il existe un voisinage
V de x0 tel que V ∩ (−V ) = ∅. Soit x ∈ V , φ−1 ({φ(x)}) = {x, − x}. Comme V ∩ (−V ) = ∅, la
restriction de φ à V est injective et réalise donc une bijection continue de V sur φ(V ). De plus
V étant compact et φ|V continue, c’est un homéomorphisme de V sur φ(V ). Il ne reste alors
plus qu’à montrer que φ(V ) est un ouvert de SOn (R), c’est clair vu que son complémentaire est
l’image continue par φ du compact Spinn \ (V ∪ −V ). φ induit donc un homéomorphisme de
V ∪ −V sur φ(V ) × {−1,1} et Spinn est donc un revêtement à deux feuillets de SOn (R).
On peut en conclure que le quotient de Π1 (SOn (R)) par Π1 (Spinn ) est de cardinal 2, donc
que SOn (R) n’est pas simplement connexe.
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