Relativité 1 Relativité restreinte I. Notions de base I.1. Introduction: transformation de coordonnées Un des problèmes les plus fondamentaux de la physique est donné par le fait que des expériences physiques sont exécutées en différents lieux, mais que les résultats devraient être universellement comparables. C'est donc depuis longtemps qu'on a étudié la question comment un changement du référentiel peut influencer sur les résultats d'une mesure. Soit S un référentiel donné, où la physique peut être développée suivant les lois bien connues. On y fait une mesure. Soit S' un autre référentiel où l'on aimerait décrire cette même mesure. Qu'est-ce qui change? Dans le cas le plus simple, S' est simplement déplacé dans l'espace, p.ex. d'un vecteur b. Alors: r' = r - b v' = v a' = a On voit que les vecteurs de position sont mesurés différemment, mais cela n'a aucune influence sur les lois physiques. En effet, on pourra toujours écrire F = m a puisque les accélérations restent les mêmes dans les deux référentiels. Cela reste aussi vrai si S' se déplace par rapport à S à une vitesse constante, u. Les accélérations et donc les forces restent inchangées: r' = r - u t v' = v - u *) a' = a Ce n'est que lorsque S' est accéléré par rapport à S que les lois physiques changent: on y observera de nouvelles forces ("forces d'inertie"). On appelle S' un référentiel "non inertiel". Les transformations marquées de *) entre deux référentiels en mouvement uniforme l'un par rapport à l'autre, sont appelées transformations de Galilée. Elles correspondent à nos expériences concernant l'addition vectorielle des vitesses. Dans le cas où la vitesse u a la direction de l'axe des x, les transformations des composantes s'écrivent plus explicitement: x' = x - u t y' = y transformations de Galilée z' = z t' = t vx' = vx - u I.2. L' expérience de Michelson En 1881, Michelson et Morley commencèrent une série d'expériences censées de démontrer l'addition vectorielle des vitesses pour le cas des vitesses de la lumière et de la Terre. A cette fin, ils utilisaient l'interféromètre qui porte leur nom. C'est un instrument qui sépare un faisceau de lumière en deux rayons qui partent dans deux directions perpendiculaires. Après réflexion dans les deux bras de l'instrument, ces rayons sont de nouveau réunis. Dû aux différences de temps de parcours dans les deux bras, on observe une figure d'interférence produite par les rayons réunis. En orientant l'instrument de telle manière qu'un bras soit aligné selon la direction du mouvement de la Terre, le temps de parcours du rayon correspondant devrait être plus long d'un facteur 2 2 √1 - u /c par rapport au rayon perpendiculaire. Cependant, l'expérience montra clairement que l'interférence reste inchangée, indépendamment de l'orientation de l'instrument par rapport à la direction du mouvement de la terre. Il faut donc conclure que la vitesse de la lumière, c, est la même dans des référentiels en mouvement relatif uniforme. Stefan Stankowski HES Bernoise / TI Relativité 2 I.3 Transformations de Lorentz L'addition des vitesses ordinaire ne peut donc pas être appliquée à la lumière (et à toute autre forme d'onde électromagnétique). Le physicien néerlandais Hendrik Lorentz trouva les formules de transformation appropriées qui s'écrivent, pour le cas d'un déplacement en direction des x avec une vitesse u: x' = (x - u t) γ y' = y z' = z 2 t' = (t - u x / c ) γ 2 2 γ = (1 - u /c ) - 1/2 transformations de Lorentz Pour que la vitesse de la lumière reste la même dans tous les référentiels il faut donc intro-duire des échelles de temps différentes dans les différents repères. Un observateur qui se meut à la poursuite d'un rayon de lumière mesure des distances plus courtes entre les points de passage du rayon, mais sa montre donne aussi des lapses de temps plus courts, de manière que la