Rétrécissement Aortique

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4e année médecine – Rotation 3 – 2015/2016
Module de Cardiologie
ISM Copy
Rétrécissement Aortique
Définition
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Rétrécissement Aortique (RA) : obstacle à l'éjection sanguine lié à une rigidité, une fusion
commissurale et/ou une calcification des feuillets valvulaires (sigmoïdes).
Cet obstacle induit un retentissement d'amont dans : les cavités gauches, la circulation pulmonaire,
plus rarement les cavités droites
Physiopathologie
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Dans le Ventricule Gauche :
 Au début : le RA induit :
 une élévation de la post-charge
 une hypertrophie concentrique du Ventricule Gauche
 fonction systolique conservée (contraction normale)
 fonction diastolique précocement altérée (trouble du remplissage)
 À terme :
 équilibre rompu
 patients symptomatiques
 Au stade avancé :
 Dilatation du Ventricule Gauche
 Altération de la fonction contractile du myocarde
Etiologies
Trois principales étiologies du RA :
 RA dégénératif (maladie de Monckeberg) :
 Cause la plus fréquente
 Maladie du sujet âgé
 Dépôts de calcium (hydroxyapatite)
 Physiopathologie mal connue
 Similitudes avec l'athérosclérose (facteurs de risque)
 RA sur bicuspidie calcifiée :
 1ère étiologie si âge est inférieur à 70 ans
 2 sigmoïdes valvulaires au lieu de 3
 Malformation congénitale la plus fréquente
 Association fréquente à une dilatation de l'aorte ascendante
 Physiopathologie associe :
 des contraintes hémodynamiques liées à l'existence de deux feuillets
 des processus proches de ceux rencontrés dans le RA dégénératif (dépôts calcaires)
 RA rhumatismal :
 Prévalence : RA Rhumatismal = Rhumatisme Articulaire Aigu.
 Sujet jeune ou d'âge moyen.
 Feuillets épaissis, rigides, rétractés, parfois calcifiés.
 lésion caractéristique : fusion commissurale.
 Autres : RA valvulaire congénital
Examen clinique
Signes fonctionnels :
 RA minime ou modéré :
 Asymptomatique +++
 Existence de symptômes :
 Sous-estimation de la sévérité du RA
 Autre cause
 RA serré :
 Phase de latence plus ou moins longue
 Symptômes à l'effort, puis au repos
 Dyspnée effort :
 Symptôme le plus fréquent
 Parfois révélateur du RA
 Origine : dysfonction diastolique (augmentation de la pression capillaire pulmonaire)
 Angor d'effort :
 Deuxième symptôme (fréquent)
 Origine multifactorielle :
 Augmentation de la consommation myocardique en oxygène (Hypertrophie Ventriculaire
Gauche)
 Ecrasement des vaisseaux (Hypertrophie Ventriculaire Gauche)
 Diminution de la réserve coronaire (bas débit)
 Lésions coronaires athéromateuses associées
 Syncope (ou lipothymie) d'effort :
 Hypoperfusion cérébrale à l'effort (bas débit)
 Trouble du rythme (Hypertrophie Ventriculaire Gauche)
 Trouble de la conduction
 Utilisation des vasodilatateurs (Dérivés Nitrés)
Signes cliniques :
 Auscultation : temps essentiel :
 Souffle systolique :
 Méso-systolique : débute après B1 et se
termine avant B2
 Timbre dur et râpeux
 Maximal au foyer aortique
 Irradiation vers les carotides
 Diminution ou abolition de B2 :
 RA serré : B2 aboli
 RA rhumatismal : B2 normal
 Dédoublement de B2 :
 RA serré (tempe d’éjection allongé)
 Présence d’un B4 (Ventricule Gauche peu compliant lors de la systole auriculaire)
Le reste de l’examen :
 Signes d‘Insuffisance Cardiaque gauche :
 Œdème Aigu du Poumon
 Tachycardie
 Bruit de galop
 Insuffisance Mitrale fonctionnelle
 Signes d’Insuffisance Cardiaque globale : en cas de forme évoluée
 Atteinte vasculaire périphérique
Examens complémentaires
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Électrocardiogramme :
 Hypertrophie Ventriculaire Gauche de type systolique :
 Rotation axiale gauche
 Augmentation des indices de Lewis et de Sokolow
 Négativation des ondes T dans les dérivations précordiales gauches)
 Troubles du rythme ou de conduction associés
Radiographie pulmonaire :
 Index Cardio-Thoracique le plus souvent normal (Hypertrophie Ventriculaire Gauche
concentrique)
 Calcifications valvulaires
 Dilatation aortique associée
 Calcifications pariétales dans l'aorte ascendante (aorte porcelaine)
 Signes d‘Insuffisance Cardiaque (syndrome interstitiel, Embolie Pulmonaire)
Échocardiographie trans-thoracique :
 Examen-clé qui permet de :
 Confirmer le diagnostic du RA.
