seule avait un design permettant d’analyser réellement l’impact d’une introduction
précoce et intraveineuse des bétabloquants. En effet, toutes les autres études ont
randomisé les patients en un groupe bétabloquant (incluant une introduction précoce
du traitement) et un groupe placebo pour une durée allant de 7 jours à 3 mois. Les
patients inclus dans le groupe placebo ne recevaient aucun bétabloquant pendant
toute la période de suivi. Ces études ne permettaient donc pas d’analyser avec
précision l’introduction des bétabloquants sur les 24 premières heures.
Pour résumé, les données sont contradictoires mais ces études n’ont clairement pas
retrouvé de bénéfice sur la mortalité à une introduction très précoce des
bétabloquants. L’efficacité du traitement était principalement lié à la réduction des
évènements rythmiques mais au prix d’un sur-risque de choc cardiogénique contre
carrant complètement le bénéfice. Cet élément est d’ailleurs parfaitement retrouvé
dans le plus grand essai randomisé réalisé sur le sujet : l’étude COMMIT.6 Au total,
45852 patients présentant un IDM ont été inclus : 22 923 patients dans le groupe
placebo, 22929 patients dans le groupe métoprolol 15mg IV puis 200mg/j pendant 15
jours. On observait une réduction de 15 à 20% du risque de récidive d’IDM et de
fibrillation ventriculaire dans le groupe traité par métoprolol au cours du suivi.
Cependant, ce bénéfice du traitement bétabloquant était complètement atténué par
un nombre significativement plus élevé de patients développant un état de choc
cardiogénique secondaire à l’administration de métoprolol rendant l’effet sur la
mortalité toute cause complètement nul (Figure 1).
Aucune étude de grande envergure n’a été réalisée depuis COMMIT, notamment
depuis l’avènement de l’angioplastie primaire et des nouvelles thérapies
antiagrégantes et anticoagulantes.
En conclusion, si le bénéfice du traitement bétabloquant est très clair à moyen et
long terme en post IDM, son emploi en phase aigue (pré-hospitalier et 2 premières
heures) n’est pas dénué de risque, notamment chez des patients potentiellement
graves. Les bétabloquants peuvent bien sur être introduit très précocement chez les
patients parfaitement stables et ne présentant aucun signe clinique d’hypotension ou
d’insuffisance cardiaque mais doivent, dans la grande majorité des cas, être différés
afin de permettre une évaluation précise de l’état hémodynamique. Leur place en
pré-hospitalier est ainsi quasi inexistante au regard du rapport bénéfice/risque. La
voie intraveineuse doit par ailleurs rester exceptionnelle et être réservée à quelques
situations bien particulières. Les recommandations européennes suggèrent qu’il est
plus sage d’envisager leur introduction dans les 12 à 24 premières heures mais
après revascularisation coronaire, évaluation clinique et échocardiographique
rigoureuse afin d’initier le traitement en toute sécurité et pouvoir adapter la posologie
de départ à chaque patient.