vitesse calculée se 8 conforme toujours à la valeur standard de 2.99791 10 m/s. La transformation du temps donne lieu à des conséquences importantes: on ne pourra plus parler d'un temps universel et la notion de "simultanéité" devient problématique. A partir des transformations des coordonnées on trouve les transformations des vitesses (en prenant la dérivée par rapport à t dans le système S et par rapport à t' dans S' ): vx - u vx' = ----------------2 1 - u vx / c vy / γ vy' = ----------------2 1 - u vx / c vz / γ vz' = ----------------2 1 - u vx / c Notez que vy' et vz' dévient de vy et vz elles aussi, malgré les égalités y' = y et z' = z . Bien sûr cela se produit à cause des échelles de temps différentes dans les deux repères. De même, on peut calculer les accélérations et on trouve qu'elles sont différentes dans les deux repères, contrairement aux transformations de Galilée ! La signification de ce résultat pour les équations de base de la physique sera discuté plus en bas (chapitre III). I.4. L' interprétation d'Einstein Il est intéressant de constater que les équations de Maxwell, description fondamentale de tout phénomène électromagnétique, ne sont pas invariantes par rapport aux transformations de Galilée, mais par rapport aux transformations de Lorentz (c.-à-d. si on utilise les transformations de Lorentz pour comparer deux référentiels on y trouve les mêmes équations de Maxwell). Il existe donc une e sorte d' harmonie entre la théorie et l'expérience de Michelson. A la fin du 19 siècle, les physiciens pensaient qu'il fallait appliquer deux théories différentes: une, invariante par rapport aux transformations de Galilée, pour décrire la mécanique, et une autre, invariante cette fois par rapport. aux transformations de Lorentz, pour décrire les phénomènes électromagnétiques. Le grand exploit d'Einstein, au début du 20e siècle, fut celui d'énoncer l'hypothèse d'une physique universelle où la mécanique elle aussi se conforma aux transformations de Lorentz. Cette approche, la "théorie de la relativité restreinte", révolutionna d'un seul coup la physique jusque-là familière. Il faut cependant admettre que les conséquences pratiques sont minimes puisque les différences entre les deux transformations ne se font remarquer que pour les vitesses très élevées, telles qu'on ne les connaît pratiquement pas dans la vie de tous les jours. En effet, les équations de Newton restent valables comme une approximation excellente aussi longtemps que les vitesses des corps matériels ne dépassent pas 0.1 c environ. Depuis qu'on est capable d'observer des particules de très haute énergie, la validité de la relativité restreinte s'est pourtant brillamment confirmée. Stefan Stankowski HES Bernoise / TI Relativité 3 II. Conséquences cinématiques (Cinématique = description des objets en mouvement) II.1. Contraction des longueurs Le facteur γ produit des effets bizarres si un observateur au repos considère des objets en mouvement très rapide (vitesses proches de c). Ainsi, les longueurs de l'objet, mesurées dans la direction de vol, apparaissent-elles réduites (contraction des longueurs). Dérivation: L'observateur en mouvement (S' ) voit l'objet au repos et mesure les positions de ses extrémités, x'1 et x'2 . Il donne comme longueur de l'objet L' = x'2 - x'1. L'observateur au repos (S) mesure les points x1 et x2 (les deux au même temps t), de manière que x'1 = (x1 - u t) γ x'2 = (x2 - u t) γ et donc: L' = L γ Puisque γ > 1, on a L' > L . C'est à dire que l'observateur au repos considère une tige en mouvement suivant l'axe des x (et orientée suivant cette direction) plus courte qu'un observateur qui se meut avec la tige (auquel la tige paraît fixe). II.2. Dilatation du temps De la même manière il s'en suit qu'un observateur au repos a l'impression que le temps s'écoule plus lentement dans un référentiel