 Evaluer la sévérité.
 Déterminer l’étiologie.
 Rechercher des anomalies associées.
 Préciser le retentissement.
 Éliminer une autre étiologie (Cardiomyopathie Obstructive, Insuffisance Mitrale,
Rétrécissement Pulmonaire…)
 Diagnostic positif :
 Remaniements / calcifications des sigmoïdes aortiques.
 Limitation de leur ouverture.
 Existence d'une accélération du flux traversant l'orifice aortique (élévation de la
vitesse maximale et du gradient moyen +++)
 Diminution de la surface valvulaire aortique +++ (Normale = 2,6- 3,5 cm2)
 Sévérité du RA :
 RA sévère (ou serré) :
 Vmax > 4m/s (normale = 1-1,7 m/s).
 Gradient moyen > 40 mmHg (États-Unis) / >50 mmHg (Européens)
 Surface valvulaire < 1 cm2 (< 0,6 cm2/m2 de surface corporelle)
 Diagnostic étiologique échographique :
 Appréciation du nombre de sigmoïdes
 Existence d'un raphé
 Caractère fusionné (RA rhumatismal)
 Présence de calcification
 Anomalies associées :
 Autre valvulopathie associée : une atteinte mitrale associée oriente vers une étiologie
rhumatismale
 Dilatation de l’aorte initiale : rechercher une bicuspidie.
 Retentissement :
 Fonction systolique et diastolique du Ventricule Gauche.
 Masse ventriculaire gauche (Hypertrophie Ventriculaire Gauche).
 Pression artérielle pulmonaire systolique
 Taille de l’Oreillette Gauche
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Échocardiographie trans-œsophagienne : intérêt limité dans le RA :
 Etiologie du RA.
 Caractère bi- ou tricuspide de la valve aortique
 Planimétrie de l'orifice aortique.
 Dimensions de l'aorte ascendante.
 Mécanisme et sévérité d'une valvulopathie mitrale associée.
Test d'effort :
 Formellement contre-indiqué en cas de RA symptomatique +++
 En cas de RA asymptomatique : démasquer des patients faussement asymptomatiques
 Mauvaise tolérance à l'effort (principalement absence d'élévation ou chute de la PA).
Échographie dobutamine :
 Indication : RA avec altération de la fonction systolique
 Surface peut être inférieure à 1 cm2
 Gradient trans-aortique < 40 mmHg.
 Intérêt : permet de distinguer :
 RA serré avec dysfonction Ventricule Gauche secondaire liée au RA.
 RA pseudo-sévère ou modérées avec dysfonction VG liée à une Cardiomyopathie
ischémique ou dilatée autonome associée
 Résultats : Absence de réserve myocardique =
Risque chirurgical majeur +++
 RA serré :
 Gradient augmente
 Surface < 1 cm2

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RA pseudo-sévère :
 Ouverture de la valve
 Surface > 1 cm2
 Gradient reste stable
Scanner cardiaque :
 Parfois utilisé pour effectuer :
 une planimétrie de l'orifice aortique (cas difficile).
 une évaluation de l'anatomie coronaire et de la fonction systolique du Ventricule
Gauche.
 Mais, interprétation difficile en cas de calcifications coronaires associées
 Quantifier objectivement le degré de calcification valvulaire aortique : mesure du score
calcique
Facteur natriurétique de type B :
 Le taux plasmatique de BNP (Brain Natriuretic Peptide) est corrélé à la sévérité
hémodynamique du RA.
 L’intérêt du BNP dans la prise en charge des patients présentant un RA serré asymptomatique
reste discuté
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Coronarographie :
 La coronarographie n'a de place qu'en préopératoire.
 Indications :
 Recherche de lésions coronaires associées (pontage associé).
 Homme de plus de 40 ans.
 Femme de plus de 50 ans.
 Présence de facteurs de risque cardiovasculaires
 Degré de calcification valvulaire aortique.
 Existence de calcification pariétale de l'aorte ascendante (aorte porcelaine).