en mouvement (dilatation temporelle). Dérivation: L'observateur en mouvement (S' ) considère deux événements qui sont enregistrés au même endroit x' aux instants t'1 et t'2 . L'observateur au repos (S) mesure: 2 t1 = (t'1 + ux' / c ) γ 2 t2 = (t'2 + ux' / c ) γ et par conséquent: t2 - t1 = (t'2 - t'1) γ L'observateur au repos mesure donc un intervalle de temps plus long que l'observateur en mouvement, pour un événement qui se produit en un endroit fixe de S’. Remarques importantes: • Notez que la contraction des longueurs aussi bien que la dilatation temporelle sont des phénomènes réciproques. Si deux observateurs, voyageant dans des fusées ultrarapides, croisent l'un l'autre, tous les deux ont l'impression de voir les longueurs de l'autre réduites et les temps allongés! Il est en fait arbitraire de choisir l'un des deux comme étant au repos et l'autre en mouvement, ou vice-versa. On ne dira pas que les longueurs sont "réellement" réduites et les temps "réellement" dilatés, mais ce n'est que l'apparence pour l'observateur qui ne voyage pas avec. Le phénomène peut en quelque sorte se comparer avec la réduction due à la perspective: Une personne A s'éloignant d'une autre personne B apparaît à celle-là réduite, de même que B apparaît réduite à la personne A. Aucune des deux n'a "réellement" changée de taille (où le mot "réellement" se réfère à l'observation de quelqu'un accompagnant la personne en question). • Notez que la théorie de la relativité restreinte est limitée à la situation des référentiels en mouvement relatif uniforme (de vitesse constante, u). On n'y dit rien sur les phénomènes apparaissant lors des accélérations. On ne pourra donc pas résoudre le fameux paradoxe des jumeaux dans le cadre de la relativité restreinte. Le paradoxe des jumeaux: l'un des jumeaux reste sur la Terre tandis que l'autre part dans une fusée hyperrapide. Au retour à Terre ce dernier devrait paraître plus jeune à son frère (puisque son temps paraît écouler plus lentement à l'observateur terrestre). Par contre, on peut également considérer que le jumeau dans la fusée se trouve au repos. Dans ce cas la Terre se déplacerait à grande vitesse par rapport à lui, et c'est maintenant le jumeau terrestre qui devrait rester plus jeune. Dans le cadre de la relativité restreinte il faut cependant réaliser que les deux jumeaux ne se retrouveraient jamais. La fusée ne pourra jamais retourner à la Terre puisque un mouvement à vecteur vitesse constant exclut tout changement de direction. Le traitement des mouvements accélérés se fait dans le cadre de la théorie de la relativité générale. Là, on trouve en fait des différences de temps "réelles". Stefan Stankowski HES Bernoise / TI Relativité 4 II.3. Durée de vie des muons Une des premières preuves (et une des plus évidentes) de la dilatation du temps fut donnée par la mesure du nombre de muons dans l'atmosphère et au sol. Les muons sont des particules élémentaires, environ 207 fois plus lourdes que les électrons. Ils sont produits dans l'atmosphère à une altitude d'environ 60 km, par le rayonnement cosmique. Les quantités de mouvement échangées lors des collisions sont très élevées ce qui fait que les muons s'envolent à une vitesse presque égale à celle de la lumière. Ils partent dans toutes les directions, c.-à-d. aussi dans la direction de la surface terrestre. Les muons sont des particules instables. On peut les produire au laboratoire, en utilisant des accélérateurs, et ils se désintègrent alors en formant d'autres particules, avec une demi-vie de 1.5 micro-secondes. (C.-à-d. qu'au bout de 1.5 µs restent moitié du nombre initial de muons, au bout de 3 µs en restent ¼ etc.). Pour la distance de 60 km les muons mettent (avec une vitesse presque égale à celle de la lumière) > -4 133 - 40 2 ⋅10 s . Ce sont 133 demi-vies, on s'attendra donc que < ( ½ ) < 10 du nombre initial arrivent au sol. Expérimentalement, on trouve un nombre fort plus élevé. La relativité restreinte explique ce fait naturellement: Les muons volant à 0.999 c , le facteur 1/γ devient 1 / γ = 0.045. Le temps de vol, t', apparaît réduit de ce facteur dans le repère des muons: t' = 2 ⋅10 -4 s ⋅ 0.045 = 9 µs = 6 demi-vies On s'attend donc que le nombre de muons sera réduit à la surface terrestre d'un facteur 6 1 ( ½ ) = /64 ce qui correspond aux mesures. II.4 Simultanéité La contraction des longueurs et la dilatation du temps impliquent aussi l’impossibilité d’une simultanéité universelle : Si l’observateur au repos considère comme simultanés deux événements (p.ex. l’émission d’impulsions lumineuses) ayant lieu en deux points différents de l’espace, A et B, l’observateur en mouvement (selon l’axe A-B) les considérera comme non simultanés. Considérons p.ex. une fusée de longueur au repos L1 = 200m qui passe à côté d’une plate-forme de longueur au repos L2 = 100m, avec une vitesse v = 0.866 c. On a alors γ = 2. L’observateur sur la plate-forme voit alors une fusée de longueur contractée L1’ = 100 m, donc de la même longueur que sa plate-forme. Il y aura donc un certain instant où les deux extrémités de la fusée se trouvent exactement à côté des deux extrémités de la plate-forme, simultanément. Par contre, l’observateur dans la fusée verra la plate-forme passer à une vitesse v = 0.866 c, γ = 2, donc il verra une plate-forme contractée, L2’ = 50 m, tandis que la longueur de la fusée sera de 200 m. Il sera donc impossible de voir les extrémité de la fusée en coïncidence avec les extrémités de la plate-forme, la pointe de la fusée passera l’une des extrémités de la plate-forme avant que la poupe passera l’autre extrémité. III. Dynamique relativiste Nous avons vu que l'accélération n'est pas invariante par rapport aux transformations de Lorentz. La loi fondamentale de la physique, écrite dans la forme F = m a , ne pourra donc plus être la même dans tous les référentiels en mouvement uniforme. Cependant, il faut rappeler que cette forme de la loi physique n'est toutefois valable que dans le cas particulier des masses constantes. La formulation plus e générale de la loi fondamentale de la physique (2 loi de Newton) s'écrit: F = dp / dt p = m v = quantité du mouvement III.1. Quantité du mouvement relativiste Dans cette dernière forme, on peut arranger les choses de manière que la loi fondamentale soit invariante par rapport aux transformations de Lorentz, malgré la non-invariance de dv/dt: Il faut postuler que la masse m d'une particule dépende de sa vitesse: 2 2 -½ m = m0 (1- v /c ) (m0 = masse au repos) Avec cette règle on obtient en fait que d(m v) / dt = d( m v') / dt' et donc que les forces restent égales dans les référentiels en mouvement uniforme l'un par rapport à l'autre. On constate de même qu’avec cette règle le théorème de la conservation de la quantité de mouvement est valable (c.-à-d. que la quantité de mouvement totale d'un système ne varie pas lorsqu'il n'existe pas de forces extérieures). Stefan Stankowski HES Bernoise / TI Relativité 5 Attention: Dans la formule cfi-dessus, v est la vitesse de la particule dans le repère considéré et non pas la vitesse relative entre deux repères! Pour la simplification de la notation, nous écrirons quand-même dans la suite 2 2 -½ (1- v /c ) =γ Epstein, dans son livre sur la relativité, donne l'explication intuitive suivante: Supposons que deux amis voyagent sur deux trains roulant avec grande vitesse (proche de celle de la lumière) en directions opposées. Lorsque les deux trains se croisent, les deux amis tentent de donner l'un à l'autre un coup de poing amical. Chacun voit le mouvement du poing de l'autre apparemment retardé (dilatation du temps) et s'attend donc à un choc faible. En vérité, le choc est fort. On ne peut