Cathétérisme cardiaque :
 Il n'a d'intérêt que dans les rares cas où il existe une discordance entre la sévérité
échographique et les symptômes
 Le franchissement du RA n'est pas anodin et est associé à un risque potentiel de complication
embolique
Autres examens préopératoires :
 Recherche de foyer infectieux ORL ou stomatologique.
 Doppler des troncs supra-aortiques.
 Explorations fonctionnelles respiratoires.
Histoire naturelle et pronostic
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La progression annuelle du RA est en moyenne de :
 + 7 mmHg
 - 0,1 cm2
 + 0,3 m/s
 Progression extrêmement variable d'un individu à l'autre
Aucun traitement médical permettant de ralentir ou de stopper la progression du RA
Lorsque le RA est serré, les symptômes apparaissent après une phase de latence plus ou moins longue
La sévérité hémodynamique du RA est un élément pronostique majeur : pic de plus de 5 m/s (RA
hyper-sévère) = pronostic péjoratif à court terme.
Autres facteurs pronostics :
 Degré de calcification.
 Progression hémodynamique rapide.
 La place du BNP reste incertaine.
Traitement
Traitement médical : Il est limité :
 Tonicardiaques (digitaliques, dobutamine...) : sont classiquement contre-indiqués.
 Vasodilatateurs : doivent être utilisés à petites doses sous peine d'une trop forte diminution du
remplissage des ventricules avec risque de chute de la PA.
 Diurétiques : peuvent être utiles en cas d‘Insuffisance Cardiaque pour améliorer l'essoufflement
 Un traitement préventif de l’endocardite oslérienne est nécessaire.
 Statines : ont été proposées pour tenter de limiter la progression de la maladie. Les résultats sont,
pour l'instant, mitigés
Traitement chirurgical :
 Indications chirurgicales formelles :
 RA serré.
 Présence de symptômes.
 Dysfonction ventriculaire gauche systolique.
 Test d'effort pathologique
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Type de substitut :
 Prothèse biologique : bio-prothèse :
 Avantage : Absence de nécessité d'un traitement anticoagulant.
 Inconvénient : Nécessité d’un nouveau remplacement valvulaire (5 à 10 ans)
 Prothèse mécanique : métal ou matériaux synthétiques :
 Avantage : Solidité
 Inconvénient : Nécessité d’un traitement anticoagulant à vie avec ses
contraintes et ses risques
 En fonction de : l’âge du patient, ses comorbidités, ses souhaits.
 Choix du type de prothèse :
 Prothèse biologique : âge avancé et/ou contre-indication au traitement anticoagulant.
 Prothèse mécanique : patient plus jeune.
 Cas particulier :
 Certains patients jeunes, pratiquant une activité sportive à risque traumatique ne
souhaitant pas suivre de traitement anticoagulant au long cours, il est possible de
proposer la mise en place d'une bio-prothèse. Elle dispense du traitement
anticoagulant, mais les patients peuvent être clairement informés de la forte
probabilité d'avoir à recourir à un nouveau remplacement valvulaire dans les 10 ans.
 Femme jeune, susceptible d'être enceinte (une grossesse sous anticoagulant
comporte des risques importants)
 Résultats :
 La mortalité opératoire d'un RA isolé chez un patient sans comorbidités est de 2 à 3 %.
 Le risque opératoire double en cas de :
 Chirurgie de pontage associée.
 âge élevé.
 fonction ventriculaire gauche altérée.
 présence de comorbidités
 Contre-indication :
 Terrain (âge et comorbidités).
 Techniques :
 Antécédent de radiothérapie.
 Aorte porcelaine.
 Remplacement valvulaire par cathétérisme (TAVI : Transcatheter Aortic Valve Implantation)
 Le pronostic à court ou moyen terme est sombre (2 à 5 ans) en l'absence de correction chirurgicale
ou par TAVI
 Autres complications :
 Troubles du rythme et de conduction.
 Insuffisance cardiaque.
 Dysfonction systolique du VG
 Greffe oslérienne (rare)
Prise en charge du RA asymptomatique : plus discutée, fonction de l’âge du patient, sa profession, son
activité physique, la sévérité hémodynamique du RA (RA hyper-serré ou progressant rapidement) et les
souhaits du patient.
Conclusion
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L’apparition des symptômes marque un premier tournant évolutif
L’apparition d’une dysfonction systolique du Ventricule Gauche indique un second tournant évolutif
qui aggrave la mortalité chirurgicale
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