expliquer ce fait qu'en supposant que la masse du poing soit augmentée ce qui donne lieu à une grande quantité de mouvement, même à vitesse réduite. L'interprétation de m = m0 γ en tant que "masse relativististe" n'est pas tout à fait sans problèmes; de manière exacte, on ne peut constater que la forme de la quantité du mouvement en TR qui est p = m0 γ v . III.2. Energie relativiste L'énergie cinétique est définie comme travail d'accélération emmagasiné. Lors d'un déplacement dr = v dt, on aura: d Ecin = = d (m0 v γ) ---------------dt F dr = v dt = m0 v d (v γ) 2 c dm (la dernière équation est obtenue en calculant d (v γ) et d m = d (m0 γ) explicitement). L'énergie cinétique d'une particule au repos étant nulle et sa masse au repos étant m0, on obtient, en intégrant (et en utilisant la constante d'intégration appropriée). 2 2 Ecin = m c - m0 c Cette équation indique qu'à toute augmentation d'énergie correspond une augmentation de la masse. Einstein se décida de généraliser en définissant une énergie totale qui inclut l'énergie au repos, c.-à-d. 2 l'énergie de masse m0 c : 2 ( = énergie de masse au repos + énergie cinétique) E=mc Cette relation masse-énergie a vu sa confirmation splendide en physique nucléaire (défaut de masse) et en physique des particules (production de masse à partir d'énergie, disparition de masse avec production d'énergie). 2 Notez que l’expression de l’énergie cinétique tend vers ½ m v pour les vitesses << c. III.3. Relation énergie - quantité du mouvement En transformant les équations données ci-dessus on trouve aisément la relation suivante entre l'énergie et la quantité du mouvement: E 2 2 4 2 2 = m0 c + p c Stefan Stankowski HES Bernoise / TI Relativité 6 IV. Métrique de Minkowski Les transformations de Lorentz sont construites de manière à préserver la valeur de la vitesse de la lumière dans différents référentiels R (on se limite aux référentiels en mouvement relatif uniforme), c.2 2 2 2 2 à-d. que x + y + z = c t ou bien 2 2 2 s = 2 2 2 c t -x -y -z = 0 En examinant les transformations de Lorentz plus à fond, on trouve que l'expression 2 2 2 2 2 2 s = c t - x - y - z est invariante dans tous les référentiels, même si elle n'est pas nulle. La 2 mesure s est donc une invariante des transformations de Lorentz pour tous les objets, non seulement la lumière, ce qui la rend très adaptée aux calculs. On en tire une représentation particulièrement élégante du monde relativiste dans un espace à quatre dimensions, l'espace de Minkowski: L'espace et le temps étant liés, on les combine en un quadri-vecteur (ct, x, y, z) dans un espace à quatre dimensions doté de la "métrique" (mesure) 2 2 2 2 2 2 s = c t -x -y -z analogue à la mesure euclidienne des longueurs, mis à part le signe moins à utiliser pour les composantes spatiales. (Certains auteurs mettent le signe moins avec la première composante et le signe plus avec les composantes spatiales. On peut alors écrire la composante temporelle en forme de nombre imaginaire, jct , et utiliser la mesure euclidienne ordinaire, le signe moins étant alors fourni 2 par j = -1 ). Posons y = z = 0 pour des raisons de simplification. En traçant ct sur l'axe vertical et x sur l'axe horizontal, on trouve 2 o pour s = 0 des droites formant un angle de 45 2 pour s = 0 des hyperboles 2 Ici, s > 0 correspond à un domaine dont les points peuvent être liés par des mouvements physiques (vitesse inférieure à c), domaine "de type temporel". 2 Par contre, s < 0 correspond à un domaine dont les points ne peuvent pas être liés par des signaux physiques (leur vitesse serait supérieure à c). C'est le domaine "de type spatial". Les points y sont parfois dits "simultanés". De même que temps et position, l'énergie et la quantité de mouvement peuvent être combinés en un quadri-vecteur: (E/c, px, py, pz) quadri-vecteur énergie-qu.d.mouvement ayant également une mesure invariante par rapport à la métrique de Minkowski : 2 2 2 2 2 2 E / c - px - py - pz = m0 c 2 Nous avons déjà remarqué que les équations de Maxwell sont invariantes selon Lorentz. On ne s'étonnera donc pas que ces équations s'écrivent de manière particulièrement élégante et simple dans le cadre de la formulation relativiste. Pour cela, on combine les champs électrique et magnétique en un tenseur (une matrice) 4x4 . Stefan Stankowski HES Bernoise / TI Relativité 7 V. Représentation intuitive d'après Epstein Epstein a donné une autre représentation, particulièrement adaptée à la compréhension intuitive des effets relativistes (L. C. Epstein, Relativity visualized, Insight Press, San Francisco 1983). Dans cette représentation, il porte le temps propre d'un objet, multiplié de c, sur l'axe vertical et la position x (mesurée dans un référentiel donné {ct, x} ) sur l'axe horizontal. Tous les événements ayant lieu à l'instant t se trouvent alors sur un cercle de rayon ct autour de l'origine. Cela permet l'interprétation suivante: Tous les objets se meuvent dans l'espace-temps avec une vitesse c, le mouvement pouvant se faire plutôt dans l'espace ou plutôt dans le temps. Les objets fixés en un point x se meuvent dans le temps. Leur temps propre coïncide avec le temps des coordonnées, t, leur "trajectoire" est une droite parallèle à l'axe vertical. La lumière se déplace le long de l'axe horizontal, son temps propre est fixe. Les objets se mouvant à une vitesse < c sont représentés par une droite oblique. Les projections des points de cette droite sur les axes vertical et horizontal donnent les valeurs de position x (mesurées dans le référentiel {ct, x}) et le temps propre (mesuré dans le référentiel en mouvement avec l'objet considéré). On détecte immédiatement la contraction des longueurs et la dilatation temporelle. (Eigenzeit = temps propre Geschwindigkeit im Raum = vitesse dans l'espace Geschwindigkeit in der Zeit = vitesse dans le temps Mischgeschwindigkeit = vitesse mixte Raum = espace) Ce diagramme permet aussi l'interprétation correcte des trajectoires non droites (ce qui dépasse la relativité restreinte puisque les vitesses changent, donc apparaîssent des accélérations). On voit directement que les "excursions dans l'espace" réduisent le temps propre. Stefan Stankowski HES Bernoise / TI Relativité 8 THEORIE DE LA RELATIVITE GENERALE = Formulation des lois physiques en présence de la gravitation (référentiels accélérés) Problème: 2 E = m c : toute énergie crée de la masse, elle doit donc être soumise à la force de pesanteur (y inclus la lumière). Les rayons de lumière courberont donc dans le champ de pesanteur. ne serait-ce pas une contradiction à la constance de la vitessse de la lumière? Idée pour résoudre le problème: Dans le champ de pesanteur, le temps ralentit, le rayon de lumière se propagera moins vite. (Le temps de l’observateur étant également ralenti, ce dernier mesurera toujours c). Principe de solution du problème: -12 Le principe se base sur l’ équivalence de la masse lourde et de la masse inerte (prouvé à 10 expérimentalement); la force de pesanteur peut donc être compensée par une force d’ inertie, p.ex. ascenseur en chute libre, laboratoire dans un satellite. Dans le laboratoire satellite sont valables les équations de la relativité restreinte. En appliquant une transformation à un référentiel accéléré, on trouve les équations en présence de gravitation. Notez: La transformation au référentiel accéléré n’ est possible que localement; cela suffit pour établir les équations physiques (différentielles). Gravitation et géométrie: En transformant vers un système accéléré (ou gravitatif) apparaissent des expressions mathématiques („tenseur métrique“) bien connues des mathématiciens depuis l’analyse des espaces courbés (géométrie de Riemann). Cela mena Einstein à réaliser: l’effet de la gravitation ne se distingue en rien de l’effet d’une courbure de l’espace: on peut imaginer la gravitation comme due à une courbure de l’espace produite par la présence de masses. On trouvera ainsi automatiquement le ralentissement du temps et l’explication des effets relativistes (p.ex. pourquoi les particules lentes sont accélérées dans un champ de pesanteur tandis que la lumière y est retardée). Les équations du champ: Le calcul des forces dans un champ gravitationnel donné et du mouvement résultant des particules se fait relativement directement avec ces assomptions. Une importance particulière trouve la forme des équations pour une distribution sphérique des masses (nommée d’après le physicien russe Schwarzschild; le „rayon de Schwarzschild“ indique la distance en dehors d’une telle distribution de masse pour laquelle aucun objet ne pourra s’enfuir de l’influence gravitative – voir discussion des « trous noirs »). Cependant, il est très difficile d’établir les équations définissant l’interaction entre les masses et la courbure de l’espace résultante (les „équations du champ“, par analogie aux équations de Maxwell qui déterminent l’interaction des charges avec les champs électromagnétiques). Cette difficulté est due au fait que les masses provoquant la courbure de l’espace interagissent elles-mêmes avec cette courbure. La forme la plus simple de ces équations du champ prédit un univers en expansion. Au temps où Einstein découvrit ces équations, c’était „impensable“ et Einstein choisit une correction (la „constante cosmique L“) pour compenser cet effet. Vous apprendrez plsu sur cette constante dans le chapitre sur la cosmologie. Les équations du champ prévoient aussi l’existence d’ondes gravitationnelles (analogues aux ondes électromagnétiques). Stefan Stankowski HES Bernoise / TI Relativité 9 Preuves de la TRG 1. Redshift de gravitation source au repos dans un potentiel de gravitation statique: pas d’ effet Doppler! photon allant de A vers B (vers le haut dans le champs de pesanteur): 2 (fA - fB) / fA =- g h / c lumière du soleil: ∆f (exper.) / ∆f (theor) = 1.01 + 0.06 problèmes: 57 vitesse relative terre - soleil mouvement thermique des atomes émetteurs convection des gaz solaires effet Mössbauer ( Fe), hauteur 22.6 m ∆f (exper.) / ∆f (theor) =1.00 + 0.01 2. horloge dans un satellite avance, parce que la pesanteur est réduite retarde à cause du mouvement le premier de ces effets domine pour les satellites distants, le deuxième domine pour les satellites plus proches de la terre. Test dans une fusée montante avec maser à l’ hydrogène vérifie la théorie avec une précision de 7⋅ 10 5 ! 3. effet Nordtvedt Si les masses lourde et inerte n’étaient pas égales, la terre et la lune se mouvraient un peu différemment dans le champs de pesanteur du soleil. Le décalage serait de l’ ordre de mètres. L’orbite de lune peut être déterminé à 10 cm près par intermédiaire du système Lunar Laser Ranging. La -4 théorie est vérifiée avec une précision de 10 . 4. courbures des rayons de lumière dans le champ de gravitation soleil: vérification TRG , précision de 0.9 + 0.2 Quasares: 1.008 + 0.005 ‘lentilles de gravitation’ 5. rotation périhélique de Mercure elle vaut 43’’ en 100 ans. Vérification TRG à 0.99 + 0.02 près. 6. précession de gyroscopes système terre-lune dans le champ de pesanteur du soleil: vérification à 1% près gyroscope de précision sur orbite terrestre : en cours de préparation. 7. retardement des échos radar de Vénus on compare un signal radar vers Vénus passant loin du soleil avec un autre qui effleure le soleil. Cela teste le paramètre cosmologique γ (d'après les équations d' Einstein γ = 1): résultat: γ = 1.000 + 0.001 8. ondes gravitationnelles Retard graduel du système de deux étoiles PSR 1913+16 Stefan Stankowski HES Bernoise / TI